L'équilibre entre le Bien et le Mal est menacé. Mais est-ce bien étonnant ? Avec tous ces joueurs dévoués qui sauvent le monde quotidiennement en éviscérant un nombre incalculable de méchants dans leurs jeux favoris, il fallait s'y attendre. Du coup, le staff manager de l'Enfer se lance dans une grande campagne de recrutement et jette son dévolu sur Ryan Lennox, ange déchu récemment débauché par sa hiérarchie. L'ange devenu démon sera-t-il capable de mettre le feu et de sauver l'Enfer ?
Ryan a tout du héros charismatique, il est flambeur, beau, musculeux, possède une voix de stentor et contrôle parfaitement tout ce qui a trait à sa pilosité faciale, mais plus important encore, il fut autrefois le meilleur agent de terrain du Paradis. Le bougre a pourtant perdu son job, sans doute à cause de méthodes un brin trop expéditives, et se retrouve donc sur Terre en tant que simple mortel. L'ange déchu découvre alors les joies de l'alcool, du chômage, des plaisirs charnels, des émissions de téléréalité et du repassage. Les agents du Paradis voient pourtant en lui un danger potentiel et décident, le plus pacifiquement du monde, de lui loger une balle dans le caisson. Sur ces entrefaites, le recruteur général des Enfers lui propose de rejoindre les rangs clairsemés des légions infernales, afin qu'il puisse se venger du déshonneur et obtenir un pouvoir véritable. Lennox, tout feu tout flamme qu'il est, ne se fait pas prier et se retourne bien vite contre ses anciens collègues.
Malgré ce pitch séduisant, Infernal reste avant tout un jeu de tir à la troisième personne assez classique et linéaire. Votre antihéros bénéficie pourtant de pouvoirs démoniaques en plus de sa capacité naturelle à utiliser des armes à feu et ses poings en acier. Outre la téléportation et la vision astrale, dont les effets et l'utilisation ponctuelle rappellent inévitablement les pouvoirs du héros Cherokee de Prey, le bonhomme pourra également se repaître de l'âme de ses ennemis vaincus pour récupérer de l'énergie et les détrousser de leur équipement. Si ce pouvoir est amusant dans un premier temps, devoir vampiriser le moindre cadavre pour ne récupérer que quelques balles relèvera bientôt de la routine lassante. D'autant plus que cet acte impie, qui prend d'ailleurs près de 3 secondes pour être réalisé, est absolument nécessaire tant le jeu est avare en munitions. Pour terminer ce petit tour d'horizon infernal, notez que le démon est aussi capable d'amplifier la puissance de ses tirs afin de tuer avec plus d'efficacité ou de détruire certains murs. Mais au fond, tous ces jolis pouvoirs peinent à faire s'emballer l'action. Passés les premiers instants de découverte, le jeu sombre vite dans le piège de la redondance.
Nous voilà donc rapidement en train de massacrer du cyber moine idiot dans des niveaux sombres et inquiétants mais honnêtement réalisés. Entre deux fusillades énergiques et difficiles où la vue à la troisième personne vous permettra de vous coller derrière des obstacles et de tirer en aveugle, le soldat Ryan devra aussi mettre à contribution Robert, son neurone, afin de résoudre quelques énigmes simplistes. Par moments cependant, le jeu semble tout faire pour vous dégoûter en vous supprimant d'un coup par l'intermédiaire d'un piège vicieux. De fait, on se prend souvent à matraquer le bouton de sauvegarde rapide en maudissant un soft qui ne vous laisse aucune chance lors de chaque première rencontre avec un traquenard. C'est sans doute en forgeant qu'on devient forgeron, mais les développeurs semblent avoir pris cet adage beaucoup trop à coeur, car ce système ne fait finalement que casser le rythme. Même constat pour les boss qui semblent tenter de pallier leur manque de charisme derrière un bouclier d'énergie protectrice. Pour en venir à bout, il faudra trouver leur point faible, parfois en interagissant avec un décor partiellement destructible, mais pas avant que vous n'ayez mordu la poussière deux ou trois fois, histoire de vous rappeler que tout démon que vous êtes, vous n'êtes pas immortel.
Le problème d'Infernal, c'est qu'il a bien trop souvent recours à des mécanismes basiques et désuets : progresser ne demande souvent que de trouver un interrupteur, ou une carte de sécurité pour ouvrir la porte suivante. Dans le même ordre d'idée, le soft semble parfois incohérent ou curieusement inconsistant. Votre héros a le pouvoir de se téléporter, alors pourquoi diable faut-il chercher une clé pour traverser... une grille ? Un démon possède-t-il une colonne vertébrale en carton pour mourir lors d'un saut de 3 mètres ? Un suppôt de Satan se délecte-t-il autant de grimper à une échelle pour faire ça avec une lenteur si délibérée ? Et si le Diable est si puissant, pourquoi communique-t-il avec son agent par l'intermédiaire d'une pitoyable oreillette ? Alors que ces constats ne relèveront sans doute que du pinaillage pour certains, d'autres y verront sans doute la marque d'un jeu qui veut se faire plus grand qu'il n'est et dont l'univers largement inspiré de comics comme Hellblazer (et son héros, John Constantine) n'est repris que maladroitement. Ce syndrome, on le retrouvera également lorsque l'on s'attachera à la réalisation du soft. Infernal est loin d'être moche et il gratifiera souvent votre regard de braise de jolies textures, d'environnements de caractère, d'explosions un peu moins convaincantes mais pléthoriques et d'effets de lumières certes impressionnants mais qui nuisent souvent à la lisibilité de l'action. Le tout semble pourtant n'avoir pour raison d'être que de dissimuler la pauvreté du level design et l'extrême linéarité qui en découle. Bref, Infernal est un titre d'action honnête au bel habillage mais qui pèche par son manque de charisme et sa structure basique.
- Graphismes15/20
Le moteur physique est solide, de même que les effets de particules et l'éclairage dynamique. Dommage que le design général ne suive pas et que les salles d'un même niveau se ressemblent toutes autant. Infernal semble vouloir en jeter des tonnes au visage du joueur mais montre régulièrement ses limites.
- Jouabilité13/20
Si le personnage réagit à peu près correctement à toutes vos sollicitations, il semblera parfois un poil trop lent pour une créature surhumaine. Mais c'est surtout l'architecture basique des niveaux et la redondance des mécanismes de jeu qui font baisser la note. Au mieux, le titre est exigeant, mais il est plus souvent frustrant qu'autre chose.
- Durée de vie12/20
Une durée de vie moyenne pour un titre solo. On ne mettra pas plus de deux jours à terminer le soft. Nul doute que les acharnés des titres d'action le finiront encore plus vite.
- Bande son12/20
Les dialogues entre les personnages manquent cruellement de personnalité, d'autant que certains doubleurs semblent manquer de conviction. La musique, qui s'excite à la moindre apparition d'un ennemi, donne dans le registre d'un heavy metal sans personnalité mais entraînant un temps.
- Scénario13/20
L'histoire est intéressante mais les cut-scenes poussives portent plus à rire qu'autre chose et c'est tout de même bien dommage pour un soft qui mise beaucoup sur son atmosphère.
Constat en demi-teinte pour cet Infernal. Le soft n'est pas mauvais, loin de là mais il semble émettre des flatulences à une hauteur plus élevée que l'orifice prévu à cet effet. Toutes les idées qu'il recycle ne sont toujours pas exploitées avantageusement et le soft finit souvent par se perdre dans ses propres ambitions. Nul doute qu'il satisfera les joueurs désireux de goûter à un peu d'action surnaturelle.