Il y a un peu plus de deux ans de cela, la Gamecube accueillait le premier épisode de Battalion Wars, titre d'action/tactique à l'univers cartoon et à l'humour mordant. Le titre, développé par les Anglais de Kuju Entertainement, réussissait en effet à reprendre à son compte l'univers bien connu de la série Advance Wars tout en manipulant avec délice une foultitude de clichés. Malgré quelques défauts, le titre proposait des affrontements aussi rageurs que mignons dont on ne pouvait se tirer vivant qu'en usant de nos neurones atrophiés. Et joie, bonheur et allégresse, sa suite débarque enfin sur Wii et gomme au passage la plupart des errements de jeunesse de son prédécesseur. Chronique d'un tir de barrage magnifiquement bien ajusté.
On dit souvent que la marque de l'humour, c'est avant tout de savoir se moquer de sa propre petite personne. Cet art délicat, les développeurs britanniques de Kuju semblent le maîtriser à la perfection. En cherchant une nouvelle fois à revisiter et à tourner en ridicule les conflits mondiaux les plus sanglants de l'histoire, les bougres n'épargnent personne, pas même leurs compatriotes. C'est ainsi que Battalion Wars 2, après un court niveau d'introduction qui pose les bases du scénario, débute vraiment lorsque le colonel Windsor, chef des armées Angloises, lance une attaque l'Empire de l'Aube,version Battalionesque du Japon. Windsor, facilement leurré par un personnage obscur dont on ne découvrira l'identité que plus tard, est manifestement convaincu que les habitants de l'archipel ont mis au point une arme de destruction massive qu'ils projettent d'utiliser pour assouvir leur soif de conquête. Une amorce empreinte d'humour qui affiche un Windsor imbu de sa personne et amoureux de sa belle moustache british, mais qui fait également écho à quelques funestes événements bien réels. Avec sa mise en scène rigolote, Battalion Wars 2, comme son aîné, se lance dans une critique acerbe des principes même du conflit et se moque ouvertement des raisons avancées.
La première campagne du jeu vous fera donc suivre les pérégrinations des soldats de l'Aube, qui pris de court par une attaque à la sauce Pearl Harbor, doivent tout d'abord ramasser les morceaux de leur armée en déroute puis repousser l'envahisseur. Le général A'Quira, votre supérieur direct, en profitera alors pour vous apprendre les rudiments du combat, et vous transformera en un parfait petit commandant en 5 missions. Un commandant capable d'attaquer les 5 autres campagnes du soft. Au cours d'une vingtaine de missions, celles-ci nous feront partager les destinées tragiques des belligérants déjà présents dans le précédent volet. Outre les deux camps déjà cités, on retrouvera donc avec plaisir la Fédération Occidentale, les Territoires de Tundra ainsi que la Xylvanie, meurtrie mais toujours prête à en découdre. Sur le terrain en lui-même, connaisseurs et néophytes ne devraient pas être trop déboussolés puisque le soft reprend grosso modo les mécanismes du premier épisode, mécanismes qui se caractérisent avant tout par une grande accessibilité.
Chaque mission commence de manière assez didactique par l'annonce de vos objectifs, matérialisés par des étoiles dorées. Puis on se retrouve vite sur le champ de bataille dans ce qui s'apparente tout d'abord à un jeu de shoot à la troisième personne. Entouré par vos troupes auxquelles vous pourrez donner des ordres basiques, ou que vous pourrez choisir de contrôler individuellement, vous devrez alors remplir lesdits objectifs en massacrant l'ennemi. Si au départ, vous ne contrôlerez que 3 ou 4 unités d'infanterie, parfois accompagnées d'un char, vous finirez par commander une quinzaine d'escouades spécialisées et de machines de guerre terrifiantes. Soldats équipés de lance-flammes, de bazookas ou de sulfateuses, véhicules antiaériens, chars légers ou lourds, rovers de reconnaissance, hélicos ou navires de guerre, la liste des outils est longue et répond toujours à la logique implacable du jeu pierre/feuille/ciseau.
En bon commandant, on devra donc garder en tête que les tanks sont efficaces contre l'infanterie et les structures ennemies, mais n'apprécient guère les bazookas et les hélicoptères. Ces derniers seront par contre vulnérables aux unités sol-air et aux raids de chasseurs. Même combat pour les différents types de navires de guerre et le sous-marin, puisque cet épisode s'amusera régulièrement à nous faire faire trempette dans une mer qui dans un autre contexte, aurait pu être paradisiaque. Bref, vous l'avez compris, toutes les unités du jeu ont leur propre croque-mitaine personnel et il vous faudra rapidement comprendre la place de chacune dans cette chaîne alimentaire.
Soutenu par une interface très accessible qui affiche l'ensemble de vos unités dans le bas de l'écran, il vous sera possible de choisir, soit tous les hommes d'un même type, soit un combattant en particulier. Pour ce faire, il vous suffira de naviguer avec la croix de la Wiimote de gauche à droite dans le premier cas, et de haut en bas une fois arrivé à destination pour la seconde option. Ne restera plus qu'à locker la cible, ennemie ou alliée, et à appuyer sur le bouton A pour demander une attaque ou une protection rapprochée. Pour intimer à vos ouailles l'ordre de vous suivre, rien de plus simple, une petite pression sur le fameux bouton A sans rien viser de particulier, et hop, tout le monde vous emboîtera le pas sans rechigner. C'est d'ailleurs ce qui constitue l'une des grandes forces du soft, qui se montre très jouable et ne souffre pas de problèmes majeurs d'IA ou de pathfinding. Et même si les ordres restent très basiques, ils offrent tout de même un bon petit nombre d'options tactiques.
Cela dit, Battalion Wars 2 se présente tout de même surtout comme un titre d'action, très réussi au demeurant, et c'est souvent vous qui ferez la différence dans un affrontement en prenant directement le contrôle de l'unité la plus sollicitée sur le moment. Là encore, que vous vous trouviez dans les bottes d'un fusilier, dans un char ou sur le pont d'une frégate, les contrôles se montrent identiques et très intuitifs. Dans tous les cas, les déplacements sont gérés par le stick du Nunchuk, indispensable pour jouer. Quelques actions de base, comme les roulades (qui ne fonctionnent bien évidemment que lorsqu'on incarne un fantassin) vous demanderont simplement d'incliner la petite larme de plastique sur le côté. Bref, il y a là tout ce qu'il faut pour traverser des missions qui apparaissent sensiblement plus courtes que par le passé, mais sans doute mieux ficelées et plus frénétiques. Il y sera souvent question de petites escarmouches, d'attaques de campements moyennement défendus et qui une fois capturés, vous permettront d'obtenir des renforts et ainsi de constituer une force conséquente, capable de mettre à mal le bastion principal de l'adversaire au cours d'une bataille dantesque.
L'ensemble se montre en plus particulièrement varié et les campagnes alternent batailles terrestres et navales, assauts massifs et séquences de défense, sessions de reconnaissance et raids aériens. Kuju Entertainement a manifestement effectué un travail d'équilibrage titanesque afin de mêler action et stratégie avec autant de classe. Cela dit, même si le titre se donne de airs de STR, on en reviendra souvent à la bonne vieille tactique du gros porc, toujours efficace, et qui consiste tout simplement à courir vers l'adversaire en s'entourant d'un maximum de troupes et en concentrant les tirs sur une seule unité, avant de passer à la suivante. La structure du jeu, et le système d'ordres décrit précédemment ne permettent pas véritablement d'envoyer des troupes à l'autre bout du terrain pour une attaque ciblée. Et en termes de tactique, la campagne ne nous impose finalement que de choisir les unités les mieux adaptées au combat du moment, ainsi que celles que l'on laissera momentanément en arrière.
Mais même si le mode solo se montre particulièrement réussi, c'est véritablement online que Battalion Wars 2 fait mouche. Limité à deux joueurs, le titre propose tout de même quelques sympathiques missions en coopération, un mode escarmouche dans lequel on se contentera de pulvériser toutes les unités de l'adversaire, et surtout un mode Assaut qui s'apparente à une partie solo. En fait, il s'agira là, selon le cas, d'accomplir ou de défendre une série d'objectifs. En tant qu'agresseur, il vous faudra atteindre tous les objectifs du niveau puis capturer le Q.G. adverse avant la fin du temps imparti. Le défenseur se chargera, lui, de vous mettre des bâtons dans les chenilles et des obus dans le pantalon. Sans possibilité de communiquer avec l'autre joueur, cela peut parfois tourner au grand n'importe quoi, mais dans la plupart des cas, Battalion Wars 2 se montre extrêmement plaisant à pratiquer en ligne. Pour finir, déclarons simplement que le bébé de Kuju a tout du bon bol d'air frais que nous espérions. Avec son cocktail d'action mâtiné de stratégie, sa campagne courte mais mieux rythmée que celle de son aîné, son dynamisme, son style cartoon ravageur et son multi online de haute volée, Battalion Wars 2 mérite amplement le coup d'oeil.
- Graphismes15/20
Plutôt joli, le titre de Kuju Entertainement vaut surtout par son style graphique hérité de la série Advance Wars. Même en affichant des paysages colorés, des tanks rondouillards et des soldats qui se déhanchent comme de petits Mario en herbe le jeu propose une action violente, rageuse, et rythmée par de nombreuses explosions. Le contraste est frappant et permet de mettre en avant le côté délicieusement parodique de ces guerres caricaturales.
- Jouabilité15/20
Outre des contrôles bien pensés et accessibles auxquels on ne pourra pas reprocher grand-chose, le titre offre une campagne intelligemment structurée qui joue la carte de la variété. Attention tout de même pour les amateurs de stratégie, Battalion Wars 2 est avant tout autre chose un titre d'action soutenu par quelques légers nuages de tactique, comme le thé du commandant Windsor. En effet, les ordres que l'on peut donner à nos troupes s'avèrent peu nombreux et limités et ne permettent pas d'élaborer d'énormes assauts en plusieurs temps comme dans un véritable STR.
- Durée de vie14/20
Six campagnes pour une vingtaine de missions au total, voilà ce qui vous attend dans Battalion Wars 2. Notons tout de même que celles-ci s'avèrent globalement plus courtes et probablement plus faciles que chez le prédécesseur. Cela dit, les joueurs qui ont la possibilité de connecter leur console sur le net peuvent se préparer à passer de nombreuses nuits blanches, puisque le titre propose enfin des modes multijoueurs, à pratiquer à deux. Seul regret, l'absence de parties locales.
- Bande son16/20
De jolies mélodies accompagnent le joueur tout au long de l'aventure. Là encore, le soft affiche sa gentille duplicité en associant des thèmes épiques et guerriers à des morceaux guillerets et sucrés. Les voix anglaises, seules disponibles dans le jeu, sont très réussies et confèrent à chaque personnage une identité bien trempée. Du sergent à la voix rocailleuse de la Fédération Occidentale au guindé Windsor en passant par le maréchal Nova, tous ont leur accent et tous font sourire. Les bruitages eux, sont tout à fait corrects.
- Scénario15/20
Une histoire rondement menée, qui sous de jolies couleurs et une apparente bonhomie évoque une réalité bien plus sinistre. Le jeu, s'il ne prétend pas faire du Tom Clancy, délivre une histoire attachante, cohérente et habilement présentée par le biais de quelques missions flash-back et de très belles cinématiques.
Sans rien chambouler à la formule d'origine, Kuju Entertainement nous offre là un excellent titre d'action mâtiné d'un soupçon de stratégie. Plus fouillé, mieux rythmé et plus varié que le premier épisode, Battalion Wars 2 diffuse sa bonne humeur au fil de batailles dantesques et rondement menées. On profitera même d'un mode multijoueur bienvenu, bien que malheureusement réservé aux gamers connectés. Et une fois encore, l'univers cartoon affiché par le titre permet de traiter avec intelligence et humour de sujets beaucoup plus sombres. Chapeau.