La multiplication des FIFA sur Xbox 360 ces deux dernières années n'a pas servi la série. Des titres développés à la va-vite, dans un éternel souci de respecter des délais de sorties annuelles, voire davantage avec des échéances telles que la Coupe du Monde en Allemagne. Une succession de déceptions qui nous ont poussés à nuancer les propos des développeurs qui assurent à chaque opus avoir révisé leur copie. Et c'est sans doute au moment où l'on s'attend à essuyer une énième déconvenue qu'une armée de développeurs, à qui l'on donne enfin les moyens des ambitions affichées, réalise le contre-pied parfait. Même un Alessandro Nesta ou un Fabio Cannavaro auraient mordu à la feinte... On s'incline.
FIFA 07 a en partie décrédibilisé le discours ambitieux, voire mégalomane d'Electronic Arts qui a toujours cherché à nous convaincre des efforts concédés dans les développements des versions de leur "simulation" footballistique. Mais en réalité, c'est aussi et surtout parce qu'en ligne de mire, FIFA 08 pointait déjà le bout de son nez. Comprenez en cela qu'il faut lui associer quasiment deux années de développement, soit un laps de temps plus que suffisant pour gommer, au moins partiellement, les tares accumulées depuis quelques saisons par celui qui a perdu son statut de référence au profit du PES de Konami. Un regain de sérieux qui a un double impact sur cette version qui n'a pas gâté les possesseurs de Xbox 360, forcés de faire avec des débuts d'ébauches de commencements de contenu et un gameplay qui n'avait rien de "nouvelle génération". Une époque définitivement révolue. Cette année, ce sont bien les versions next-gen qu'il faut prendre comme référence et qui ont fait l'objet des meilleures attentions des équipes en charge du projet. Le sourire de Ronaldinho et la détermination de Ribéry sur le packshot en sont le parfait symbole.
La transformation est radicale, surprenante, grisante. FIFA s'invite au rang des simulations, dans tous les sens du terme. Un contraste flagrant que l'on fait déjà depuis quelques semaines et les prestations en salon du protégé d'EA Sports. En douze petits mois, le profil du jeu a connu l'évolution qui aurait dû être la sienne depuis 2003. C'est dire si le dépaysement est au rendez-vous, à tel point qu'il n'est plus de rigueur d'associer ce titre au terme arcade, désormais bien loin de la mentalité qui sévit sur le terrain. Un rythme de jeu fondamentalement plus lent, une physique de balle indépendante, une animation d'une rare fluidité et surtout un contrôle de balle qui envoie aux oubliettes le "Je contrôle, je passe, je contrôle, je centre, je tire, je marque". Preuve en est, les joueurs multiplient les petites touches de balle pour mieux contrôler le cuir, en fonction de la puissance de la passe, du rebond et de leur meilleur pied. De quoi humaniser clairement leur comportement individuel qui met enfin en avant les différences de gabarits et de maîtrise technique du joueur contrôlé. La gestion des contacts, en lutte aérienne comme au sol, en profite tout autant, avec des petites poussettes, des tirages de maillots et des petits coups bas lorsque l'on abuse des touches de pression, certes efficaces, mais qui conduisent régulièrement l'arbitre à sanctionner des interventions jugées illicites. Des coups de sifflet cependant pas toujours justifiés, ce qui constitue l'un des points noirs du jeu. Il est rageant de concéder un penalty pour avoir tenté de subtiliser la balle proprement, sans tacler ni faire tomber l'attaquant...
A ceux qui étaient allergiques à l'automatisation ultra présente des transmissions et des frappes de balle, EA a répondu de la meilleure des manières en proposant, dans les options, de rendre tout ceci le plus manuel possible. Et la liberté de jeu s'en voit décuplée, rehaussant considérablement le niveau de difficulté, ce qui nous amène à conseiller cette configuration aux joueurs aguerris tant elle fait place aux erreurs multiples. La conservation du ballon a un prix, celui du timing parfait. Concrètement, il faut jouer avec la pression de la touche de passe ainsi qu'avec le stick analogique gauche (toutes les directions étant fonctionnelles) pour donner un ballon à l'endroit précis souhaité, que ce soit dans les pieds ou dans l'espace, en sautant ou non une ligne. Un principe qui vaut également pour les centres, dont les six possibilités (ras-de-terre, mi-hauteur et aérien, chacun immédiats ou non) permettent de trouver le joueur démarqué et d'éviter aussi souvent que possible des duels aériens perdus d'avance dans le style Baky Koné contre Lucio. En résumé, le joueur a enfin la sensation de construire ses propres actions, d'autant que l'IA n'a plus cette maudite habitude d'anticiper on ne sait comment nos décisions et de glisser littéralement. Les déplacements sont donc individuels et pas seulement réalisés en direction du ballon, de sorte à ce que le marquage, en zone ou non, et l'alignement des trois ou quatre défenseurs soit assuré. Et ça, ça fleure bon le réalisme comme on l'aime.
Techniquement parlant, les possibilités sont nombreuses et désormais utiles voire salvatrices en fonction du niveau de difficulté (amateur, semi-pro, pro ou légende) choisi. Pas de tricks surréalistes où le joueur se prend pour une otarie à qui on aurait greffé un pied de Messi et un pied de Ronaldinho. Tout se fait au stick analogique droit, en maintenant la gâchette gauche enfoncée, de sorte à réaliser des feintes de corps, des passements de jambes, des râteaux, des roulettes, des coups du sombrero, des talonnades ou encore le fameux Flip Flap, jouissant lorsqu'il est réussi. Tout ceci dans un unique but, se trouver, à un moment donné, en position idéale de tir. Et là aussi, la variété des tirs manuels permet de placer son ballon à n'importe quel endroit de la cage de 2m44 par 7m32. Adieu les tirs enroulés qui finissaient à mi-hauteur, ras du poteau. Mais tout n'est évidemment pas parfait. En dehors de l'arbitrage, parfois douteux sur les contacts, on ne peut que regretter les caguades de gardiens, parfois très mal inspirés. Pourtant, ceux-ci ont perdu leur mauvaise habitude de ne plonger qu'à mi-hauteur et d'être battus par des frappes qui finissent sous la barre ou en lucarne. Autre point noir, la sélection du joueur qui, lorsqu'elle est passée en manuel, souffre de quelques approximations, notamment sur les contres adverses où l'on s'acharne sur le stick analogique jusqu'à ce que le joueur souhaité soit contrôlé. Toutefois, cette fonction est très utile si une passe courte est manquée, histoire de switcher le réceptionner, placé dernière l'initial.
Tactiquement cette fois, FIFA 08 inclut un éditeur de formations bienvenu, histoire de ne pas être restreint par les formations de base, pas toujours très pertinentes dans le placement des joueurs. On peut donc paramétrer le positionnement de chaque joueur du onze type de l'équipe souhaitée ainsi que leur mentalité en phases offensives et défensives. Sans oublier le choix des tireurs de coups de pieds arrêtés qui restent, sur la pelouse, toujours un peu délicats à jouer, ce qui constitue un autre point perfectible pour le prochain opus. Toujours en terme d'édition, le mode création de joueurs s'avère très poussé, notamment sur l'aspect physique, ce qui nous fera regretter le fait de nous pouvoir que modifier les informations et capacités des joueurs déjà en place. Un lifting n'aurait pas été de trop puisqu'encore une fois, le moteur de la machine ne semble pas suffisamment maîtrisé pour que les visages permettent de reconnaître immédiatement les acteurs, même s'il s'agit d'une star internationale.
La pléthore de championnats absents de cette version l'année dernière est bien là, on en note même quelques nouveaux (Australie, Autriche, Eire, République Tchèque, Ligue 2 française). Au même titre que les modes de jeu classiques (match amical, Compétition, Carrière, Fiesta et Défi) mais aussi et surtout de la grosse nouveauté : "Deviens Pro". Essentiellement multijoueur, celui-ci est également accessible sous forme de matchs uniques en solo. Le principe est tiré du célèbre et non moins ancien Libero Grande. Vous incarnez donc un seul joueur, de votre choix (sauf le gardien, ce qui est dommage pour les aficionados de ce poste si particulier), de la première à la dernière minute d'une rencontre avec tout ce que cela comprend de particularités en fonction de la position occupée sur la pelouse. Un jeu de caméra jongle d'une vue globale lorsque l'action se situe au centre du terrain à une vue rapprochée devant les buts adverses et si c'est vous qui contrôlez le cuir. L'impression d'incarner un seul et même acteur dans un stade et une pelouse immense n'a jamais été aussi bien pensée et réalisée. Mieux encore, balle au pied et en pleine accélération, une caméra dynamique vous suit de près, exactement à la Gears Of War pour les amateurs de FPS. Sensations garanties. Votre impact sur le déroulement du jeu est cependant élargi puisqu'il est possible d'ordonner à vos coéquipiers de presser l'adversaire ou de tirer au but. Mais l'essentiel reste de pouvoir demander le ballon dans les pieds ou dans l'espace, de sorte à participer au jeu et à rendre une copie positive, évaluée à la fin du match avec tout un tas de statistiques propres à votre prestation. Jouissif !
Le jeu en ligne, c'est aussi ce sur quoi se concentre ce FIFA 08. Très gonflé, celui-ci jongle entre les Ligues Interactives, publiques ou privées, dont le concept n'était pas présent sur Xbox 360, les championnats jusqu'à 32 et les parties diverses et variées, personnalisables à souhait, avec ou sans classement. Ce qui est déjà beaucoup en attendant la mise en ligne du mode 5 contre 5 se présentant comme le meilleur moyen de vivre des matchs en multi. C'est aussi EA Sports Football World, lieu de communication, de comparaison, de défis, où il est possible de consulter les parcours et statistiques de tous les autres joueurs. On peut également se joindre à des groupes de fans, se tenir au courant des infos foot, télécharger les mises à jour récurrentes qui permettent de jouer avec les effectifs actuels et de gommer les quelques oublis de la base de données, la majeure partie du temps dus à un manque de temps justement. A noter en plus, un partage de ralentis, après une inscription ici. Enfin, on appréciera la division du Online selon trois salles, Débutants, Experts et Elites, selon les niveaux des joueurs et en fonction de leur pourcentage de matches non terminés, idéal pour identifier la qualité et la fiabilité des joueurs connectés. Autant de possibilités qui prolongent le multi Offline qui peut accueillir des parties jusqu'à quatre.
- Graphismes17/20
En dehors d'une modélisation des visages des joueurs imparfaite, FIFA impressionne en parvenant à franchir un nouveau palier graphique après s'être légèrement essoufflé, notamment au niveau des textures des pelouses. Très proche d'une retransmission télévisée, ce volet prône le réalisme technique à tous les étages, avec l'habituel coup de pouce des licences, des maillots qui bougent au vent et surtout une animation quasi sans faille. Mention spéciale à la vingtaine de stades officiels, fidèles au plus haut point aux plus célèbres enceintes internationales.
- Jouabilité17/20
FIFA est enfin une simulation. Ce réveil tardif et presque surprenant place le jeu d'EA Sports en concurrence plus que jamais directe avec la mentalité d'un PES. Plus complet, plus fluide, plus réaliste, ce cru 08 est avant tout plus varié dans les phases de jeu et propose un contrôle des plus manuels sur la circulation de la balle, dont la physique est pour la première fois totalement indépendante des joueurs. On regrette cependant, pour les vieux de la vieille ou les allergiques aux sticks analogiques, que les déplacements ne puissent être opérés avec la croix directionnelle.
- Durée de vie17/20
A l'exception des compétitions internationales, rien ne manque à ce FIFA, si ce n'est d'être justement plus complet au niveau des sélections jouables, une quarantaine seulement. Le solo comme le multi vous occuperont largement jusqu'à FIFA 09, entre les modes Carrière, Compétition et Défi pour le premier et Fiesta et Online pour le second, d'autant que des matches à 5 contre 5 suivront bientôt. Le mode "Deviens Pro" apporte une agréable fraîcheur mais souffre de n'être pas assez développé en solo, dans l'optique de proposer une variante à la Carrière.
- Bande son17/20
Occupé par sa délicate mission de relance du PSG, Paul Le Guen a redonné la place à Franck Sauzée pour accompagner Hervé Mathoux de Canal+, fidèle au poste. Un résultat forcément concluant si l'on met de côté quelques rares incohérences et répétitions du duo de choc. Quant à l'ambiance des stades ou la tracklist des menus, elles s'imposent une nouvelle fois comme des références de choix, avec, entre autres, la présence d'un speaker parfaitement audible ou des chants officiels de supporters de sélections nationales ou de clubs huppés.
- Scénario/
Le choc opéré par la profonde refonte du gameplay de FIFA est un véritable tournant sur ce marché hautement concurrentiel, qualitativement parlant tout du moins. D'autant que cette attente date de plusieurs années et qu'elle réunissait à la fois les fidèles de la série et ceux qui souhaitaient voir PES davantage chahuté sur le rectangle vert. On accueille donc à bras ouverts ce FIFA qui laisse derrière lui un passé récent délicat et un profil qui ne sera désormais plus le sien. Une vraie bonne simulation affichant le réalisme que tout connaisseur réclame.