Les possesseurs de 360 sont décidément gâtés en matière de RPG japonais. Après Lost Odyssey, Eternal Sonata, et en attendant Tales of Vesperia, la console de Microsoft s'apprête à accueillir en exclusivité un nouveau représentant du genre. Infinite Undiscovery se démarque tout de même de ses confrères en misant davantage sur l'action. Si vous maitrisez l'anglais et que vous n'avez pas peur de passer des heures dans de sombres donjons, attendez-vous à succomber à son charme.
Quand Square Enix rencontre Tri-Ace, ce sont tous les amateurs de RPG japonais qui retiennent leur souffle. En effet, c'est déjà à l'association de ces deux grands noms du jeu vidéo que l'on doit des perles telles que les Star Ocean ou les Valkyrie Profile. Autant dire qu'Infinite Undiscovery, le dernier né de leur union, a pu susciter beaucoup d'attente parmi les amoureux du genre. Mieux vaut les prévenir tout de suite, ceux-ci risquent d'être déstabilisés pas la tournure que les développeurs ont donné à leur titre : Tri-Ace a fait le choix d'orienter le jeu clairement vers l'action et de lui donner un level-design proche d'un dungeon-RPG. Pour apprécier pleinement Infinite Undiscovery, il ne faut donc pas avoir peur d'enchaîner les combats dans des couloirs qui paraissent parfois interminables. Cet aspect n'est pas un défaut en soi, mais il risque tout de même de rebuter les joueurs qui auraient préféré partir à la découverte d'un environnement plus ouvert.
Votre périple commence d'ailleurs dans le lieu le plus fermé qu'il soit : une prison. Vous incarnez Capell, un jeune flûtiste qui ignore la raison de son arrestation. Celui-ci est tellement peu dégourdi que son destin aurait certainement pris fin dans cette cellule si une demoiselle n'était pas venue le délivrer. Aya, la jeune fille en question, lui révèle au passage la raison de sa présence derrière les barreaux. Ses ravisseurs l'ont confondu avec un certain Lord Sigmund, le leader d'un groupe se faisant appeler la Force de Libération. La ressemblance entre les deux hommes est telle qu'Aya elle-même se mélange les pinceaux alors qu'elle appartient à ce fameux groupe. Elle pensait ainsi porter secours à son chef alors qu'elle se retrouve à aider un musicien plutôt chétif. Tant bien que mal, ces deux compagnons d'infortune devront donc faire équipe pour s'enfuir de cette prison. Cette entrée en matière a le mérite de vous plonger directement dans l'action, mais elle présente aussi quelques défauts majeurs qui plombent ces premières heures de jeu.
Vous serez ainsi rapidement poursuivi par un ogre qu'il est impossible de battre, votre seule solution : la fuite. Non seulement ce type de scène manque cruellement d'originalité, mais on peut aussi se questionner sérieusement sur la pertinence de sa présence au début de l'aventure. En effet, on aurait préféré découvrir gentiment le gameplay plutôt que de se sauver bêtement devant un ennemi trop fort pour soi. Les choses ne s'arrangent pas une fois qu'on atteint la sortie. On se retrouve alors perdu en pleine nuit dans une forêt labyrinthique. Si jamais un rayon de lumière se glisse dans la pièce dans laquelle vous jouez, vous n'apercevrez de l'environnement que les quelques brasiers disposés ici ou là par vos ennemis. Avouez que c'est plutôt frustrant de devoir se diriger à tâton dans le noir alors que vous pensiez vous en mettre plein les mirettes avec de sublimes décors. Certes ce passage obligé par l'obscurité a quelques vertus éducatives : il permet par exemple de se familiariser avec le principe des attaques par surprise. Vous aurez ainsi des bonus si vous agressez un ennemi sans qu'il vous voit ou vous entende arriver, et vous serez pénalisé si un monstre vous surprend. Tout au long de l'aventure vous retrouverez d'autres passages obscurs pour mettre à l'épreuve votre discrétion, mais ils ne seront jamais aussi longs ni aussi rébarbatifs que cette première balade nocturne.
Un dernier défaut vient ternir encore un peu plus le début du jeu, il concerne les cinématiques. Les doublages anglais des principaux protagonistes sont plutôt réussis, on reprochera juste aux dialogues de ne pas coller du tout aux mouvements des lèvres. Par contre de nombreuses scènes ne sont pas doublées. Il s'agit d'un aspect que l'on retrouve dans de nombreux RPG, mais au début d'Infinite Undiscovery les cinématiques muettes et parlantes ne cessent de s'enchaîner. Cela peut paraître un détail mais finalement le rythme de l'action s'en ressent. C'est d'autant plus dommage que les musiques du jeu auraient mérité d'être davantage mises en avant lors de ces scènes muettes. En effet la bande-son est signée Motoi Sakuraba à qui l'on doit entre autres celles des Star Ocean ou des Valkyrie Profile. Si les thèmes musicaux ne sont pas particulièrement originaux, ils collent tout de même parfaitement au jeu et à son ambiance.
Vous l'aurez compris, il n'est pas évident d'accrocher à Infinite Undiscovery après une ou deux heures de jeu. Non seulement ce début est mal rythmé mais l'histoire a aussi du mal à se mettre en route. Il faut dire qu'il est assez difficile de s'attacher aux différents personnages qui paraissent tous aussi fades les uns que les autres. Les plus patients seront pourtant récompensés car le scénario ne finit pas de s'étoffer au fil de l'aventure. On découvre petit à petit que le monde d'Infinite Undiscovery est beaucoup plus riche qu'il n'y paraît au premier coup d'œil. Il s'agit d'un univers ou les pouvoirs magiques délimitent des barrières sociales réellement marquées. Au sommet de cette hiérarchie vous avez les puissants aristocrates qui sont clairement identifiables par leur auréole dans le dos. Puis vous avez les citoyen ordinaires. Au moment de leur naissance, ceux-ci sont soumis à un rite qui les marque à jamais. Ce "lunaglyph" leur octroie un pouvoir particulier tel que la maîtrise du feu ou la capacité de soigner. Enfin ceux qui sont dépourvus d'une telle bénédiction lunaire, les "unblesseds", sont considérés comme de véritables parias. C'est dans ce contexte qu'un mystérieux Dreadknight enchaîne littéralement la lune afin de profiter au maximum de ses pouvoirs. Lord Sigmund et sa Force de Libération sillonne donc le monde pour briser ces énormes chaînes et pour éviter que la lune finisse par s'écraser sur terre. L'histoire d'un marginal qui intègre malgré lui un groupe de combattant cherchant à sauver le monde laisse comme une impression de déjà-vu. Mais force est de constater que Capell n'est pas seulement une pâle copie de Cloud et qu'il prend de plus en plus de consistance au fil de l'histoire.
On n'ira cependant pas jusqu'à affirmer que l'originalité d'Infinite Undiscovery tient à son scénario. Par contre son système de combat risque d'en intéresser plus d'un. On a souvent comparé ce jeu à Final Fantasy XII pour la simple raison qu'il n'y avait pas de distinction entre les phases d'exploration et celles de combat. En effet lorsque vous croisez un ennemi dans Infinite Undiscovery, vous pouvez directement l'affronter sans passer par une quelconque arène dédiée aux combats. Mais la comparaison s'arrête là car à la différence de son illustre aîné, l'action se déroule totalement en temps réel. Ne comptez pas sur le moindre répit pour ouvrir votre inventaire, donner des ordres à vos équipiers ou changer de cible. Vous vous focalisez sur l'adversaire en face duquel vous vous trouvez et vous frappez autant de fois que vous pouvez. D'ailleurs ce système de combat fait penser à celui de Star Océan : vous disposez d'une touche pour les coups rapides et d'une autre pour les coups puissants, vous pouvez leur assigner des techniques spéciales que vous déclenchez en maintenant le bouton correspondant appuyé. Le coût en MP (points de magie) et les dégâts infligés par ces techniques diffèrent en fonction de la touche à laquelle vous les avez assignées. L'absence de tour par tour se traduit par un usage bien particulier de la jauge d'AP (points d'action) : il faut que celle-ci soit assez remplie par rapport au poids de l'ennemi pour placer l'une de ces attaques spéciales. Ces techniques vous permettront par exemple d'envoyer votre adversaire dans les airs. Cette possibilité est loin d'être un gadget puisque, comme dans Tales of Symphonia, vos combos sont synonymes de bonus. En l'occurrence les combos aériens vous rapportent davantage d'expérience, ceux au sol vous permettent de remplir votre jauge d'AP et si votre ennemi est à terre, cela vous rapportera des HP (points de vie) et des MP. On prend ainsi plaisir à jongler avec des ennemis déjà morts afin d'accumuler le maximum de bonus. Ce principe manque peut-être un peu de finesse mais il permet surtout aux combats de ne jamais tomber dans la routine et de toujours apporter leur lot d'adrénaline.
Tout au long de l'aventure, il n'y a que Capell que vous dirigez réellement. Mais cela ne veut pas dire qu'il est seul pour autant. Vous pourrez ainsi lui choisir trois coéquipiers parmi une douzaine de personnages pour partir à la découverte du monde. Les combats en leur compagnie s'apparentent un peu à ce que l'on avait pu voir dans la série des Dot Hack : vous vous contentez de leur donner de vagues instructions et vous vous concentrez sur votre personnage. En l'occurrence vous leur indiquez la stratégie globale à adopter parmi six possibilités : les laisser totalement libres, leur demander de vous aider à effectuer des combos, de combattre le même ennemi que vous, de se disperser, d'attendre ou d'économiser leurs MP. Vous pouvez aussi leur demander d'effectuer un coup spécial. Il vous faut d'abord choisir le personnage, puis la technique en particulier que vous aviez déjà présélectionnée. Il est aussi possible de requérir très rapidement des soins en appuyant seulement sur Y. De manière générale, vos compagnons sont tout à fait autonomes : il faut davantage les voir comme de réels soutiens lors des combats plutôt que comme autant d'autres personnages à votre charge. Lorsque vous organisez vos équipes, il faut faire attention à la spécificité de chacun de vos coéquipiers. La plupart d'entre eux disposent par exemple d'un job qui leur permet de créer leurs propres objets. Certains peuvent ainsi transformer les herbes et les fruits en potions, forger des armes ou faire de la cuisine. Évidemment plus vous faites travailler l'un de vos compagnons, plus son job monte en niveau et plus il pourra créer des objets intéressants. Il faut aussi prendre en compte leurs traits de caractère : les deux jumeaux par exemple sont plus efficaces quand ils font équipe et Aya a peur des insectes...
Vous pourrez arriver à la fin d'Infinite Undiscovery en une vingtaine d'heures en mode facile à condition de ne pas vous éterniser en quêtes annexes, mais il faudra bien une trentaine d'heures pour terminer le mode normal et une quarantaine si vous voulez réellement faire le tour du jeu. En effet il vous faudra réellement exploiter toutes les capacités de vos compagnons pour découvrir toutes les subtilités du jeu. Rico, l'un des deux jumeaux, a ainsi la capacité de parler avec les animaux, certains autres équipiers peuvent déverrouiller les serrures ou détruire des blocs de pierres. On pourra aussi prendre plaisir à dénicher toutes les partitions de musique pour que Capell s'en donne à cœur joie avec sa flûte. En conclusion on ne rentre pas facilement dans l'univers d'Infinite Undiscovery, mais on finit par découvrir un jeu beaucoup plus riche qu'il n'y paraît à la première impression.
- Graphismes16/20
Le character design laisse un peu à désirer mais les décors sont tout simplement magnifiques.
- Jouabilité16/20
Les combats sont particulièrement dynamiques et fournissent toujours une bonne dose d'adrénaline. On regrettera seulement que quelques ralentissements se fassent sentir quand il y a trop d'unités à l'écran et qu'il ne soit pas toujours aisé de cibler un autre ennemi.
- Durée de vie13/20
Certes on arrive à la fin du jeu en une vingtaine d'heures en mode facile. Mais il faudra bien une trentaine d'heures pour le terminer réellement en mode normal et bien plus si vous souhaitez voir toutes les cinématiques.
- Bande son14/20
Les mélodies de Motoi Sakuraba font toujours autant mouche, on regrettera juste qu'elles ne soient pas davantage mises en avant lors des cinématiques muettes. La plupart des doublages anglais sont corrects mais on aurait aimé que les voix japonaises soient elles-aussi proposées.
- Scénario13/20
Il faudra attendre le deuxième disque pour que l'histoire commence réellement à prendre de l'ampleur. Si vous supportez les dialogues insipides de la première partie du jeu, votre patience finira donc par être récompensée.
Infinite Undiscovery est loin d'être exempt de défauts mais il propose finalement une aventure plus riche qu'il n'y paraît au premier abord. Pour peu que les longs couloirs et les combats en temps réel ne vous effraient pas, vous trouverez là un RPG qui mérite d'être exploré en long et en large.