Vous connaissez la recette du gloubi-boulga ? Prenez tous vos ingrédients préférés, mélangez-les dans un grand saladier et vous obtenez forcément un plat extraordinaire. Trinity Universe est l'application de cette idée formidable à l'univers des jeux de rôle japonais. En effet, l'affiche a de quoi laisser rêveur puisque ce titre a été développé conjointement par Nippon Ichi Software, Gust et Idea Factory. Reste à savoir si cette rencontre a donné lieu à une délicieuse alchimie ou si elle a accouché d'une bouillie infâme.
Qui a dit que l'industrie des jeux de rôle japonais a tendance à tourner en rond ? En effet, si l'on a aussi vu débarquer quelques nouvelles licences intéressantes telles que Resonance of Fate ou Lost Odyssey, la plupart des jeux de ces dernières années sont tout simplement des suites de séries déjà installées. Histoire de donner un nouveau souffle à leurs productions sans pour autant déstabiliser leurs fans, les développeurs se tournent de plus en plus vers une recette miracle : le cross-over. Ils peuvent ainsi nous proposer de nouvelles aventures qui mettent en scène des personnages issus de leurs plus célèbres franchises. Nippon Ichi Software s'était déjà essayé à l'exercice l'année dernière en éditant Cross Edge, un RPG qui mélangeait pêle-mêle les univers issus de leurs propres productions, mais aussi de celles de Capcom, de Gust et d'Idea Factory. On retrouve pratiquement les mêmes protagonistes autour de Trinity Universe puisque le titre est développé conjointement par Nippon Ichi, Gust et Idea Factory.
L'un des grands intérêts de développer de tels cross-over tient à la possibilité de mettre le scénario à proprement parler de côté pour se concentrer quasiment uniquement sur les relations entre les personnages. Concrètement Trinity Universe vous permettra de découvrir le Netheruniverse, un lieu situé aux confins de l'espace qui récolte des tas d'objets hétéroclites, voire même des bâtiments ou des morceaux de ville issus d'univers alternatifs. Un "Demon God King" transformé en gemme est censé veiller au grain pour éviter que tous ces débris ne finissent sur la figure des habitants du coin. Mais le prochain monarque, Kanata, refuse d'être transformé en simple pierre magique, il est même changé en "Demon Dog King" à la suite d'un rituel raté. C'est donc affublé de deux grandes oreilles et d'une queue poilue que celui-ci décide de partir à l'aventure pour trouver un autre moyen de sauver ses concitoyens des débris spatiaux. De son côté une Valkyrie du nom de Rizelea est bien décidée à remettre la situation dans l'ordre en capturant le fuyard et en l'incitant à se transformer en gemme. Au début de votre partie vous serez amené à choisir de suivre l'une ou l'autre de ces deux destinées.
C'est en effet l'une des particularités de Trinity Universe : le jeu propose justement deux scénarios distincts qui se croisent et qui vous permettent notamment de rencontrer les personnages à des moments différents de l'aventure et de ne pas avoir accès aux mêmes fonctionnalités avec le même timing. Parler de scénarios tient cependant peut-être de l'abus de langage tant ceux-ci se limitent à d'interminables discussions entre les différents protagonistes. N'espérerez pas vous balader librement dans le Netheruniverse, vous enchaînez tout simplement ces séquences bavardes ou vos séances de shopping en passant par le menu. Il faut tout de même reconnaître que si ces dialogues traînent souvent en longueur, ils contiennent surtout une bonne dose d'humour et d'autodérision. Attention, il vous faudra un bon niveau d'anglais pour profiter de ces blagues car seul le manuel est traduit en français, et accessoirement une bonne connaissance des jeux de rôle japonais pour comprendre les allusions aux autres séries ou les remarques concernant les personnages de Disgaea et ceux d'Atelier Viorate. On remarque au passage que ces scènes bavardes proposent un joli rendu en 2D. Cette qualité saute vraiment aux yeux lorsque l'on fait la comparaison avec la modélisation des mêmes personnages quand ils se lancent dans la découverte de donjons en 3D.
Pas la peine de prendre des pincettes, l'exploration des donjons de Trinity Universe ne risque pas de vous flatter la rétine. Bienvenue dans le règne des couloirs ternes, perpendiculaires les uns aux autres, aux textures approximatives et aux distances d'affichage ridiculement courtes. Si ce level design peu engageant ne vous a pas encore démotivé, l'animation rigide à souhait de votre héros vous achèvera certainement. Bref, même s'il est encore possible de faire apparaître des trésors cachés grâce à un sortilège coloré, on a vraiment hâte de se retrouver en plein combat pour briser cette monotonie. Les rencontres sont aléatoires mais elles s'avèrent elles aussi souvent décevantes : on retombe inlassablement sur les mêmes types d'ennemis... Une fois dans le feu de l'action, on retrouve un système de combat au tour par tour assez traditionnel qui est toutefois agrémenté d'un grand nombre de fonctionnalités annexes. A chaque touche correspond une attaque différente : le Triangle est dédié à la magie, le Carré aux attaques rapides et la Croix aux coups puissants. En fonction de votre arme, vous aurez accès à différents combos en utilisant ces touches dans des ordres précis. Il vous faut aussi surveiller votre jauge de Points d'Action située en bas à droite de l'écran : le total de ces derniers diminue quand vous effectuez une attaque mais aussi lorsque vous laissez filer le chronomètre. Il faut donc enchaîner les coups rapidement pour espérer en placer le plus possible lors d'un assaut.
Vous pouvez vous compliquer un peu la tâche en utilisant lors des combats une foule d'options disponibles mais pas toujours très utiles. Il est ainsi possible d'enchaîner les assauts des différents protagonistes pour maximiser les dégâts. Sous certaines conditions vous pourrez même déclencher des attaques combinées tout simplement dévastatrices. La touche Rond vous permet aussi d'utiliser les compétences que vous leur avez assignées. Il s'agit généralement de sorts de soin ou de soutien. Ces compétences sont plus ou moins accessibles : appuyer brièvement sur la touche vous permettra d'enclencher la première d'entre elles tandis qu'il faudra laisser la touche enfoncée et remplir entièrement une jauge pour accéder à la seconde. A force de cogner sur la tête des méchants monstres qui vous font face, vous finirez aussi par remplir les orbes situées autour de votre jauge de PA. Ces fameuses jauges peuvent être utilisées pour générer un bouclier magique, pour se soigner ou pour utiliser des capacités EX assez dévastatrices. Si tout cela ne vous suffit pas, vous avez encore la possibilité de libérer la puissance de vos armes, ou plus précisément la puissance des dessins qui viennent orner vos armes. Ces Managraphics sont capables par exemple de soigner toute votre troupe ou d'infliger des dégâts à tous vos ennemis. Vu la profusion de fonctionnalités, on pourrait croire que le système de combat de Trinity Universe est particulièrement complexe et stratégique mais au final ce n'est malheureusement pas le cas. Il suffit en effet de leveller bêtement et d'appliquer plus ou moins les mêmes recettes pour se sortir sans problème des différents affrontements.
De la même manière, il ne faut pas s'attendre à une richesse incroyable dans le cadre de la fiche de personnage. Les upgrades se font automatiquement lors des changements de niveaux mais Violet, en tant que bonne alchimiste, vous concoctera une bague planétaire sur laquelle vous pourrez fixer des météorites correspondant à des bonus différents. Cette fonctionnalité arrive plus tôt dans le scénario de Rizelea que dans celui de Kanata, mais ce dernier n'est pas en reste puisqu'il aura la possibilité de synthétiser des monstres afin de les combattre dans une arène et de remporter un beau pactole constitué de points d'expérience et d'objets rares. Notez enfin que la synthèse d'objets répond elle aussi présent au rendez-vous, on n'en attendait pas moins d'un titre qui emprunte quelques personnages à l'univers des Atelier. Finalement on se retrouve donc avec un jeu qui ne manque pas de fonctionnalités en tous genres mais qui ressemble vaguement à un patchwork mal agencé reprenant des éléments que l'on a déjà vus ici ou là. Si l'humour omniprésent vous procurera certainement quelques fous rires, on aurait aimé qu'il nous soit servi avec un gameplay plus original et une trame un peu plus passionnante.
- Graphismes10/20
Les scènes de dialogues en 2D sont plutôt agréables à l'œil mais on déchante rapidement lorsque l'on part à l'aventure dans les donjons en 3D : les décors sont alors simplement hideux et la modélisation des personnages est tout juste digne d'un jeu PS2.
- Jouabilité13/20
Le gameplay de Trinity Universe paraît relativement riche sur le papier mais malheureusement le soufflet dégonfle progressivement lorsque l'on avance dans le jeu. Les nombreuses fonctionnalités font finalement figure de gadgets et on se retrouve avec un système assez peu original qui tranche par exemple radicalement avec la richesse des combats tactiques d'un Disgaea.
- Durée de vie13/20
On a droit à deux histoires parallèles pour le prix d'une, chacune d'entre elles vous tiendra occupé au moins une petite vingtaine d'heures de jeu. Malheureusement la progression devient vite lassante tant les combats sont répétitifs.
- Bande son11/20
Pour apprécier la musique de Trinity Universe, il faut non seulement aimer la pop japonaise, mais aussi prévoir un bon stock de calmants. En effet, à long terme, ces airs survoltés risquent de faire dérailler votre tension nerveuse... Notez que les doublages anglais font parfois défaut mais que les voix japonaises sont plutôt soignées et répondent à tous les stéréotypes du genre.
- Scénario12/20
Le Netheruniverse est un monde perdu au fin fond de l'espace qui récolte régulièrement des morceaux d'autres univers... Pour être franc, la trame scénaristique est loin d'être extraordinaire mais finalement les développeurs de Trinity Universe se sont plus ou moins rattrapés en proposant des dialogues drôles et décalés.
Trinity Universe est clairement un jeu destiné aux fans du genre qui apprécieront certainement les nombreuses références humoristiques. Malheureusement l'intérêt du jeu se limite à cet aspect, le titre dans son ensemble donne finalement l'impression d'un grand patchwork mal agencé et sans grande originalité.