Une métaphore de nos peurs les plus profondes, un chemin vers notre subconscient, l'anti-chambre de l'enfer... Silent Hill représente tout et rien à la fois. Pourtant, depuis des années, nous y retournons inlassablement, inéluctablement, poussé par l'envie de retrouver un proche, le pardon, une réponse tout en sondant les méandres brumeuses de cette bourgade depuis longtemps passée à la postérité. Pendant ce temps, l'histoire continue, les ténèbres grignotent du terrain et les hurlements continuent de se propager au rythme des frissons nous parcourant l'échine...
Comme une déclaration d'amour au fan, Silent Hill : Homecoming abat ses cartes dès le départ, dès l'introduction du titre même qui renvoit à une des séquences les plus traumatisantes du film L'Echelle de Jacob : Cet opus sera une ode à la série en multipliant les références à la saga et son pendant filmique. Dès lors, nous ne serons pas étonnés, entre autres, par les transitions entre le monde réel et le monde parallèle, exactes répliques de celles du long métrage de Christophe Gans. Il va sans dire que cet aspect amène une plus grande crédibilité à l'univers qui met à profit les capacités de la PS3 afin de s'assurer un certain réalisme. Pourtant, après 7, 8 heures de jeu, il est bien difficile de se prononcer sur la qualité de ce segment possédant le moins de personnalité. Ceci est compréhensible dans le sens où l'impression d'assister à une représentation des meilleurs moments de la série prévaut du début à la fin. Tout y passe : l'hôpital désaffecté, la descente métaphorique dans les entrailles de Silent Hill, les apparitions fugaces de Pyramid Head, la présence de Robbie le lapin, la recherche d'un parent disparu, etc. Mais là où le fan pourrait se sentir frustré, l'envie d'assister à nouveau à une histoire macabre, à une parade de monstres, nous incite à poursuivre l'aventure pour démêler le vrai du faux.
De fait, s'il est bien difficile d'émettre, pour le moment, un avis sur l'histoire, sachez malgré tout qu'elle sonne comme un écho à celle de Silent Hill 2. Pour autant, n'allez pas vous faire des idées. Non, Homecoming n'arrive pas à la cheville du point d'orgue de la saga et non, l'approche de cet opus est bien moins psychologique de celle du deuxième épisode. Cependant, on y retrouve quelques similitudes à commencer par la recherche du frère du héros qui semble avoir disparu, à l'image des 3/4 de la population de Shepherd's Glen, la ville natale d'Alex, le protagoniste principal de Homecoming. D'ailleurs, le fait de ne pas débuter à Silent Hill a de quoi intriguer d'autant qu'après quelques heures, nous sommes éjectés dans la bourgade maudite sans autre forme de procès. Vous conviendrez donc qu'il faudra mieux attendre les crédits de fin avant d'émettre un jugement net et définitif à propos de l'aspect scénaristique. Ceci dit, on regrettera un peu le faible nombre de cinématiques n'aidant pas vraiment à se plonger dans cette nouvelle épopée horrifique. De plus, si une des nouveautés liée aux choix de réponses lors de dialogues apporte une plus grande interaction avec les NPC, l'implication du joueur dans l'aventure ne s'en trouve pas vraiment grandie puisque quelle que soit l'orientation de l'échange verbal, le résultat est globalement le même.
Sur le plan des nouveautés justement, signalons tout de même quelques ajouts plus ou moins intéressants. Au rayon des "moins", la présence de quelques déclinaisons de créatures connues a de quoi étonner. Vous me direz, c'est le but recherché, mais dans ce cas, on doutera quand même du bon goût des designers. A l'inverse, les infirmières que je citais plus avant sont bien plus flippantes que par le passé et certaines monstruosités semblent plus que jamais inspirées par les travaux de Francis Bacon. On citera aussi des combats trop présents et parfois franchement lourds malgré la possibilité d'effectuer des esquives puis de contre-attaquer rapidement dans la foulée. Bien entendu, plus on avance plus on troque ses armes de fortune (couteau, tuyau) contre des moyens de défense plus radicaux (hache, pistolet, fusil à pompe) mais ça ne résout pas tout. Heureusement que les monstres ne nous suivent pas tout le temps d'une pièce à l'autre, ce "problème" étant finalement salvateur. Mentionnons aussi des actions contextuelles parfois utiles, pour se libérer de l'emprise d'un monstre, parfois inutiles lorsqu'il s'agit de nous demander de détruire des planches de bois pour se frayer un passage. De plus, heureusement que le ridicule ne tue pas car entendre Alex maugréer qu'il ne peut pas découper un tableau avec sa hache (ceci nous obligeant à récupérer le couteau dans l'inventaire) a de quoi faire pouffer. A propos de l'inventaire, celui-ci a été aussi repensé et devient du coup plus lisible et plus agréable à utiliser.
En marge des affrontements, les énigmes n'ont pas été oubliées mais elles sont désormais moins liées à l'histoire et deviennent pour la peine beaucoup plus proches de puzzles "Resident Evilesques". On aura donc du mal à être stimulé intellectuellement parlant en connectant quelques câbles ou en déplaçant des pièces de bois dans la grande tradition des taquins. Paradoxalement, si notre ressenti a pour l'instant des allures de déception, il n'en est rien car au-delà des diverses déconvenues émaillant cette découverte, auxquelles s'ajoute une qualité graphique décevante et quelques ralentissements innommables rendant le tout injouable, le besoin d'en voir plus est bel et bien réel. D'autant plus vrai que la bande-son, à laquelle la série doit tant, est une fois encore par-faite, des somptueux thèmes de Yamaoka en passant par les bruitages, le doublage et le rendu sonore. Bien entendu, cette impression témoigne d'un véritable culte voué à la série se traduisant par l'envie inéluctable de poser un pied après l'autre pour dénicher l'instant qui nous procurera l'ultime jubilation macabre. La conclusion de cet aperçu n'en est donc pas une, simplement une étape vers la célébration ou la dénonciation de ce segment qui a déjà le mérite de renouer avec un brouillard opaque qu'on espéra pouvoir balayer d'un revers de lampe torche pour entrevoir la vérité en novembre prochain.