Engrangeant les pesos depuis des années sur le dos de ce pauvre Sherlock, Frogwares continue à nous abreuver d'aventures plus ou moins réussies sur des supports divers et variés. Cette fois, c'est la Nintendo DS qui a droit à son propre épisode du nom de Sherlock Holmes DS. Youpi, vociférera l'amateur éclairé... Avant de se rendre compte qu'il s'agit ici d'un portage vite fait mal fait de Sherlock Holmes : Le Mystère de la Momie sorti en 2002 sur PC.
Plutôt que de se triturer les méninges afin de proposer une aventure inédite aux possesseurs de DS, Frogwares choisit la voie de la facilité en portant la cuvée 2002 de Sherlock Holmes PC sur la portable de Nintendo. Un choix des plus discutables surtout quand on sait qu'à la base, la version d'origine était loin d'être respectable. Quoi qu'il en soit, on devra se contenter de cet état de faits qui voit le sieur Holmes dépêché par sa cousine Elisabeth Montcalfe pour retrouver le père de cette dernière. Ni une, ni deux, Sherlock s'engouffre dans un cab, saute dans un train et se retrouve, passée une cinématique, dans le manoir du disparu, féru de mythologie égyptienne. Et c'est là que tout bascule.
La première impression que nous donne le jeu tient en trois syllabes : déception. Tout commence par le rendu visuel qui semble figé dans une époque où on s'extasiait devant des titres proposant des graphismes en 32 couleurs. Vous pourrez certes arguer du fait que la DS n'est pas ce qu'on peut appeler une bête de course mais dans le cas présent, on sent bien que les développeurs n'ont fait aucun effort aussi bien pour ce qui est des écrans de jeux manquant de lisibilité et de peps que pour les cinématiques terriblement "usagées". L'autre souci technique, synonyme de son crachotant durant lesdites cinématiques, agresse véritablement nos esgourdes, même en baissant le volume sonore de la machine. Heureusement que les quelques commentaires audio de Sherlock passent mieux même si ici on reprochera un doublage anglais assez maladroit bien moins convaincant que son homologue français des derniers titres de Frogwares. Pour rester dans les personnages, difficile également de légitimer l'absence de Watson, parti en vacances (sigh), et du très faible nombre de personnages gravitant autour du détective. En somme, on sent bien qu'à nouveau la solution de facilité a été privilégiée d'autant que le titre se rapproche bien plus d'un jeu de réflexion que d'un jeu d'aventure.
En effet, le jeu étant découpé en chapitres, vous n'aurez de cesse de passer d'une pièce à l'autre pour dénicher des objets afin de résoudre quelques énigmes, logiques et donc relativement simples. Cependant, on regrette parfois qu'il faille automatiquement effectuer une action avant une autre pour résoudre un puzzle. Par exemple il sera à un moment impossible de mettre du bois avant un chiffon dans un poêle afin d'allumer un feu. Limité et agaçant. Heureusement, pour les moins alertes ou les plus fainéants d'entre vous, cette version DS comprend une aide évolutive composée de plusieurs indices vous permettant de connaître la solution de chaque énigme. A n'utiliser qu'en dernier recours à moins de vouloir sacrifier la durée de vie sur l'autel de la paresse. Le hic c'est qu'on a souvent tendance à utiliser cette aide salvatrice sachant que la jouabilité n'est pas vraiment à la hauteur. Si on visualise rapidement les objets dans notre inventaire, situé dans l'écran du haut, qu'on peut les manipuler facilement, on peste souvent contre les déplacements assez poussifs nous demandant de cliquer, via le stylet, sur un bord de l'écran pour tourner la caméra puis d'avancer en cliquant à nouveau sur le curseur. A signaler que ce dernier se trouve être de nature polymorphe en fonction des actions à effectuer (avancer, regarder, examiner...). Pour l'anecdote, les plus observateurs remarqueront que la pipe que tenait le curseur dans la version d'origine a purement et simplement disparue sur Nintendo DS. Non politiquement correct mon fils !
Finalement, il est regrettable que Frogwares n'ait pas pris un peu plus de temps pour nous adapter des épisodes autrement plus intéressants tel Sherlock Holmes et la Nuit des Sacrifiés pour ne citer que ce dernier. Au lieu de ça, on se retrouve avec un soft qui a terriblement mal vieilli tant dans ses mécaniques de jeu que dans son scénario digne d'un épisode bas de gamme de Scooby-Doo comme le disait si justement Jihem lors de son test. Dans tous les cas, le scénario est loin d'être à la hauteur des ouvrages de Sir Arthur Conan Doyle, le sentiment de solitude nous étreignant du début à la fin de l'enquête. Il est sympathique que les développeurs aient essayé de rendre leur jeu le plus accessible possible, notamment grâce à l'aide, mais au final, on voit mal comment un joueur passionné d'énigmes et d'aventure pourrait hésiter ne serait-ce qu'une seconde entre ce Sherlock Holmes DS et les excellents Runaway : The Dream of the Turtle ou Hotel Dusk : Room 215. La passion pour le détective anglais pourrait ici faire la différence, oui, c'est certain mais pas nécessairement à l'avantage du titre qui nous intéresse aujourd'hui.
- Graphismes9/20
Les cinématiques dénotent clairement une adaptation de jeu sorti il y a de nombreuses années. Néanmoins, on aurait presque envie de dire qu'elles ne sont pas si vilaines que cela par rapport aux "graphismes 32 couleurs" synonymes d'une visibilité toute relative.
- Jouabilité12/20
Le fait de pouvoir rapidement ouvrir l'inventaire ou l'aide, par une pression sur les boutons L et R, apporte une certaine souplesse tout comme le fait de pouvoir utiliser, à l'aide du stylet, un curseur multifonction selon les actions à effectuer. Maintenant, on déplorera des déplacements assez poussifs nous demandant de constamment cliquer sur le bord de l'écran pour tourner. Il eut été plus simple de mettre à profit la croix de direction pour le faire, plutôt que d'associer cette dernière au déplacement du curseur.
- Durée de vie9/20
Cet épisode demeure bien plus accessible qu'un Sherlock Holmes contre Arsène Lupin, véritable presse-cervelle. Toutefois, retenez bien que ce titre tient plus du jeu de réflexion que du jeu d'aventure et qu'il conviendra d'utiliser à bon escient l'aide évolutive synonyme de solution complète.
- Bande son9/20
Le son crachotant durant les cinématiques est insupportable et le doublage anglais ne convient pas vraiment au personnage de Sherlock. De plus, la gamme de bruitages est extrêmement limitée tout comme les musiques, collant à l'univers mais plutôt discrètes.
- Scénario9/20
Un scénario limité de par l'absence de personnes à interroger ou tout simplement celle de votre acolyte de toujours, Watson. Le sentiment de solitude est donc assez dérangeant car s'il sied au détective taciturne, il implique pour le joueur une sorte de vide abyssal.
Adapter un Sherlock Holmes sur DS était une bonne idée, adapter un mauvais Sherlock Holmes sur DS l'était déjà moins. Daté, mal adapté, et ressemblant davantage à un jeu d'énigmes qu'à un vrai jeu d'aventure, cet opus souffre également de la comparaison avec des titres comme Runaway : The Dream of the Turtle ou Hotel Dusk : Room 215, bien plus intéressants. Quant à la question de l'acheter ou non, inutile de vous dire que la réponse est des plus élémentaires.