Neversoft et Activision manquent-ils de bon sens ou de modestie pour dégainer Gun sur PSP une semaine avant l'arrivée de Vice City Stories ? Privilégions la seconde option et soyons confiants. Après un passage en demi-teinte sur Playstation 2, ce shoot violent et "Fordien" compte user d'enrichissements multijoueurs et de 5 nouvelles missions solos pour justifier son existence. O.K. Corral, voyons ce que tu as dans le ventre.
Archétype du cow-boy fier et mystérieux qu'on trouve dans la plupart des westerns, Colton White est un héros dans l'âme. Elevé par un trappeur respectable et expérimenté, notre homme possède enfouie en lui une haute idée de la justice et croit en un certain nombre de valeurs qui le pousseront à défier l'ordre établi pour défendre les causes qui le méritent. C'est le combat de cet homme qui nous est raconté dans Gun, un combat qui lui permettra de rassembler une à une les miettes de son passé pour découvrir quelles sont ses origines et comprendre pour qui et pour quoi il doit se battre.
Souci majeur quand on parle de PSP, la prise en main est malheureusement à nouveau déficiente, sans condamner définitivement le plaisir de jeu. Mélange de shoot à la 3ème et 1ère personne, matinée de très légères séquences de plate-forme et d'exploration, le titre de Neversoft sur consoles de salon faisait preuve d'ambition, ou de confusion, au choix. L'essentiel est de diversifier les situations, quitte à demander au joueur de maîtriser une multitude de commandes : mitraillage à dos d'équidés, tirs éclairs au ralenti et en vue subjective, coups de couteau, bâtons de TNT lancés sur des endroits idoines... Le passage sur une Playstation Portable amputée de deux gâchettes et d'un stick analogique est logiquement laborieux sur le plan ergonomique. Ainsi, pour simplement rengainer ses colts, vous devez maintenir la croix directionnelle vers le bas pendant deux longues secondes puis compléter la manip avec le bouton X. Il en est de même avec le bouton triangle pour recharger son arme. Certaines commandes sont aussi bien mal positionnées, comme cette gâchette gauche pour se baisser, ce qui rend la prise sur la console moins assurée à chaque coup de feu avec la gâchette droite. En substituant le stick analogique droit de la PS2 par les quatre boutons, le contrôle de la visée et de la caméra perd énormément en souplesse et en rapidité (ils n'ont pas mis d'autre lock que celui présent en tirs éclairs), et le titre devient logiquement plus ardu. Celui qui trouvait le plus soutenu des challenges tout juste faisable se contentera amplement d'une difficulté moyenne tandis que la majorité devra d'abord se rabattre sur le niveau le plus accessible avant toute autre ambition. Nouvelle déception donc, mais à la différence de l'injouable Coded Arms, Gun Showdown devient plus perméable au bout de deux petites heures de jeu.
Il s'agit de la même structure solo que le titre sorti sur PS2. Soit une chaîne d'opérations liées par la trame narrative, sans la moindre ellipse temporelle. Le rythme est donc assez élevé puisque votre progression est dénuée de temps morts. Par exemple, même lors d'un long déplacement vers une autre ville, le scénario se débrouille pour vous occuper avec l'escorte mouvementée d'une diligence. Les missions de ce fil d'ariane sont constamment sanguinaires ce qui devient rapidement pénible. Pour reprendre le test PS2, et malgré le liant du scénario, il y a toujours quelque forme de gratuité et de facilité dans ces affrontements cow-boys-faune sauvage, cow-boys-bandits, bandits-Indiens ou cow-boys-Indiens (je vous laisse remplir les combinaisons manquantes). Ce n'est pas tant la barbarie de certaines séquences qui m'ont choqué (la période que l'on appelle "western" ne fût rien d'autre que le Moyen-Age de l'histoire américaine) mais plutôt les énormités très Z dans l'âme comme ces carrioles de TNT transportées par les Indiens (et qui explosent au moindre coup de feu évidemment) ou la possibilité de garder sur soi un lot de cocktail Molotov déjà allumé. Heureusement, les missions annexes viennent offrir des alternatives au bain de sang décomplexé que prétend nous offrir la trame principale. Il s'agit ici de livrer un marchand, là de ramener un canasson dans son ranch. C'est en dialoguant avec des NPC que ces besognes accessoires se déclenche. Le problème c'est qu'il s'agit de séquences indépendantes qui ne viennent pas s'ajouter à la quête principale, mais qui doivent être réglées dès l'instant même où vous les avez amorcée. De fait, même si vous pouvez sauter sur le premier cheval venu afin de parvenir à des quêtes secondaires établies à des endroits épars, il s'agit en réalité de défis à régler sur place si l'envie vous en prend. Cette disposition éloigne Gun bien loin d'un GTA. Les chevauchées ne procurent d'ailleurs aucune sensation, le cheval se comportant comme le ferait n'importe quel engin motorisé. Attention tout de même à ne pas trop le fatiguer car votre monture s'épuise rapidement et risque de rendre l'âme si vous la poussez au-delà de ses limites.
D'abord du côté des blancs, Colton n'hésitera pas par la suite à se ranger du côté des indiens pour mettre à mal la cavalerie et se venger de ceux qu'il considère à juste titre comme des assassins. On aurait pu croire que ces missions parmi les peaux-rouges seraient un peu plus variées, mais c'est loin d'être le cas. La seule phase d'infiltration présente dans l'aventure est gâchée par son absence d'intérêt, les ennemis à neutraliser vous tournant tous le dos, et le tir à l'arc n'étant pas suffisamment mis à contribution. A plusieurs reprises, vous aurez également l'opportunité de contrôler des canons ou des mitrailleuses, mais là encore, le gameplay trahit de gros problèmes de jouabilité. Les phases de tir manquent de précision et même le Tir éclair est chaotique à gérer à cause de son caractère assisté qui nous empêche de faire vraiment ce que l'on veut. Les affrontements contre les boss s'en retrouvent d'autant plus pénibles à jouer, et bien souvent, c'est la méthode la plus bourrine qui fonctionne le mieux. C'est bien la rapidité et l'insouciance avec lesquelles s'enchaînent les objectifs de missions qui nous pousse à avancer, bien plus qu'un éventuel plaisir de jeu. A plusieurs égards, Gun n'est pas sans rappeler Red Dead Revolver, un titre qui n'était pas exempt de défauts mais qui avait au moins quelque chose à offrir au joueur et qui savait se renouveler à travers la grande variété de situations et de personnages à incarner. A l'inverse, l'optimisation de l'arsenal de Colton ne suffit pas à enrichir le gameplay de Gun au fil de l'aventure, et l'on se prend à scruter constamment le pourcentage de progression dans l'espoir d'en finir au plus vite. A ce sujet, la méfiance est de mise puisque, si vous ne faites pas les missions secondaires, vous arriverez au boss final et donc au terme de l'aventure principale en moins de 7 heures avec un pourcentage de seulement 47%. Habile façon de leurrer le joueur sur la durée de vie, d'autant plus quand on sait le faible intérêt des missions secondaires. Au final, Gun ne nous aura pas franchement enthousiasmés, et c'est d'autant plus regrettable qu'il partait sur des bases intéressantes avec un background plutôt réussi. Heureusement, le versant multijoueur permet à ce portage d'être pertinent. En tout cas, il défraie les mauvaises habitudes de certains éditeurs ou développeurs avec un support ad hoc total. Question modes de jeu, c'est assez commun : deathmatch et une variante pour le plat de résistance de 2 à 6 joueurs, et une petite sucrerie, en la présence d'un poker, pour 2 à 5 joueurs.
- Graphismes13/20
La réalisation est correcte mais l'exagération des effets, notamment lorsqu'on est à court de vie, nuit à la lisibilité de l'action. Bien que généralement vastes, les environnements demeurent également un peu sommaires. Sur cette version PSP les teintes assez délavées des décors comme des ennemis rendent l'identification assez tendue par moment.
- Jouabilité12/20
La prise en main est loin d'être immédiate et le portage souffre nettement de l'absence des deux autres gâchettes comme d'un stick analogique droit. Les affrontements contre les boss trahissent de vrais problèmes d'IA. Le tout sanglant de votre progression est très Z, c'est certainement volontaire mais mal maitrisé, ça manque de piquant, de surprise. Les quêtes secondaires, moins militaires, permettent de souffler un peu mais il s'agit en réalité de défis à exécuter sur l'instant, elles ne se cumulent pas à la trame principale. Dommage, ça fait quand même très cheap.
- Durée de vie11/20
Le pourcentage de jeu permet de faire illusion sur la durée de vie, car les missions facultatives représentent une part aussi importante que l'aventure principale. Malheureusement, ces missions annexes sont de faible intérêt, et le scénario principal se termine en moins de 7 heures. Grâce à un support ad hoc, le multijoueur, bien que d'un contenu assez classique, relance nettement l'intérêt du portage.
- Bande son13/20
La bande-son n'est pas avare de grands thèmes épiques, mais ceux-ci tombent à plat car l'ambiance n'est pas au rendez-vous. Le doublage anglais est tout de même réussi, mais ça ne suffit pas à renforcer l'immersion.
- Scénario10/20
Le cadre crépusculaire du western n'excuse pas le manque de vie et de relief dans les dialogues et les comportements des PNJ. Il suffit de jouer à un Stranger Oddworld pour s'en rendre compte. Le scénario brasse un ensemble de figures et de situations assez pompeuses, ça ne cadre pas avec les intentions du gameplay.
Attendu de pied ferme par les inconditionnels de westerns que nous sommes, Gun Showdown nous aura finalement déçus. Le titre se repose sur son background accrocheur et sa violence gratuite sans chercher à creuser le gameplay qui joue volontairement la carte du Z et de l'exagération sans pour autant réussir à surprendre, à profiter du dynamisme de sa structure. Castré par les différences ergonomiques entre PS2 et PSP, ce portage est dispensable pour ceux qui attendent Vice City Stories. Il amusera plus facilement un public moins exigeant en terme de jeu d'action, ou friand de westerns.