Titre atypique au possible, Under The Knife est en quelque sorte une histoire d'amour passionnée entre un concept et sa matérialisation parfaite. En effet, terre d'accueil des jeux à l'originalité galopante, la DS se change parfois en une véritable bénédiction lorsque ses capacités tactiles sont mises à contribution avec intelligence. C'est ici le cas avec le jeu d'Atlus parvenant à donner au célèbre stylet un rôle bien plus important, le transformant en un instrument chirurgical de pointe. Quoi de mieux pour profiter de cette intéractivité poussée qu'un outil éminemment adapté au travail demandé. Le gameplay s'enroule donc avec douceur autour du petit crayon et se dévoile au fur et à mesure de l'aventure, gardant son génie en réserve. Se déroulant dans un univers hospitalier, ce qui est la moindre des choses, le soft vous place dans la peau de Derek Stiles, un jeune chirurgien nerveux et assez étourdi qui va rapidement changer d'attitude à la suite d'un événement étrange. Le conduisant à se remettre en question et à utiliser à bon escient ses capacités spécifiques, réunies sous le nom de Healing Touch, il va devenir le spécialiste des causes perdues. Assisté de Angie Thompson, une infirmière plutôt impulsive, Derek va rencontrer les cas les plus étranges, au sein d'une année 2018 où la GUILT, une nouvelle forme de peste, ravage de nombreuses villes et villages. Une situation particulièrement immersive donc, qui permet de se sentir immédiatement happé par le jeu et surtout par son rythme "épuisant" et stressant.

Coup de génie ou simple interprétation, on ressent parfaitement les moindres modifications au sein des interventions. Chaque accroc, chaque confusion amène sur une pente émotionnel dont il est difficile de s'extirper. Le joueur se rend en effet compte des plus infimes basculement dans le déroulement de l'opération jusqu'à prévoir des "coups" à l'avance afin de s'assurer une réussite. Evidemment la panique prend parfois le dessus sur la raison, mais c'est dans ces moments que Trauma Center se révèle totalement. Il diffuse alors une tension constante obligeant à se focaliser précisément sur le problème, à faire parler son instinct, et à augmenter sa vitesse d'exécution tout en restant concentré. Un véritable tour de force qui nécessiterait presque la présence d'une assistante pour vous éponger le front. En effet, le gameplay même vous oblige à rester attentif tout au long du temps. Affichant l'endroit précis de la blessure à soigner sur l'écran tactile, Trauma Center dispose tout autour de cette zone d'opération des icônes, représentant les divers ustensiles qui vous seront nécessaires. Une idée des plus logiques mais qui bute parfois sur la difficulté à passer d'un outil à l'autre dans l'urgence, étant donné leur relatif éloignement. Il aurait peut-être été plus judicieux de permettre au joueur de les placer comme bon lui semble suivant l'opération en cours. Néanmoins, ce n'est qu'un détail au regard de ce que propose le jeu.

Une fois plongé dans le silence des organes et après avoir ouvert votre patient d'un cou de scalpel, il ne vous reste plus qu'à vous faire entièrement confiance et à démontrer votre talent. Des capacités qui devront être variées et bien incrustées dans votre esprit à la vue de la diversité des cas à traiter. Allant de "simples" fractures à suturer jusqu'à une trachéotomie en passant par le traitement de tumeurs multiples, les interventions que vous aurez à gérer ne pardonneront pas le moindre écart de conduite. Chaque geste doit être pensé et vos armes bien choisies, d'autant que le stylet demeure d'une précision suffisamment étonnante pour vous pénaliser à la moindre incartade. Jongler adroitement entre le gel antibiotique, les forceps et le drain dans l'ordre logique de leur utilisation est un petit plaisir terriblement prenant. Surtout lorsque l'on découvre des techniques permettant de se servir de ses acquis différemment et la myriade de petits détails obligatoires à la réussite d'une épreuve. Une complexité naissante et charmeuse grandit alors rapidement vers des sommets vous forçant à recommencer parfois trois ou quatre fois une opération dans un souci de réussite. Un écueil un tantinet énervant tant certains passages donnent envie de trancher une artère dans le vif afin d'en finir une bonne fois pour toute. Outre le fait qu'il ne faut surtout pas que je devienne médecin, ce constat met au jour un petit handicap qui pourra peut-être rebuter certaines personnes. Toutefois, ce serait passer à côté d'un concept fort et d'un jeu férocement accrocheur. De plus, l'arrivée de la Healing Touch, matérialisée par une sorte d'étoile à tracer durant une opération après avoir choisi l'icône appropriée, change un tantinet la donne et autorise une liberté relative.

En effet, cette capacité autorise celui qui la possède à réaliser des sortes de miracles chirurgicaux, comme par exemple la possibilité de ralentir le temps durant quelques secondes afin de traiter simultanément de multiples lésions. Un atout de choix dans la manche de la blouse, sachant que des surprises plus ou moins cruelles viendront égayer vos amputations et autres ablations. Des tumeurs peuvent se multiplier sous vos yeux, des objets nocifs peuvent d'un coup affluer par groupes de dix dans les vaisseaux sanguins, etc. Les situations se modifient donc constamment et vous ne serez jamais certain de l'avenir de votre patient avant de l'avoir définitivement recousu. Une variété empêchant l'arrivée fourbe de la lassitude, et réservant une part de mystère excitante. Parallèlement à cela, une réelle trame scénaristique se déploie, jouant sur divers niveaux et évoluant dans des proportions assez imposantes une fois l'existence de la GUILT prouvée. Elle brosse de plus des rapports entre personnages véritablement intéressants, souvent basés sur un questionnement personnel en rapport avec les limites de la médecine. Un pilier solide soutenant donc un gameplay bourré d'idées, novateur et bien plus que tout définitivement fun. Le seul malheur qui pourrait encore lui arriver serait de ne pas être localisé dans notre beau pays. Mais l'arrivée de la simulation d'avocats Phoenix Wright confère un tant soit peu d'espoir. Et deux litres de physio pour Trauma Center !