Comme beaucoup de franchises, SAW nous a offert, après un excellent premier épisode synonyme de huis clos méthodique et malsain, une tripotée de suites ne cessant de tirer la saga vers le bas. Mélangeant scénario abracadabrantesque censé remplir le vide entre deux séquences de torture, la série semble plus que jamais destinée à finir sa carrière en capitalisant outrageusement sur le gore craspec au détriment d'un quelconque équilibre scénaristique. Du coup, se retrouver avec l'adaptation vidéoludique du film n'avait rien d'évident surtout au moment où arrive en salles le dispensable SAW VI qui a quand même le mérite de faire rire les petits Français que nous sommes rien qu'avec son titre.
Pour celles et ceux qui se demanderaient comment on adapte une série de six films en un seul jeu vidéo, voici un début de réponse. Prenez un personnage emblématique, disons l'inspecteur Tapp du premier film. Rajoutez-y au moins un caméo qui a déjà fait ses preuves, Amanda par exemple. Plongez ces deux personnages dans un asile psychiatrique, SAWpoudrez le tout de pièges pervers, d'énigmes, de quelques combats et d'apparitions de Jigsaw. Mettez tout ça dans le four, laissez cuire quelques mois puis servez le tout bien chaud en y ajoutant de multiples clins d'oeil aux long-métrages. Et voilà, vous avez votre jeu ! Ce n'est pas plus compliqué que ça. Ainsi, si dans l'absolu, on ne pouvait pas vraiment s'attendre à autre chose de SAW, on pourra néanmoins être surpris par les influences (directes ou non) du jeu vu qu'on y trouve pas mal d'idées piquées à Lost ou Silent Hill Homecoming. Rassurez-vous, le tout passe plutôt bien d'autant que la progression est constamment ponctuée de différentes énigmes, allant du simple piège à déjouer grâce à une action contextuelle aux mécanismes plus complexes demandant davantage de réflexion.
C'est d'ailleurs cette pluralité qui offre à SAW une certaine personnalité faite de pérégrinations dans l'asile entrecoupées de cinématiques aux termes desquelles vous vous retrouvez généralement assommé puis jeté dans un endroit isolé. Ne restera plus qu'à continuer le petit jeu de Jigsaw en essayant de sauver votre peau et celle d'autres prisonniers la plupart du temps enchaînés à des pièges complexes. La résolution de ces derniers sera l'occasion de mini-jeux relativement simples dans leurs concepts. Néanmoins, à l'instar des films, vous devrez parfois faire preuve de rapidité, le temps imparti pour déjouer un piège étant variable. Comme on le voit, l'architecture du jeu est calquée sur celle des films même si plusieurs casse-tête (à base de roues crantées, de câbles à relier) font indéniablement penser au Lost d'Ubisoft. Toutefois, on félicitera les développeurs d'avoir plutôt opté pour un titre orienté réflexion qu'action. Ainsi, si on peut combattre plusieurs hères à intervalles réguliers, on privilégiera la fuite en verrouillant les portes ou en posant des pièges après avoir déniché le matériel nécessaire. Bien que le côté jouissif de la chose soit bel et bien là, on regrettera tout de même de ne pouvoir vraiment mettre à profit les armes de fortune qu'on trouvera ici et là. En effet, le système de combat étant d'une lourdeur sans nom, on aura tôt fait de détaler en laissant parfois les pièges de Jigsaw (le collier explosif en tête... Sans mauvais jeu de mots) faire le travail à notre place.
Toutefois si vous optez pour le combat rapproché, sachez que vous allez devoir anticiper les attaques des vos adversaires, la faute à des coups terriblement lents que ce soit à mains nues, avec un tuyau, une batte ou que sais-je encore. Une façon de faire loin d'être instinctive et souvent peu probante surtout si un ennemi vous frappe d'abord puis enchaîne dans la foulée avec une pluie de coups. En somme, si vous en avez l'occasion, n'hésitez pas à reculer pour vous faire un petite injection afin de vous ragaillardir. Nonobstant, cet aspect de SAW vous vaudra quelques grommellements surtout si la caméra s'amuse à faire des siennes. Au final, on redoutera ces séquences même si fort heureusement, il est bon de rappeler qu'elles ne constituent pas le corps du jeu plus intéressé par les puzzles du tueur à la morale sociale. Etre conscient des solutions qui s'offrent à vous, voilà ce que vous devrez avoir en tête même si on reprochera à Konami de ne pas avoir été assez perspicace pour comprendre que 60 euros est un peu cher payé pour un titre intéressant mais tournant trop rapidement en boucle, surtout dans sa deuxième moitié qui n'est rien d'autre qu'un copier/coller de la première. L'archétype même du jeu pas franchement mauvais mais pas franchement bon qu'on guettera du coin de l'oeil sur les sites de bonnes affaires.
- Graphismes12/20
Du même niveau que Silent Hill Homecoming, SAW réussit au sein d'un même endroit (un hôpital psychiatrique) à quelque peu se renouveler en termes d'environnements, du moins durant les premières heures de jeu. Bien entendu, le tout garde une homogénéité parfois ennuyeuse mais via quelques éclairages maîtrisés et une atmosphère malsaine, le visuel du titre s'en tire convenablement.
- Jouabilité13/20
Les développeurs ont été bien inspirés de mettre en avant les énigmes plutôt que les combats vu que ces derniers sont lents, peu précis et rapidement lourdingues. Ainsi, si on déjouera facilement les pièges machiavéliques de Jigsaw, le titre regorge de différents casse-têtes à l'image de ce que proposait Lost et de séquences basées sur des QTE. Bien que l'ensemble tourne en rond (surtout à la toute fin où on nous refourgue 5 fois de suite le même type de pièges !!), on se prend malgré tout au jeu d'autant qu'il est également possible de piéger ses adversaires pour leur faire sauter la caboche.
- Durée de vie11/20
Le jeu est relativement simple surtout si vous mettez à profit les pièges pour éviter de fastidieux combats. Les énigmes restent elles aussi accessibles hormis certaines d'entre-elles qui vous demanderont beaucoup de sang-froid. Tablez en moyenne sur 8 heures pour en faire le tour.
- Bande son14/20
On retrouve la voix si caractéristique du Jigsaw et les autres doubleurs ne s'en sortent pas si mal que ça. De plus, la plupart des thèmes musicaux de la série rempilent pour le jeu.
- Scénario9/20
Reprenant les artifices scénaristiques de la série, les scénaristes ont attaché des bouts de ficelle ensemble afin de nous balancer un scénario aux ambitions très mesurées. Etant bourré de clins d'oeil aux divers films, ceux ne connaissant pas la saga passeront à côté de pas mal de choses tandis que les fans devront se contenter de personnages et situations connus. Enfin, précisons que le soft propose deux fins mais que l'une comme l'autre sont d'une banalité affligeante.
Se complaisant dans un sadisme assumé, fer de lance de la saga cinématographique, l'adaptation de SAW bouffe à tous les râteliers en empruntant principalement à Lost et Silent Hill Homecoming. Le résultat aurait pu être aussi catastrophique que les derniers segments filmiques mais heureusement il n'en est rien. Loin d'être un indispensable du survival, le jeu réussit à trouver un certain équilibre grâce à une progression ne perdant jamais de temps. Dommage cependant que l'ensemble tourne vite en rond, que la deuxième moitié de jeu traîne beaucoup trop en longueur et que la principale motivation du joueur pour avancer tienne en la promesse d'un twist final