La majorité des cultures humaines considèrent la mort comme une ombre rodant sur leur destinée, la représentant souvent comme un être anthropomorphique inquiétant. Soit sous les traits d'un dieu, soit revêtant la forme d'un squelette à la longue tunique à capuche, monsieur, ou madame La Mort semble hors de toute normalité et dimension. Pourtant, il a bien fallu qu'il ou elle aille à l'école un jour, apprenne son boulot de mort. Ce n'est pas parce que l'on est hors du temps que ça empêche de vivre dans la société. La preuve, voici l'histoire d'un petit être découvrant le monde, élevé par des parents attentionnés. Ce jeune garçon se nomme Death Jr et se trouve être le fils naturel de La Mort. Comment est-ce possible me direz-vous ? Je vous répondrais que je n'en sais rien.
Annoncé dès les prémices de la PSP, encore dans les usines de Sony à l'époque, Death Jr avait surpris tout le monde. Fluide, digne d'une Psone en très grande forme, arborant un petit aspect commun avec Medievil, le titre ne pouvait que susciter l'attente excitante. Et pourtant, ce n'est que maintenant qu'il arrive, vêtu de sa cagoule de reports, et un peu dans l'indifférence générale. Une entrée qui convient plutôt bien à un titre axé sur la mythologie de la mort, se glissant insidieusement et étrangement dans le quotidien. Mais est-ce pour autant que le soft de Konami doit souffrir de cet état particulier ? Il est vrai que l'on a maintenant plutôt tendance à le regarder avec un mélange d'espérance et de curiosité. Heureusement, cela conduit à l'envie d'en savoir davantage sur sa personne. Dès les premières minutes, les impressions qui nous assaillent sont plutôt bonnes, sublimées par des artworks très inventifs et détenteurs d'une atmosphère ironique, similaire à celle présente dans les films de Burton. Un univers "glauquo-comique" se dévoile alors dans toute sa force originale donnant à penser que nous voilà enfin devant le subtil croisement entre les paysages torturés de Jack Skellington et ceux de Sir Daniel Fortesque. C'est donc le coeur empli de joie que vous vous lancerez dans le musée abandonné, servant de plate-forme générale au jeu. En effet, c'est de ce lieu angoissant que vous pourrez avoir accès à l'ensemble des mondes présents dans la quête. S'ouvrant au fur et à mesure de votre progression, les voies menant aux divers univers passent obligatoirement devant l'un de vos compagnons, laissés sans connaissance après leur rencontre fortuite avec une sorte de créature peu amicale. Séparés de leur âme, ces derniers n'attendent qu'une chose, que vous les aidiez à retrouver enfin ce morceau d'eux-mêmes. C'est dans cette optique que vous allez vous introduire dans des mondes à l'image de chacun d'entre eux, face à des hordes de créatures belliqueuses et visiblement infernales.
Armé de sa longue faux et de deux pistolets relativement puissants, notre petit ersatz de Dante, sans la classe et surtout sans la peau, verra ses ustensiles de dépeçage évoluer au fil des inconscients ramenés dans leur enveloppe d'origine. Vos doubles automatiques se verront donc ajoutés à une belle collection comprenant un "fusil sullivan" semblable à un canon-scié, un lance-flammes, un fusil électrique, ou encore les célèbres "hamsters C4". Complétant la panoplie logique du héros vidéoludique en colère, cette longue liste offre à Death Jr une puissance de feu qui ne sera pas de trop pour contrecarrer les plans des divers monstres que vous croiserez. Immondices sur pattes faisant d'ailleurs moins peur que vos propres amis de pixels, dérangeants et totalement fous. Néanmoins, vos ennemis ont comme avantage de disposer d'une férocité sincèrement éprouvante. De ce fait, le soft de Backbone Entertainment, malgré le côté juvénile du fils de La Mort ne s'adresse pas du tout à un public jeune, loin de là. Non que l'univers soit choquant, bien au contraire, mais la difficulté est telle que le challenge dépassera les malheureux ayant sous-estimé le jeu. Tentant dans des accès héroïques d'esquiver les tirs et les coups de griffes de vos opposants, vous serez rapidement submergé par ces derniers, et parviendrez peu aisément à dénicher un item de santé avant de passer de vie à trépas. D'autant que le fait que le propre fils de La Mort s'éteigne est déjà assez cocasse en soi. En fait, si la présence d'une difficulté hautement dosée n'est pas précisément un mal, lorsqu'elle rentre en rapport avec un gameplay assez calamiteux elle se change en un problème handicapant.
Gérant maladroitement la caméra, en se perdant dans des plans de plus en plus en désaccord avec une quelconque lisibilité, le titre se voit heureusement pourvu du célèbre cadrage automatique, replaçant le point de vue derrière le héros. Un ajout qui sauve quelque peu les meubles, mais ne parvient pas à faire oublier le manque d'étapes dans la direction. De fait, la gestion des déplacements au stick requiert un net entraînement, notamment dans le cas des demi-tours. En effet, il est plus que fréquent de passer en un clin d'oeil et sans précision aucune d'un côté à l'autre, aboutissant à une sorte de perte de repères. La caméra bascule tellement vite que l'on ne peut honnêtement pas vraiment savoir si le mouvement s'est effectué complètement ou non. On passe donc son temps à essayer de se localiser tout en faisant face aux attaques incessantes des adversaires. Certes, il est possible de passer en vue interne pour se placer idéalement dans la direction voulue, mais en pleine action cette manipulation pose de lourds écueils. Plein de bonne volonté, on peut accepter que les phases de recherches, si le niveau est assez ouvert, ne posent pas d'immenses problèmes, tout en restant critiquables. Un avis qui change radicalement dès que l'on se trouve aux prises avec le système de lock plus qu'étrange du soft. Mal calibré, ce dernier semble privilégier l'inutile à la survie. S'axant sur les voitures, maisons, boîtes aux lettres, et autres objets destructibles, le ciblage prend un malin plaisir à ignorer vos ennemis, pensant sûrement qu'une bouche à incendie représente un danger bien plus important. Et ce n'est pas faute d'avoir essayé le mode manuel, tout aussi condamnable pour sa tendance, non à cibler sans raison, mais à s'arrêter quelques instants sur des choses sans intérêt immédiat. De plus, dès que l'on se trouve dans la fureur du combat, maniant sa faux et ses armes à feu avec un plaisir réel, le procédé de lock préfère s'attarder sur les opposants lointains, plutôt que sur ceux vous laminant au corps-à-corps.
Et le fait de désactiver ce dernier ne change pas la donne, sachant, comme dit ci-dessus, que le maniement de Death Jr s'avère imprécis. Echapper à son destin se change donc en un véritable chemin de croix, durant lequel personne ne viendra vous sauver. Mais le plus énervant est bien de sentir que le soft en lui-même contient un vrai potentiel, complètement ignoré dans le cas présent. Doté d'une ambiance macabre, cynique et décalée au sein de laquelle on pénètre avec aisance, le soft de Konami laisse entrevoir la conception d'un univers cohérent, dans un non-sens assumé. D'autre part, certaines idées de gameplay, comme l'utilisation de la faux ou la présence d'un vrai dynamisme dans les combats, constellés d'ailleurs de combos prenants, auraient mérité une meilleure intégration. Dommage. Présenté comme le fer de lance de la console de Sony, Death Jr n'est en réalité qu'un jeu de plate-forme/action sans réelle envergure, miné par un attroupement de défauts ludiques. On aurait tellement aimé s'attacher à cette histoire décalée. La Mort a encore frappé.
- Graphismes14/20
Tirant assez bien parti des capacités de la PSP, Death Jr affiche des décors joliment modélisés, même si certaines textures laissent un tantinet à désirer. Le monde créé se révèle très accrocheur, rassemblant des inspirations de l'oeuvre générale de Tim Burton, de Medievil, et dans une moindre mesure d'Evil Twin. Un beau mélange qui donne une cohérence graphique au titre et un caractère bien à lui. Pourtant, et malgré une grande fluidité, le soft accuse de lourds problèmes de caméra, handicapant réellement.
- Jouabilité7/20
Mis à part le système de combat très dynamique et quelques bonnes idées en relation avec la faux, le gameplay de Death Jr souffre d'énormes lacunes. Peu jouable à cause d'un système de lock mauvais sur tous les plans, il continue dans sa descente aux enfers par le biais du manque de précision dramatique des déplacements. De plus, dans la foulée, le système de jeu s'empêtre dans une lisibilité déficiente et une absence d'évolution dommageable. Ereintant.
- Durée de vie11/20
Comportant un nombre de missions correct, Death Jr n'est cependant pas très long à terminer, inclus dans les limites habituelles du genre. De plus, vous n'aurez pas de bonus particuliers à déverrouiller, ce qui ne vous poussera pas vraiment à revenir dans l'aventure. Que ce soit par nécessité ou par plaisir. Enfin, et devant la difficulté de certains passages, vous n'aurez pas spécialement le courage de passer outre cette dernière et sa cohorte de problèmes techniques.
- Bande son12/20
Assez éclectique, la bande-son est composée de thèmes plutôt rythmés, arborant même parfois des sonorités électroniques. Néanmoins, on retrouve dans l'ensemble des morceaux plutôt enlevés, avec parfois un petit côté Medievil dans la présence de choeurs et d'envolées ironiques. Les effets sonores sont quant à eux convaincants, permettant de bien se plonger dans l'action frénétique du soft.
- Scénario/
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Que dire, sinon que Death Jr déçoit cruellement ? Auréolé d'une ambiance prenante et délicieusement macabre, le titre de Backbone Entertainement se perd définitivement dans des soucis de gameplay presque terrifiants. Soumis à un lock à l'inverse de l'intuitif, ciblant tout et n'importe quoi et d'une jouabilité fort imprécise, les aventures du rejeton de La Mort ne parviennent pas à s'extirper de leur étroit caveau. On aurait aimé s'accrocher à cette quête originale et délirante contenant tout de même quelques qualités, mais tous les essais sont vains. Laissons ces êtres étranges reposer en paix.