Les vieux RPGistes ayant depuis longtemps forgé leurs armes dans les méandres de la PSone se souviennent sans doute d'un certain Azure Dreams de Konami mettant en scène un jeune héros quelque peu naïf. Tentant de pénétrer dans les plus hautes sphères de la légendaire Tour des Monstres, ce dernier ne pouvait compter que sur des compagnons violents et griffus qu'il récoltait au fur et à mesure de sa progression. Bardé de problèmes divers, dont le célèbre écueil du niveau du héros remis à zéro à chaque sortie du donjon principal, ce soft n'avait pas vraiment récolté de lauriers. Est-ce que sa suite officieuse va progresser dans la même voie ? L'ascension ne fait que commencer.
Tout débute fort mal pour notre jeune ami Tao, que vous vous empresserez de renommer, magicien de son état et vivant sur la petite île de Bente, perdue dans l'océan. Suite à un malheureux incident survenu sur le toit de la Tour des Monstres, pratiquement toute la population de son village natal se voit pétrifiée sans avoir eu la possibilité de fuir ce funeste destin. Traumatisé par la vision de sa famille statufiée, le petit aventurier se lance alors en quête de la créature responsable de tout ce cauchemar en décidant de s'expatrier vers la ville de Mondominio, terre d'accueil de la fameuse tour. Haï de la majorité des habitants du comté pour des raisons que vous apprendrez par la suite, Tao se voit immédiatement considéré comme un paria, étant tout bonnement appelé "le Bente". Une entrée en matière difficile qui n'empêchera pas ce magicien débutant de dénicher des personnes pratiquement favorables à sa cause et surtout de trouver le courage de se lancer seul dans ce qui sera peut-être sa dernière demeure. Outre le côté dramatique de ces propos, il faut retenir dès à présent que le tire se présente sous une forme très particulière, connue sous l'appellation de Dungeon-RPG. Si cela ne vous dit rien et que vous ne vous êtes jamais lancé dans une telle quête, vous allez rapidement comprendre ce que cela peut avoir de problématique.
A la différence des RPG classiques, le Dungeon-RPG vous place dans un univers relativement clos, composé d'un seul village et d'une ou plusieurs zones de combat. Vous ne voyagez jamais vraiment et n'avez pour seul et unique but que d'écumer des dizaines et des dizaines de donjons sans phases de transition classiques entre eux. Si le principe aide à créer une ambiance étouffante ou d'évolution sur un microcosme afin de saisir au plus près un point scénaristique précis, il contient également une part d'ombre non négligeable dans son côté facilement répétitif. De fait, certains titres arrivent à dépasser cette limitation magnifiquement, à l'image de Vagrant Story ou de Breth Of Fire : Dragon Quarter dans un genre un tantinet différent, alors que d'autres s'y empêtrent assez lourdement, comme le méconnu Grandia Xtreme. Malheureusement, Tao's Adventure fait un peu partie de cette seconde facette, dans son entêtement à resservir sans cesse des salles au level design assez semblable, modifiant simplement certains coloris et l'ambiance générale. En effet, il est difficile de trouver une motivation à l'ascension d'une tour gigantesque si justement on ne parvient pas à réellement ressentir une notion de découverte et de progression. D'autant que le systématisme des actions a rapidement tendance à développer une lassitude probante. Passant les phases paisibles dans la ville de Mondominio en vendant les pépites trouvées dans la tour, en achetant des armes, ou en augmentant les caractéristiques de ces dernières via la magie noire, vous finirez forcément ces étapes de customisation par une visite plus ou moins longue dans le bâtiment maudit. Puis, une fois votre périple terminé, pour des raisons techniques (manque de potions, difficulté) ou amicales (votre petit monstre vous somme de vous reposer), vous retournerez dans la cité et ainsi de suite. Un rythme peu aisé à supporter sur le long terme et qui de plus ne trouve pas vraiment d'intérêt le contrebalançant.
Il arrive souvent que des jeux manquant d'aplomb sur une face tentent de s'équilibrer en développant un second axe avec passion. Tao's Aventures essaye avec quelques peines de muscler son côté ludique en proposant un gameplay riche, bien que parfois mal utilisé. Vous laissant le choix des armes à votre entrée dans la Tour des Monstres, à savoir entre une épée classique ou un bâton magique, le soft vous permet en effet de compenser le faible nombre de MP dont dispose ce vieux Tao par une petite pirouette intelligente. Dans les faits, dès que vous éprouvez le besoin d'économiser les points nécessaires à l'utilisation de vos sorts, vous disposez de la possibilité de vous équiper d'une lame tout ce qu'il y a de plus tranchant afin de découper les nombreuses tentatives de rébellion des créatures du donjon. Un système digne d'intérêt et passant outre les habituelles contraintes du mage, mais ne permettant jamais d'oublier que le coeur du soft reste la magie. Car s'il est fastidieux de passer à chaque fois par l'ouverture d'un menu lorsque vous désirez porter un coup de taille ou d'estoc, il est bien plus amusant de déclencher un sort. En effet, malgré l'obligation encore une fois de passer par une commande de l'interface en priorité, l'exécution d'un sortilège reste un moment de réelle interactivité, reprenant dans les grandes lignes le principe de Lost Magic : après l'ouverture d'une zone spécifique à l'écran, sorte de tableau noir entouré de gravures dorées, vous devez y dessiner un symbole particulier assez fidèlement, ce dernier correspondant en réalité à un sort particulier. Une fois tracé de la meilleure manière qui soit avec votre stylet, cette incantation prend forme et il ne vous reste plus qu'à en définir la cible en la sélectionnant tout simplement. Vous ne risquez d'ailleurs pas de vous faire attaquer, le temps s'arrêtant lors de la réalisation de votre oeuvre d'art numérique, contrairement au déroulement pénible inhérent à Lost Magic.
Vous aurez bien évidemment l'occasion de développer vos sorts en fonction de votre niveau d'expérience, mais vos chances de survie dépendront également de vos compagnons bestiaux. Après avoir découvert des oeufs de monstres et les avoir faits expertiser dans une boutique ou via un item rare et spécial, il vous est ainsi donné le pouvoir de les faire éclore, mais exclusivement dans l'enceinte du donjon. Une fois ces petits êtres de plein pied dans la vie, il vous suffit de les ajouter dans votre grimoire occulte afin de pouvoir les invoquer quand bon vous semble et n'importe où. Bénéficiant d'une I.A de chou-fleur trop cuit, ces bêtes étranges s'allieront à vous lors de votre périple, étant censées vous protéger lors des différentes rixes survenant au gré des étages. Malheureusement, vous regardant la majeure partie du temps sans rien faire, ces dernières ne manqueront pas de vous énerver, notamment dans leur réflexe inné de se placer dans la ligne de mire du monstre vous faisant face. Mis à part ce côté un peu dilettante, ces diverses créatures pourront bien sûr bénéficier d'une évolution à l'image de la vôtre et changeront parfois complètement de forme au fil de leur maturation. Malgré tout, vous n'aurez pas vraiment de prise sur leurs capacités et ne pourrez pas aboutir au degré d'intérêt profond d'un Pokémon ou d'un Jade Cocoon pour les plus forcenés. Pourtant, bien conscient de tous ses défauts, Tao's Adventure : Curse Of The Demon Seal parvient tout de même à dévoiler un certain charme, grâce à son gameplay (du moins les magies), son ambiance sonore travaillée, et son univers empreint de légende et d'un certain désespoir étonnant. Si vous avez l'âme d'un collectionneur, vous savez ce qui vous reste à faire. Quoique...
- Graphismes13/20
Si le titre de Konami est l'un des premiers RPG à utiliser une représentation en 3D, sans permettre de rotation de la caméra (bien trop basse en passant), reste que cette dernière se révèle assez pauvre, notamment au niveau des détails. De plus si cet aspect permet de construire certains panoramas assez impressionnants, notamment celui de la Tour des Monstres, il massacre copieusement les personnages qui manquent cruellement de finesse. A noter tout de même le design général de l'univers, assez réussi.
- Jouabilité11/20
Si le fait de dessiner ses propres symboles afin de lancer des sorts reste une idée ingénieuse, diffusant un certain plaisir, l'obligation de passer sans cesse par des menus assez longs à afficher est un écueil difficile à contourner. De plus, si l'élevage de monstres s'avère sympathique, l'impossibilité d'avoir une réelle emprise sur eux fait de cet ajout un quasi-gadget qui ne vaut pratiquement que pour l'aspect collection.
- Durée de vie14/20
Bénéficiant d'un grand nombre d'étages avec un boss bien fourbe tous les cinq paliers, la Tour des Monstres semble bien longue à gravir, surtout si l'on prend en compte le nombre d'allers-retours entre le donjon et la ville. Heureusement qu'il est possible de revenir au dernier étage visité, sans quoi le tout serait vite devenu insupportable. Enfin des principes de combats et d'échanges à deux joueurs permettront d'étoffer encore un peu la durée de vie.
- Bande son14/20
Possédant quelques thèmes vraiment agréables et centrés sur le côté oriental du soft, la bande-son aide réellement à s'impliquer dans l'histoire et participe à l'attrait premier que l'on ressent pour ce dernier. Les effets sonores sont quant à eux assez effacés et ne rendent pas vraiment hommage à certaines magies puissantes.
- Scénario11/20
Relativement classique dans son côté "les forces du mal attaquent et il faut les tuer", Tao's Adventure surprend quelque peu lorsque l'on apprend les raisons de la détestation des personnes de Mondominio à l'égard des habitants de l'île de Bente. Une réflexion intéressante sur la nécessité d'une action qui ne se retrouve pas vraiment dans la quête principale qui avance à un rythme terriblement lent.
Suivant la voie des RPG relativement moyens initiée par Lost Magic, Tao's Adventure : Curse Of The Demon Seal surnage un tantinet grâce à ses quelques idées de gameplay et son ambiance générale. Car, si l'aventure est au départ entraînante, elle a vite tendance à s'affaisser dans les salles identiques de la Tour des Monstres pour ne pas en ressortir très en forme. Si seulement le titre s'était montré un peu plus dynamique et surtout mieux construit, il aurait pu créer une petite surprise. Ce n'est malheureusement pas le cas. La disette de RPG de grande envergure sur DS continue....