Exhumé du fin fond du royaume des titres les plus mal notés de l'histoire de la Xbox première du nom, Dark Daemon arrive en France, sur la pointe des pieds, en nocturne et par la porte de derrière. Il rampe, s'insinue par un trou de souris, pour finir par se tenir là, tapi sur l'étal poussiéreux d'une grand-mère édentée à la brocante dominicale, avec au coeur l'espoir fugace qu'un joueur négligent le glisse par inadvertance dans son panier.
Daemon Vector avait sans doute réussi à déposer ses pixels sur la boîte noire de Microsoft à une époque où le géant américain croyait encore aux chances d'une de ses consoles sur le territoire nippon. En ce temps-là, Bill Gates ne reculait devant aucun navet pour tenter de séduire un public japonais récalcitrant. Du moment qu'un léger relent de sushi émanait des redingotes des développeurs, ou bien que ces derniers pouvaient justifier d'une ascendance asiatique même lointaine, le géant de Redmond ne se faisait pas prier pour sortir son chéquier en or massif. Aujourd'hui, si nous n'avions pas sous les yeux un catalogue 360 de qualité et pourtant toujours boudé par les japonais, on aurait pu croire que l'échec de la première Xbox sur l'archipel nippon avait sans doute été entièrement dû à ce Daemon Vector...
Le soft est un hack'n slash pur et mou. Pour les néophytes, il s'agit d'un jeu au but subtil et recherché : l'extermination totale et brutale d'un type d'ennemis qu'on a choisi pour des raisons d'hygiène et d'esthétique. Ici, les victimes sont des créatures plus ou moins démoniaques, apparues en même temps qu'une épidémie de peste bubonique dans l'Italie du XIVème siècle. Contaminant la population et se servant des morts comme soldats, les Nécrolocustes (ben tiens !) volent les nains de jardin, font des graffitis sur les murs, crachent sur les vieilles dames, urinent dans les ascenseurs, détériorent les arrêts de bus et achètent des albums de la Star Academy, bref sont maléfiques. Face au mal, deux héros aussi charismatiques que des bétonnières, dégainent leurs armes rutilantes et décident de trancher dans le vif du sujet.
Pas la peine de faire une biographie détaillée des deux poltrons, sachez simplement que vous pourrez jouer une jeune femme à la poitrine opulente répondant au doux nom de Rhéa (Kteur), et un jeune homme à la crinière blonde connu sous le patronyme de Roy Asgard, fruit de l'union d'une Goa'uld et d'un distributeur de bonbons Pez. Le titre propose donc deux campagnes qui varient sensiblement, même si vous pourrez parfois visiter un même lieu avec les deux personnages. Malheureusement, tous les niveaux sont horriblement linéaires et il faudra bien souvent se contenter de broyer tous les ennemis d'une salle afin d'empocher la clé qui vous permettra de passer à la suivante. Le problème d'un jeu comme celui-ci, c'est sa dépendance totale sur son système de combat. Et de ce côté-là, Daemon Vector n'est pas gâté. Roy et Rhéa se manipulent exactement de la même façon, et si leurs attaques divergent visuellement, elles se réalisent de la même façon, en combinant clavier et souris. On pourra donc déclencher une série de 3 coups, une espèce d'onde de choc qui mettra au sol tous les ennemis qui vous entourent et un uppercut pas franchement efficace. Mises à part une ou deux variantes, comme la possibilité de planter son épée dans un ennemi au sol, c'est à peu près tout ce que vous aurez à vous mettre sous le mulot. Il vous faudra donc cliquer, cliquer et encore cliquer pour découper des tripotées d'ennemis bêtes à manger du foin.
D'ailleurs, les 8 types de monstres du jeu aiment à se coincer contre les murs ou à attendre que vous éviscériez leurs collègues avant d'intervenir. On les rencontre parfois par packs de 12 et ils se contenteront alors d'être mous, mais à plusieurs. A ces vils cadavres ambulants s'ajoutent quelques boss souvent ridicules et qui se contenteront de répéter une ou deux attaques jusqu'à ce que vous ayez pris le coup, dans tous les sens du terme. Pour rendre les combats encore moins attractifs, la caméra adopte une vue plongeante à 45 degrés qui ne permet pas de voir ce qui vous attend ensuite. Au fond, ce n'est peut-être pas plus mal.
Sorte de mélange malhabile entre Dynasty Warriors, Diablo voire même Resident Evil par temps de brouillard, Daemon Vector ne s'approche d'aucun de ses modèles. Les cinématiques manquent cruellement de personnalité, de pêche et tout simplement d'intérêt. En règle générale, l'aspect horrifique du soft prête à rire. Ainsi, alors que vous venez de débiter des tranches de zombis depuis un quart d'heure dans les égouts de la ville, vous finissez par pénétrer dans une salle lugubre. La porte se referme derrière vous et une créature semble vouloir sortir d'un boyau étroit et suintant, la peur au ventre (ou presque) vous vous retrouvez bientôt devant un autre zombi, en tout point semblable à ses congénères, et que vous aurez tôt fait d'éparpiller. Enfin, ce n'est pas le pseudo système de gestion de l'équipement et la "boutique" dans laquelle vous pourrez obtenir des potions et des améliorations de barre de vie qui apportera de la profondeur à un jeu qui s'abîme déjà dans les méandres de l'ennui vidéoludique. Finalement, pour donner le dernier coup au clou qui referme le couvercle du cercueil, notons que le titre est extrêmement mal localisé et certains textes ne s'afficheront qu'à moitié, voire moins. D'un autre côté, pour s'entendre dire que "Techniquement parlant, les drapeaux contrôlent ce monde. Quiconque contrôle les drapeaux contrôle tout.", on se dit que finalement, on nous épargne quelque chose.
- Graphismes7/20
Comme les Nécrolocustes, on fait dans le sale et l'irrévérencieux. Graphiquement, le titre ressemble à un mauvais jeu Xbox, avec des textures grossières et une animation hachée. Le design général est de fort mauvais goût et le tout manque cruellement de charisme. Tout comme les héros qui en dehors de leur poitrine respective n'ont pas grand-chose pour eux.
- Jouabilité6/20
Des coups limités, des ennemis statiques et stupides et une caméra mal fichue achèvent de donner au soft un aspect injouable particulièrement saisissant.
- Durée de vie10/20
Les deux campagnes offrent au soft une durée de vie convenable si l'on arrive à faire abstraction de ses défauts pléthoriques.
- Bande son7/20
Trois ou quatre musiques insipides vous accompagneront pendant vos séances de découpages. Quant aux bruitages, ils sont plutôt mauvais, avec un ou deux sons parfois risibles par personnage et des bruits de pas qui laissent imaginer que les héros portent des après-skis. Mention spéciale aux zombis qui sonnent comme des ballons en train de se dégonfler au moment de leur deuxième trépas.
- Scénario5/20
Pauvrement mise en scène, l'histoire n'est compréhensible qu'en se penchant sur le manuel, et encore. Les cinématiques ne semblent pas avoir de liens entre elles et la déplorable localisation fait que de nombreux textes sont tout simplement passés à la trappe.
Que dire ? Daemon Vector est bourré de défauts et ne réussit rien de ce qu'il entreprend. Axé sur le combat, il ne permet pas au joueur de se défouler convenablement. Axé sur la peur, il ne réussit qu'à faire sourire. Il faudrait être fou pour ne pas laisser l'Italie du XIVème siècle aux mains de Nécrolocustes.