Le puzzle-game n'est pas un art facile et ne développe pas un Tetris ou un Meteos qui veut : c'est un peu l'épilogue de plusieurs longues séances de jeu sur Dropcast. Dans le genre, la réussite d'un titre se mesure souvent à l'évolution de sa courbe d'intérêt : passée une phase d'apprentissage plus ou moins douloureuse durant laquelle vous tentez d'en comprendre la mécanique et d'en maîtriser les rouages les plus fins, le jeu peut alors délivrer tout son potentiel addictif. Rien de cela dans Dropcast, qui cumule suffisamment de lacunes et de maladresses pour que, tout en sachant pertinemment jouer, vous n'ayez jamais l'impression de maîtriser pleinement la situation. Vous perdez, mais sans savoir vraiment à quel moment vous avez fauté ; vous gagnez, mais sans pouvoir invoquer l'efficacité de votre "skill". Du coup, vous enchaînez les parties sans grande conviction.

Sachez tout de même que Dropcast, qui vous invite à tenir votre DS à la verticale, inclut deux modes de jeu : La Malédiction d'Ingrid et Bataille Royale. Jouable en solo uniquement, le premier vous propose d'aider Ingrid à se divertir en constituant le plus grand nombre possible de lignes sur l'écran de gauche (elle est comme ça, Ingrid...). Pour cela, rien de plus simple. Vous disposez sur l'écran de droite d'un certain nombre de blocs de couleurs différentes, que vous pouvez casser par groupes de deux ou plus. C'est en supprimant stratégiquement les petits groupes mal disposés ou de couleur minoritaire que vous parvenez à assembler de gros groupes de blocs de même couleur. Lorsque six blocs ou plus sont appareillés, ils se surlignent, signe qu'ils seront envoyés sur l'écran de gauche lorsque vous les casserez de la pointe du stylet (c'est ce que le jeu appelle "lancer un sort"). La double subtilité tient à la forme sous laquelle vous allez les renvoyer, ainsi que l'endroit exact où ils atterriront. Et là, ça se complique, alors essayez de vous montrer un peu plus attentif que vous ne l'avez été jusqu'à présent !

Commençons par la forme : c'est une icône située en haut de l'écran qui vous indique en permanence le motif que prendront les blocs supprimés : en ligne, en colonne, en T... (la forme active change toutes les 15 secondes selon une rotation aléatoire). Ne comptez pas attendre patiemment la forme de vos rêves, sachant que de nouvelles rangées de blocs apparaissent constamment sur l'écran de droite, vous poussant inexorablement vers le haut, et a fortiori vers le game over. Sachez par ailleurs que c'est le bloc que vous touchez pour détruire un groupe qui détermine le lieu d'atterrissage dudit groupe sur l'écran de gauche : si, par exemple, vous touchez un bloc situé dans la colonne à l'extrémité droite de l'écran, le groupe détruit atterrira dans la même colonne sur l'autre écran. Le système aurait été judicieux si les deux écrans de jeu avaient été positionnés l'un au-dessus de l'autre (il aurait suffi de lever les yeux pour estimer le point de chute). Problème : Dropcast propose justement une tenue verticale de la DS qui anéantit toute velléité de visée précise. Incompréhensible !

Si vous réussissez tout de même à former des rangées de blocs sur l'écran de gauche, celles-ci disparaissent alors dans un nuage de fumée, vous créditant au passage d'un certain nombre de points (constituer des lignes de même couleur ou plusieurs lignes à la fois rapporte davantage de points). Il vous faudra pour cela compter sur la chance bien plus que sur un éventuel savoir-faire. Certains pourront arguer que la difficulté consiste précisément à composer d'une part avec les formes imposées et d'autre part avec l'incertitude du point de chute. Mais l'impossibilité de développer de véritables stratégies, couplée à une part d'aléatoire trop importante, rend la progression diablement frustrante (pour peu que l'on puisse encore parler de progression). D'autant que bien souvent, lorsque vous vous rapprochez du haut de l'écran et que la panique commence à vous envahir, il vous suffit de tapoter frénétiquement l'écran pour vous donner de l'air. Cette technique fonctionne trop bien et donne lieu à des parties parfois exagérément longues, surtout dans le mode Bataille Royale que nous allons évoquer à présent.

Bien que la jouabilité y soit à-peu-près identique, ce second mode de jeu vous met dans la peau de peluches aux tendances psychopathes, dotées de sorts spécifiques qu'elles utilisent pour s'affronter. L'écran de gauche appartient à votre adversaire ; l'objectif n'est plus d'y former des lignes mais d'y envoyer le plus de blocs possible afin de le submerger, sachant qu'il tentera de vous faire subir le même sort. Dans ce mode, plus de forme à gérer, mais différents types de sorts à lancer en fonction du personnage incarné (il y en a huit à débloquer au fil de vos victoires) mais aussi en fonction des symboles dessinés sur les blocs à appareiller. Certains sorts envoient des blocs morts, d'autres rendent les blocs touchés inactifs, d'autres encore les détruisent ; il existe également des sorts de parade, servant à contrer ceux de l'adversaire, ainsi que des coups spéciaux consistant à masquer son écran l'espace de quelques secondes. Ces sorts ont beau apporter une touche de folie plutôt bienvenue, ils n'en restent pas moins impuissants à relever une sauce qui a du mal à prendre en raison des défauts rédhibitoires mentionnés plus hauts.

Pour ne rien arranger, l'option multijoueur disponible permet seulement de jouer en local (avec une ou plusieurs cartes) : pas de jeu en ligne possible contrairement à un Tetris DS. Cette option aurait pourtant donné à l'acquéreur de Dropcast l'assurance de trouver un adversaire, ce qui n'aurait pas été un luxe vu le probable insuccès du titre.