Espace, frontière de l'infini vers laquelle voyage notre vaisseau spatial. Sa mission de cinq ans, explorer de nouveaux mondes étranges puis les vitrifier, découvrir de nouvelles vies, d'autres civilisations, pour mieux les détruire et, au mépris du danger, faire reculer l'impossible. Voilà, en quelques mots, ce que nous réserve cet énième jeu de stratégie inspiré de la légendaire série Star Trek, un jeu qui malgré quelques idées sympathiques s'égare rapidement dans le vide spatial qu'il nous proposait pourtant de conquérir.
Se reposant sans doute sur l'effarante constatation qui dit que le Trekkie de base n'hésitera pas à malmener ses maigres économies dès lors qu'on lui présentera un produit estampillé Star Trek, Bethesda nous sort un nouveau titre de stratégie de derrière les fagots. Hélas, le pauvre petit tas de pixels rassemblés à la hâte ne passera pas sans être copieusement fouetté par la prose vengeresse d'un fan contrarié. Car c'est un fait, dès les premières secondes de jeu, les connaisseurs ne pourront que constater l'extrême et douloureuse désinvolture avec laquelle Bethesda semble avoir traité sa source d'inspiration. Star Trek : Conquest n'affiche en effet qu'un minable lien de parenté avec la série Star Trek : La Nouvelle Génération, pourtant emportée par l'étincelant capitaine Jean-Luc Picard et son crâne lustré. Du riche humus de la série, Conquest ne tire qu'une dizaine de lignes insipides qui serviront timidement de "scénario". Seul le design général reste fidèle à la série, bien qu'aucun personnage connu ne fasse partie du voyage. C'est donc le coeur serré que nous nous engageons dans une absurde lutte à mort entre la Fédération, les Klingons, les Romuliens, les Breens, les Cardassiens et le Dominion. Dans Star Trek : Conquest, toutes les races ont joyeusement piétiné leurs alliances ancestrales ainsi que les principes élémentaires de la diplomatie galactique pour se crêper le chignon comme des mégères en mal d'amour.
Pourtant, malgré son pitch anémique, Star Trek : Conquest parvient à se rendre modérément intéressant de par son gameplay. Gameplay que nous allons maintenant tenter d'étudier ensemble. Dans le mode Campagne, il vous sera tout d'abord demandé de choisir votre race, le nombre d'adversaires que vous souhaitez affronter ainsi que le niveau de difficulté. Notez d'ailleurs qu'en mode Facile, le brouillard de guerre censé dissimuler les mouvements ennemis sera désactivé. Une fois la partie configurée, vous vous retrouverez propulsé sur une carte galactique divisée en différents secteurs. Il s'agira alors de collecter des ressources (de simples crédits, qui dépendent du nombre de planètes sous votre contrôle), de construire des avant-postes ainsi que des vaisseaux pour votre flotte puis de partir envahir les planètes des nations voisines. Le tout repose sur une interface extrêmement simple et se déroule au tour par tour, comme dans un jeu plateau type Risk. Chaque race peut disposer de trois amiraux au maximum, chacun contrôlant une flotte de guerre. Ces officiers gagnent de l'expérience en affrontant l'ennemi et font profiter leurs troupes de bonus d'attaque, de défense ou de mouvement. Et si d'aventure, l'un de vos héros mord la poussière, vous aurez toujours la possibilité de le réintégrer à votre armée moyennant quelques deniers.
Les vaisseaux qui constituent les flottes de vos officiers se divisent en trois catégories : les scouts qui sont rapides mais fragiles, les croiseurs qui constituent un bon compromis entre maniabilité et puissance de feu, et les dreadnoughts, puissants et cuirassés mais terriblement lents. Chaque flotte ne pourra intégrer que six bâtiments en plus du croiseur de l'amiral. Il faudra donc choisir intelligemment vos forces. On privilégiera tout d'abord les unités légères afin de partir le plus rapidement possible à la conquête de la galaxie. Sur chaque planète conquise, on pourra construire des mines pour accroître nos ressources, des stations pour réparer et construire des vaisseaux ainsi que des laboratoires de recherche, utiles pour développer des armes spéciales qu'il sera possible d'utiliser ponctuellement, à la manière de jokers.
A chaque tour, les différentes nations déplacent leurs généraux respectifs sur la carte, annexent de nouveaux territoires en vaporisant pirates et indigènes, puis essaient logiquement de grignoter le territoire de l'empire voisin. Lorsqu'il y a bataille, le soft vous propose en fait différentes options. Vous pourrez effectivement choisir de résoudre le combat automatiquement ou au contraire, de chausser vos oreilles de Vulcain et de prendre directement le contrôle de vos vaisseaux pour une phase de baston en temps réel. On retrouvera là certains des principes exploités par beaucoup de jeux estampillés Star Trek. On tentera ainsi de positionner ses boucliers pour absorber les gros des tirs tout en cherchant à abattre ceux de l'ennemi. Rigolotes au début, ces séquences s'avèrent finalement trop chaotiques pour être vraiment intéressantes. La jouabilité y est simpliste, la caméra mal placée et l'ensemble singulièrement répétitif du fait de l'incompétence de l'IA et du petits nombres de vaisseaux disponibles. Très vite, on finira par s'en remettre à la résolution automatique des combats pour ne plus jamais revenir combattre directement l'adversaire.
Mais au final, que l'on soit sur la carte tactique ou sur le champ de bataille, tous les mécanismes du jeu vous seront acquis en quelques minutes, et ce, même sans tutorial. Star Trek : Conquest montre donc ses limites rapidement et plonge le joueur dans une routine abrutissante. Jamais on ne se sentira stimulé tant l'IA se montre incapable d'opposer la moindre résistance. Un mode multijoueur aurait certainement donné beaucoup plus de sel aux affrontements, mais l'option est tout simplement absente. Un oubli inacceptable qui ôte une grande part de son potentiel au soft. D'autant que le fameux mode Campagne se limite tout simplement à la destruction des adversaires que vous vous serez choisis, sans aucun liant scénaristique. Changer de race n'apportera pas vraiment de variété, car les différences entre chaque peuple - qui se limitent généralement aux compétences des généraux et aux coûts des unités - ne sont pas assez prononcées pour nous inciter à retenter l'aventure.
Pire, la disposition de la galaxie ne change jamais et vous passerez donc tout votre temps à jouer sur la même carte, qui s'avère d'ailleurs très petite. La seule option restante pour tenter d'extirper un peu plus d'intérêt de ce jeu finalement simpliste consiste à s'essayer au mode Escarmouche, qui ne revient en fait qu'à vivre les batailles en temps réel que nous décrivions ci-dessus. Autant dire qu'il n'y aura plus grand-chose à faire après seulement une ou deux heures de jeu. Le concept de Star Trek : Conquest n'était pas foncièrement mauvais, bien au contraire. Le mélange entre stratégie au tour par tour et phases de combats en temps réel auraient pu fonctionner si seulement le jeu avait fait preuve d'un peu plus de profondeur. Sans mode multijoueur, sans véritables différences entre les factions et sans lien digne de ce nom avec la puissante licence Star Trek, le titre de Bethesda ne peut malheureusement que rejoindre les rangs des softs ratés, oubliables et oubliés.
- Graphismes6/20
Une carte galactique insipide et de minuscules unités qui reprennent effectivement le design délicieusement kitch de la série, mais sans la moindre finesse. La licence Star Trek n'est pas véritablement exploitée et l'action aurait très bien pu se dérouler dans n'importe quel autre univers de SF.
- Jouabilité7/20
Plaisant pendant une heure, le temps de découvrir comment fonctionne le système de jeu, Star Trek : Conquest montre rapidement ses limites et son manque de profondeur. Trop facile, trop répétitif, trop limité, le soft ne se renouvelle jamais. Dommage, car l'interface est claire et la plupart des fonctions immédiatement accessibles.
- Durée de vie5/20
Impossible de ne pas sanctionner un soft qui ne nous offre qu'une "campagne" non scénarisée qui s'apparente à un médiocre mode "bac à sable" et dont on aura fait le tour en moins de deux heures. Sans mode multijoueur, on devra se coltiner une IA en mousse, incapable de se défendre. Bref, il n'y a pas de challenge et donc pas d'intérêt sur le long terme.
- Bande son11/20
La bande-son reprend vaguement les effets et les musiques de la saga télévisée. Mais il faut préciser que les voix, limitées à quelques répliques d'automates, sont en anglais.
- Scénario2/20
Pas de scénario à proprement parler. Les différentes nations de l'univers ont tout simplement décidé de s'envoyer mutuellement des missiles sur la tronche, comme ça, pour le fun.
Quel dommage, il n'aurait pas fallu énormément d'efforts pour faire de Star Trek : Conquest un jeu digne d'intérêt. Un vrai mode campagne avec un petit scénario cohérent, quelques personnages connus, quelques unités supplémentaires ainsi qu'une sélection plus étendue d'options tactiques pour terminer par du multi. Oui, en fait, cela fait tout de même beaucoup. En l'état, le soft s'avère trop simpliste et limité pour divertir un joueur tolérant plus de quelques heures. A éviter, à plus forte raison si l'on est fan de la série.