Et si dans un avenir proche, Crayola mettait la main sur le monde et le transformait en un gigantesque tableau pastel complètement pourri par le crime organisé ? Une seule solution s'imposerait alors à ce super trust coloré : dessiner des super flics en pâte à crayon armée. Et cette idée, on la doit au papa de GTA et à son nouveau studio Real Time Worlds.
Certes, ce n'est pas une entreprise productrice de crayons de couleur qui domine le monde de Crackdown, mais l'idée est là. Alors que la société croule sous une criminalité telle que les gangs règlent leurs comptes à coup de bazooka dans la rue, toutes les polices du monde s'allient et fondent l'Agence, une organisation employant des fonctionnaires génétiquement modifiés ne reculant devant aucun usage de la force afin de faire régner l'ordre. Sorte de GTA ayant rencontré Spider-Man 2, Crackdown peut n'avoir l'air de rien mais parvient à hypnotiser le joueur de façon surprenante, ce malgré son gameplay finalement très basique. Contrairement à la plupart des GTA-like, le titre de Real Time Worlds ne propose pas une foule de missions annexes, de bidules à collecter ou d'activités futiles à but oisif. Au centre d'une ville en forme d'archipel se trouve l'Agence, point de départ auquel vous ne reviendrez que pour emprunter des véhicules spéciaux, à défaut de prendre ceux qui traînent dans la rue. Autour, 3 quartiers composés chacun de 2 îles et dans lesquels vous êtes théoriquement libre de vous rendre comme bon vous semble. Un peu partout dans cette ville de bonne taille, vous pourrez repérer en vous déplaçant des points de ravitaillement où seront stockées vos armes et qui feront ensuite office de point de respawn, une méthode simple pour se rendre d'un point à un autre rapidement. Notez que chacun de ces points devra être conquis une première fois, ce qui constitue une première activité.
Vous le sentez venir, chaque quartier est sous l'emprise d'un gang dont les hommes de main errent dans les rues pendant qu'un certain nombre de leaders se terrent dans leur planque bien gardées, on comptera ainsi 6 missions liées aux boss par quartier, étapes indispensables à l'affaiblissement des chefs de gangs qui seront votre cible finale. Voilà, le but est donc simple, éliminer un par un les sous-chefs des 3 secteurs de la ville. Mais pas question de se lancer dans cette tâche à la hâte. Si une fois les boss repérés vous pouvez tenter de les neutraliser, il faudra souvent faire machine arrière après s'être pris une grosse piquette faute d'être suffisamment expérimenté dans l'art du massacre de truand.
Car tout le charme de Crackdown vient de la progression de votre personnage en fonction de 5 aptitudes : agilité, conduite, explosifs, force et tir. Pour certaines, l'expérience viendra de la pratique, comme pour le tir, l'usage des explosifs ou la force physique. Pour d'autres, comme pour l'agilité, c'est la collecte d'orbes ou la participation à des courses d'obstacles qui fera de vous un agile félin. La conduite pour sa part augmentera en fonction des acrobaties ou des courses que vous effectuerez. Libre à chacun de décider quelles aptitudes il souhaite développer. Pour ma part, je suis devenu une bille en conduite mais je peux vous jeter une bagnole sur le coin de la tronche tout en sautant à 25 mètres de haut pour vous finir avec une balle dans le gros orteil. Ca fait envie, hein ? Entre chaque mission de boss, il conviendra donc de veiller à améliorer son personnage de façon à être à la hauteur lors de l'affrontement. Pour ça, il suffit de traîner dans les rues, pas n'importe lesquelles cependant car avec peu d'expérience, le simple fait de se rendre dans un quartier de haut niveau est déjà un risque. Passer du temps à naviguer de la sorte en dézinguant tous les groupes de malfrats qu'on dégotte peut sembler fastidieux, pourtant, le côté complètement débridé de Crackdown, avec ses bonds de 20 mètres et ses explosions chaotiques, supprime l'aspect laborieux et formel de ce gain de force. A la rigueur, on s'amuserait presque plus à nettoyer la ville de cette façon que pendant les missions. Ce qui rappelle un peu le syndrome Spider-Man 2 dont le gameplay avait les mêmes caractéristiques. Et le level design du jeu offre de quoi s'occuper. Les décors sont tortueux, on trouve un paquet de hauts immeubles à escalader et ceux qui préfèrent les déplacements en véhicules ne seront déçus que par une chose : l'absence de deux roues.
Vient ensuite l'élimination à proprement parler. C'est là que l'on comprend tout l'intérêt de s'être bien préparé. Les boss sont toujours planqués dans de grands bâtiments et extrêmement bien gardés. De plus, vous pouvez toujours tenter de supprimer tous les hommes de mains, tant que vous n'aurez pas éliminé le chef, il en viendra à la pelle, parler de centaines n'est parfois pas exagéré. Mais pour chacun, il existe plusieurs approches qui vous sont indiquées. Une pour un agent athlétique, une pour les véhicules, une pour la force de destruction massive. Atteindre le boss le plus rapidement possible est clairement la meilleure chose à faire avant de l'isoler. De plus, sachez que pour le tuer, il vous faudra vider un paquet de chargeurs, comme tout bon gros boss à l'ancienne, ceux de Crackdown sont coriaces. En résumé : mieux vaut être bien entraîné.
Il est vrai que beaucoup n'auraient pas parié lourd sur Crackdown qui, vu de loin, pouvait laisser une mauvaise impression. Pourtant, le fait est que même en étant lassé à en pleurer des GTA-like, Crackdown séduit par son aspect débridé. Et dans la mesure où la progression de votre personnage est aussi sensible que rapide, il ne faut pas attendre longtemps avant de goûter aux joies de son gameplay décomplexé. Ce qui n'empêchera pas de noter quelques défauts. A commencer par le manque de variété que certains pourraient lui reprocher. Contrairement à la plupart des jeux du genre, Crackdown ne propose pas de missions annexes, de petits jobs ou de choses dans ce goût-là qui permettent de donner un but autre que l'accomplissement des missions principales ou la quête d'expérience. De même, son côté un peu bourrin peut lasser à la longue, bien que dans ce cas-là, un break d'une semaine ait finalement suffit à laisser s'évaporer cette saturation. Mais on regrettera que le système de visée totalement automatisé rende caduque la localisation des dégâts, car s'il est possible de désarmer un ennemis en tirant dans la main ou de l'immobiliser en visant les jambes, ce sera nécessairement en visant à "main levée", en mouvement et sur une cible mouvante éloignée. Autant dire que la chose est quasiment impossible. Autre défaut, nettement plus gênant celui-ci, les difficultés d'orientations. N'affichant pas de système de guidage, Crackdown ne permet pas non plus de marquer un point précis sur la mini-map déjà peu lisible. Ainsi, chaque planque de boss repérée s'affiche dans un rayon donné et si vous avez décidé de vous rendre en un lieu précis, il faudra fréquemment ouvrir la carte générale pour vérifier que vous n'avez pas dévié en suivant le mauvais indicateur. Le problème est encore plus flagrant lorsqu'on utilise un véhicule qui n'autorise pas de faire le chemin en ligne droite. D'où la primauté des déplacements à pieds Enfin, dernier regret, le mode coopératif initialement prévu pour tourner en écran splitté sur une console n'est ici disponible qu'en mode online ou en liaison multiconsoles (du moins sur notre version). Une simple option en écran splitté n'aurait pas été de trop dans la mesure où le mode coop constitue un attrait non négligeable du jeu.
- Graphismes15/20
Le design est particulier et peut avoir ses détracteurs, au moins joue-t-il la carte de l'originalité. Techniquement, la physique impressionne même si elle n'a rien de réaliste. La version de test ne présentait aucun problème majeur, si ce n'est un ou deux petits bugs de collisions discrets. On déplore également des ragdolls assez étranges.
- Jouabilité16/20
La prise en main est des plus simples et la progression rapide du personnage vous permettra très vite de réaliser toutes sortes de cabrioles. Seul le pilotage peut s'avérer rébarbatif si on ne booste pas un minimum la compétence.
- Durée de vie14/20
C'est un peu le hic pour un GTA-like, en l'absence de missions annexes, la durée de vie prend un coup dans les dents car il ne faut pas si longtemps que ça pour éliminer les gangs. Ceci étant, si on accroche vraiment aux nettoyages des rues, on peut très facilement augmenter le temps de jeu.
- Bande son12/20
On retrouve le coup désormais classique de l'autoradio et de ses pistes multiples. Du côté des voix, il est fort déplaisant de constater que chaque gang ne dispose que d'un stock limité d'expression qu'ils nous resservent jusqu'à plus soif. Un point franchement gavant à la longue.
- Scénario8/20
Un point faible pour certain, un aspect anecdotique pur d'autres, Crackdown n'a pas vraiment de scénario et fait l'impasse sur toute forme de mise en scène.
Crackdown, l'archétype du jeu tout bête mais effroyablement addictif. Il est vrai que son gameplay est bourrin et basique dans une certaine mesure, qu'en dehors de flinguer tout ce qui bouge, on ne nous demande rien et qu'on peut lui reprocher de ne pas être "complet". Pourtant, c'est toujours avec plaisir que l'on retourne arpenter les rues, sautant de plus en haut, soulevant des objets de plus en plus lourds et causant de plus en plus de dégâts. Résultat, le titre est à essayer absolument pour ceux qui doutent, et à acheter par ceux pour qui traverser une ville sans en fouler le sol constitue déjà un petit bonheur en soi.