Les FPS ne se bousculent pas au portillon en ce début d'année. C'est pourquoi on ne crache pas sur l'arrivée d'un nouveau représentant du genre, tout droit venu de l'est. Surtout quand il revendique une parenté avec un certain Painkiller. Avec ses tranchées de la Première Guerre mondiale infestées de zombies, NecroVisioN parviendra-t-il à supplanter le hit de People Can Fly dans le coeur des bourrins ? Tentative de réponse.
La Première Guerre mondiale, voilà une période peu usitée dans les jeux vidéo. C'est pourtant le contexte qu'a choisi The Farm 51 pour placer l'action de NecroVisioN, son premier projet. En deux mots, vous incarnez Simon Bukner, un yankee venu trouer la peau de quelques boches en Europe. Mais le conflit qui fait rage sur le vieux continent a des conséquences plus terribles que prévu : la poussière des combats a plongé la planète dans la pénombre, tandis que le méchant Zimmerman réveillait des puissances occultes enfouies dans les profondeurs de la terre au prix d'expériences atroces. Notre brave Texan se retrouve donc à lutter contre une horde de zombies et autres créatures démoniaques. En cela, NecroVisioN rappelle effectivement Painkiller, qui nous invitait à trucider les légions infernales de Lucifer.
Les deux jeux sont toutefois bien différents dans leur manière de raconter l'histoire. Painkiller se contentait d'un fil conducteur aussi mince qu'une ficelle de string, tout juste évoqué de temps à autre par une cinématique. NecroVisioN fait le pari d'une narration plus aboutie, avec de nombreuses cut-scenes qui interviennent au beau milieu des niveaux. Etait-ce bien nécessaire pour un jeu d'action de la sorte ? Non seulement ça casse un peu le rythme, mais les doublages français ne sont pas du tout à la hauteur, avec des accents anglais et allemands parfaitement ridicules. Sans compter que certains dialogues sont assez surréalistes dès la phase d'écriture... Seul le héros s'en sort, avec une voix correcte et quelques répliques bien senties. Un bouton est d'ailleurs dédié uniquement à la fonction de provoquer par le biais de petites phrases rigolotes. Au final, on ne sait trop quoi penser de ce scénario (dont certains pans sont également dévoilés au travers de lettres à dénicher). Parfois involontairement comique, il donne un peu l'impression d'un nanar... Un second degré plus assumé, ou au contraire une atmosphère sombre sans concession humoristique, auraient probablement été préférables à ce curieux mélange.
Quoi qu'il en soit, l'ambiance est tout de même au rendez-vous, en grande partie grâce à l'aspect graphique du titre. Pourtant, le moteur de Painkiller a pris un sacré coup de vieux d'un strict point de vue technique. NecroVisioN en fait les frais et accuse clairement un certain retard sur les FPS sortis ces dernières années, en termes de finesse et de niveau de détails. Mais qu'est-ce qu'un moteur 3D sans le talent des artistes ? C'est là que The Farm 51 fait fort, en parvenant à créer un univers vraiment immersif. Des tranchées jonchées de cadavres aux mondes souterrains, d'un laboratoire secret aux ruines désolées d'un village gazé, le studio nous offre des environnements visuellement superbes, qui confèrent à NecroVisioN une forte personnalité. Les ennemis ne sont pas en reste, formant une galerie de monstres du plus bel effet. Malgré tout, sachez que le jeu souffre de temps de chargements longuets, même pour ceux dits "rapides" qui interviennent après une mort (dans une moindre mesure heureusement). Pour clore ce chapitre, signalons également que les possesseurs de machines DirectX 10 trouveront en NecroVisioN un des rares jeux tirant parti de cette technologie pour afficher quelques bricoles supplémentaires.
Maintenant que les présentations sont faites, voyons plus précisément ce que NecroVisioN a dans le ventre. C'est en se penchant sur son gameplay qu'on constate les plus grandes différences avec Painkiller, rien qu'au niveau des mouvements pour commencer. La vitesse de course de Simon Bukner semble plus faible que celle de Daniel Garner. Il s'épuise quand il sprinte, se prend les pieds dans le moindre obstacle (mauvaise gestion des collisions ?), et la plus petite montée le ralentit considérablement... Bref, il est impossible d'accélérer en sautant partout comme un lapin, d'autant que les niveaux sont généralement plus tortueux et cloisonnés que les vastes arènes offertes par Painkiller. NecroVisioN perd donc l'aspect "fast FPS" qui faisait le charme de son illustre modèle à cause de ces déplacements un peu mous du genou.
Soyez rassuré, cette relative mollesse des déplacements n'enlève rien à la fureur des combats. Là encore, NecroVisioN se démarque en proposant un système original, basé sur l'accomplissement de combos au corps-à-corps. Décapitation à la pelle, éviscération à la baïonnette, décérébration au fusil à pompe... Les affrontements sont particulièrement violents. Les combinaisons possibles sont nombreuses, mélangeant tirs et attaques de mêlée (coups de pieds, de crosse...). Ces combos font monter une jauge d'adrénaline, qui permet de déclencher un ralentissement du temps pendant quelques secondes. Réaliser des enchaînements augmente également le niveau de furie, qui attribue des pouvoirs spéciaux plutôt sympathiques. En parlant de pouvoirs, vous pourrez aussi lancer des boules de feu et même ressusciter les morts dans la seconde partie du jeu, après avoir récupéré la Main d'Ombre, "l'arme ultime des Nécromanciers" (sic). Le reste de l'arsenal est plus classique mais pas moins jouissif à utiliser. Dès le premier niveau, lorsqu'on récupère une mitrailleuse lourde dans chaque main, on comprend qu'on a affaire à un titre délicieusement bourrin...
Au final, ce système de combat fonctionne bien et constitue un des principaux atouts de NecroVisioN, avec son atmosphère apocalyptique. Néanmoins, le titre de The Farm 51 n'est pas parfait. Au cours de notre voyage dans l'enfer des tranchées, nous avons constaté quelques bugs, comme la disparition du HUD ou, plus gênant encore, le non-déclenchement d'un script pourtant indispensable à la bonne conclusion d'un niveau... Mais on veut bien pardonner ce léger manque de finition aux développeurs, car ils ont par ailleurs su faire preuve d'imagination. Citons ainsi une dernière bonne idée du titre : les salles de défis. Ces arènes spéciales vous proposent quelques challenges comme tuer 100 zombies au lance-grenades en 2 minutes 30, ou faire 50 headshots dans le même laps de temps, etc. Assez fun, ces missions bonus permettent en plus de gagner des armes de façon définitive. Ca remplace un peu le système de Tarot Noir de Painkiller. Terminons en évoquant le multijoueur, nettement moins inspiré. Il ne propose que des modes archi-classiques (deathmatch, capture d'item...) sur une douzaine de cartes. Ca ne devrait pas enthousiasmer les foules outre-mesure.
- Graphismes14/20
Avec NecroVisioN, The Farm 51 nous offre une belle vision de l'enfer de la Première Guerre mondiale. Malgré un manque flagrant de polygones, les différents décors traversés possèdent leur charme, grâce à une palette de couleurs bien choisie et quelques chouettes effets. Le bestiaire est à l'avenant. Dommage que les temps de chargements soient si longs.
- Jouabilité15/20
Principale originalité de NecroVisioN, le système de combat "gun-jitsu" est une réussite, avec un arsenal dévastateur et des combos au corps-à-corps diablement fun à réaliser. Le jeu recèle quelques séquences qui varient agréablement l'action. On regrette toutefois les déplacements un peu lents et quelques bugs énervants.
- Durée de vie12/20
Comptez une douzaine d'heures pour terminer la campagne solo et les quelques chambres de défis. Mine de rien, c'est plus que beaucoup de FPS actuels... Par contre, il ne faudra pas trop compter sur le multi pour rallonger la sauce : avec des modes vus et revus et une poignée de cartes seulement, il n'y a pas vraiment de quoi s'emballer.
- Bande son12/20
Entre le bruit des armes, les hurlements des monstres et la musique, on peut dire que la bande-son soutient bien l'action, sans être un chef-d'oeuvre pour autant. Mais -car il y a un gros "mais"- le doublage français plombe l'ambiance avec ses accents caricaturaux au possible. Les développeurs de l'est ont encore des progrès à faire dans l'adaptation de leurs jeux en Occident...
- Scénario12/20
Saluons d'abord NecroVisioN pour son choix du contexte de la Première Guerre mondiale, très peu exploité en jeu vidéo. L'histoire elle-même n'est pas mauvaise, mais souffre d'un ton hésitant entre sérieux et humour. Quant aux cut-scenes bavardes impossibles à esquiver, elles ont tendance à hacher le rythme, ce qui n'est pas forcément bienvenu dans ce genre de FPS.
Tant par son univers que par son gameplay, NecroVisioN possède suffisamment de personnalité pour se défaire de son glorieux héritage. N'y cherchez donc pas le nouveau Painkiller, vous seriez déçu, le titre de The Farm 51 n'en possède pas la fougue. Cependant, il faut le prendre pour ce qu'il est, c'est-à-dire un FPS correct proposant une bonne dose d'action aux amateurs du genre. En période de disette, on ne dit pas non.