Quand Ubisoft veut sortir son jeu de foot à l’occasion de la Coupe du Monde, ça donne Pure Football sur PS3 et Xbox 360, « la référence du football à 5 contre 5 ». Enfin, c’est du moins ce qui est écrit sur la jaquette. Parce qu’en réalité, cet Academy of Champions retouché pour coller au public des consoles HD est surtout la référence du foot-age de gueule.
La séquence d'introduction de Pure Football, qui avait été diffusée lors de l'annonce du jeu, met en scène une équipe abattue par la défaite, en train de rager dans les vestiaires. L'arbitre a été mauvais, nous dit-on. Qu'à cela ne tienne, un simple texto et voilà un défi envoyé à l'équipe adverse : on va régler ça par d'autres moyens, on vous attend sur un terrain pas loin d'ici - sans public et sans arbitre – où tous les coups sont permis. Ne lésinez pas sur les tacles assassins et les coups d'épaule, et asseyez-vous sur toute notion de fair-play. Parce que Pure Football, c'est pas fait pour les lavettes ; y'a de la sueur, du sang et des mecs bien burnés. Voilà une belle promesse qui ne survivra pas bien longtemps vu que le jeu n'est somme toute qu'une resucée d'Academy of Champions, sorti fin 2009 sur Wii et sans doute développé par la même équipe d'Ubisoft. Bien que sponsorisé par la Fédération Internationale de Street Football, ce titre n'a pas grand-chose à voir avec du football de rue. On a plutôt affaire à une sorte de Mario Strikers Charged Football dopé à la testostérone. Et bien entendu, c'est beaucoup moins bien.
Pure Football propose plusieurs modes de jeu relativement classiques : Campagne, Partie Rapide et Multijoueur. Le premier vous permet de créer votre joueur, de former votre équipe de 5 et de partir à la conquête de l'Europe. Les deux autres sont l'occasion de profiter du jeu en multi, à 4 en local ou à 2 en ligne. Le titre ne brille pas particulièrement par son contenu, car il n'intègre que 17 équipes et 8 stades différents. Mais sur ce point, reconnaissons que FIFA Street 3 ne proposait pas vraiment mieux. Intéressons-nous de plus près au mode Campagne, qui est le centre du jeu, ne serait-ce que parce qu'il permet de débloquer la totalité du contenu (joueurs, maillots, stades...). Il débute par la création de votre joueur : choix assez sommaire d'options physiques et sélection de son poste (défenseur, milieu, attaquant). Tout au long de la campagne, vous aurez la possibilité d'améliorer ses attributs (passe, finition, puissance...) grâce aux points Pure gagnés lors des matchs.
Avant de commencer, vous devez aussi créer votre équipe (nom, emblème, couleur des maillots) et sélectionner votre effectif de départ parmi l'ensemble des recrues disponibles pour votre club. Au début, ce sont essentiellement de joueurs de seconde zone (enfin, n'exagérons rien, il s'agit tout de même d'internationaux !). Mais vous déverouillerez au fur et à mesure des stars de premier rang (Lionel Messi, Fernando Torres, Franck Ribery, ou encore Steven Gerrard et Lukas Podolski, qui prêtent leur image au jeu), toutes fidèlement modélisées, que vous pourrez alors intégrer à votre équipe. La façon de les débloquer est d'ailleurs assez originale : à chaque fois que vous rencontrez une équipe, vous avez l'occasion de « recruter » les joueurs qui la composent. Chacun d'eux vous impose une condition différente, indépendamment du score final du match, qui correspond en principe à son poste : marquer un but sur centre, réussir un nombre de tacles donné, etc.
L'objectif du mode campagne est de se hisser au sommet du classement des 18 meilleures équipes mondiales afin de participer à un tournoi final qui déterminera le grand vainqueur. On vous accorde 28 jours pour grimper suffisamment dans la hiérarchie. Vous pouvez prendre part à un défi par jour et vous gagnez une place en le remportant. Les défis sont accessibles en navigant de stade en stade sur une carte d'ensemble, sachant qu'au fil de vos succès, vous débloquez d'autres stades et donc d'autres défis (face à des équipes de plus en plus fortes), qui ont hélas tendance à se répéter (match minuté, but en or, mini-tournoi...). Il faut reconnaître que l'ensemble est assez bien fichu. Un regret tout de même : une campagne se boucle bien trop vite, même s'il vous en faudra sans doute plus d'une pour tout débloquer. Jusque-là, tout ne va pas trop mal. Le problème, c'est sur le terrain. Là, on se rend compte que le jeu n'est qu'une version remaniée de Academy of Champions sur Wii.
Comme vous pouvez le constater sur les captures, la caméra est située dans le dos de votre équipe et suit le joueur que vous contrôlez, ce qui vous contraint à de fréquentes passes à l'aveugle. Afin de délivrer une dose de fun immédiat, le gameplay est basé sur des actions simples (passe, tacle, tir, course...). Un système de jauge avec curseur, qui se manifeste lors de chaque tir, centre ou geste de défense désespéré, permet de réaliser des super-coups spectaculaires et presque imparables : ce sont les actions « Pure ». A chaque fois que vous cadrez une frappe, vous remplissez progressivement votre barre de tir Pure : une fois pleine, elle vous permet d'effectuer automatiquement, sans vous soucier du curseur, une frappe Pure qui donne lieu à un sympathique effet de mise en scène. Cette volonté de spectaculaire se retrouve dans les bruitages ridiculement exagérés qui renforcent l'impact de chaque frappe, de chaque choc et du moindre coup de crampon dans la pelouse.
A côté de ça, Pure Football introduit quelques idées de gameplay profondément maladroites. Les actions d'accélération, qui profitent d'un effet de flou bien fichu, vous empêchent de dribbler, de changer de direction et même de vous arrêter ! Vous devez aussi composer avec un geste défensif, le mouvement de pas chassé (sic), aussi absurde qu'inefficace ; il faut alors se replier sur le tacle glissé. Le problème, c'est que ce dernier est systématiquement assassin (impossible de tacler proprement) et a pour effet de remplir une jaune de faute qui, une fois pleine, vous sanctionne d'un pénalty. On aboutit alors à des situations improbables, où vous massacrez en toute impunité et à plusieurs reprises un attaquant lancé vers votre but, pour déclencher un peu plus tard un pénalty en réalisant un petit tacle offensif dans la surface de réparation adverse. Un paradoxe total pour un jeu qui prétendait jouer les gros durs et s'affranchir des règles les plus « contraignantes » du football.
De la même manière, on est surpris de retrouver des touches, des sorties de buts et des corners qui éloignent encore un peu plus Pure Football de FIFA Street. On vous permet bien de sortir quelques gestes techniques en agitant le stick droit dans un sens ou dans l'autre, mais ils ne sont vraiment pas au centre du jeu. Bref, si ce titre se laisse pratiquer le temps d'une campagne ou d'une session entre amis, il vous laisse la désagréable impression de ne pas trop savoir à quoi vous jouez exactement. Il oscille, sans jamais choisir son camp, entre le football traditionnel, le foot de rue et le Mario Striker-like pour un résultat affreusement mitigé qui risque de vous laisser sur votre faim. Il faut reconnaître qu'Ubisoft, conscient des maigres qualités de son bébé, a la sagesse de ne le proposer qu'à 30 euros. Mais quand on sait que pour ce prix-là, on peut bénéficier de FIFA 10 ou de FIFA Street 3, difficile de vous conseiller cet achat franchement dispensable.
- Graphismes10/20
Les décors de fond ne sont pas à la hauteur de ceux de FIFA Street 3 mais ils restent plutôt jolis. En revanche, la pelouse est moche et les joueurs sont sommairement modélisés, même si les visages sont assez fidèles à leur modèle réel. Ce qui sauve le jeu sur le plan visuel, ce sont ces sympathiques effets de caméra qui dynamisent les actions « Pure », filtres à l’appui.
- Jouabilité8/20
On comprend parfaitement les velléités arcades du gameplay, assez simpliste si l’on excepte les actions « Pure » et la possibilité de réaliser quelques gestes techniques. Mais on pardonne moins la jouabilité insatisfaisante de Pure Football, accentuée par une gestion poussive des collisions, une physique du ballon peu crédible et une rigidité d’ensemble qui fait peine à voir.
- Durée de vie9/20
Le mode Campagne, au centre du jeu, se boucle bien trop rapidement. Il est secondé par deux modes plus classiques (Partie Rapide et Multijoueur) qui vous permettront notamment de jouer à plusieurs (en local ou en ligne), mais aurez-vous vraiment envie de prolonger l’expérience ?
- Bande son9/20
Les thèmes musicaux électro et planant sont un peu hors de propos dans ce jeu qui se veut viril et transgressif. L’accentuation volontaire des bruitages, destinée à renforcer la sensation de « foot brutal » confine au ridicule. Reste la présence plutôt plaisante des voix de vos coéquipiers, qui vous conseillent et commentent régulièrement vos exploits sur le terrain.
- Scénario/
Pure Football est un jeu de foot très arcade qui se veut sauvage et brutal, mais qui manque le coche à tous les niveaux. L’accentuation grotesque du gabarit des joueurs et de l’impact des bruitages ne suffit malheureusement pas à conférer au gameplay le dynamisme qui lui manque. D’autant que si le jeu s’affranchit de certaines règles, ce n’est que pour mieux en intégrer d’autres, aussi contraignantes que maladroites. Pour ne rien arranger, la jouabilité trop rigide souffre d’une gestion poussive des collisions et d’une physique de balle peu crédible. Du coup, le sympathique mode campagne et la présence de véritables joueurs internationaux ne suffisent pas à sauver cet ensemble décevant, qu’il est difficile de vous conseiller, même à 30 euros.