Alors que la campagne pour les élections présidentielles françaises bat son plein, voilà que débarque à point nommé Mission President, un jeu qui vous met aux commandes du pays de votre choix. Votre objectif est très simple : tenter de rester au pouvoir le plus longtemps possible. Pour cela, vous pouvez prendre des mesures dans la majorité des domaines clés de la vie de la nation : éducation, police, impôts, culture... Un concept attirant donc, mais qui est plombé par la présence de nombreuses incohérences et de bugs qui font de ce titre une des plus grosses hontes des jeux vidéo.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que le projet du studio français Eversim était ambitieux. Créer un jeu capable de rendre compte de toute la complexité de la gestion d'un pays n'était pas une mince affaire. Les données à prendre en compte étaient en effet très nombreuses : monétaires, économiques, sociales... Les développeurs ont essayé de retranscrire le plus fidèlement possible les forces et les faiblesses de près de 230 pays ou territoires mondiaux dont 170 sont jouables. Comme le titre est avant tout un jeu, les noms des dirigeants, partis politiques et autres syndicats sont fictifs. Au début d'une partie, vous pouvez choisir entre deux modes : le mode mission qui vous imposera un objectif précis à réussir (par exemple augmenter les allocations familiales), et le mode scénario. Dans ce dernier, vous pouvez choisir le pays que vous contrôlez et il n'y a pas de limite de temps. Le but sera alors de rester au pouvoir le plus longtemps possible, ce qui ne sera pas une sinécure, croyez-moi.
Pour vous aider à gérer votre pays, 11 grands ministères sont à votre disposition : économie et finances ; agriculture, industrie, services et commerce ; santé et travail ; famille et logement ; police et justice ; défense nationale ; éducation et recherche ; culture ; environnement et transports ; politique nationale et enfin, affaires étrangères. Vous pouvez donner vos instructions à chacun d'entre eux. Par exemple, vous pouvez allouer plus de crédits au soutien scolaire, augmenter le minimum vieillesse... Cependant, ce n'est pas parce que vous avez pris une décision qu'elle sera appliquée. En effet dans les pays comme la France, il faut auparavant qu'elle soit adoptée sous forme de loi par le parlement. Et là, ça se gâte car ce dernier ne sera pas forcément du même avis que vous. Par exemple, si vous incarnez un président de droite, il vous sera difficile d'augmenter l'impôt sur la fortune car votre groupe parlementaire (majoritaire) s'y opposera. Vous pouvez donc dire adieu à votre mesure, à moins que vous ne donniez rendez-vous au président de votre parti pour lui demander de voter le projet (en lui donnant un dessous-de-table par exemple). Mais ça ne marche pas à tous les coups. Tout va dépendre de votre indice de popularité, popularité que vous devez tenter de maintenir assez élevée sous peine de devoir quitter le pouvoir aux prochaines élections ou même avant en cas de grosses grèves et d'émeutes.
Et c'est bien là que se situe un des gros problèmes du jeu : sa trop grande difficulté et ses nombreux illogismes. Pour mieux vous rendre compte de ce à quoi on est confronté, je vais prendre quelques exemples. Un défaut parmi tant d'autres concerne les réactions du peuple totalement à côté de la plaque. Si on tente d'augmenter de 1% l'impôt sur la fortune, augmentation très modeste s'il en est, il arrive de voir des manifestations contre ce projet rassemblant plusieurs dizaines de milliers de personnes à l'appel du... club de défense des automobilistes ! Vraiment très étrange, d'autant que le mouvement peut s'étendre et que la partie peut se terminer prématurément à cause d'une révolution vous poussant à l'exil. Et tout ça pour avoir pris une petite mesurette de rien du tout... Encore pire, alors que je contrôlais la Corée du Nord (un modèle de démocratie), quelle ne fut pas ma surprise de voir un sit-in provoqué par le mouvement des chasseurs (si, si !). Même en envoyant l'armée impossible de mettre fin au mouvement qui a pourri. La grogne a monté et je me suis retrouvé expulsé du pouvoir. Bref, c'est totalement fantaisiste et pour un jeu qui se revendique être une simulation, ça fait tache. Ces bugs sont vraiment très fréquents et il est impossible de les décrire tous ici : données à côté de la plaque, chiffres fantaisistes (ex : 545568774%5454-5454), fenêtres qui ne s'affichent pas et j'en passe.
Si la gestion des affaires intérieures du pays est quasiment impossible à cause de ces problèmes, ce n'est pas beaucoup mieux pour ce qui concerne les relations internationales. Ainsi, les dirigeants étrangers voudront très fréquemment prendre rendez-vous avec vous et lorsque l'entretien aura lieu, rien ne se passera ! Quoi, ils veulent juste me rencontrer pour prendre un café ? Ils ne nous demandent rien et il vous suffira de leur dire que vous venez souvent en vacances dans leur pays pour qu'ils vous adorent. En plus, les possibilités de questions offertes sont limitées et peu pertinentes. Par exemple, que fait la position "Vous devriez vous préoccuper un peu plus des droits de l'homme" dans une réunion entre le président français et la chancelière allemande ? C'est ridicule ! Encore pire (et oui, ça n'arrête pas), le choix des villes présentes sur la carte est pour le moins étrange. Pour la région Auvergne par exemple, c'est Aurillac qui est représentée et non pas Clermont-Ferrand. Dans ces conditions, difficile de vraiment entrer dans le jeu et de profiter des différentes possibilités guerrières, des sommets internationaux (ONU...), des accords commerciaux... En définitive, il semble que le studio de développement a été pressé par l'éditeur de sortir son titre en pleine période électorale, alors même qu'il manque plusieurs mois de développement. Et sortir un jeu visiblement inachevé, c'est évidemment s'exposer à la foudre des joueurs.
- Graphismes4/20
Certes, ça n'a jamais été le principal intérêt de ce genre de jeux mais ici, on atteint des sommets à cause de photos au rendu absolument horrible et de bugs qui font que beaucoup de fenêtres ne s'affichent qu'à moitié. Bref, la lisibilité d'ensemble n'est pas optimale.
- Jouabilité2/20
En l'état, c'est totalement injouable, les bugs et autres incohérences étant beaucoup trop nombreux. Quel dommage, car le concept de départ était vraiment sympathique.
- Durée de vie3/20
On laisse très vite tomber à cause des nombreux bugs et incohérences qui plombent totalement les parties.
- Bande son9/20
Le doublage français n'est pas des plus convaincants. Quant aux musiques et aux effets sonores, ils sont assez moyens.
- Scénario/
Euh... c'est une blague ? Le jeu est tellement buggé (même avec le patch 1.002) que ça en est ridicule. Bugs graphiques, fenêtres qui ne s'ouvrent qu'à moitié, chiffres fantaisistes (du genre 985%9865?54541), textes qui se chevauchent ou qui ne s'affichent pas... En plus, on parle de simulation, mais on remarque de nombreuses incohérences : les révolutions se déclenchent pour un rien, la difficulté est horriblement élevée, les relations internationales sont survolées... Dans ces conditions, difficile de conseiller Mission President. Quelques mois de développement supplémentaires étaient indispensables pour ce titre qui est visiblement sorti inachevé.