Si vous suivez l'actualité RPG avec attention, peut-être vous demandez-vous pourquoi le test de Wild Arms 4 n'arrive que maintenant. Sorti initialement chez nous en octobre 2006, le soft a en fait été récemment réédité dans une version expurgée des bugs qui sabotaient l'édition française originale. Il nous aura donc fallu d'abord mettre la main sur la bonne version du jeu pour vous en proposer un test complet.
Le sort semble bien s'acharner sur la série des Wild Arms qui souffre depuis quelques années d'une distribution chaotique en Europe. Tandis que les épisodes 2 et Alter Code F n'ont même pas atteint les frontières du vieux continent, ce quatrième volet aura bien failli lui aussi rater son tour du monde, mais c'était sans compter sur l'oeil attentif de 505 GameStreet qui a heureusement compris l'intérêt de porter ce titre dans notre pays. Alors certes, les textes restent en anglais et les premiers acheteurs auront dû essuyer les plâtres d'une première édition truffée de bugs, mais on peut aujourd'hui s'estimer heureux de pouvoir découvrir le quatrième volet d'une série qui gagne à être connue. Ne nous leurrons pas pour autant, si le premier Wild Arms avait souffert de la sortie simultanée de Final Fantasy VII, celui-là se verra sans doute complètement éclipsé par le phénomène FFXII. Par conséquent, seuls les inconditionnels du genre auront la bonne idée d'aller se le procurer sous l'oeil méprisant du grand public qui passera encore une fois à côté d'un très bon jeu.
Si la série Wild Arms ne manque pas de singularités, les fans se rendront compte avec étonnement que ce nouvel opus n'hésite pas à tirer un trait sur la plupart d'entre elles, au risque de heurter les puristes. A ce sujet, on peut déjà signaler le changement de formule au niveau du prologue, puisque celui-ci n'est plus agencé de manière à présenter au joueur les différents héros dans des phases de jeu où l'on s'attendrait à pouvoir les contrôler individuellement. Au lieu de ça, la réunion des quatre membres de votre équipe se fait plutôt rapidement et enchaîne directement sur l'apparition du traditionnel dessin animé d'introduction précédant le véritable début de l'aventure. Un changement qui s'explique par le fait que seul le détenteur de l'ARM intervient durant les phases d'exploration, les autres n'apparaissant que lors des affrontements. Autrement dit, la tradition qui voulait que l'on doive switcher entre ses personnages pour utiliser leurs capacités afin de progresser dans les niveaux n'est plus vraiment d'actualité, mais elle ne disparaît pas pour autant. Les concepteurs ont en effet opté pour une gestion d'outils spéciaux tels qu'un bâton à enflammer ou des bombes à faire exploser, utilisables dans les niveaux pour interagir avec certains éléments du décor, tout ça dans le but de résoudre les différents casse-tête proposés. Un choix qui ne fera peut-être pas l'unanimité mais qui revient finalement au même, si ce n'est qu'on aura davantage tendance à s'attacher à Jude, le héros principal, plutôt qu'à ses coéquipiers.
L'adolescent ne serait pourtant rien sans le support de ses trois précieux alliés qui n'en disposent pas moins de suffisamment de charisme pour lui voler la vedette. Archétype de la demoiselle timide et dévouée, Yulie Ahtreide était vouée à devenir la guérisseuse attitrée du groupe, compte tenu de sa faible endurance. Mais son rôle ne se limite pas à ça puisque, sous certaines conditions qui seront évoquées un peu plus loin, elle s'improvise maîtresse des éléments et devient capable d'invoquer de très puissantes créatures. Malgré son look de jeune premier et son côté beau parleur, Arnaud G. Vasquez n'est pas l'individu lâche qu'il croit lui-même incarner, car ses talents magiques le rendent étonnamment efficace voire même indispensable en tant que personnage de soutien. Vous l'utiliserez donc essentiellement pour lancer des sorts à distance, notamment pour réduire les capacités de vos ennemis, sa plume de combat n'étant que peu efficace au corps-à-corps. On garde le meilleur pour la fin avec Raquel Applegate, une épéiste dont le charisme et le franc-parler n'ont d'égal que son incroyable efficacité en combat direct.
J'abrège volontairement cette présentation des personnages et du scénario pour m'attarder tout de suite sur le système de jeu qui mérite pas mal d'explications. L'histoire, vous la découvrirez par vous-même au moyen des cut-scenes et des dialogues, du moins si vous comprenez l'anglais, mais leur teneur ne constitue pas, à mon avis, le véritable point fort du titre. L'ambiance se veut toutefois agréablement imprégnée de l'approche western qui a fait la réputation de la série, et le rôle des protagonistes qui échafaudent des plans dans le QG ennemi n'est pas sans rappeler le fameux Skies of Arcadia. Plus linéaire que ses prédécesseurs, Wild Arms 4 vous entraîne dans un voyage d'une trentaine d'heures à travers une succession de niveaux, donjons et villages, qui s'enchaînent sans que l'on puisse vraiment partir à l'aventure en empruntant des voies détournées. Un manque de liberté qui s'explique par la disparition des déplacements en extérieur via une map en 3D, remplacée ici par une simple carte permettant d'atteindre chaque destination instantanément. Autant dire qu'on avance très vite dans cet épisode, surtout que la difficulté globale se révèle assez faible, ne serait-ce que parce que les personnages regagnent toute leur énergie entre chaque combat et que l'assainissement de certains points de sauvegarde permet carrément de désactiver les rencontres aléatoires dans la plupart des donjons dès qu'on en ressent le besoin.
Une approche qui prouve que les concepteurs ont voulu privilégier l'aspect stratégique des combats et la résolution des énigmes au détriment de l'exploration. Les donjons proposent ainsi un très grand nombre de casse-tête à résoudre en utilisant les outils trouvés en chemin, mais aussi beaucoup de phases de plates-formes assez inattendues dans un jeu de rôle. L'occasion de mettre à contribution la technique d'accélération de Jude qui permet de ralentir tous les éléments extérieurs pour surmonter certains pièges. Si ces séquences se révèlent parfois délicates, elles ne sont pas pénalisantes dans le sens où on peut recommencer autant de fois qu'on veut en repartant directement au début du dernier écran. Par cet aspect-là, le soft se démarque agréablement des autres RPG sur consoles et s'autorise en même temps une vraie diversité dans les situations proposées. Le système d'obtention des compétences est aussi plutôt bien pensé puisqu'il vous permet d'attribuer temporairement les points obtenus en montant de niveau dans les aptitudes de votre choix avant de les acquérir définitivement lorsque vous atteindrez le niveau requis. Dans le même ordre d'idées, l'ARM de Jude évoluera suivant vos choix, à condition de dénicher les items prévus à cet effet et qui, à l'instar des badges à équiper, font partie des éléments les mieux cachés dans le jeu.
Au milieu de toutes ces bonnes idées, ce qui satisfera le plus le joueur sera sans doute le système de combat, radicalement différent de ce qu'on avait pu voir auparavant dans la série. L'arène se divise maintenant en plusieurs hexagones appelés HEX qui constituent autant de zones dans lesquelles les personnages et les ennemis vont pouvoir se déplacer pour agir. Selon l'action que vous voulez effectuer, vous devrez donc rester à distance ou bien vous approcher d'une zone adjacente pour frapper, mais la subtilité vient du fait que ce sont toutes les unités présentes sur cet HEX qui seront touchées. C'est aussi valable dans l'autre sens, et tout l'intérêt de ce système réside dans le dilemme posé par l'envie de regrouper tous ses alliés, pour par exemple les soigner d'un seul coup, au risque que chacun d'entre eux subisse des dommages lorsqu'un ennemi attaquera leur HEX. Il faut bien sûr garder à l'esprit que ce ne sont pas les unités qui sont frappées directement par les altérations d'état, mais seulement la zone où elles se trouvent, ce qui veut dire qu'il suffit de se déplacer pour y échapper. Le système permet ainsi de mettre en place de véritables stratégies de combat, et renouvelle constamment les affrontements pour le plus grand plaisir du joueur.
Il faudrait aussi parler de l'influence des effets naturels (eau, feu, terre, vent) sur les HEX, sachant qu'ils permettent d'ajouter la puissance de l'un de ces éléments dans vos sortilèges et même de déclencher des invocations. Par ailleurs, en groupant régulièrement tous vos personnages au même endroit, ils pourront acquérir des attaques combinées, bien plus efficaces que les attaques spéciales et qui se traduisent par des animations qui donnent envie de toutes les découvrir en jouant sur la répartition des personnages à l'écran. Ainsi, sous ses airs de RPG de seconde zone développé avec peu de moyens, Wild Arms 4 parvient à s'octroyer une véritable identité en multipliant les bonnes idées pour les mettre au service d'un système de jeu bourré de subtilités qui rattrape ses lacunes techniques et ses faiblesses de contenu. Autant de bonnes raisons pour ne pas bouder la sortie de ce titre qui a vraiment tout pour satisfaire l'amateur de RPG qui sommeille quelque part en vous.
- Graphismes14/20
Le jeu profite d'une réalisation 3D satisfaisante mais limitée, dans le sens où on ne peut pas explorer la carte et qu'on ne peut pas non plus déplacer la caméra ou pénétrer dans les bâtiments. Les attaques spéciales et les invocations sont assez bien mises en valeur, mais ce n'est vraiment pas par ses graphismes que le soft impressionne le plus.
- Jouabilité17/20
Les phases d'exploration dans les donjons font intervenir pas mal de plate-forme et d'énigmes à résoudre, ce qui surprend agréablement. Le système de combat est vraiment ingénieux et on comprend pourquoi il devrait être réutilisé dans le prochain épisode.
- Durée de vie15/20
Terminer le jeu en ligne droite devrait vous prendre une trentaine d'heures, car on avance assez rapidement et le niveau de difficulté n'est pas très élevé. Le soft recèle heureusement suffisamment de quêtes annexes, comme la collecte des badges, la recherche des Ex Files et les affrontements contre les boss optionnels pour rallonger considérablement la durée de vie.
- Bande son15/20
Les musiques sont à la hauteur de la réputation de la série avec des thèmes qui collent bien avec le côté western de certains passages du jeu. Seuls quelques dialogues sont doublés en anglais.
- Scénario14/20
Les textes ne sont pas traduits en français et seuls les anglophones pourront profiter du scénario. Certaines cut-scenes valent vraiment le coup d'oeil car la qualité de la mise en scène rattrape largement les faiblesses techniques.
Triste destin que celui de Wild Arms 4 qui risque de passer complètement inaperçu sous nos latitudes. Si vous aimez un tant soit peu le genre, ne boudez pas la sortie de ce RPG qui risque de vous étonner par la qualité de son système de jeu. Beaucoup de changements par rapport aux derniers volets de la série, mais les fans n'auront sûrement pas besoin de plus de quelques heures pour l'adopter sans regret.