Amstrad CPC. Rien qu'avec ces deux mots les trentenaires commencent à baver, l'air béat, perdus dans leurs vieux souvenirs naïfs d'une époque disparue où l'on pouvait encore s'émerveiller devant quelques pixels et un concept alliant simplicité et ingéniosité. Dans des temps où les équipes créatrices n'étaient composées que d'un ou deux obscurs développeurs, les boîtes françaises telles que Loriciel réalisaient des jeux de très bonne qualité, dont plusieurs auront traversé les époques. Voici le test de l'un des meilleurs, Skweek.
Skweek, kézako ? Bien que cela ressemble à une onomatopée, c'est bien le nom du personnage que l'on incarne dans ce jeu d'action/réflexion. Sorte de boule de poils orange munie de deux petites pattes, Skweek doit sauver son monde et ses copines les « Skweekettes » d'une infestation qui rend sa planète bleue. Pour cela, il doit passer sur toutes les cases de chacun des niveaux du jeu pour leur rendre leur belle couleur d'origine, le rose bonbon. Bien évidemment, de méchantes bestioles viendront lui mettre des bâtons dans les roues de diverses manières. Encore éberlué par ce scénario kafkaïen d'une profondeur infinie, nous pouvons démarrer une première partie.
Lorsque l'on commence une partie de Skweek, la première impression est visuelle. C'est coloré, très coloré. L'univers est enfantin et joyeux, rien n'effraiera les plus petits et même les monstres sont mignons tout plein. La grosse peluche que l'on dirige se déplace de façon nonchalante bien que particulièrement rapide. On peut se déplacer et tirer dans quatre directions et il ne faut pas plus de dix secondes pour comprendre le fonctionnement. Les niveaux sont étalés sur sept écrans que l'on traverse de façon verticale. Des murs, destructibles ou non, peuvent bloquer certains passages, sans compter les nombreuses cases d'eau qu'il vous faudra éviter, notre ami Skweek ne sachant pas nager. Evidemment, tout cela serait trop simple si d'autres cases ne venaient pas compliquer la tâche. Les cases fléchées poussent le joueur dans une direction. Même s'il est possible de contrer cette case en marchant dans le sens inverse, on se retrouve très ralenti, ce qui peut être crucial si on est poursuivi par un monstre. Les cases de glace sont encore plus perfides. Une fois que l'on marche dessus, on glisse dans la direction initiale tant qu'il y a des cases de glace sur notre chemin. Malheureusement, s'il y a une case d'eau à la fin des cases glacées, c'est la mort assurée. Ces nombreux pièges sont diablement bien placés et il vous faudra être attentif à vos moindres mouvements.
Heureusement, tout n'est pas contre le petit Skweek. Certaines cases bénéfiques l'aideront dans sa quête de restauration de la planète. Tout dabord, il y a deux types de cases POW. L'une d'entre elles élimine tous les ennemis présents à l'écran tandis que l'autre crée une flaque d'eau de neuf cases détruisant tous les monstres, ainsi que les murs destructibles présents dans la zone. Evidemment, il faudra fuir très vite après avoir marcher dessus si on ne veut pas subir le même sort. Il y a aussi des cases "Short Cut" qui vous téléportent vers d'autres cases similaires, pratique pour atteindre des zones lointaines, voire inaccessibles. Enfin, il y a les cases bleues claires qui immobilisent les ennemis pendant un certain laps de temps, ce qui est un plus non négligeable vu leur tendance à vous gêner dans votre progression. En effet, ces derniers ne se contentent pas de vous bloquer le passage, ils peuvent aussi changer la couleur des murs. Loin de n'être qu'esthétiques, il faut savoir que vos tirs rebondissent sur les murs verts, tandis que les murs orange les absorbent. De plus, certains monstres sont bien plus dangereux que d'autres. Certains peuvent tirer, d'autres se déplacent très vite ou repeignent en bleu toutes les cases qu'ils foulent, ou encore changent de forme à volonté. Enfin, certains monstres peuvent transformer des cases d'eau ou des murs en cases bleues, vous obligeant donc à revenir les repeindre en rose.
Toutes ces variantes rendent les parties bien plus complexes et fun qu'il n'y paraît de prime abord. Avec les monstres qui changent la couleur des cases ou modifient le terrain, vous devrez souvent faire quelques allers-retours pour passer sur de nouvelles cases bleues. En plus des monstres parfois difficiles à éviter, l'un des pires ennemis du jeu sera le temps. Effectivement, on a en générale qu'une ou deux minutes pour finir un niveau, et le joueur devra donc être extrêmement rapide et précis. Oublier une case sur son chemin peut être fatal car cela nous oblige à revenir sur nos pas quand tout se joue déjà à la seconde près. Pire encore, un ennemi peut éventuellement recolorer une case en bleu à la dernière seconde du temps, vous faisant ainsi perdre une vie ! Néanmoins, malgré toutes ces difficultés, il ne fait aucun doute que le concept du jeu est particulièrement addictif. Les niveaux sont très originaux dans leur construction, et la rapidité de l'action ne laisse pas une seule seconde de répit. Les nombreux bonus qui peuvent apparaître en cours de jeu, comme le tir paralysant, les chaussures qui nous évitent de glisser sur la glace ou encore le tir qui détruit les murs (mais les transforme en cases bleues), finissent d'apporter de la diversité à un jeu déjà ultra complet.
Le jeu dispose de 100 niveaux, ce qui est beaucoup compte tenu de la difficulté de certains et du degré de rejouabilité du soft, tout en sachant qu'on a le choix de les faire dans l'ordre, ou de façon totalement aléatoire. Au final, il est dur de reprocher quoi que ce soit à Skweek. A la limite, on pourrait dire que les mouvements de la petite boule de poils sont un petit peu trop rapides, mais c'est vraiment histoire de chipoter. Skweek est un jeu prenant, avec des graphismes mignons, un concept à la fois simple et intelligent et une musique entraînante, bien qu'un poil répétitive. Il est néanmoins plutôt difficile de le conseiller à un joueur n'ayant pas connu cette époque bénie. Seuls les plus curieux pourront essayer de découvrir cette petite perle oubliée qui aura pourtant généré des crises d'hystérie et de fous rires chez les plus vieux d'entre nous. En tout cas, si vous avez un doute, n'hésitez pas, foncez !
- Graphismes16/20
Avec ces couleurs vives et ses monstres charismatiques, Skweek est une réussite. Bien qu'on ne puisse pas parler de claque graphique, les niveaux sont jolis et renvoient assez facilement à notre enfance, d'autant que les ennemis ressemblent plus à des peluches qu'autre chose. Le design rond de l'ensemble plait à toutes les tranches d'âge. A la limite, et seulement parce qu'il faut bien pinailler de temps en temps, on pourrait dire qu'il faut vraiment réussir à lire le petit «plouf» en haut à droite pour se rendre compte que la case grise qui vient de nous tuer était en fait une case d'eau. Mais bon, une fois qu'on le sait, plus de problème.
- Jouabilité16/20
Dur de faire injouable avec seulement quatre directions et un bouton de tir. Skweek répond parfaitement et c'est temps mieux vu qu'il faut parfois de bons réflexes pour éviter les monstres. Il nous arrive d'être surpris en changeant d'écran de nous retrouver presque nez à nez avec un ennemi, mais cela n'arrive pas assez souvent pour être gênant. Par contre, il est vrai que la tendance qu'à Skweek à démarrer au quart de tour dès qu'on effleure une direction peut surprendre, notamment quand on est à deux pixels d'une belle flaque d'eau, surtout lorsque l'on sait qu'il y a un bonus nous permettant d'aller encore plus vite ! Mais rien d'assez fâcheux pour crier au scandale.
- Durée de vie16/20
Vu la difficulté du jeu, surtout à cause du temps imparti pour finir chaque niveau, vous aurez plus de chance de voir un game over que de finir Skweek. Bien qu'il y ait différents moyens de gagner des vies, il y en a encore plus qui mènent à la mort. Toutefois, les plus persévérants finiront le titre en 2-3 heures, ce qui est quand même beaucoup pour ce type de jeux. De plus, y revenir est un véritable plaisir, d'autant que les 100 niveaux sont très différents les uns des autres, certains étant même plutôt originaux.
- Bande son12/20
Deux musiques, c'est peu. Chacune a un loop d'à peu près une minute et demie ce qui n'est pas si mal quand on sait que c'est le temps qu'il faut en générale pour finir un level d'une traite, du moins quand on est doué. A vrai dire, il y a de fortes chances que vous soyez morts avant le premier loop dans la plupart des cas, mais bon, on va faire comme si de rien n'était. Les effets sonores sont plutôt simples. Bref, ce n'est pas dans ce domaine que Skweek peut prétendre à une révolution.
- Scénario/
A moins d'avoir lu la notice, il n'y a absolument aucun moyen de connaître le fabuleux scénario du jeu empli de haine, d'amour, de trahisons et de… bon ok j'arrête.
Skweek est une petite perle de gameplay comme on en rencontre peu. Une fois la partie démarrée, impossible de savoir quand elle se terminera. Près de vingt ans après sa sortie, il est toujours aussi drôle et prenant, ceci grâce à un concept très complet qui promet beaucoup de surprises en pleine partie. Il ne faut pas se fier au design un peu gnan-gnan, ce jeu demande beaucoup de réflexion et de rapidité. Les quelques possesseurs d'Amstrad se régalent encore, mais sachez aussi que ce jeu est dispo sur PC en abandonware depuis belle lurette. Il n'y a plus qu'à en profiter.