Après avoir fait un sinistre petit détour sur Wii pour tenter d'y monter sa propre chaîne de fast-foods, Crypto, alien teigneux et avide de cerveaux humains, s'attaque maintenant à la PS3 et la Xbox 360. Et si ses précédentes aventures ne sont pas restées dans les annales (à part pour quelques terriens malchanceux), elles eurent tout de même le mérite de divertir les joueurs et de leur offrir quelques heures de rigolade. Hélas, ce nouvel opus, malgré de bonnes intentions et un univers toujours aussi décalé, s'effondre douloureusement à cause d'une réalisation datée et d'un gameplay qui commence à sentir le renfermé.
Comme les fans le savent indubitablement, chaque épisode de Destroy All Humans ! s'inspire d'une période précise de notre belle histoire terrienne. Ce dernier volet ne fait pas exception et nous entraîne en plein coeur des seventies, alors même que le monde découvrait avec bonheur le disco, le reggae, les pantalons pattes d'eph' et que les citoyens américains s'insurgeaient volontiers contre le prix du gallon d'essence. C'est dans ce contexte très particulier que notre fier Crypto fait son grand retour et qu'il s'apprête à semer le chaos pour ce qui aurait pu être notre plus grand plaisir. Le bougre a en fait passé les dix dernières années de sa vie à Las Paradiso, lieu de perdition pour les joueurs et les personnes de peu de vertu. Crypto a ouvert un casino pour voler leur argent et leur ADN aux pitoyables terriens que nous sommes. C'est ainsi que la première partie du jeu voit notre teigne préférée tenter de réduire à néant les efforts de concurrents locaux, de sinistres caricatures de mafieux. Mais la suite prend une toute autre dimension alors que des guerriers Nexos issus de sa galaxie natale débarquent pour tenter de lui faire la peau.
Conspiration intergalactique, massacre d'humains à pied ou en soucoupe volante, missions complètement barrées, armement débile, tout semble là pour nous divertir dans une aventure qui nous fera mettre à sac des villes virtuelles librement inspirées de nos fières cités : Las Paradiso, Sunnywood, Shen Long, Paris, puis enfin Furon, la planète de Crypto. Mais si tous les éléments qui faisaient le sel des précédents volets sont là, pourquoi parler de déception lorsqu'on cherche à qualifier ce nouvel épisode ? Commençons par le plus évident, même si ce n'est pas foncièrement ce qu'il y a de plus significatif, en d'autres termes : la réalisation. En Route vers Paname accuse quelques années de retard sur les productions actuelles. Et si on peut à la rigueur passer sur le monstrueux clipping, les textures immondes, la modélisation sommaire et l'aliasing omniprésent, puisqu'au fond, les précédents jeux restaient agréables malgré leur faiblesse technique, on ne pardonnera pas à ce nouvel épisode ses nombreuses saccades et ses bugs récurrents. Un jeu peut être moche mais jouable, or ce n'est pas vraiment le cas d'En Route vers Paname qui tend à cumuler tous les défauts de la création, au point d'en devenir vraiment frustrant.
Pour le reste, le principe du jeu s'avère fondamentalement semblable à celui des précédents opus. Le but consiste toujours à effectuer un certain nombre de missions absurdes tout en découvrant de nouvelles armes et de nouveaux pouvoirs puis en améliorant ceux qui sont déjà en notre possession. Ici, on pourra donc partir explorer les environs en jetpack avant de faire virevolter passants et éléments du décor par la simple force de l'esprit. On aura également la possibilité de scanner les cerveaux des terriens pour en extirper les plus intimes pensées, avant de tenter d'entrer dans leur corps pour passer inaperçu. Pour vous aider à semer le chaos en ville et pour récolter plus d'ADN (synonyme d'améliorations), vous disposerez en outre d'un blaster électrique, d'un Désintégrateur, du traditionnel lanceur de sondes anales, d'un Détonateur à Ions, d'un Dislocateur destiné à propulser ce qui se trouve sur votre chemin dans les airs et même d'un fusil capable de faire intervenir une plante carnivore géante... L'arsenal est sympathique mais ne surprendra absolument pas les fans de la première heure.
Bref, on éprouve un plaisir malsain à martyriser la populace en début de partie, mais lorsqu'il faut recommencer la même chose plusieurs fois dans des villes qui finalement, ne sont pas si différentes que ça (en dehors de leur apparence globale), la lassitude finit immanquablement par s'installer. D'autant que les missions, même si elles apparaissent rigolotes dans un premier temps, ne s'avèrent finalement pas très intéressantes ni très inspirées. Même constat pour les rares challenges secondaires à tenter dans chaque zone, qui se contentent généralement de recycler les vieux concepts de course contre le temps ou de collecte d'objets. Pour corser l'addition, sachez que le jeu souffre beaucoup de ses cinématiques poussives, de ses doublages français plus que moyens et de ses pitoyables conversations lors desquelles on nous demande de choisir la réplique suivante parmi une petite sélection de possibilités. Les trois quart du temps, cette méthode aboutit à quelque chose de totalement incohérent et de franchement indigeste. Au final, l'ambiance en prend un sacré coup et le soft perd donc une grande partie de son attrait. Terminons enfin par un tout petit mot sur le multijoueur, un multi qui se limite ici à trois modes de jeu sans âme à pratiquer en écran splitté. En somme, Destroy All Humans ! En Route vers Paname débarque sur le marché en étant totalement brut de décoffrage. Le soft fait plus office d'ébauche que de titre complet et abouti. Il délivre occasionnellement quelques doses de fun mais ne vaut pas d'être acheté au prix fort.
- Graphismes7/20
Destroy All Humans ! En Route vers Paname ! accuse véritablement tous les défauts de la création. Clipping monstrueux, aliasing très prononcé, gestion des collisions catastrophique, saccades récurrentes, modélisation sommaire, textures nées d'un autre âge... La liste est longue. Pourtant, malgré tous ces reproches, le jeu parvient occasionnellement à plonger le joueur dans une ambiance affreusement kitch et décalée.
- Jouabilité12/20
Les grands principes avancés par ses aînés sont repris à l'identique dans ce nouveau volet. L'interface est donc suffisamment bien conçue pour que l'on ne se perde pas dans les nombreux gadgets de Crypto. En revanche, le gameplay reste très approximatif et l'impression de liberté relativement trompeuse, compte tenu du faible nombre de missions. Les rares ajouts, comme celui des fausses conversations à choix multiples, ne convaincront personne.
- Durée de vie13/20
Si vous êtes du genre à remuer ciel et terre pour dénicher tous les objets cachés, vous devriez pouvoir rester une douzaine d'heures en compagnie de ce bon vieux Crypto. Ceux qui ne visent qu'à expédier la trame principale tourneront davantage autour de huit heures de jeu. Le multijoueur se limite quant à lui à trois modes assez quelconques.
- Bande son10/20
Pas de version anglaise dans ce nouveau volet. Tout a été remplacé par des voix françaises assez moyennes même si quelques répliques et accents caricaturaux sont bien retranscrits. Certains bouts de conversations ne sont même pas doublés, que cela soit en anglais ou en français. Dans l'ensemble, l'humour passe beaucoup moins bien que dans les anciens volets. Restent des musiques et des bruitages bien kitch qui renvoient aux vieux films de SF.
- Scénario11/20
La trame principale repose sur des missions étrangement liées qui n'ont pas su conserver la saveur des deux premiers opus. On a néanmoins plaisir à découvrir les dernières aventures du cruel Crypto, encore perdu dans une histoire aussi débile que la moindre de ses répliques.
Le renouveau de la série ne se fera pas avec ce volet. Décevant par sa technique autant que par son gameplay qui sans être catastrophique, n'apporte rien de vraiment marquant à la formule initiale, Destroy All Humans ! En Route vers Paname ! prend surtout des airs de soft incomplet, sorti à la va-vite par une équipe volontaire mais sans grandes idées et sans trop de moyens. En dépit de tous ses défauts, le jeu parvient occasionnellement à distraire et ne mérite donc pas d'être totalement méprisé. Pour autant, difficile de le recommander à l'achat, une location serait probablement bien plus indiquée.