C'est un peu comme une résurrection, une réminiscence du passé. Plus fort encore que Prey revenu d'entre les morts, Team Fortress 2 voit le jour en 2007 alors qu'il aurait dû sortir en 1999. Plus personne ne croyait à sa venue mais voilà que Valve, sûrement par pur esprit de contradiction redonne vie à ce grand classique des mods pour en faire un FPS online décomplexé et fun.
Loin des shoots en ligne au déroulement et aux règles complexes tel que Quake Wars, loin également de l'univers SF viril et des skills de Unreal Tournament, à des années lumières de la maîtrise de Masta King de Counter Strike, Team Fortress 2 prend des airs de jeu simple d'accès, au design délirant, un titre nerveux, accessible et ouvert qui reprend les bases de son ancêtre. Ce que Valve propose avec TF2, c'est un FPS multi old-school pur jus mais auquel on a collé un design qui tranche sévèrement avec ce qu'on a l'habitude de voir, préférant à la science-fiction ou aux univers réalistes un aspect cartoon rigolo. De Team Fortress premier du nom, célèbre mod qui a commencé sa carrière sur Quake en 1996, on retrouve en premier lieu les 9 classes dont chacune ont leurs spécificités. Le Scout se comporte comme un guépard avec sa vitesse de déplacement très élevée et ses doubles-sauts qui en font le plus à même d'aller voler le drapeau dans la base adverse ou de prendre possession des points de contrôle, ce qu'il peut faire plus rapidement que les autres joueurs. Le Soldier plus lent mais lourdement armé avec son lance-roquettes remet au goût du jour les rocket jumps qui le font bondir sur de longues distances. Le Sniper reste le campeur classique que l'on connaît pendant que le Pyro se comporte comme un grand malade équipé de son lance-flamme à courte portée et devant prestement s'équiper de son shotgun pour se défaire d'un adversaire trop éloigné. Quant au Medic ou à l'Engineer, ils offrent encore des expériences de jeu totalement différentes des autres. Vitesses, armements, vulnérabilités, rôles, chaque classe est unique.
Parmi les classes du jeu, il faut toutefois distinguer différents degrés de maîtrise ou de complexité. Extrêmement aisé d'accès, Team Fortress 2 accueille les débutants sans problème, quel que soit le rôle que l'on décide d'occuper. D'ailleurs, avant chaque partie, on a la possibilité de visionner une petite vidéo d'introduction à la carte jouée puis de lire un court descriptif de la classe choisie. Néanmoins, certaines fonctions exigeront plus de subtilités que d'autres. L'Engineer a la lourde tâche de fabriquer et de placer avec discernement les tourelles de défense qui peuvent se révéler cruciales lorsqu'on doit protéger sa base et un bon joueur peut s'avérer déterminant dans une partie. Du coup, il faudra qu'en face on dispose d'un ou plusieurs Spy hors pair pour régler le problème. Le Spy peut en effet infiltrer les rangs ennemis pour saboter les tourelles ou même attirer à lui les Medics et les neutraliser, sans parler de la capacité à se glisser dans le dos des adversaires pour les poignarder. Ainsi, lorsqu'en incarnant les Blu, vous avez à prendre d'assaut la base des Reds et que ces derniers savent ce qu'ils font en matière de tourelles positionnés sournoisement (difficiles à voir, autant à neutraliser), sans un minimum de coordination pour en venir à bout, vous n'aurez aucune chance. Et pour poursuivre l'exemple de l'Engineer, on étendra son importance en citant la fabrication de points de ressources, munitions ou kits de soins. De plus, sachez que les classes de Team Fortress 2 sont fondamentalement déséquilibrées. Voilà pourquoi la coopération est bien plus importante qu'on le pense de prime abord. Ne négligez donc pas des couples comme le classique Medic/Heavy, un toubib assure l'invulnérabilité du joueur équipé de la Gatling, tous deux pouvant alors faire des ravages dans les lignes ennemies, tant que personne ne réussit à abattre le Medic.
Ceci étant, même les plus complexes des classes ne nécessitent pas des heures et des heures d'apprentissage et on fait assez vite ses armes dans TF2, le jeu étant très clair sur le rôle de chacun. Ce qui n'empêche pas le titre d'avoir deux degrés de pratique, à la fois très accessible aux débutants absolus mais pouvant offrir satisfaction aux joueurs plus expérimentés, découvrant les subtilités du jeu à force de pratique. Des joueurs qui retrouveront de plus les grands classiques du genre, loin des innovations à la mode de Quake Wars et autres Crysis, pour ceux qui ont tâté sa bêta. De fait, TF2 propose six cartes dédiées à des modes différents. Sur le remake de 2Fort, on se lancera dans un CTF où le drapeau à capturer devient une mallette pendant que Well et Granary proposent de dominer les points de contrôle disposés dans les deux bases Blu et Red. Sur Dustbowl et Gravepit, on dévie un poil de cette thématique puisque le but sera ici de conquérir les trois points de contrôle d'une équipe qui s'efforce pour sa part de défendre. Quant à Hydro, elle vient illustrer le mode de conquête territoriale et se présente comme une suite de petites maps dont il faut s'emparer. Et il va de soi que dans chaque mode, le rôle des différentes classes ne sera pas le même. Bien conçues, ces cartes offrent le même double degré de pratique. Partout, de gros panneaux vous indiquent où trouver quoi, la mallette, les points de contrôles A, B, ou C, du coup, vos première parties ne consisteront pas à vous emparer d'un drapeau pour ensuite ne plus savoir où vous devez le ramener. Mais avec la pratique, on découvre les chemins détournés, les vrais bons spots pour sniper, les recoins où placer une tourelle ou un téléporteur etc.
Cette tendance à la clarté, on la retrouve d'ailleurs dans le HUD du jeu qui vous indique de façon bien lisible si votre mallette a été capturée, qui est en train de prendre le point de contrôle de qui ou quel joueur a besoin d'assistance. Cette lisibilité, on la doit en partie au design burlesque du jeu qui aide à avaler les grosses icônes habituellement fort peu appréciées. Mais avec sa patte graphique d'inspiration cartoon, Team Fortress 2 sort du lot habituel et une pointe de dérision dans un flot de shooters online trop sérieux, ça change. Le charisme des personnages est plaisant, tout comme le son de leur voix que l'on peut entendre en balançant des messages en cours de partie ou en narguant un adversaire. Dans cette veine, Valve a même inclus un aspect revanchard à son jeu. A chaque décès et avant votre respawn, vous aurez droit à un plan fixe sur votre assassin et si un joueur en domine un autre, en le fraggant plus d'une fois de suite, le titre vous en informe et en fait votre bête noire, vous encourageant à prendre votre revanche pour un maximum de points au final. Lorsque vous passez de vie à trépas, on vous montre même le « bon côté de la vie » en énumérant ce que vous avez tout de même accompli, meilleurs temps de survie, votre record personnel de coopération en tant que Soldier et autres exploits individuels. On trouve même une feature inédite, le jeu est capable d'identifier la coopération dans un frag, si vous vous acharnez à deux sur un adversaire, le frag ne va pas à celui qui a pris son dernier point de vie mais aux deux joueurs. Fini les vols de frag ou le manque de reconnaissance d'un petit travail d'équipe.
En somme, Team Fortress 2 a tout pour plaire. Voilà un jeu en ligne en équipe qui réussit à se montrer accueillant pour le débutant sans pour autant frustrer le joueur plus aguerri, qui propose un design décalé et un peu d'humour bienvenu, l'ensemble au service d'un gameplay efficace. Pourtant, on peine à ne pas lui reprocher deux ou trois petites choses, comme l'impossibilité d'activer un friendly fire par exemple, ça ne coûte rien et ça manquera sans doute à quelques-uns. Mais c'est principalement son très faible nombre de maps qui fâche. Six cartes même bien fichues, c'est tout de même un brin radin. Maintenant, tout un chacun sait que d'ici peu, la communauté se mettra au travail et pondra des dizaines de nouvelles cartes qui devraient assurer à Team Fortress 2 une longue vie. Dommage pourtant que Valve ait agi avec Team Fortress 2 comme avec Portal : proposer la base et laisser les joueurs faire le reste.
- Graphismes16/20
La technique a quelques ratés sur les textures et offre des modèles assez simplistes mais qui collent idéalement aux choix artistiques du jeu. Ce design cartoon apporte une grosse dose d'humour à un genre qui en manque cruellement, quitte à faire fuir certains puristes grincheux. Tant pis pour eux.
- Jouabilité17/20
Tout est fait pour orienter les joueurs en douceur, accueillir le débutant ou satisfaire l'expérimenté en proposant une courbe d'apprentissage régulière et rapide. Quant au gameplay, il dépoussière des concepts vieux comme le CTF avec brio et met à disposition 9 expériences différentes avec ses différentes classes.
- Durée de vie17/20
Limité pour le moment à 6 cartes, Team Fortress 2 est déjà largement assez fun pour se maintenir à flot jusqu'à l'arrivée des maps en provenance des joueurs. On peut parier sur son avenir.
- Bande son18/20
La bande-son rejoint le travail esthétique au service de l'humour avec principalement des voix ridicules et drôlissimes.
- Scénario/
Valve réussit un étrange pari, celui de rafraîchir un gameplay éculé. Parfait complément à d'autres softs en passe de devenir des usines à gaz tant leur déroulement est complexe, TF2 s'impose comme un titre qui s'aborde comme on le souhaite, comme un pro ou comme un béotien mais avec un seul but clair et assumé : se marrer en ligne sans trop se prendre la tête. Ne lui manque qu'un nombre de maps plus fourni.