Nous n'attendions pas spécialement Memento Mori, jusqu'à ce que le bougre pointe le bout de son nez dans une version preview en janvier dernier. Pleine de promesses, cette dernière a su attirer notre attention sur ce titre développé par le studio tchèque Centauri Production. Au final, cette aventure mérite-t-elle vraiment le détour ? C'est ce que nous allons voir.
Dans Memento Mori, vous incarnez tour à tour deux personnages. D'un côté, il y a Larisa "Lara" Svetlova, une Russe qui travaille à Lyon pour le compte d'Interpol. Elle est spécialisée dans le trafic d'oeuvres d'art : vols et copies de tableaux n'ont plus de secrets pour elle. De l'autre côté, il y a Max Durand, un faussaire français repenti. Ce duo improbable est amené à enquêter sur une intrusion dans le musée de l'Ermitage de Saint-Pétersbourg, sous la pression du vil colonel Ostankovic, responsable de la protection du patrimoine culturel russe et accessoirement ancien supérieur de Lara. Une investigation qui va conduire nos héros au Portugal, en Ecosse et en Finlande, sur les traces d'une mystérieuse société secrète (mais quelle société secrète n'est pas mystérieuse ?).
Cette histoire est un des points forts de Memento Mori. Certes, le rythme est assez lent, mais on se laisse facilement prendre par la succession des événements. De plus, elle est servie par des dialogues de qualité, dans l'ensemble bien doublés en français. Notez que la plupart des personnages parlent d'ailleurs un français impeccable (sans accent), même s'ils sont d'origine russe. A Lisbonne en revanche, les habitants parlent bien portugais, dépaysement garanti ! Ce mélange est un peu curieux, mais on s'y fait, c'est toujours mieux que les interprétations caricaturales auxquelles le genre nous a trop souvent habitués. Toujours à propos des dialogues, sachez qu'ils ne vous laissent pas choisir entre plusieurs répliques prédéfinies, comme souvent, mais plutôt entre différentes attitudes à adopter : positive, négative ou interrogative. On ne peut pas dire que ça bouleverse vraiment les choses, même si certains choix auront une influence sur la fin. En effet, Memento Mori propose plusieurs dénouements, en fonction de quelques actions optionnelles réalisées au cours de l'aventure. Pas de réels embranchements donc, la trame reste linéaire, mais ces conclusions multiples n'en demeurent pas moins appréciables, car le jeu souffre par ailleurs d'une durée de vie un peu faible.
Ce problème de longueur tient surtout dans la grande facilité du gameplay. Classique, celui-ci vous demandera d'effectuer les traditionnelles collectes et associations d'objets. Vous trouverez aussi une énigme requérant de trouver un code, une autre nécessitant le calibrage d'un appareil sophistiqué, etc. En bons adeptes des nouvelles technologies, nos deux protagonistes disposent d'ailleurs de téléphones portables et d'ordinateurs pour les aider dans leurs recherches. Quoi qu'il en soit, vous ne bloquerez jamais bien longtemps sur un problème. Ou alors, ce sera pour une mauvaise raison : une certaine rigidité du gameplay. Memento Mori est de ces jeux qui ne tolèrent pas la moindre petite entorse au schéma précis établi par les développeurs. Prenons un exemple pour être plus concret. Dans la bibliothèque de Saint-Pétersbourg, vous devez trouver un livre et l'apporter à un vieil homme. Armé d'un indice et du registre, vous parvenez à en déduire quel est le bon ouvrage. Las, Max refuse toujours de l'amener. Car si vous, joueur, savez, lui ne sait pas ! Il faut en fait associer le bouquin et le registre pour que ça fasse tilt et qu'enfin il comprenne.
Néanmoins, il faut admettre que ce genre de situation est rare. De façon générale, les énigmes sont logiques et le gameplay apporte tout de même satisfaction. Les amateurs de réflexion devraient y trouver leur compte. Autre élément de satisfaction, la réalisation très correcte, aussi bien sur le plan musical que graphique. Les différents lieux traversés possèdent tous une atmosphère réussie. Il y a bien quelques décors qui manquent un peu de vie, quelques visages un peu anguleux, mais ce serait vraiment chercher la petite bête que de reprocher ça à Memento Mori. Au final, cette nouvelle aventure signée Centauri Production ne démérite pas, notamment grâce à son scénario bien ficelé. Il ne s'agit certainement pas du jeu d'aventure de l'année, mais si vous êtes fan du genre, vous pouvez la tenter sans grand risque d'être déçu. Avant de craquer, vous pouvez toutefois télécharger la démo française, elle vous donnera un bon aperçu du jeu.
- Graphismes15/20
Clé de voûte de tout point'n click qui se respecte, les décors sont soignés, avec pas mal de détails et une belle gestion de la lumière. Pour ne rien gâcher, les environnements sont variés selon que l'on soit en Russie, au Portugal ou en Ecosse. Les personnages sont globalement bien modélisés, on note en revanche une certaine rigidité dans leurs expressions faciales.
- Jouabilité14/20
Les fondamentaux du gameplay sont archi-classiques : trouver des objets, les combiner, résoudre des énigmes... Memento Mori tente tout de même d'innover par petites touches, avec son système de dialogues ou sa caméra secondaire qui se focalise parfois sur un détail, mais ça ne change pas vraiment une recette qui a fait ses preuves. Restent quelques cheminements énervants de rigidité, heureusement rares.
- Durée de vie11/20
L'aventure est découpée en 18 actes, assez courts pour la plupart, d'autant que la progression est fluide vu le peu de difficulté. Du coup, ce secteur est le principal point faible de Memento Mori. Reste l'argument des fins différentes, mais elles ne s'obtiennent pas via des embranchements alternatifs, seulement en réalisant quelques actions facultatives. Pas vraiment de quoi se motiver à recommencer...
- Bande son14/20
Le thème principal est une plainte lancinante jouée au piano, fort réussie, qui nous plonge immédiatement dans l'ambiance. Sans être aussi inspirées, les autres musiques sont plutôt correctes dans l'ensemble. Quant au doublage français, il est d'honnête facture, même si quelques répliques auraient mérité des intonations plus convaincantes.
- Scénario14/20
Bien construit, le scénario nous emmène au coeur du milieu artistique, à travers plusieurs villes européennes. Malgré un rythme assez lent (habituel dans le genre), l'histoire se laisse suivre sans déplaisir. Enfin, bien que la trame soit parfaitement linéaire, elle réserve plusieurs dénouements, du classique happy end à des fins beaucoup plus tragiques.
Memento Mori est une bonne surprise, dans le sens où nous ne l'attendions pas vraiment. Il ne figurait d'ailleurs pas dans notre catégorie "aventure" des jeux les plus attendus de 2009. Et pourtant, le titre développé par Centauri Production a des arguments à faire valoir, en particulier son histoire. En attendant des "poids lourds" comme Secret Files 2 ou Runaway 3, Memento Mori représente donc un investissement envisageable pour les fans d'enquêtes, et augure bien pour l'avenir du studio, qui planche déjà sur un autre projet baptisé Alternativa.