Près de deux ans et demi après le premier Death to Spies, les petits gars d'Haggard Games nous proposent de chausser à nouveau les bottes crasseuses d'un agent du SMERSH. Acronyme d'une expression russe signifiant "mort aux espions", SMERSH désigne en fait le service de contre-espionnage soviétique chargé de mettre des bâtons dans les chenilles de l'armée allemande lors de la Seconde Guerre mondiale. Une tâche pour le moins délicate dans le premier jeu, en raison d'une difficulté particulièrement relevée et surtout de quelques soucis de prises en main. Cette suite, parvient heureusement à corriger pas mal des errements de son prédécesseur sans pour autant céder aux sirènes de la simplification.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le SMERSH ne rendait compte qu'à Staline lui-même et officiait dans le secret le plus absolu, n'hésitant pas à liquider les informateurs après les avoir délestés de leurs précieuses informations. Ancré dans une réalité historique brumeuse mais fascinante, ce nouveau Death to Spies propose sept missions variées aux objectifs souvent complexes. Sabotage, extraction de personnel, vol de documents, assassinat, le titre réutilise les principaux schémas de son aîné en prenant un malin plaisir à nous fourrer dans des situations fort inconfortables. Moment of Truth se place d'ailleurs en tant que suite directe du premier opus, allant pour le prouver jusqu'à débuter sur la cinématique de fin de Death to Spies. On se retrouve donc toujours dans la peau du même espion russe qui se remémore ses pérégrinations furtives. Chaque mission prend ainsi toujours la forme d'un flash-back qui ne sera pas nécessairement lié avec le précédent. N'attendez donc pas du titre qu'il vous serve un scénario en béton armé. Au fond, seule la cohérence des missions et la perspective assez savoureuse d'opérer chez les Alliés vous permettra de vous plonger dans l'ambiance.
Pour ceux qui n'auraient pas eu le plaisir de souffrir en compagnie de notre espion déchu en 2007, sachez que le soft se présente en fait comme une sorte de fusion entre Hitman et Commandos. En vue à la troisième personne, il s'agira avant tout de feinter continuellement et d'évoluer entre les nombreuses patrouilles allemandes pour se frayer un chemin vers l'objectif. Tout est bon pour réussir : ramper dans les herbes folles, assassiner silencieusement une sentinelle mal placée avant d'en planquer la dépouille, créer des diversions, mettre en place des pièges, voler des uniformes, barboter des véhicules et j'en passe. Mais prenez garde, les soldats adverses semblent particulièrement alertes et n'hésiteront pas à venir voir ce qu'il se passe en cas de bruit suspect. Mieux, lorsque vous volerez un uniforme, il faudra d'abord s'assurer que celui-ci n'est pas recouvert de sang et que le reste de votre équipement correspond à votre nouvelle identité. Amusez-vous donc à saluer un officier dans votre nouvel uniforme de la Wehrmarcht flambant neuf avec une mitraillette de l'armée russe en bandoulière, vous m'en donnerez des nouvelles. A ce titre, on notera d'ailleurs une petite amélioration de taille : il est désormais possible de stocker un autre déguisement dans son inventaire, ce qui évitera de fastidieux allers-retours vers une victime dissimulée dans un coin.
Méfiez-vous tout de même car l'IA a été largement remaniée et vous suspectera de manière logique. Sa seule véritable lacune ne vous apparaîtra finalement que quand elle devra faire parler les armes. Rigides comme pas permis, avançant bêtement vers vous en ligne droite, les troufions ennemis perdront alors toute crédibilité. Mais au fond, ce n'est pas là un véritable problème, puisque dans Death to Spies, une fusillade en règle aboutit invariablement à votre trépas. Ici, la moindre erreur se paie cash. Comme son prédécesseur, le soft ne s'adresse pas aux lopettes et aux tarés de la gâchette, même s'il faudra occasionnellement faire usage des armes. Le challenge est assez relevé, et ce même en facile. De quoi réjouir le fan de jeux d'infiltration, et faire pleurer le néophyte. D'autant que les développeurs ont pensé aux plus acharnés en ajoutant un nouveau mode de difficulté qui interdit purement et simplement l'usage de déguisements. On sera alors contraint de faire du rentre-dedans au sein d'un jeu qui ne s'y prête pas vraiment.
Mais ce n'est heureusement pas là la seule nouveauté de cet opus. De manière générale, Haggard Games s'est appliqué à gommer les lourdeurs du premier volet. Première modification de taille, le mode discrétion utilisé pour se rapprocher silencieusement d'une cible vous permettra de vous déplacer un peu plus rapidement que par le passé. Cela semble anodin, mais les fans du premier volet se souviendront sûrement d'avoir pesté sur la lenteur du personnage et sur son incapacité à rattraper un garde en train de faire sa ronde. Désormais, vous devriez pouvoir tomber sur le dos de votre proie sans trop de difficultés. A cela s'ajoute un petit remaniement du radar, qui indique maintenant le degré de suspicion des gardes à proximité grâce à un code couleur. Les missions étant globalement plus complexes que dans Death to Spies premier du nom, ce petit dispositif n'est pas de trop, d'autant qu'il ne nuit pas véritablement à l'immersion. Il est vrai que certains petits détails font encore un petit peu tâche, à l'image des portes qui se ferment toute seules, mais l'ensemble reste suffisamment cohérent pour nous maintenir rivé à l'écran.
Un constat qui peut également s'appliquer à la réalisation dans son ensemble, qui accuse toujours de nombreuses années de retard sur la concurrence, même si on décèlera de menues améliorations depuis 2007. Rien de fondamentalement rédhibitoire cependant, puisque la véritable réussite de Death to Spies est encore une fois de laisser au joueur toute la latitude nécessaire pour remplir ses objectifs. Car si quelques cinématiques viendront parfois vous donner des indices sur la marche à suivre, ce sera à vous de faire votre petite popote, de crocheter telle ou telle porte ou d'assommer un officier dans les toilettes. Chaque objectif peut être atteint de plusieurs façons, et c'est à vous de décider comment y parvenir. Death to Spies n'est d'ailleurs pas de ces titres qui tiennent constamment le joueur par la main. Le bougre peut même paraître un petit peu trop vache, au sens où il ne s'embarrasse même pas d'un semblant de tutorial. Il vous faudra donc tâtonner pendant un bon bout de temps dans chaque mission pour parvenir à vaincre. De ce fait, les sept missions proposées pourront vous maintenir dans l'aventure plus d'une dizaine d'heures, ce qui est tout à fait correct compte tenu du petit prix affiché par cette suite. Il est simplement dommage que certaines soient un petit moins bien pensées que les autres. C'est d'ailleurs là le seul gros défaut d'un titre qui se révèle aussi plaisant qu'exigeant.
- Graphismes11/20
En dépit de quelques améliorations dans la gestion des lumières et d'un travail plus marqué sur les couleurs, Death to Spies : Moment of Truth reste toujours très en-deçà des productions actuelles. Textures, modélisation des objets et des personnages et animations s'avèrent effectivement dépassées. L'univers dépeint par Haggard Games reste toutefois assez crédible.
- Jouabilité15/20
Très semblable à son aîné pour ce qui relève de la prise en main, Death to Spies ne fait finalement que condenser la plupart des actions caractéristiques des jeux d'infiltration. Si le résultat n'est pas original pour un sou, les différentes options s'imbriquent avec suffisamment d'intelligence pour rendre le jeu plaisant. Ajoutons à cela une IA relativement affûtée et quelques retouches salvatrices, comme la rapidité de déplacement accrue du héros en mode discrétion, et vous obtenez quelque chose de très réussi. On regrette seulement le fait que les missions, bien que globalement maîtrisées, soient assez inégales en termes d'intérêt.
- Durée de vie14/20
Les sept missions du jeu pourront facilement vous occuper pendant plus d'une dizaine d'heures. Le total est donc un petit moins conséquent que pour le volet précédent. Mais le petit prix du soft ainsi que son fort potentiel de rejouabilité compensent ce petit défaut.
- Bande son13/20
Un poil plus inspirées que dans le premier opus, les compositions restent toutefois un petit trop banales à notre goût. Côté bruitages, on reste dans le classique et l'efficace, même si entendre d'incessants "Was ist das ?" a franchement de quoi énerver.
- Scénario11/20
Death to Spies : Moment of Truth se contente du minimum syndical en matière de scénario. On retrouve donc un agent du SMERSH qui se remémore ses anciennes missions sans que celles-ci ne soient vraiment liées. Reste que le fait d'incarner un espion soviétique - qui ira même faire une petite visite aux Américains - représente un agréable changement de perspective.
De nouvelles situations et quelques améliorations de gameplay salvatrices, voilà ce que vous réserve ce nouvel opus de Death to Spies. Ainsi, si le soft reste fidèle à son aîné en proposant des missions d'infiltration ouvertes et extrêmement exigeantes, son IA affûtée et sa jouabilité très légèrement remaniée lui permettront de satisfaire les fans comme les néophytes en quête de challenge.