Cette fin d'année 2009 voit débarquer plusieurs jeux de rôle très attendus, pour le plus grand plaisir des amateurs du genre qui ne sauront plus où donner de la tête. Dragon Age : Origins, le nouveau titre de Bioware, s'annonce tout de même comme le grand favori. Mais en a-t-il vraiment la carrure ? Nous vous proposons quelques éléments de réponse dans ce nouvel aperçu réalisé sur la version preview du jeu, déjà bien finalisée et même localisée en français.
Si vous suivez de près Dragon Age : Origins, vous n'êtes pas sans savoir qu'il a été plus ou moins annoncé comme le nouveau Baldur's Gate. Cette promesse, les fans du genre l'ont déjà entendue à maintes reprises, concernant des jeux qui n'ont finalement pas comblé leurs attentes. Sauf que dans le cas présent, on n'a sans doute jamais été aussi proche de la vérité : à croire que seul le studio qui avait créé le mythe pouvait réitérer cet exploit. Pour ceux, et il y en a aussi, qui entendent parler pour la première fois de Dragon Age : Origins, sachez que contrairement à Mass Effect, le précédent jeu de Bioware, il ne s'agit pas d'un action-RPG. Les combats s'y déroulent bien en temps réel, mais la représentation aérienne et l'utilisation de la pause active, plus que conseillée si vous ne voulez pas mordre rapidement la poussière, les rendent particulièrement tactiques.
Dragon Age : Origins est donc un vrai jeu de rôle "à l'ancienne", de la même trempe qu'un Drakensang (sorti sur PC en mars 2009) avec qui il entretient d'ailleurs de nombreuses similitudes. A l'instar du titre de Radon Labs, il permet de diriger un groupe de quatre personnages (le vôtre, ainsi que trois compagnons à sélectionner parmi les alliés rencontrés), offre la possibilité de passer librement d'une vue aérienne plus tactique à une vue à la 3ème personne plus immersive et propose cette fameuse pause active permettant d'interrompre l'action pour passer des ordres aux membres de votre petite troupe (bouger, changer de cible, utiliser des compétences, se soigner...). On y retrouve aussi la même façon de se déplacer de zone en zone sur la carte du monde avec rencontres aléatoires à la clé, héritée de Baldur's Gate. Mais la comparaison s'arrête là, car si Drakensang noyait d'emblée le joueur sous sa complexité, notamment dans le domaine de l'évolution des personnages, Dragon Age : Origins prend le contre-pied de cette démarche en choisissant de ne distiller ses possibilités que de façon très progressive. L'objectif est simple : permettre au joueur de s'immerger pleinement dans l'histoire avant même de lui donner les clés (les mécanismes de jeu) qui permettront d'influer sur son déroulement.
Ce parti pris s'affiche dès la phase de conception de votre personnage : seules trois races (humain, elfe, nain) et trois classes (guerrier, mage, voleur) sont accessibles. Ce choix limité pourra paraître décevant aux yeux des puristes, qui bénéficieront toutefois de la possibilité de spécialiser leur avatar dès le niveau 7. Le secret, c'est que la combinaison race/classe choisie détermine le background du personnage, parmi six différents, ainsi que le scénario de départ qu'il vivra. Nous tairons pour l'instant la teneur de ces six prologues, qui sont l'occasion de quelques choix moraux et débouchent tous sur un tronc commun sur lequel ils auront quelques répercussions. Sachez toutefois que la trame principale est relative à l'irruption, dans l'univers de Férelden, de créatures souterraines nommées "engeances". Responsable des Gardes des Ombres, une confrérie légendaire qui a déjà repoussé une telle invasion par le passé, Duncan part à la recherche de nouvelles recrues qu'il sent capables d'affronter le rite d'initiation. Pendant ce temps, les engeances déferlent sur la cité d'Ostagar, qui organise ses défenses. Outre le choix de vos origines, la phase de création propose un éditeur plutôt complet qui permet de façonner physiquement votre personnage. Soignez son apparence vu qu'il apparaîtra dans les nombreuses cut-scenes du jeu.
Tout au long de leur progression, les personnages de votre groupe évoluent : vous améliorez leurs statistiques et leur choisissez de nouvelles compétences (discours, vol à la tire, herborisme, survie, stratégie... elles recouvrent des domaines variés et sont accessibles à tous) ainsi que de nouveaux pouvoirs spécifiques à leur classe. Ces derniers se structurent en plusieurs branches de sorts et de talents à la puissance croissante (les plus puissants nécessitant bien entendu les plus gros prérequis). Là où Dragon Age : Origins marque des points, c'est que chaque pouvoir trouve son utilité en combat, et que nombre d'entre eux sont tournés vers la synergie de groupe. Par exemple, votre guerrier peut renverser d'un coup de bouclier l'adversaire qui se dirigeait vers votre mage, tandis que ce dernier a la possibilité de canaliser un sort qui enflamme les épées de ses compagnons. De cette façon, les groupes bien équilibrés peuvent venir à bout d'opposants en surnombre. Cela donne lieu à des affrontements épiques qui figurent parmi les plus réussis jamais vus dans un jeu de rôle. Leur mise en scène, leur beauté formelle (le sang gicle, les armes s'entrechoquent), leur dynamisme et le challenge offert (pause active obligatoire dès le niveau de difficulté moyen) en font de purs moments de bonheur.
Si vous craignez que la pause active ne hache à l'excès les combats, un compromis vous permet d'en négocier la plupart en vous passant de cette option. Dragon Age : Origins vous propose en effet de paramétrer des scripts personnalisés pour chacun de vos compagnons, destinés à les rendre plus autonomes lors des affrontements (exemple : utilisation d'un cataplasme curatif quand la santé descend en dessous de 25 %). Plus un personnage passe de temps à vos côtés, plus il vous apprécie, et plus il bénéficie d'options tactiques. A ce sujet, et pour sortir du registre martial, notez que les motivations particulières de chacun des membres de votre groupe peuvent entrer en contradiction entre elles, voire avec les vôtres. Certains personnages peuvent ne pas s'apprécier, ou même ne pas apprécier vos choix, et vous le faire savoir. Vous devez alors veiller à ménager les susceptibilités, sachant qu'il vous est possible de leur offrir des cadeaux si leur jauge d'approbation décline de trop. Certains PNJ auxquels vous vous adressez réagissent différemment en fonction des membres de votre groupe. A côté de ça, Dragon Age : Origins n'oublie pas de proposer ces petites fonctionnalités très prisées des amateurs du genre. Des possibilités d'artisanat et d'enchantement d'équipement (plutôt simplistes il faut bien l'avouer) vous sont donc offertes.
Comme souvent dans les derniers jeux Bioware, combats et dialogues représentent l'essentiel du temps de jeu. L'exploration n'est pas laissée pour compte, mais les différentes zones de Férelden, fermées et relativement peu étendues, sont vite parcourues. On y trouve par contre un grand nombre de quêtes variées, d'un intérêt inégal. Certaines bénéficient d'une écriture solide quand d'autres semblent tout droit sorties d'un MMO. Mais c'est surtout grâce à son background original, loin des conventions de l'heroïc fantasy classique, et à ses thématiques modernes que le jeu se démarque. Ici, les elfes sont parqués dans des ghettos, les clans de nains agissent comme des mafias et les mages sont surveillés par l'inquisition. Il vous arrivera de croiser un tueur en série livré en pâture aux engeances, un forgeron prodige sommé par son associé de privilégier la quantité à la qualité, ou encore un mage victime d'Alzheimer suite à une surconsommation de potions de mana. Qui plus est, sexe et violence seront également de la partie. Riche, crépusculaire, adulte, décalé et immersif, l'univers de Dragon Age : Origins est donc particulièrement séduisant. Dommage qu'on ne puisse pas en dire autant de la réalisation, assez inégale et plutôt quelconque dans l'ensemble, qui souffre des retards de développement qu'a connus le projet.
Rien toutefois qui suffise à entamer notre envie de plonger plus avant dans ce qui s'annonce comme un grand jeu de rôle. Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, Dragon Age : Origins sera – ô joie ! – fourni avec un éditeur de modules comme Neverwinter Nights en son temps. Il ne vous reste plus qu'à faire preuve d'un peu de patience, sachant que l'attente ne devrait plus être très longue !