En développement depuis 4 ans chez Rebellion, Rogue Warrior semble surgir d'une époque lointaine, révolue surtout. A croire que le voyage dans le temps existe.
Les films d'action des années 80, ça vous parle ? Le genre Chuck Norris hein, bien velu. Avec des dialogues en béton armé, des scénarios en roseaux et de l'action tellement surdosée que ça en devient ridicule. D'une façon ou d'une autre, en jouant à Rogue Warrior, on se dit que Rebellion devait avoir en tête de rendre hommage ou de parodier ces films. L'ennui c'est que franchement, qui a envie de jouer à Chuck Norris ? Ou dans le cas qui nous occupe, à Dick Marcinko, ancien Navy Seal's ayant réellement existé et dont le jeu s'inspire. Se déroulant dans les années 80, Rogue Warrior nous sert tous les poncifs sur la guerre froide, et surtout une palanquée de tirades ordurières se terminant le plus souvent par « sale coco ». Non là comme ça, ça peut faire rire, mais le fait que ça se produise pratiquement à chaque fois que vous tirez sur quelqu'un vous donnera rapidement envie de vous crever les tympans. Du pur nanar qui ne fait vraiment sourire qu'un temps.
Mais les autres sujets de rigolade sont nombreux. Le développement de Rogue Warrior a débuté il y a 4 ans, et punaise, qu'est-ce que ça se voit. On aurait pu penser que tout ce temps ait été consacré à remettre le jeu au goût du jour. Ben non, pour être précis, on pencherait plutôt pour une autre solution : il y a 3 ans, Rebellion a mis le développement en pause pour se consacrer sur ses autres projets (comme, pouf, pouf, Shelshock 2, héhé). De fait, voilà un titre qui semble surgir d'une faille temporelle tant il semble fièrement bardé de toutes les innovations balbutiantes de l'année 2006. Par exemple, Dick, s'il se contrôle en vue subjective, peut se mettre à couvert, le jeu adoptant alors une vue à la troisième personne. Par contre, il ne peut pas bondir rapidement de sa position. Sa liberté de mouvement lorsqu'on vise est déplorable, à tel point que si une cible se trouve 1 centimètre et demi trop à gauche, vous ne pourrez pas l'atteindre. Esthétiquement, il n'y a même pas d'animation de transition entre vue subjective et vue externe. Vous pouvez avoir confiance, ça choque.
Si la plupart du temps, les missions linéaires du jeu finiront dans la plus grande barbarie, Rogue Warrior prévoit pourtant de vous laisser jouer la carte de l'infiltration. En pratique, il suffit de s'approcher d'un ennemi inattentif pour effectuer un silent kill. Là encore, on se croirait revenu quelques années en arrière. On approche, on est encore à 4 bon mètres, paf, on appuie sur le bouton et là d'un coup sans prévenir, on assiste à une animation, somme toute réussie, nous montrant l'exécution. C'est joli, certes, mais c'est aussi le degré zéro du challenge. Toutes les missions sont conçues de telle sorte qu'elles démarrent de la même façon. Au départ, on trouve une tripotée de gardes placés de façon adéquate, il suffit de se jeter sur eux et de les liquider. Ne prenez même pas la peine de marcher ou de vous baisser, allez-y en courant, l'IA était en option. Puis, on finira par vous voir, du coup, paf, c'est l'alerte générale et là on sort les gros fusils. Pas devenus plus malins, les soldats ennemis ne savent faire que deux choses, rester plantés ou sortir et avancer au pire moment possible pour leur propre survie. Oh parfois on meurt, soyons honnêtes. Par exemple, lorsqu'on décide d'effectuer une action au corps à corps qui foire à cause de la détection moisie des collisions. Quand on dit que Rogue Warrior a 4 ans de retard, il ne faut pas forcément comprendre qu'il aurait été bon il y a 4 ans. Non, non, non, même à l'époque, on a de sérieux doutes.
D'ailleurs, lorsqu'on relit les premières annonces, on rit jaune. A l'origine, Rogue Warrior devait faire intervenir des équipiers, finalement non. Il devait proposer une IA hors du commun. Raté aussi. Et surtout, n'avoir recours à aucun script, alors qu'au final, il en est plein à craquer, et pas des subtils ou efficaces comme dans un Call of Duty, non, du gros, du lourd, du visible. On pourrait encore faire état des armes sans recul et surtout sans puissance, ou encore du moteur 3D poussif affichant des modèles anguleux et des textures grossières mais à quoi bon tirer sur l'ambulance, surtout si elle a déjà les pneus crevés ? On se demande franchement pourquoi Rebellion et Bethesda ont finalement décidé de sortir leur titre, sans aucune campagne promotionnelle qui plus est, et face à une ribambelle de FPS devant lesquels il ne peut qu'avoir honte.
- Graphismes11/20
Le moteur est grossier, les modèles anguleux, les textures écœurantes. On peut apprécier les animations des mises à mort mais de là à se dire bluffé. Rogue Warrior affiche un rendu à peine comparable à celui de la première vague de jeux de 2006.
- Jouabilité8/20
L'IA lamentable et la construction des niveaux engendrent une platitude et un ennui impressionnants. Les gros scripts mal ficelés n'arrangent rien, de même que les mécaniques « révolutionnaires » d'il y a 4 ans, pas remises au goût du jour.
- Durée de vie7/20
On avance à une vitesse folle. La campagne solo est bouclée en une après-midi. Il y a bien un mode multi à 8 mais on en cherche encore l'intérêt profond.
- Bande son11/20
Si les dialogues peuvent faire sourire, les répliques de Dick balancées toutes les 26 secondes donnent de sérieuses envies de meurtre. Les musiques s'inspirent assez clairement des productions des années 80, pour prolonger l'hommage, mais sont trop répétitives pour qu'on arrive à apprécier la chose.
- Scénario6/20
Euh... "A mort les coco voleurs de missiles nucléaires ! C'est que nous qu'on a le droit d'en avoir." En gros hein. Sans même un effort de mise en scène.
On se demande un peu pourquoi Bethesda n'a pas simplement annulé la sortie de Rogue Warrior. Ne ressemblant plus à ce qu'il devait être, il est évident qu'il n'a aucun argument pour lui tant il est daté, aussi bien ludiquement que techniquement. Et sortir le même mois que Modern Warfare 2, sans l'ombre d'une campagne de promo ? Au dos de la boîte on peut lire : je suis le dieu implaccable du combat. Ben paf, plaqué bonhomme.