Ils sont nombreux ceux qui ont voulu copier Max Payne et son gameplay à la fois étrangement basique mais néanmoins enchanteur. Le résultat fut souvent désastreux ou trop moyen pour faire date, El Matador pourrait pourtant faire figure de bonne alternative.
Si la copie n'est pas conforme, difficile en tout cas de nier le poids de l'héritage Max Payne dans El Matador. Le seul point que le titre ne se risque pas à reprendre, c'est son caractère cinématographique élaboré et son scénario tortueux. Sans doute une heureuse idée tant la tâche peut se révéler aventureuse et l'échec cuisant. Alors exit la grosse histoire, ce qui n'exclut pas la présence d'un (tout) petit scénario qui parvient gentiment à nous faire enfiler les missions à un rythme assez soutenu. Pour l'histoire, sachez donc que vous êtes un agent de la DEA envoyé en Colombie pour lutter contre les cartels de la drogue en compagnie des autorités locales qui vous surnommeront rapidement, El Matador. Qu'ils sont taquins ces colombiens.
Pour le reste, n'attendez rien qui bouleverse votre vie. Souvenez-vous de Max Payne, enlevez le côté romantique, augmentez le nombre d'ennemis et le rythme, et voilà. Equipé d'un nombre d'armes à peu près équivalent aux nombres de rivets d'un jean, El Matador défouraille comme un petit fou en s'aidant du désormais fameux bullet time qui se décline en deux versions. D'une pression sur la touche idoine, vous pouvez l'enclencher et en profiter comme bon vous semble tant que votre jauge est remplie. Autre solution, le bon vieux dodge jump, de côté ou en avant, qui s'effectue au ralenti mais sans vider votre jauge. Simple, classique, déjà vu certes, mais efficace puisque la sauce d'El Matador prend bien mieux que celle des autres softs ayant voulu tenter l'expérience du shoot en masse en slow motion.
Le déroulement des missions reste lui aussi terriblement classique. Totalement linéaire, le level design sait toutefois faire preuve d'assez de variété pour faire oublier son aspect hautement dirigiste et l'action se veut rondement menée. Bien souvent, il faudra commencer par une prise d'assaut qui se terminera par la poursuite effrénée d'un truand quelconque. Dans les faits, force est tout de même de constater qu'on fait un peu toujours la même chose, courir, se mettre à couvert et tirer. Oui, bon, il faut aussi reconnaître qu'on s'amuse beaucoup à faire ça. Probablement à cause de l'architecture relativement bien pensée, pleine de détours, de planques, de fausses voies et à des décors qui volent en éclats, marquant l'intensité des affrontements. On appréciera également la variété des environnements, passant des ruelles de la ville à une vieille usine pour finir par la forêt tropicale.
L'autre différence avec Max Payne viendra de la présence fréquente d'alliés, même si leur rôle est plus décoratif qu'autre chose, disons qu'ils participent à la frénésie générale mais leur IA ne fera pas vraiment la différence, étant à peine moins évoluée que celle de vos ennemis. Ces derniers comptant en effet plus sur leur nombre que sur leur QI pour vous causer des ennuis. En somme, El Matador procure de sympathiques sensations pour ceux qui savent apprécier un gameplay assez sommaire mais bien enrobé et fortement influencé par celui mis au point par Remedy il y a quelques années. Malheureusement, le titre souffre de quelques problèmes qui viennent s'ajouter à son manque d'originalité.
Si l'I.A. faiblarde, pour ne pas dire carrément suicidaire, a déjà été mentionnée, on ne passera pas sous silence l'impossibilité de se mettre à couvert autrement qu'en s'accroupissant derrière un objet. A l'heure actuelle, chacun a pu goûter au confort d'une fonction permettant de se plaquer contre un mur et d'en pointer le bout de son nez pour arroser copieusement ce qui se trouve autour, en particulier dans un jeu aussi nerveux. On se demande bien pourquoi Plastic Reality n'a pas intégré la chose dans El Matador. Ce qui est d'autant plus frustrant que vos alliés et ennemis ne cessent de le faire. De plus, si globalement la réalisation est des plus correctes, il est dommage d'avoir à subir des saccades parfois gênantes. Des chutes de framerate malvenues dans un jeu à l'action aussi rapide. Et d'autres bugs peuvent se produire, nettement plus problématiques puisque entraînant un vilain game over. C'est en tout cas ce qui m'est arrivé à trois reprises en traversant un bout de mur par magie pour ensuite me retrouver dans les limbes du moteur 3D. Regrettable, car El Matador profite par ailleurs d'une réalisation séduisante.
- Graphismes16/20
En dépit de quelques ralentissements parfois handicapants, le jeu s'en tire très honorablement pour sa 3D, ses textures, ses effets de lumières ou l'animation des personnages. Seules les explosions sont franchement ratées.
- Jouabilité15/20
On aura du mal à faire plus simple pour ce qui est de la prise en mains, Plastic Reality s'inspire fortement de Remedy en offrant un shooter dopé à la tension nerveuse et au bullet time. Le résultat est défoulant et on ne s'ennuie guère. Dommage cependant que l'action manque un peu de variété et d'originalité.
- Durée de vie13/20
La plupart des missions se traversent sans soucis majeurs même si certaines scènes de combats peuvent se révéler ardues. La durée de vie demeure dans la moyenne des jeux du genre et, sans surprise, il n'y a pas de multijoueur.
- Bande son15/20
Les dialogues en V.O. sont bien doublés mais leur contenu n'a rien d'une oeuvre littéraire, le style est laconique et se voudrait sans doute tranchant mais sans y parvenir. Les musiques sont très nerveuses, dans un style technorock assez bateau mais qui colle très bien à l'action.
- Scénario13/20
Le scénario ne vous mettra pas la tête à l'envers mais il a le mérite de pouvoir être suivi et de bien justifier la progression.
Faisons simple et direct : El Matador n'est pas révolutionnaire, loin s'en faut. Sa formule est archi classique, linéaire au possible mais le tout est suffisamment bien amené pour qu'on se laisse tenter par ce Max Payne version DEA survoltée. Alors si vous aimez le genre, ne vous privez pas, pour 40 euros, vous aurez une charmante petite distraction.