Ah ben voilà un jeu pour moi, les aventures des poupées Bratz à la conquête du monde de la mode, ou comment tirer parti de la seconde poupée incontournable après Barbie. Sans surprise aucune, un titre qui joue la carte de la surenchère de paillettes dorées, de mascara vert fashion et à chaussures à semelles compensées.
Les stéréotypes ont la vie dure. Il faut dire qu'ils remplissent bien les tiroirs-caisses. C'est sans doute pour cette raison que lorsqu'on veut cibler le jeune public féminin appréciant la mode, il faut systématiquement qu'on nous gave avec des personnages futées comme des coquilles Saint-Jacques. Bratz, à l'origine, c'est la seule véritable force de résistance à Barbie, sur le plan commercial du moins. Une ligne de poupées super branchouilles qui fréquentent des gens cool, portant des prénoms cool, dans des endroits cool et suivant surtout la mode la plus cool, si on aime les trucs très voyants et très chers. Ce sont leurs aventures palpitantes que l'on nous propose de suivre ici, celles de 4 coquilles Saint-Jacques habillées comme des grues et lancées à coeur perdu dans la création de leur propre magazine de mode. Une idée de base pourtant pas si mauvaise après tout, qui aurait même pu être très sympa, si son exploitation n'était pas adaptée au QI d'un coquillage, d'un coquillage mal habillé de surcroît. Le tout bercé par des chansons aux paroles profondes comme "on me dit que je porte trop de maquillage mais je m'en moque". C'est de Bob Dylan je crois.
Conçu comme un jeu d'aventures du pauvre - sous couvert d'être celui de la jeunesse - Bratz : Rock Angelz est creux, vraiment très creux. Tout au long de l'aventure, on ne fera que répéter sans cesse les mêmes quêtes et les mêmes mini-jeux, tous aussi dépourvus d'intérêt et reposant sur les bases les plus simplistes, à savoir : trouver un objet et l'amener à un point donné. Seul le contexte change, l'énigme reste la même. Inutile de réfléchir ne serait-ce que 2 secondes, vous n'avez rien à faire. Vous cherchez une nuance de bleu ? Ne la cherchez pas, parlez simplement à la vendeuse pour lancer un script, passer à un autre personnage, parler à une autre vendeuse qui vous donnera le bleu qui convient, mais seulement après qu'elle vous ait envoyé arranger un rencart avec votre copain Ethan qui se trouve justement à 10 mètres de là. L'ensemble de la partie aventure du jeu ne revient qu'à cliquer sur un objet ou une personne, sans même avoir besoin de s'y reprendre à deux fois puisqu'il n'y a jamais de choix possible. Fatalement, on avance là-dedans à vitesse grand V, à moitié endormi.
Alors, comme pour relever cette mayonnaise sans moutarde et sans sel, Bratz s'orne de mini-jeux, eux aussi praticables par une noix de Saint-Jacques, enfin sous réserve qu'elle ait des bras. Non parce que sinon une Saint-Jacques lambda, ça ne peut pas jouer évidemment, pensez-donc, un coquillage. Enfin bref, les mini-jeux. Là encore, ils sont tous identiques, ou presque. La majeure partie du temps, vous aurez sous les yeux une liste d'objets déroulante avec pour consigne de cliquer sur l'un d'entre eux. Qu'il s'agisse de prendre les bons ingrédients pour un cocktail ou de choisir les bonnes fringues pour remplir des valises. Un peu comme dans Adiboudchou quoi. Si ce n'est qu'Adiboudchou, c'est pas prévu pour une fillette de 10 ans. Et le pire, c'est que si la chose est déjà ennuyeuse à s'en jeter par la fenêtre, ces épreuves paraissent ne jamais vouloir prendre fin. Heureusement qu'ensuite on est récompensé par une nouvelle quête hautement stimulante. Ah, ben non en fait, au temps pour moi, on est juste récompensé par le retour de la chanson rock qui parle du front de libération de l'abus de l'eye-liner infantile, tous ensemble : "you're wearin' too much make-up !".
En matière de réalisation, c'est un peu la cata aussi avec des décors flous sur lesquels évoluent des personnages animés à la va-vite. Des personnages par ailleurs clonés puisque la quasi-totalité des intervenants de sexe non-féminin (des mecs quoi) sont moulés sur le même modèle 3D, façon guerre des clones. Mais c'est surtout sur les textes rédigés en petit-nègre que l'on a envie de s'attarder avec des sous-titres dépourvus d'articles (aller vers porte) ou encore des traductions assez hasardeuses qui nous valent d'être en relation avec un certain "rédacteur de photo". Heureusement (enfin, on se comprend) les sous-titres des dialogues ont profité de plus de soins, en même temps, c'est pas du Baudelaire non plus, même si l'ensemble de cette oeuvre fleure bon les fleurs du mal et m'a foutu un sacré spleen.
- Graphismes8/20
Les textures sont étirées et floues, les modèles 3D tiennent de la mauvaise blague. En somme, on peut dire que la vulgarité vestimentaire du jeu se retrouve également dans sa réalisation.
- Jouabilité5/20
Du début à la fin, on fait et refait sans cesse et sans plaisir les mêmes actions, les mêmes énigmes, les mêmes mini-jeux, toujours au service d'une aventure pleine de vide.
- Durée de vie8/20
D'une facilité déconcertante Bratz se boucle en quelques heures à peine. Je parle du jeu là, pas des cheveux de la poupée.
- Bande son10/20
Un doublage en anglais composé de voix aux accents surjoués destinées à donner à la bande-son son indispensable teinte top fashion. Fatalement, c'est irritant au possible. Les musiques sont en plein dans la mouvance rock pour jeunes adolescentes. Non, non je ne ferai pas de commentaires... "you're wearin' too much make-up !"
- Scénario/
En soi, proposer un jeu d'aventure dans le milieu de la mode, avec pour ambition la création d'un magazine, ça peut être assez sympa pour une jeune fille. A condition de ne pas destiner le jeu aux bigorneaux. Bratz n'offre malheureusement qu'un gameplay totalement creux et parfaitement vide de sens, enrobé d'un nappage sirupeux et vomitif.