Quand on signe une adaptation de série TV, il faut s'attendre à recevoir les foudres, ou les applaudissements, des fans pour qui chaque détail compte. Est-ce pour ceci qu'Ubisoft a sorti dans une grande confidence la version vidéoludique de Lost ? Difficile de le savoir même si en fin de compte le titre est loin d'être aussi "je m'en foutiste" qu'il aurait pu l'être.
Si Lost a acquis si rapidement ses galons de "série culte", c'est qu'il y a une raison. En effet, après trois saisons, inégales mais donnant envie d'en savoir plus (et c'est là le principal), les premiers épisodes de la quatrième saison offrent un nouveau tournant pour le show qui s'appuie alors sur un double mystère lié à l'île et au monde extérieur. Bien entendu, je me ferai fort de ne point vous spoiler et bifurquerai donc directement vers l'adaptation qui nous intéresse aujourd'hui. Lost, sous-titré Via Domus, s'attarde sur le cas d'un passager du vol Oceanic 815, malheureusement amnésique et cherchant de surcroît à savoir où il est tombé et surtout qui il est. Ce pitch de départ permet donc de converser avec les personnages centraux du show à savoir Kate, Sawyer Hurley, Sayid, Locke, etc. Sympathique d'autant que les visages sont correctement modélisés et que les doubleurs français ont repris du service pour cette adaptation.
Tout commence lors du crash de l'appareil, vécu cette fois de l'intérieur. Après coup, on arrive vite en terrain connu, le plan de l'oeil de notre avatar étant le parfait écho de celui ouvrant la série qui d'après la légende urbaine recèlerait une bonne partie des réponses aux questions qu'on se pose tous : Mais où sont tombés les survivants ? Malheureusement, le jeu ne vous offrira pas vraiment de renseignements sur ce point, les informations délivrées par Via Domus étant finalement bien maigres en comparaison de ce qu'on apprend en regardant la série ou en allant fureter sur le net. Quoi qu'il en soit, l'ambiance est fidèlement restranscrite et au fur et à mesure des épisodes composant l'aventure solo, on note l'évolution physique et mentale des rescapés. Toutefois, on pourra être surpris des raccourcis empruntés par les scénaristes faisant de Lost : Via Domus une sorte de minuscule antisèche pour qui aimerait se souvenir des détails les plus importants des saisons 1 et 2.
En somme, on est alors en droit de se demander à qui se destine ce titre. Aux fans ? Pas certain. A ceux qui voudraient connaître la série ? Je n'en suis pas sûr vu que le jeu dévoile énormément d'éléments tout en laissant dans l'ombre des événements très importants du show. Au final, on cherchera alors à savoir de quoi le jeu est réellement fait en matière de gameplay. Sur ce point, les idées ne manquent pas mais elles sont toutes un peu bancales. Ainsi l'aspect "survie" se résume grossièrement à faire du troc avec les survivants. Il vous faudra alors récupérer des noix de coco, des bouteilles d'eau pour les échanger contre des torches, des lampes ou même des pistolets, ces derniers étant particulièrement utiles lorsque les Autres vous prennent pour cible. En dehors de cet aspect, on compte finalement trois grandes phases se détachant du lot. La première nous demande de nous frayer un chemin dans la jungle, ou dans des grottes, en suivant des repères et en utilisant une boussole tout en évitant le monstre de fumée noire, ceci devenant vite rasoir surtout lorsqu'on nous assène la même phase d'un niveau à l'autre.
Viennent ensuite les panneaux électriques qui devront être réactivés en utilisant des fusibles afin de rediriger l'électricité dans l'ensemble des circuits. Sympa la première fois, usant au bout de deux panneaux, énervant après le troisième. On en viendrait presque à prier pour avoir un piratage automatique à la Bioshock. Enfin, la troisième phase est liée au passé de notre personnage. En effet, à intervalles réguliers, vous pourrez vivre des flash-back durant lesquels vous devrez prendre une photo bien précise (visible au préalable sous une forme déchirée) qui vous permettra alors d'évoluer librement au sein dudit flash-back pour parler avec des personnes ou récolter des informations. le plus difficile sera ici de dénicher un élément marquant de la photo pour savoir ce qu'on doit photographier. L'idée est originale mais mal exploitée, engoncée entre des effets graphiques gênant le joueur et une portée ludique limitée. Finalement, Lost se résume à courir dans la jungle, à passer son brevet d'électricien et à jouer au photographe amnésique. Le plus embêtant vient aussi du fait que l'aventure, qu'on boucle en six, sept heures, se base sur un héros trop effacé dont l'histoire n'existe que par celle des autres survivants et celle de l'île qui n'est pas encore prête de subir les affres d'une déforestation. Bref, inutile de régler votre téléviseur car le gros de l'intérêt de cette adaptation semble s'être évanoui dans la Quatrième dimension.
- Graphismes13/20
La modélisation des visages est réussie malgré des yeux semblant nous fusiller à chaque regard. Concernant les environnements, Ubisoft a réalisé un très bon travail, la jungle étant épaisse, dense et éclairée par de beaux jeux de lumière. De plus, on y retrouve tous les environnements de la série et bien que les intérieurs soient moins réussis que les extérieurs, le tout est loin d'être vilain.
- Jouabilité13/20
La maniabilité ne pose pas vraiment de problème mais les phases de jeu se ressemblent beaucoup trop d'un épisode à l'autre. En somme, on fait du troc pour récupérer des objets, des armes afin de se prémunir contre d'éventuels dangers, on traverse la jungle en se référant à des annotations ou en utilisant notre boussole et enfin on se coltine des panneaux électriques à réparer en utilisant des fusibles. Restent les flash-back partant d'une idée aussi astucieuse qu'usante lorsque la mise au point doit être faite au pixel près.
- Durée de vie6/20
Le jeu survole rapidement les deux premières saisons ainsi que le début de la troisième et vous réclamera entre 5 et 8 heures selon votre aisance dans la résolution des énigmes. La replay-value est quasiment nulle à moins de vouloir dénicher tous les indices afin de récolter quelques jolis artworks bonus.
- Bande son15/20
Les compositions tout en finesse de Michael Giacchino sont ici reprises mais utilisées de façon assez maladroite. Néanmoins, l'ambiance musicale reste calquée sur celle de son modèle et, cerise sur le gâteau, les doubleurs officiels (exception faite de Jack il me semble) de la version française rempilent à l'occasion de cette adaptation.
- Scénario9/20
Si vous ne connaissez pas Lost, vous ne comprendrez absolument rien au synopsis du jeu qui, tout en relatant l'histoire d'un personnage inédit, expose en parallèle celle de la série via une succession d'ellipses narratives. Du coup, les fans de l'oeuvre de J.J. Abrams ne s'y retrouveront pas non plus de ce point de vue-là sachant qu'aucune information supplémentaire n'est délivrée afin de percer le mystère de l'île.
Si Ubisoft s'est montré très frileux autour de la communication de Lost, on les comprend un peu vu que le résultat est d'un niveau tout juste acceptable même pour un jeu vendu une quarantaine d'euros. Cependant, si le titre déçoit scénaristiquement, dans ses phases de gameplay redondantes et sa durée de vie ridicule, l'ambiance du show est fidèlement retranscrite, la présence des doubleurs officiels rajoute à l'immersion tout comme l'aspect graphique fort honorable et quelques idées de gameplay sont intéressantes même sans être totalement convaincantes. Du coup pour quelle note opter : 4, 8, 15, 16... 23, 42 ? Et pourquoi pas un 9 ? A découvrir entre deux épisodes de la quatrième saison.