Une énorme gueule de requin sur la jaquette, un titre qui fait peur, mais qu'est donc Deep Waters ? Un simulateur de pêche au requin ? Un jeu d'action en eau trouble aux graphismes terrorisants inspirés des Dents De La Mer ? Non, juste un truc vachement bizarre et parfaitement injouable.
Quand le label 505 Gamestreet de Codemasters repère une proie, elle est généralement faible, malade ou gravement blessée. Il ne lui reste alors qu'à la traquer et à l'achever, flairant l'odeur nauséabonde du jeu qu'on a oublié de finir de développer, voire, de commencer. Deep Waters est une atrocité sans nom, une abomination, une plaie d'Egypte oubliée que même les textes anciens se sont refusés à mentionner. Deep Waters emprunte son scénario au film catastrophe Waterworld. Ici aussi on se retrouve dans un monde ravagé et couvert d'eau, incarnant un jeune homme naviguant au gré des vents, ou plutôt de son moteur diesel. Pour gagner sa vie, ce bout d'homme s'en va de port en port afin de se voir attribuer diverses missions, dont la chasse aux monstres marins. Enfin c'est ce qu'on dit, parce que dans la pratique, moi je n'ai même pas pu sortir de la première crique du jeu et j'ai dû me contenter de tirer sur des requins et des espèces de pirates en planche à voile adaptes du boulet de canon.
Tout content sur mon beau bateau, me voilà parti pour me voir attribuer mes premières missions, justement, aller tuer tous les requins qui traînent. Et là c'est le drame. Difficulté numéro une : se déplacer sur le bateau étroit afin d'aller et venir entre le harpon, la barre ou les caisses de ravitaillement. Non seulement il n'y a pas de place pour se déplacer, mais en plus, le personnage est pratiquement incontrôlable. Tant bien que mal, on parvient à rejoindre la barre pour découvrir une nouvelle horreur : la caméra. Placée derrière le bateau presque au niveau de l'eau, celle-ci fait des efforts louables pour qu'on soit bien certain de ne rien voir devant nous. Le même angle de vue étant utilisé lorsqu'on utilise le harpon (et sans mire de visée), se servir de ce dernier est tout simplement impossible. Peu importe, de toutes façons pour tuer les requins, on se sert du fusil. Ah mais là attention, c'est encore une autre histoire. Lorsqu'on dégaine le fusil, on ne peut plus bouger, seulement essayer de viser, et j'insiste sur le terme "essayer". Alors temps qu'il s'agit de requin, ça va encore à peu près, même si le fait de devoir rester statique devient vite fort irritant, surtout que là encore, la caméra se place dans cette aberrante position totalement horizontale. Mais quand les petits lutins en planche à voile se pointent, là on a des envies de meurtre. A la vitesse où ils se déplacent, pour les aligner il faut sans cesse dégainer/rengainer le fusil et bouger dans tous les sens. Mais le mieux, c'est lorssqu'ils commencent à vous tirer dessus et vous ne pouvez rien faire, chaque tir vous immobilisant en faisant tanguer le navire. Or, il se trouve qu'il est rare qu'ils se limitent à un tir, non, non, en général, ils vous balancent 3, 4, voire même 5 coups d'affiléé. On se retrouve à essayer de se déplacer, en étant bloqué par les tirs, sans même arriver à voir ce qui se passe et avec une arme qui elle aussi vous empêche de bouger. En admettant qu'on arrive à faire un pas, normalement, juste après, les lutins recommencent à tirer. Même s'enfuir est un calvaire puisqu'il faut encore pouvoir rejoindre la barre et lancer le bateau.
Injouable, c'est tout simplement injouable. Au sens strict du terme. D'ailleurs, même naviguer est un cauchemar en raison d'une gestion des collisions complètement hallucinante, à plusieurs mètres d'un objet vous réalisez que vous butez sur lui sans même le toucher physiquement ! C'est juste parfaitement insupportable. Mais on peut aller encore plus loin dans le mépris total du consommateur et la définition de ce qu'est un jeu injouable. Parce que ce qu'il faut savoir, c'est que les requins, j'ai fini par les tuer, ainsi que les petits lutins mais ensuite, on fait quoi ? On va se faire payer au port et on tente de se faire refourguer une autre mission pardi. Et ben non, raté, ça marche pas. Alors on fait quoi ? Rien. Je n'ai jamais réussi à obtenir une seconde mission, pas plus que je n'ai pu sortir de la zone où je me trouvais. Voilà, c'est tout, le jeu bloque là, impossible de faire quoi que ce soit d'autre.
D'un autre côté, on se demande qui pourrait bien avoir envie de continuer à jouer. Commande incontrôlable, caméra débile, intérêt nul, et il faut ajouter à ça une réalisation à qui vous ferait vomir du sang dont on aurait à peine voulue à l'ère des premiers jeux 3D de la Playstation. Une seule question se pose quand on voit Deep Waters, le développement n'a pas été terminé, mais a-t-il jamais vraiment démarré ?
- Graphismes3/20
Comment vous dire ça ? C'est laid, très laid, avec une grande étendue bleue qui doit représenter la mer et deux ou trois machins très vilains qui s'agitent dessus de temps à autres. Et comme si la laideur n'était déjà pas assez pénible pour la rétine, il y a de l'aliasing partout.
- Jouabilité1/20
Deep Waters est injouable. Les commandes sont complètement folles, le gameplay se résume à deux boutons et la maniabilité vous met les nerfs en pelote. Mais le comble est tout de même l'incapacité de progresser dans le jeu. Encore que finalement, tout bien réfléchi, c'est peut être une bonne chose.
- Durée de vie1/20
Au bout d'environ 5 minutes, on ne peut plus rien faire. Et quand bien même ce serait possible, je ne vois pas qui pourrait bien le vouloir.
- Bande son5/20
La bande-son passe d'une irritante mélodie en MIDI dissonant à un espèce d'improbable mixe entre du Steve Vai et un générique télé. Non seulement c'est ignoble mais en plus ça ne colle pas du tout à l'univers.
- Scénario/
Deep Waters est tout bonnement un titre honteux qu'il est impossible de jouer à cause de laideur, de sa maniabilité, de ses caméra ou de sa progression incompréhensible et bloquée. Alors que fait-on d'un jeu auquel on ne peut pas jouer ? On le balance au fond d'un lac, en eaux profondes.