Avec plusieurs mois de retard, l'Europe goûte enfin au mélange de la cuisine et du jeu sur DS. Si la rencontre entre ces deux univers ne date pas d'hier, cf Yoshi's Cookie sur Super Nintendo, la portable de Nintendo change l'approche du tout au tout, comme elle l'a déjà fait avec Trauma Center. Seule subsiste la crainte du gadget usé rapidement, limité par son propre thème. Alors, recette miracle ou tambouille sans saveur ?
Malgré sa nature exotique, Cooking Mama reste assez classique dans le fond, et on le classera volontiers à côté d'un Wario-Ware Like. Les 120 recettes que l'on vous propose sont des successions timées de manipulations très simples : à peine 2 gestes à effectuer en moyenne. Ces mini-jeux s'avèrent donc souvent minimalistes (appuyer à répétition sur l'écran pour découper un légume) ou un poil plus recherchés (faire rouler des croquettes de pommes de terre dans la chapelure, puis les enduire de sauce douce et enfin les poser sur le plateau). Le nombre exact de manipulations n'est pas indiqué par l'éditeur mais, à vue de nez, il faut tabler sur une quarantaine de petits travaux manuels avec des variations mineures autour de la découpe, du pétrissage, de la cuisson, etc... Le plaisir de la découverte et de la maîtrise passé, ces actes ne se révèlent pas suffisamment fun pour nous retenir au nom du simple plaisir ludique. Le mode Test, présent pour établir des records, est d'ailleurs assez inutile. C'est pourtant le seul challenge véritable contenu dans le soft. Si vous manquez une des manipulations pendant le suivi d'une recette, Mama, la gentille matrone des fourneaux qui vous accompagne continuellement, réparera vos bêtises. Seul le nombre de points attribués à la conclusion de vos préparations permet de jauger vos performances en terme d'application et de rapidité d'exécution. Il vous en faut une certaine quantité pour débloquer l'ensemble des recettes, c'est-à-dire une petite centaine vu qu'on vous en octroie seulement vingt au démarrage du jeu. Dévoiler l'ensemble de ces préparations est toutefois assez rapide. Les recettes sont courtes, et on a fait le tour des manipulations après une petite heure, sans avoir jamais rencontré de réelles difficultés.
L'intérêt ludique est donc limité, même si l'exploitation de la DS ne déçoit pas. Souffler pour refroidir, tourner pour remuer la soupe, agiter de droite à gauche pour râper : la quasi-totalité des manoeuvres sont très convenablement liées à l'acte réel. Les bruitages associés sont aussi délicieux, et accompagnent les gestes avec tenue. On attendait du titre qu'il ne manque que les odeurs pour être devant sa table de cuisine, c'est presque le cas. Taito aurait pu rendre ce lien encore plus impressionnant si il avait soigné la direction artistique et le rendu graphique du titre. Certes, la représentation infantile de Mama et ses simagrées seront laissées à l'appréciation de chacun. Mais qu'il s'agisse de la mise en scène des recettes, des animations associés aux gestes ou du simple dessin très simpliste des aliments et ustensiles, on regrette tout de même une certaine pauvreté. Le studio n'a pas choisi d'éxagérer un peu le trait et c'est bien dommage, cette cuisine là est trop propre, trop hygiénique pour devenir "palpable". Il faut sans doute y voir la volonté de ne pas se priver d'un public plus mature, comprenez par là un vaste panel englobant étudiants, jeunes travailleurs, célibataires et cuisinières en herbe de tout âge. Il convient dès lors de savoir si le titre se montre suffisamment pédagogue et possède un contenu intéressant pour nous convaincre de mettre la main à la pâte.
Attention, ne partez pas sur vos grands chevaux à la lecture de ce paragraphe. Il s'agit simplement de se poser la bonne question : la cuisine orientale est-elle à la mode ? Si c'est le cas, Cooking Mama arrive à point nommé. Plus de la moitié des 120 recettes viennent d'un ailleurs exotique. Il suffit de vous donner quelques noms : Gyoza, Soupe Miso, Takoyaki, Tonjiru. Et quand ce ne sont pas des plats traditionnels, vous pouvez être sûr de retrouver du riz une fois sur deux. Le reste des recettes concerne des plats plus communs : steak tartare, omelettes de toutes sortes... Sorti du manque de représentation des cuisines du monde entier, il existe surtout un problème incongru si on désire prendre Cooking Mama "au sérieux", afin de se faire la main ou de simplement retenir en s'amusant quelques recettes intéressantes. L'inquiétude, c'est de se demander tout simplement si on trouvera aisément à côté de chez soi les ingrédients évoqués (du Konjac ? Du poulpe ?), et si on aura la motivation pour aller les chercher. Avec un peu de recul, il apparaît que Cooking Mama, par nécessité d'offrir un tant soit peu de consistance sur le plan ludique mélange plats simples, typiquement intéressants pour des étudiants, et d'autres plus alambiqués, qui intéresseront peu de personnes à cause du fastidieux de leur préparation. Reste la possibilité de mélanger une recette à un accompagnement (riz, spaghetti), le dernier mode de jeu. Un début de création qui permet d'imaginer ce que pourrait être un prolongement naturel du titre de Taito si celui-ci se lâche un peu plus : faire sa propre ratatouille dans un concert de sauces hasardeuses et de couleurs suspectes !
- Graphismes9/20
Substitut de Maïté version kawai, Mama ne ressemble pas à grand chose sinon à une grande tête vaguement féminine, extatique, et manifestement sous narcotiques puissants. Simpliste mais rigolo . On aurait préféré que cette folie se retrouve aussi dans la mise en scène et les animations liés aux manipulations des recettes. Cette cuisine est trop propre, trop sage.
- Jouabilité12/20
Bonne utilisation de toutes les composantes de la DS : double-écran, stylet et micro. Mais les manipulations des mini-jeux s'avèrent très limitées. On les découvre avec plaisir, on les maîtrise rapidement on n'y revient plus. Les mélanges "plat + accompagnement" symbolisent ce qu'on attend d'une suite : improviser ses propres recettes, s'amuser un peu plus en roue libre. L'aspect pédagogique pourrait bien souffrir de cette majorité de recettes orientales et assez sophistiquées. Cela dit, il semble possible d'apprendre, ou au moins de retenir efficacement des recettes grâce à Cooking Mama.
- Durée de vie10/20
Découvrir les 120 recettes vous prendra deux heures tout au plus. Evidemment, Cooking Mama est fait pour une utilisation plus aléatoire et s'adresse à des personnes qui veulent soit se mettre à la cuisine soit découvrir de nouvelles recettes en s'amusant.
- Bande son14/20
L'unique thème sonore du jeu est aussi mignon que désuet. Les bruitages sont très efficaces, et participent au caractère très sensoriel du titre.
- Scénario/
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Si le titre de Taito est loin de posséder une densité qui pourrait satisfaire de simples joueurs, il est d'une confection très honnête, se prend en main en un éclair et peut effectivement être d'un intérêt pédagogique intéressant. Taito n'a pas jugé bon de revoir sa liste de recettes, à consonances très orientales, avant d'exporter son titre. L'avenir nous dira si ils ont eu raison ou non. Pour conclure, sans être le soft décalé et extravagant que certains avaient cru voir, Cooking Mama a sa place sur DS, à mi-chemin entre un logiciel d'apprentissage façon Brain Training et un jeu sensoriel dans la veine de Trauma Center.