Quand je serai grand, je serai pompier ! Mais comme j'ai déjà 32 ans et que je commence à prendre de la brioche, je préfère jouer à Appels d'Urgence. C'est plus marrant et nettement moins risqué. Quoique...
Sniper et Anuman Interactive se sont associés pour nous proposer un nouveau jeu de gestion consistant à sauver des vies en danger. Éteindre un incendie, dégager un arbre tombé sur une voie ferrée lors d'une tempête, intervenir sur un accident de la circulation, venir en aide aux victimes d'un tremblement de terre... Les situations ont le mérite d'être variées. Appels d'Urgence s'inspire donc davantage de la série des Emergency que celle des Fire Departement puisqu'on n'y dirige pas que des soldats du feu. Les différentes missions impliquent l'intervention des autres services de secours : Samu, police, véhicules spéciaux... On peut même faire appel à des spécialistes des matières dangereuses ou encore à des brigades canines pour chercher les personnes enfouies sous les décombres. Jusqu'ici, tout va bien.
Pourtant, dès le début, les choses se gâtent. Le jeu ne propose qu'une série de huit missions à débloquer les unes après les autres. Huit petites missions qui se bouclent potentiellement en 10 à15 minutes chacune pour peu qu'on ait accompli la succession d'actions adéquates. Pourtant, la progression risque de se révéler aussi longue que fastidieuse. Quel est donc le secret de Appels d'Urgence ? Tout d'abord, il n'inclut aucun tutorial. Et comme la boîte de jeu ne contient pas de manuel, il faut aller chercher celui-ci à la racine du CD-ROM et s'acquitter de la lecture d'une vingtaine de pages en format pdf. On passe donc une bonne heure à jouer du alt+tab pour comprendre les mécanismes de jeu. Oh, ce n'est pas que ceux-ci soient très compliqués, ils sont même particulièrement simplistes. Mais l'interface absolument imbuvable n'arrange pas les choses. Prenons un exemple : l'action de base qui consiste à déplacer une unité (un pompier par exemple). Clic gauche sur l'unité pour la sélectionner, clic droit pour ouvrir le menu d'actions qui lui sont propres (chaque unité a une fonction et donc une palette d'actions particulière), nouveau clic gauche pour sélectionner l'action voulue, puis dernier clic sur le sol pour lui indiquer sa destination. Bref, une succession de quatre clics couplée à un passage par un menu contextuel, juste pour se déplacer. Vous pouvez désormais imaginer aisément le reste de la jouabilité.
Le joueur vit donc un calvaire comparable à celui de ses pauvres victimes, qui n'en vaut vraiment pas la chandelle. Le gameplay se résume en effet à accomplir la série d'actions nécessaire pour répondre à une situation donnée ; la stratégie n'y a pas sa place. Prenons un exemple : la troisième mission consiste à dégager un arbre tombé sur une ligne à haute tension. On se voit fournir pour cela des véhicules d'intervention et du personnel de secours non utilisés jusque-là. Vu qu'on ne sait pas du tout comment procéder, on passe son temps à tâtonner pour parvenir à accomplir telle ou telle action (sortir la grande échelle, installer une scie à chaîne...). Et comme chaque mission doit être accomplie dans un temps limité (sans compter l'obligation de ne pas grever le budget octroyé), il faut la recommencer encore et encore avant de pouvoir en venir à bout. Qui plus est, une fois la situation maîtrisée, on aimerait avoir l'occasion de réinvestir ces savoir-faire si durement acquis dans une situation similaire ; ce ne sera jamais le cas, les huit missions étant trop différentes les unes des autres. Appels d'urgence se révèle donc totalement inintéressant, et comme il propose de toute façon une réalisation catastrophique, faite de graphismes préhistoriques et de bruitages ridicules, bien incapables de susciter une quelconque tension, on ne peut que se féliciter de vous avoir sauvé – oui vous, le joueur potentiel – de ce terrible désastre.
- Graphismes3/20
Des graphismes réalistes avec des effets de catastrophe spectaculaires. Ah non pardon, ça c'est ce que dit la jaquette. En fait, le jeu est moche, très moche. La 3D isométrique a 20 ans d'âge, l'incrustation des objets dans le décor fait pitié et l'animation des personnages prête à sourire.
- Jouabilité2/20
La jouabilité, exécrable, souffre surtout d'une interface en tous points catastrophique (la colonne de sélection des personnels, représentés par d'immenses portraits hideux à faire scroller, est une vaste blague). Le gameplay a la mauvaise idée d'abandonner toute velléité stratégique au profit d'une progression par essais et par erreurs (renforcée par l'absence de tutorial).
- Durée de vie3/20
Si la prise en main n'était pas aussi fastidieuse et si le jeu ne gonflait pas sa durée de vie en vous faisant recommencer inlassablement les mêmes missions, il se bouclerait en 2 heures maximum. Tout est dit.
- Bande son4/20
Les thèmes musicaux très convenus essaient vainement d'installer un semblant de tension. Ils sont régulièrement ponctués par les voix françaises des personnages, à la limite du ridicule.
- Scénario/
Appels d'Urgence mériterait de remporter le prix H. G. Wells de l'année. Ce fabuleux retour dans la préhistoire vidéoludique vous permettra de croiser des monstruosités que l'on croyait disparues : réalisation antédiluvienne, jouabilité inhumaine, système de progression archaïque... Rien ne vous sera épargné. S'il y en a un à sauver de ce désastre, c'est bien vous !