Cela fera bientôt 20 ans que Dungeon Explorer est sorti sur TurboGrafx. Hudson Soft, qui se plaît à recycler ses vieilles licences, nous propose un revival du jeu sur consoles portables. Malgré ses nombreux défauts, le titre s'impose sans mal comme le hack'n slash de la DS. Il faut dire que la concurrence inexistante y est pour beaucoup.
Il y a des scenarii qu'on se plaît à exposer, d'autres que l'on préfère expédier. Celui de Dungeon Explorer fait partie de la seconde catégorie. Non qu'il soit particulièrement mauvais ; il se révèle même étonnamment fouillé pour le genre. Sans doute trop : pour être honnête, je n'ai pas tout compris. Malgré l'effort des traducteurs, la pléthore de noms de lieux, de rois et de dieux qui vous est assénée à chaque dialogue fait qu'on se perd rapidement dans les méandres d'une histoire emberlificotée. Et comme elle est au service d'une dimension RPG plutôt basique, on n'a que peu envie de faire l'effort nécessaire. Bref, considérez que dans Dungeon Explorer, vous lutterez contre une conspiration visant à libérer un dieu-démon enfermé depuis des millénaires dans une pyramide. Ce qui est déjà pas mal, vous le reconnaîtrez.
Pas de doute, Dungeon Explorer est un hack'n slash dans la plus pure tradition du genre. Vos premiers pas dans le jeu vous évoqueront immanquablement Diablo II : les donjons alternent avec les extérieurs, et vous devez immuablement vider les lieux de leurs occupants, tout en ramassant des loots de rareté variée et en améliorant votre personnage. Là où cela devient nettement moins séduisant, c'est que la majorité de vos adversaires provient de générateurs de monstres qui parsèment les niveaux. Et on vous obligera fréquemment à détruire tous les générateurs d'une salle pour débloquer l'ouverture de la porte qui permet de passer à la suivante. Cet aspect du jeu est franchement rebutant. Il y a bien quelques monstres "indépendants", mais ils sont si mal fichus qu'on n'éprouve aucun plaisir face au bestiaire rencontré : gobelins, trolls et squelettes se résument à des formes grossières que seul le nom permet d'identifier (mention spéciale aux "loups" qui évoquent davantage des lézards). Ils se révèlent – à l'instar des décors – aussi variés que moches et pixellisés. A noter que les traducteurs, limités en caractères, ont dû abuser des abréviations. Vous combattrez donc des Pod Roc, des Chair Putr et des Wisp Pointe. Et cet aspect est hélas omniprésent dans le jeu, des écrans de statistiques jusqu'aux descriptifs des items : quelle joie de voir votre Emp. Cha mettre la main sur un Ann qui augmente sa Cp et sa Grd !
Puisque nous en sommes à évoquer votre personnage, sachez que vous avez le choix entre neuf incarnations possibles, combinaisons de trois classes (guerrier, mage et archer) et de trois races. Le problème, c'est que chacune d'elles vous enferme dans une évolution-type qui restreint votre libre-arbitre. Le gain de nouvelles compétences est automatique, et la répartition des points de caractéristique à chaque franchissement de niveau ne vous permet en aucun cas de déterminer l'orientation de votre personnage, qui ne peut de toute façon porter qu'un type d'équipement dédié, déterminé par votre choix initial. L'avantage, c'est la rejouabilité : vous aurez la possibilité de recommencer le jeu, qui offre déjà 15 bonnes heures de vie, en choisissant une autre approche. L'inconvénient, c'est que vous passez votre temps à revendre l'équipement inutilisable aux marchands de la ville. Du coup, vous avez souvent la bourse bien remplie, et l'achat en nombre de potions n'est jamais un problème – ce qui rend la progression plutôt facile. L'aspect fortement dirigiste du jeu se retrouve également dans les donjons : certains interrupteurs n'apparaîtront comme par miracle qu'après avoir parlé à un personnage bien précis. Quant au déplacement sur la carte du monde, il ne sert qu'à mieux masquer la linéarité de la progression. Bref, on a le sentiment que les développeurs ont essayé d'introduire en vain un aspect RPG somme toute superflu.
Malgré tous ces point faibles, il faut bien avouer que Dungeon Explorer se révèle assez addictif. On latte du monstre, on utilise des potions, on ramasse des clés, on se booste contre les boss, on identifie les objets trouvés, et on en redemande. Le jeu est même doté de quelques idées sympathiques, comme cette foire qui s'installe régulièrement en ville, ce robot-suivant que vous pouvez acheter et customiser, ou encore cette banque qui permet de stocker votre argent et vos possessions en prévision d'une mort inopinée. En outre, le titre dispose d'un gros atout : son mode multijoueur, en local ou en ligne. Vous avez la possibilité de faire équipe avec deux autres aventuriers pour explorer les 50 niveaux de la fameuse pyramide du dieu-démon. On doit alors coopérer pour vaincre les monstres (beaucoup plus résistants) et se partager les loots par tirage au sort, pour peu qu'on se soit sorti vivant des nombreux pièges vicieux. Cet aspect du jeu, bien étudié, permet de revivre les sensations d'un Gauntlet, ce qui est quand même appréciable. Au final, pour une première incursion du genre sur DS, Dungeon Explorer se révèle plutôt recommandable. Concrètement, si vous êtes fan du genre, si les générateurs de monstres ne vous gênent pas, et si vous êtes prêt à faire asbtraction d'une réalisation plus que médiocre, le jeu peut fort bien vous convenir. Oui je sais, ça fait beaucoup de conditions.
En raison d'une incompatibilité avec l'appareil de capture, les images proviennent de l'éditeur.
- Graphismes8/20
On a beau être sur DS, la qualité de la 3D proposée est franchement insuffisante. La console nous a déjà prouvé qu'elle était capable de bien mieux en la matière. Ici, les monstres sont (involontairement) difformes, les environnements pixellisés, les textures hideuses. Bref, ça pique les yeux.
- Jouabilité12/20
La maniabilité du personnage est correcte. Côté interface, c'est mi-figue mi-raisin : les menus sont une véritable usine à gaz, mais le jeu propose une palette de combat bien pensée et bien exploitée, qui permet d'accéder facilement à un objet ou à un pouvoir. A noter que Dungeon Explorer ne propose pas la moindre petite possibilité tactile.
- Durée de vie14/20
L'aventure solo vous tiendra occupé une quinzaine d'heures, ce qui est honnête pour un hack'n slash sur DS. D'autant qu'on a la possibilité de la recommencer en incarnant un autre personnage. A l'appui également, un mode multijoueur bien réalisé qui permet de s'éclater à plusieurs.
- Bande son7/20
L'ambiance sonore est extrêmement décevante. Les thèmes musicaux sont peu inspirés et mal utilisés (il sont parfois en décalage total avec l'ambiance des niveaux traversés). En outre, vous n'entendrez guère plus d'effets sonores que ceux de vos coups : les monstres, notamment, n'ont été dotés d'aucun bruitage.
- Scénario9/20
Le jeu met en avant un background fourre-tout mais assez fouillé, qui ne sert cependant qu'à complexifier inutilement un scénario très classique. La traduction française est quant à elle très inégale, et a visiblement souffert d'une limitation en caractères inhérente à la version japonaise du jeu.
Dungeon Explorer est l'exemple parfait du jeu qu'on ne conseillera qu'à un public très précis : celui des amateurs de hack'n slash en recherche d'un titre de ce type sur DS, et prêts à faire le deuil d'une réalisation décente pour retrouver l'aspect addictif propre au genre. Si vous êtes dans ce cas, foncez, sinon vous feriez bien de passer votre chemin.