Inventeurs du concept de puzzle-RPG à l’occasion du sympathique Puzzle Quest, les Australiens d’Infinite Interactive semblent depuis se reposer sur leurs lauriers. Avec Puzzle Chronicles, ils s’enfoncent dans une extrême médiocrité qui témoigne à la fois d’un manque d’inspiration et de l’adhésion à une logique de rentabilité.
Comment, quelques semaines après Might & Magic : Clash of Heroes, un titre DS qui transcende magnifiquement son modèle, les inventeurs du concept de puzzle-RPG peuvent-ils oser sortir un jeu aussi faible et aussi bancal que Puzzle Chronicles ? Malgré toute la sympathie qu'on peut avoir pour Infinite Interactive, qui a eu le mérite d'innover avec Puzzle Quest, on ne peut que déplorer la logique de rentabilité qui anime désormais le studio, et qui aboutit aujourd'hui à un titre sans aucun intérêt qui ferait passer Galactrix pour un chef-d'oeuvre. Rien, du gameplay poussif jusqu'à la progression insipide en passant par le design à mourir de rire et le scénario épouvantable (les adjectifs sont interchangeables), ne parvient à sauver Puzzle Chronicles de la déconfiture la plus totale. Malgré toute la bonne volonté du monde, l'auteur de ces lignes aura donc bien du mal à mettre en avant les quelques (rares) points positifs du jeu.
Le concept de puzzle-RPG, au centre de Puzzle Chronicles, concilie une progression de type jeu de rôle (avec tout ce que cela implique en matière d'évolution du personnage) et des combats qui se résolvent à la manière d'un puzzle-game. L'histoire vous met dans la peau d'une sorte de Conan le Barbare dont la tribu a été capturée par des marchands d'esclaves au service du terrible Démon Cornu. Il sera accompagné dans sa quête par son amie d'enfance Eléa ainsi que par la mystérieuse sorcière Morgana. Ce scénario risible, qu'on croirait écrit par un écolier de maternelle, s'appuie sur des cut-scenes ignobles, au design sans doute inspiré par les murs de sa classe. La progression ultra-dirigiste dans les différentes zones de jeu, qui abonde de gimmicks agaçants (du type : «Cette porte est fermée ; va chercher la clé qui se trouve là-bas »), implique des déplacements laborieux sur des cartes tout aussi laides, et n'a d'autre intérêt que de vous permettre d'enchaîner les combats.
Les affrontements de Puzzle Chronicles, qui se déroulent sur une grille horizontale, délaissent le tour par tour d'un Puzzle Quest pour adopter un jeu en temps réel. L'objectif consiste à combiner des gemmes de couleur afin de déclencher des attaques qui ont pour effet de pousser la matrice vers votre adversaire. Une petite animation en haut de l'écran, que vous n'aurez guère le temps de regarder, vous renseigne sur l'évolution du combat. Le gameplay devient simple dès que vous avez compris l'utilité des différents types de gemmes : certaines génèrent la rage nécessaire pour effectuer vos attaques, d'autres permettent d'accumuler de l'énergie pour lancer vos pouvoirs (peu nombreux, et liés pour certains au chien de guerre qui vous accompagne), d'autres encore servent à activer les objets de votre inventaire ; enfin, les gemmes dites « de combat » sont vouées à déclencher tout ça. Le résultat, qui aurait pu être sympa, se révèle hélas sacrément poussif, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, la jouabilité se montre aussi rigide que peu intuitive. La chute latérale des gemmes vous contraint à manipuler les directions haut et bas pour les déplacer à droite et à gauche, ce qui exige un certain temps d'adaptation. Qui plus est, les erreurs de visée, imputables au manque de réactivité des contrôles, sont impossibles à corriger dès lors que le bloc est entré en contact avec un autre ou que vous avez accéléré sa chute en utilisant le bouton dédié. A ce sujet, signalons qu'un fichu temps de latence accompagne aussi bien l'activation de vos sorts que la chute accélérée des blocs. Toutefois, n'ayez crainte, car au vu du rôle important du hasard et de l'impossibilité de mettre en place une stratégie digne de ce nom, les développeurs de Puzzle Chronicles ont préféré évacuer toute notion de challenge : les combats sont d'une facilité déconcertante et les défaites n'ont aucune conséquence, ce qui réduit d'ailleurs à néant l'intérêt de la progression et la dimension RPG du jeu.
Ledit aspect jeu de rôle consiste à upgrader régulièrement les statistiques de votre personnage et à sélectionner ses équipements avec soin, le tout ayant, reconnaissons-le, une influence perceptible sur le déroulement des phases de combat. De temps en temps, Puzzle Chronicles vous confronte à des mini-jeux destinés à déverrouiller un donjon (où il sera ensuite possible de leveller), à entraîner votre chien de guerre, ou encore à rechercher un trésor... Ces épreuves, peu dynamiques et vite ennuyeuses, prennent invariablement la forme de puzzle-games verticaux au principe éculé. Dans l'ensemble, la vingtaine d'heures de jeu proposées par Puzzle Chronicles ne vous épargnera aucune redondance. Enfin, on ne saurait clore ce tour d'horizon de la version PSP sans mentionner ces épouvantables temps de chargements, longs et omniprésents, qui vous conduiront à passer plus de temps à patienter qu'à jouer. C'est la goutte d'eau qui fait déborder un vase déjà bien plein.
- Graphismes6/20
Les décors sont kitsch et moches, les héros souffrent d’un character design catastrophique et les cut-scenes ne valent même pas un cartoon à petit budget. A côté de ça, le rendu des combats, qui souffre d’une certaine confusion et de ralentissements notables, n’est pas non plus exempt de tout reproche.
- Jouabilité7/20
Le gameplay ne se montre convaincant ni dans son aspect puzzle-game ni dans son aspect jeu de rôle. La maniabilité rigide et peu intuitive, couplée à une interface minimaliste (qui oblige à garder certaines informations en mémoire) et à une absence de réel challenge, rend l’expérience très insatisfaisante. Pour finir, les temps de chargements omniprésents (vous y aurez même droit pour une simple navigation dans l’inventaire) nous poussent à sanctionner durement ce critère.
- Durée de vie13/20
Les 17 zones de jeu, qu’il est possible de boucler chacune en une grosse heure, vous offriront donc une vingtaine d’heures de jeu, sachant que si cela ne vous suffit pas, vous pouvez toujours prolonger l’expérience à travers le mode deux joueurs en local.
- Bande son14/20
L’ambiance sonore se montre plutôt satisfaisante. Des thèmes musicaux légers et aériens illustrent vos déplacements sur la carte tandis que des bruitages dynamiques soulignent les moments forts des phases de combats. Seuls les doublages en V.O., peu crédibles, ternissent un peu le tableau.
- Scénario5/20
Digne d’un mauvais épisode de Hercule ou de Xena la Guerrière, l’histoire de Puzzle Chronicles est tellement générique qu’elle en devient parfois ridicule. A noter que la localisation française ne vous épargnera ni les traductions approximatives ni les fautes d’orthographe.
Depuis la sortie de Puzzle Quest, le studio Infinite Interactive donne l’impression d’être pris dans une spirale infernale, qui vaut à chaque nouveau jeu d’être encore plus mauvais que le précédent. Doté d’une dimension technique, artistique et ludique d’une grande médiocrité, Puzzle Chronicles nous fait craindre le pire pour le futur Puzzle Quest 2. Et pour ne rien arranger, les temps de chargements insupportables de cette version PSP nous conduisent à la sanctionner assez durement.