"Wouah ! C'est le plus beau jeu du Monde !" pouvait-on lire dans la presse de l'époque. Peut-être, peut-être pas, je n'en avais aucune idée et pas de point de comparaison non plus. Tout ce que je savais, c'est que je me plaisais à squatter l'ordinateur d'un pote chaque mercredi après-midi pour pouvoir y jouer. Je ne comprenais rien, mais la singularité du titre m'émerveillait. Aujourd'hui, je peux y jouer tranquillement avachi dans mon canapé et sur ma console portable qui plus est. Le monde change. Pas Myst.
En commençant à bosser en tant que rédacteur, jamais je n'aurais cru être amené à écrire un jour sur Myst premier du nom. Myst, c'est le passé, l'ancêtre des jeux de réflexion "écran par écran", celui qui a posé les bases du genre et que l'on cite systématiquement lorsqu'il nous faut une référence. D'ailleurs, on parle bien aujourd'hui de Myst-like pour définir cette catégorie. Pourquoi tant d'éloges ? Parce que Myst a fait figure d'ovni à sa sortie, d'abord sur Mac puis sur PC. C'était un titre créé par un petit studio qui allait nous faire vivre une aventure aussi complexe que passionnante, aussi envoûtante que déroutante. Pour arriver à ce résultat, Cyan, le petit studio en question, avait de sérieux atouts de son côté. D'abord une réalisation bluffante pour l'époque (des graphismes léchés, soutenus par quelques animations de-ci de-là, un paysage sonore incroyablement riche) mais aussi une structure narrative unique. Dans Myst on ne sait rien. Ou pas grand-chose. On arrive sur une île, visiblement déserte, mais possédant suffisamment d'indices pour nous faire comprendre qu'une famille a habité là. L'endroit est vraiment étrange, un bateau englouti gît sur le quai, il y a une fusée digne des romans de Jules Verne un peu plus loin, un planétarium, un petit bassin, un grande horloge ainsi qu'une blibliothèque complètement saccagée. Quelques livres restent pourtant intacts. En les lisant, on s'initie au passé de l'endroit et au rôle d'Atrus, créateur de mondes de son état, ou plutôt d'Ages comme on dit dans Myst. On comprend que grâce à sa plume, Atrus peut donner vie à de véritables univers qu'il peut ensuite visiter en se servant de livres de liaison. De là, on fait le rapprochement avec ce qu'il nous arrive. Très certainement avons-nous touché l'un de ces fameux livres qui nous aurait conduit directement sur Myst.
Dans la bibliothèque, on trouve aussi deux autres ouvrages, un rouge et un bleu. Chacun d'eux renferme un fils d'Atrus - Sirrus est enfermé dans le livre rouge, Achenar se trouve dans le bleu. Mais la liaison n'est pas bonne, et on ne saisit pas bien ce que les deux souhaitent nous dire, ni ce qu'ils attendent de nous. Tout juste comprend-on qu'il va falloir retrouver les pages manquantes de ces livres pour améliorer la liaison et peut-être aider ces pauvres prisonniers. Toute l'intrigue reposera ainsi sur la découverte du passé de ces frères. Qui sont-ils réellement et pourquoi Atrus a-t-il décidé de les enfermer de la sorte ? Chacun accuse l'autre d'avoir trahi leur père et ce sera à vous de trouver la vérité dans ce drame familial. Pour cela, il va falloir faire marcher votre observation et votre perspicacité. Plus qu'un jeu d'aventure au sens où on l'entend généralement, Myst est un jeu de réflexion. En effet, vous allez devoir apprendre à connaître l'endroit qui vous entoure, comprendre l'utilité de chaque chose et découvrir comment les manipuler. Myst ne sera pas la seule île à explorer puisqu'en trouvant des livres de liaison vous allez aussi pouvoir explorer d'autres Ages et ainsi affiner votre jugement sur ce qu'il s'est réellement passé dans la famille.
La version originale de Myst proposait quatre Ages à visiter (le bateau de pierre, Sélénium, l'Age mécanique et la passerelle de bois). Dans cette version PSP, on a droit à un cinquième décor avec le monde glacé de Rime (directement issu de la version realMyst). Chaque environnement réserve ses mystères qu'il faut percer petit à petit, encore une fois en observant tout ce qui nous entoure. Les indices peuvent prendre la forme de dessins, de notes, ou plus fourbement de sons. Le joueur est ainsi constamment sur le qui-vive à la recherche d'éléments qui pourront l'aider à avancer. A sa sortie, Myst était considéré comme réellement difficile, voire infaisable. Sans remettre en cause cette difficulté, il faut tout de même préciser qu'avec les années, beaucoup de jeux sont arrivés reprenant ce genre d'énigmes basées sur la logique et habituant notre esprit à trouver rapidement les solutions à ce qu'on nous demande. Du coup, ce que l'on considérait très dur il y a dix ans devient aujourd'hui plus abordable. Je ne dis pas que Myst est facile, juste qu'il n'est pas aussi insurmontable qu'il pouvait n'y paraître à l'époque.
Comme dit dans l'endroit, quel que soit le support, Myst restera toujours Myst et c'est encore vrai sur PSP. Le revers de la médaille c'est que le jeu n'a pas évolué techniquement et ce que l'on trouvait magnifique se trouve être aujourd'hui plutôt laid. Bien sûr, le design des Ages permet de garder un semblant de dignité. Cela dit, je suis certain que nombre de joueurs n'auraient pas dit non à un petit dépoussiérage aux niveaux graphique et sonore. Garder l'architecture des lieux tout en appliquant des textures plus fines, améliorer les bruitages en éliminant le souffle, voilà qui aurait permis à Myst de réellement briller sur PSP. Ca, et peut-être une refonte de la jouabilité. Tout du moins une adaptation. Tous les joueurs consoles vous le diront, il n'y a rien de plus pénible que de manier un curseur avec une manette. Que ce soit avec la croix directionnelle ou le pseudo stick de la portable, les mouvements de la main qui nous sert de pointeur manquent parfois de précision. De même que les "clicks" qui s'effectuent désormais avec la touche Croix. Si sur PC, il était facile d'appuyer très rapidement, le bouton de la PSP s'écrase trop longuement et entraîne par moments quelques soucis de maniabilité. Je m'explique. Dans l'un des Ages, il faudra régler un cadran sur une position précise à l'aide de deux gros boutons. En appuyant sur l'un ou sur l'autre, vous faites défiler des coordonnées. Le problème, c'est que le temps de latence est très important et qu'il devient impossible de régler les coordonnées à la virgule près. On doit alors se contenter d'une approximation, ce qui n'est pas grave mais qui se montre tout de même gênant. Au rayon des petits défauts, on signalera aussi les temps de chargements vraiment longuets entre chaque écran, ce qui est totalement incompréhensible étant donné la pauvreté de chaque décor. Enfin, ce ne sont que des broutilles me direz-vous. Car encore une fois, Myst reste Myst. Un jeu fondateur à découvrir si ce n'est pas déjà fait.
- Graphismes8/20
C'est sûrement au niveau graphique que Myst semble le plus à la traîne. Certes le design est toujours aussi réussi, il n'empêche que l'aspect technique est à la traîne. Cette version PSP était peut-être l'occasion de remanier tout ça.
- Jouabilité11/20
Myst ou pas Myst, diriger un curseur avec autre chose qu'une souris n'a jamais été chose aisée, notamment lorsqu'il s'agit d'être précis. On éprouve donc quelques difficultés de temps à autre. De plus, les déplacements écran par écran sont parfois pénibles en raison de longs chargements entre chacun.
- Durée de vie14/20
Moins de 2 minutes si vous connaissez déjà le jeu. Plusieurs heures si vous foulez pour la première fois le sol de Myst. Un conseil : pensez aux feuilles de brouillon à côté de vous pour noter chaque indice.
- Bande son10/20
Les quelques voix ont la bonne idée d'être en français ce qui facilite l'immersion dans le titre. Côté bruitages par contre, rien ou presque n'a changé depuis la première édition du jeu.
- Scénario15/20
Cet épisode de Myst marque le point de départ de l'incroyable mythologie qui sera contée au cours des quatre volets suivants. Les premiers pas sont déroutants, mais le scénario se révèle vite passionnant.
C'est sûr que Myst n'est pas tout frais et qu'on sent le fossé technique trahissant ses douze ans d'âge, pourtant l'aura du jeu reste intacte. Cette version PSP n'est peut-être pas indispensable pour ceux qui connaissent déjà cette pièce maîtresse du jeu d'aventure, les autres se doivent d'y jeter un oeil. On appelle ça la Culture.