L'excellente série Runaway a largement contribué à réhabiliter le genre point'n click sur PC. Développé par le studio espagnol Pendulo, le premier épisode, Runaway : A Road Adventure, reprenait en effet la plupart des codes et des mécanismes de ce type de jeux alors en passe de tomber en désuétude. A l'aide d'un simple curseur, le joueur devait interagir avec des objets et des personnages placés dans des décors fixes pour aider le héros à résoudre de nombreux mystères. Grâce à son humour décapant, sa réalisation soignée et ses puzzles de qualité, Runaway : A Road Adventure devint une référence et une suite fut publiée en 2006 sous le nom de Runaway 2 : The Dream of the Turtle. Tout aussi bonne sur le fond comme sur la forme, cette dernière fut ensuite adaptée sur DS et Wii, deux consoles bénéficiant de systèmes de contrôles (Wiimote, stylet) particulièrement adaptés au point'n click.

En dépit de son statut de suite, Runaway 3 ne commence pas où le 2 s'était arrêté. Au lieu de ça, le jeu débute par une cinématique nous montrant Gina assistant à l'enterrement de Brian, entrecoupée d'images du procès de ce dernier pour meurtre ! En effet, l'ex-étudiant en physique reconverti en aventurier a été accusé de l'assassinat d'un certain colonel Kordsmeier... Mais il ne se souvient de rien et clame son innocence. Afin de vérifier si son amnésie est réelle ou simulée, le tribunal l'envoie à l'asile Happy Dale, où le docteur Bennett doit l'examiner. C'est là que Brian est apparemment victime d'un accident mortel... Évidemment, vous vous doutez bien qu'il s'agit encore d'un des tours de passe-passe dont il a le secret, et que le bougre a en fait simulé son décès pour prendre la poudre d'escampette. Ce que vous devrez éclaircir en revanche, ce sont les circonstances de cette évasion, que vous allez reconstituer. Après quoi vous pourrez passer au coeur de l'histoire : déjouer la machination qui pèse sur Brian et le laver de tout soupçon.

Le scénario est impeccablement construit et alterne, c'est une première, entre des séquences dans la peau de Gina et d'autres dans celle de Brian, jusqu'à ce que les deux tourtereaux se retrouvent pour le grand final. Comme dans les précédents opus, la progression dans l'histoire se fait tout d'abord en dialoguant avec les nombreux personnages rencontrés. Une trentaine de protagonistes vous attendent, du scénariste déchu à l'infirmière sadique en passant par les pensionnaires de l'asile, tous plus fous les uns que les autres. Vous retrouverez même quelques vieilles connaissances, mais chut... Quelques fans regretteront sans doute l'absence de Sushi, Saturne et Robby, le trio d'amis de Brian présent dans Runaway 1 & 2, mais il faut savoir faire de la place aux nouvelles têtes. Quoi qu'il en soit, cette brochette de personnages vaut le détour pour leurs répliques savoureuses, toujours bourrées d'humour et de références en tout genre. On regrettera juste que les doublages en anglais soient si peu nombreux et d'aussi mauvaise qualité.

Côté gameplay, les contrôles au stylet de cette version DS se révèlent une fois de plus impeccables. Comme dans le précédent épisode, il s'agit toujours de scruter les décors à la recherche du moindre objet à activer ou à emporter avec soi. L'inventaire est visible en permanence sur l'écran du haut et quelques clics suffisent pour observer, combiner et utiliser nos possessions. Vous aurez peut-être un peu de mal à comprendre l'intérêt de conserver une notice de montage de cercueil en suédois ou un gant en caoutchouc rempli d'eau. Dans le même ordre d'idées, ramasser des bougies d'anniversaire semble totalement inutile au premier abord. Pourtant, lorsqu'il s'agira d'épiler un dos velu... L'usage farfelu des nombreux objets que l'on aura entre les mains ne risque pas de réconcilier la série avec ses détracteurs. Les amateurs d'énigmes bien salées, en revanche, seront une nouvelle fois comblés. Ne pensez pas cependant que le défi est hors d'atteinte du joueur lambda. D'une part, les éléments intéressants de chaque décor apparaissent facilement à l'écran et d'autre part un assistant nous donne de précieux indices lorsque nous sommes bloqués.

En ce qui concerne la réalisation de Runaway : A Twist of Fate, attendez-vous à recevoir une nouvelle claque au niveau des graphismes. Même si les deux petits écrans de la DS restent limités en matière d'affichage, chaque décor tiré de la version PC regorge de détails peints à la main par une poignée de passionnés dont le talent éclate à chaque instant. Les nombreux intérieurs que l'on visite sont fouillés et colorés. De nombreuses cinématiques de bonne facture illustrent le scénario. Les personnages que l'on rencontre sont très stylés. En fait, seule l'animation de nos héros pêche un peu lorsqu'ils s'éloignent trop de l'écran. Au niveau du son, en revanche, c'est pas la joie. D'une part, les musiques sont très mal compressées, ce qui donne une qualité d'écoute très médiocre, et d'autre part, les bruitages sont extrêmement limités. Mais ne faisons pas la fine bouche, Runaway : A Twist of Fate reste un excellent portage DS qui fait honneur à la version d'origine et conclut merveilleusement bien la série.