Après Soldiers : Heroes Of World War 2 et Faces of War, le studio ukrainien Best Way continue dans ce qu'il sait faire de mieux : de la tactique en pleine Seconde Guerre mondiale. Men of War, qu'on peut voir comme le troisième volet de la série, reprend donc à son compte la formule éprouvée de ses prédécesseurs. Du coup, il conserve les qualités qui ont fait le succès de Faces of War bien qu'il ne propose pas grand-chose d'original.
Men of War prône une approche tactique de la stratégie en temps réel. Pas de base à construire ni de ressources à récolter, juste des hommes à gérer. Et c'est déjà bien suffisant, car il y a fort à faire pour les maintenir en vie. D'où cet avertissement préalable : réfractaires à la micro-gestion, abstenez-vous. Pour apprécier Men of War, il faut aimer s'occuper finement de chaque unité. Certaines actions peuvent bien être réalisées de façon automatique (les soins par exemple), mais globalement c'est à vous, joueur, de tout faire pour mener à bien chaque mission. Des missions qui vous emmèneront en Europe, en Russie et en Afrique du Nord au cours de trois campagnes, selon que vous préfériez incarner les Allemands, les Soviétiques ou les Alliés. Les objectifs à accomplir sont variés et vous conduiront aussi bien à capturer une position qu'à défendre un train, infiltrer une ville ou libérer des prisonniers.
Une fois dans la bataille, quel que soit le but, vous voilà à la tête d'une poignée d'hommes et parfois de quelques véhicules. La première chose à faire est d'apprendre à se déplacer correctement, c'est-à-dire planqué. Men of War dispose d'un système de couverture très complet, puisque chaque obstacle ou presque peut servir de rempart, qu'il s'agisse d'un simple tronc d'arbre ou d'une carcasse de voiture. Attention toutefois, l'environnement est entièrement destructible. Le jeu consiste donc à se mouvoir d'un abri de fortune à l'autre pour parvenir à contourner l'adversaire. Comme souvent dans le genre, les soldats ont le choix entre trois postures : debout, agenouillé ou couché. Ces choix sont accessibles via une interface complète et plutôt bien fichue, à l'exception de quelques options bizarrement reléguées dans des sous-menus. Ainsi, demander un tir de suppression requiert deux clics successifs, pas vraiment pratique. Il vaudra mieux apprendre les raccourcis clavier pour être plus réactif. Notez que la fonction de contrôle direct fait son grand retour et vous autorisera à diriger en personne les mouvements et tirs d'une unité, ce qui est parfois très utile.
Un autre point important du gameplay de Men of War est la gestion des munitions. Chaque balle est comptabilisée, il faut donc veiller à se réapprovisionner de temps en temps. Pour cela, il n'y a pas de secret, la meilleure solution est encore de piller les cadavres. L'interface fait là quelques emprunts au hack'n slash, avec des touches permettant d'afficher en surbrillance les corps et les objets tombés au sol, et un inventaire découpé en cases pour ranger les armes. Best Way fait tout de même quelques concessions au réalisme dans ce compartiment du jeu, puisqu'il est tout à fait possible qu'un troufion se trimballe un fusil, deux mitrailleuses et dix grenades sans broncher. Surtout, les munitions sont compatibles d'une armée à l'autre : si vous manquez de balles pour vos mitraillettes soviétiques, celles des Allemands feront parfaitement l'affaire. Un choix compréhensible mais qui fera grincer quelques dents chez les simulationnistes les plus pointilleux...
Quoi qu'il en soit, Men of War fait quand même partie des STR exigeants. La difficulté, si mal conçue dans Faces of War où les explosions piquaient à peine, a été sérieusement revue à la hausse. Un obus fait enfin ce qu'il est censé faire : mal. Les rares véhicules sont donc à traiter avec tous les égards qu'ils méritent. S'ils appartiennent à l'ennemi, il faudra vite les détruire, ou mieux, les capturer. S'ils sont à vous, il est vital d'en prendre soin en les réparant du mieux possible. Comme les dégâts sont localisés, il est possible de continuer à tirer avec un blindé immobilisé par une chenille endommagée. En parlant des véhicules, sachez que le jeu propose un nombre de modèles assez conséquent. D'ailleurs, de manière générale, le contenu de Men of War fait plaisir à voir. Les STR de l'est nous avaient habitués à une certaine maigreur ces derniers temps (Warfare, 9ème Compagnie...). Mais Best Way ne se fout pas de la gueule des joueurs, avec une grosse vingtaine de missions, du coop, plusieurs modes multi intéressants et un éditeur de cartes.
Jusque-là, le tableau semble idyllique, mais Men of War contient aussi quelques tares. Notamment l'intelligence artificielle ennemie, qui est parfois suicidaire. Il faut voir une escouade d'infanterie foncer bille en tête sur un char, qui les massacre évidemment en quelques secondes au gros calibre. Notre version plantait régulièrement, nous obligeant à redémarrer le PC sans autre forme de procès. Et au final, Men of War donne tout de même une légère impression de "Faces of War ++". Certes, le nouveau titre de Best Way gomme quelques vieux défauts de la série, comme l'IA alliée et le moteur physique, enfin corrects. Mais en dehors de ces corrections, le titre se contente souvent de faire du copier-coller, jusque dans l'interface absolument identique à la précédente (mini-carte exceptée). Ce manque d'audace n'enlève rien à ses qualités : Men of War est sans conteste un bon jeu de stratégie. Les fans seront ravis de retrouver leurs marques avec un nouveau terrain de jeu (l'Afrique du Nord). Quant à ceux qui étaient passés à côté des anciens opus, ils feraient bien de jeter un oeil à celui-ci, ils pourraient bien repartir conquis.
- Graphismes15/20
Men of War prouve à ceux qui en doutaient qu'il est possible de faire des jeux de stratégie à la fois riches et beaux. La modélisation des décors et des unités est tout à fait convaincante, les effets de fumée et de reflets sont chouettes, c'est du beau travail. Attention tout de même, si vous poussez toutes les options à fond, il peut y avoir quelques ralentissements lorsqu'il y a beaucoup de monde à l'écran, et ce même sur un PC de jeu correct (Core 2 Quad 2,4 GHz, 2 Go de RAM, 8800 GTX).
- Jouabilité15/20
Du côté du gameplay pur, Men of War est un vrai régal, avec des possibilités stratégiques bien réelles. Déplacer ses hommes à couvert, choisir le bon angle d'attaque, savoir utiliser le tir de suppression tout en gérant les munitions... Les options sont nombreuses -et déterminantes. Le contrôle direct d'une unité est un vrai plus. Dommage que ce constat réjouissant soit un peu terni par quelques problèmes de jouabilité, comme l'IA ennemie pas toujours très fine, sans compter quelques fâcheux plantages.
- Durée de vie16/20
Aucun souci de ce côté-là, on en a pour son argent. Entre les trois campagnes jouables en coopération, les missions bonus et les différents modes multi, il y a de quoi faire. Men of War est même fourni avec un éditeur complet, on peut donc s'attendre à voir débarquer des créations de la communauté rapidement.
- Bande son12/20
Le doublage (anglais dans notre version) assure le service minimum, les musiques sont martiales comme il se doit et les bruitages s'avèrent plutôt bons.
- Scénario12/20
Les campagnes offrent un bon panel de ce que fut la Seconde Guerre mondiale, avec des missions et des environnements variés. Certains regretteront néanmoins la disparition du Pacifique au profit de l'Afrique du Nord. Best Way tente de nous faire vivre le destin de quelques soldats, mais la mise en scène des cinématiques est trop plate, difficile de s'attacher dans ces conditions.
Prenez Faces of War, corrigez-en quelques défauts, remplacez la campagne du Pacifique par celle d'Afrique du Nord, et vous obtenez Men of War. Ah, oui, et changez "Faces" par "Men" aussi, sinon ça ne marche pas. Bref, vous l'aurez compris, Best Way a fait preuve d'une certaine frilosité, préférant rester sur ses acquis plutôt que de tenter d'innover. Mais comme les acquis sont bons, on ne va pas trop les en blâmer. Malgré son classicisme, Men of War est un bon STR tactique, qui devrait offrir quelques belles heures aux passionnés du genre.