Vous vous souvenez sans doute de SCAR, sorti il y a un an. Douze mois plus tard, c'est son petit frère, toujours développé par Milestone, que l'on voit débarquer sur PC. Une suite qui ne prend aucun risque en misant sur la reconduction de quelques idées novatrices ayant fait l'originalité du soft. Le contenu s'enrichit pour sa part de nouveaux constructeurs venus épauler la marque Alfa-Roméo.
Milestone est sans doute l'un des premiers développeurs à s'être penché sur l'aspect psychologique d'une course, quelle que soit sa catégorie ou son niveau. Plus qu'un jeu mettant à contribution vos talents de pilotage, Evolution GT, que l'on pourrait facilement nommer SCAR 2, se veut être une expérience unique dont le but est de donner un profil différent aux nombreux face-à-face entre pilotes de voitures de tourisme. Intimidation, persévérance, réflexes, concentration, endurance... Toutes ces qualités deviennent nécessaires, pour ne pas dire indispensables, à tout challenger souhaitant fouler l'une des marches du podium d'Evolution GT face à sept concurrents survoltés qui ne lésineront pas sur les moyens pour lui barrer la route du succès. En résumé, le titre de Black Bean rappelle à tout le monde que les trophées se gagnent d'abord grâce au mental et qu'il faut adapter sa façon de piloter en fonction de ses qualités et défauts psychiques. Mais rassurez-vous, sans un bon coup de volant et une prise de risque maximale, on ne peut rien compter remporter.
La première chose qui saute aux yeux est que tout possesseur de SCAR aura l'étrange impression d'être en face du même jeu, à quelques différences près puisqu'on remarque peu de variantes dans le gameplay. Il n'y a en fait que trois aptitudes à acquérir pour prétendre avoir le jeu en main. La première est la capacité à intimider l'adversaire. Pour cela, pas d'appels de phares au milieu de la nuit ou de coups de klaxon intempestifs comme on le voit régulièrement dans des séries B américaines. Il vous suffit de suivre une voiture de près pendant quelques secondes pour faire perdre son sang froid au pilote et l'obliger indirectement à vous céder la place. En effet, si vous insistez en restant dans son axe quelques dizaines de mètres plus loin, il finira par voir sa jauge de concentration chuter en flèche. Il perdra alors une partie du contrôle de son véhicule et se mettra à tanguer de droite à gauche. C'est pendant ce laps de temps qu'il vous faut profiter de la situation pour déboîter et gagner une place. Tout en partant d'une bonne idée (dans la réalité, un pilote qui a la pression a souvent du mal à ne pas commettre d'erreur), cette notion est considérablement exagérée puisqu'il ne suffit pas vraiment de suivre un pilote de près pour le rendre totalement incapable de conserver une trajectoire correcte.
Seconde capacité, la ruse. Ce n'est en fait, ni plus ni moins, qu'une mise à profit de l'aspiration. Le seul souci est que cette aspiration est extrêmement mal gérée et reproduite dans Evolution GT. D'une part puisqu'au lieu de faire gagner quelques km/h en vitesse de pointe grâce à l'effet d'aérodynamisme, elle booste l'accélération de la voiture dont on ne semble plus vraiment maître, un peu comme si la pédale des gaz s'enfonçait d'elle-même. Pas très agréable comme sensation. Et d'autre part car l'IA est complètement ravagée. Les réactions sont démesurées et totalement indignes de pilotes professionnels. Leur seul objectif, vous mettre dehors, quels que soient les moyens à emprunter. Ils ferment la porte à chaque virage, n'hésitent pas à donner des coups de volant lorsque votre dépassement est largement entamé et préfèrent compromettre leurs chances de victoire tant qu'ils sont certains de vous mettre hors d'état de nuire. Un comportement qui n'a rien à voir avec la discipline même si la réalité offre souvent de jolis débats musclés. Dans Evolution GT, l'impossibilité d'améliorer les performances de sa voiture et l'obligation de courir avec la même machine que les sept autres pilotes font que l'on ne peut dépasser qu'à l'approche des virages. Et justement, l'IA le refuse catégoriquement, que vous soyez beaucoup plus rapide qu'elle ou non.
Dernière capacité, l'effet tigre (pourquoi tigre, c'est un mystère). On dispose d'une jauge représentant la capacité qu'a un pilote à anticiper les événements qui vont se passer. Loin d'être une nouveauté dans un jeu de courses, elle permet de remonter le temps de quelques secondes afin de réparer une potentielle erreur de pilotage comme un freinage trop tardif ou un coup de volant mal placé. Complètement irréaliste, elle contredit complètement ce que le jeu prétend être, une simulation. En bref, en plus d'être un copier-coller bête et méchant des idées du premier volet, ces pseudo-subtilités n'apportent pas l'originalité escomptée et n'existent finalement que par l'effet graphique (pas convaincant lui non plus...) qu'elles provoquent. Et encore, là aussi, les limites se font rapidement sentir, notamment lorsque l'on est "intimidé" par un concurrent. Tenez-vous bien, le champ de vision se floute entièrement (c'est bien connu, quand on a la pression, on devient à moitié aveugle...) pendant quelques secondes. L'objectif est donc de tenter de garder le cap en attendant que cette aberration se termine. Dommage que le jeu ne sache pas sur quel pied danser entre simulation et pouvoirs magiques venus de nulle part. Seule l'accélération du rythme cardiaque apporte une petite dose de réalisme.
De son côté, le mode carrière peine à apporter la profondeur souhaitée. Entre les 25 défis et les 52 courses, on a un peu de mal à se passionner, faute de variété. Le seul point sympathique du jeu, qui n'est pas nouveau puisque repris de SCAR, est le côté RPG avec l'amélioration des compétences du pilote. Après avoir relevé avec succès des défis ou remporté des victoires dans les différentes catégories accessibles, le pilote engrange des points d'expérience et se bonifie en se perfectionnant dans les domaines que sont l'intimidation, la confiance, le jugement, l'anticipation, la précision, l'accélération, le freinage et la ruse. Les développeurs ont donc choisi de ne pas mettre à profit l'acquisition de licences en misant plutôt sur l'importance du pilote, au détriment des voitures que l'on aurait bien aimé régler et améliorer au fil de la carrière. Finalement, les 35 modèles issus de différentes marques (Alfa-Roméo, Audi, Chevrolet, Mercedes, Opel, Pagani, Pontiac, Renault, Seat, TVR, Volkswagen...) n'ont pas beaucoup de poids sur le contenu du jeu, déjà bien maigre. Et ce n'est pas la modélisation des dégâts complètement loupée, car très sommaire, qui me fera dire le contraire. Pas plus que les parties multijoueurs qui accentuent l'impression que l'on a de rouler à 50 km/h, d'autant qu'il n'existe pas de vue interne, même pour le solo. On a le temps de faire du tourisme à Albacete, Barcelone, Berlin, Florence, Londres ou Milan, quelques-unes des localités présentes dans Evolution GT, pour un total de 28 circuits. Inutile de dire que ce volet passe à côté de son sujet et aura bien du mal à convaincre au milieu de la tonne de jeux de courses déjà sur le marché.
- Graphismes12/20
Evolution GT ne s'en tire pas trop mal mais la médiocrité de certaines textures et le manque de détails des seconds plans gâchent la réalisation somme toute correcte. On regrette que les effets provoqués par l'aspiration, l'intimidation et le retour dans le temps n'aient pas été davantage soignés. Les voitures sont bien plus convaincantes mais la déformation de la carrosserie est très peu crédible.
- Jouabilité10/20
Aucune impression de vitesse, une IA kamikaze et irresponsable, des idées originales mais mal exploitées. C'est le bilan que l'on peut faire d'un gameplay qui n'apporte quasiment aucun plaisir de jeu, seul ou à deux. On pourra reprocher à ce titre de n'être ni une simulation ni un jeu d'arcade ou plutôt les deux à la fois. Seules les réactions des voitures tendent à être réalistes.
- Durée de vie11/20
35 voitures issues d'une dizaine de marques différentes, 28 circuits, 25 défis et 52 courses n'attendent que vous. Oui mais voilà, le gameplay est très répétitif et pas si intuitif qu'il ne l'espérait. Du coup, soit on pique du nez, soit on va voir ailleurs.
- Bande son9/20
Cela reste très banal et pas vraiment immersif, que ce soit au niveau des thèmes musicaux comme des sonorités des moteurs, trop timides en vue normale. Pas de quoi s'enflammer.
- Scénario/
Si SCAR avait apporté une bonne dose de fraîcheur au milieu de jeux à licences en panne d'inspiration, Evolution GT se contente de nous resservir les mêmes plats sans parvenir à s'orienter vers l'arcade ou la simulation. Ses idées sont mal exploitées et manquent vraiment de profondeur. L'IA ne fait qu'empirer les choses en vous rendant la tâche parfois impossible. Une petite déception.