Depuis qu'EA a récupéré la licence James Bond, l'éditeur a eu bien du mal à s'en dépatouiller, mais l'an dernier, l'épisode Quitte Ou Double aura fini par briser cette chaîne maudite. La grande question est alors : EA sera-t-il en mesure de rééditer la performance ?
Que voilà une excellente idée, adapter l'un des vieux James Bond classiques, interprété par l'immortel Sean Connery. Un vrai bon 007 bien vintage des temps anciens, histoire de retrouver une ambiance drue et auréolée de la classe du plus grand des James Bond. L'idée un peu moins bonne en revanche, c'est d'avoir voulu apporter des changements assez regrettables vis-à-vis du film. EA, dans un but compréhensible, a ainsi opéré quelques ajouts et coupes sombres dans le scénario de Bons Baisers De Russie. Certaines scènes se voient donc tronquées ou curieusement biaisées, mais ce sont surtout les ajouts qui manquent singulièrement de pêche. Cela dit, le jeu conserve une fidélité tout à fait honorable avec la trame du film qui voit l'agent le plus classe du monde partir à Istanbul pour tomber droit dans un piège du SPECTRE. Tout ça pour justifier une gigantesque chasse aux canards, puisque Bons Baisers de Russie, le jeu, a tout d'un shooter, assez primaire en vérité.
Voilà qui est par ailleurs assez étonnant dans la mesure où, comme à l'accoutumée, Bond est bien équipé en gadgets divers. L'ennui, c'est qu'on a finalement peu d'occasions de s'en servir. Le Q-Copter par exemple, ce petit hélicoptère radioguidé, sert de temps à autre à jeter un regard là où l'on ne peut se rendre physiquement pendant que la ceinture de rappel nous donnera accès à des zones en hauteur ou trop basses. Mais si Quitte Ou Double faisait de cette ceinture un usage spectaculaire, Bons Baisers De Russie la transforme en un malheureux accessoire qui vous déplace automatiquement et sans la moindre allure. Il en va de même pour tous les éléments relatifs au combat, sympathiques dans l'idée, mais parfaitement inexploités. A titre d'exemple, il est possible de réaliser des stealth kills, mais en dehors de deux missions d'infiltration (amusantes au demeurant), jamais on n'aura réellement l'occasion, le besoin ou même l'envie de s'en servir. La raison en est simple : le jeu est avant tout un enchaînement de gros gunfights, malheureusement trop faciles. Pour spectaculaires que puissent être certaines séquences de jeu, elles sont bien trop simples. Dotés d'une IA franchement à la ramasse, les ennemis se font décimer de façon industrielle. Certes, on peut, comme dans Quitte Ou Double, utiliser le système de visée de façon à tirer sur une grenade qu'un hostile et belliqueux adversaire porte à la ceinture. Mais pourquoi s'enquiquiner de la sorte quand il est si simple de tirer dans le tas ? Du coup, l'idée même de profiter de ce genre de petits "plus" ne dépasse pas le stade d'embryon de neurone. Et c'est encore le même problème qui se pose avec les attaques au corps-à-corps qui bien souvent sont exécutées par accident, parce qu'on s'est trop approché d'une cible. C'est très frustrant finalement de voir toutes ces possibilités être complètement effacées par une action trop rentre-dedans. A ce titre, Quitte Ou Double s'en sortait beaucoup mieux là ou Bons Baisers de Russie pèche par paresse.
Ceci étant, on peut toujours trouver son bonheur dans cette succession de combats à la mise en scène parfois ébouriffante, à condition de ne pas être allergique au fait de courir en tirant partout avec un système de visée qui fait le plus gros du travail. Le genre de chose que l'on aurait également souhaité éviter dans les phases à bord de véhicules. Un autre point sur lequel Bons Baisers de Russie échoue quelque peu. Clairement moins impressionnantes que la grande poursuite à moto de l'année dernière, ces phases, qu'elles soient à bord d'une voiture, d'un bateau ou du jetpack souffrent surtout du même problème que le reste du jeu : c'est pas mal, mais on n'est pas dedans, pour la bonne et simple raison que tout ceci est trop facile, il nous manque les grands frissons. Du coup, l'action tombe plus ou moins à plat, cédant encore une fois la place à du run'n gun un peu bateau.
Et c'est un peu la même chose en multijoueur, que l'on joue en deathmatch ou en CTF, ou même dans le pourtant prometteur Dogfight dans lequel on s'affronte équipé de jetpack. Exactement comme dans le mode solo, on note de bonnes bases, mais la sauce retombe. En particulier à force de latter les autres joueurs avec une visée bien trop assistée. Bonjour le challenge ! On terminera avec quelques mots sur la réalisation qui nous fait profiter d'un Sean Connery fort joliment modélisé mais malheureusement dépourvu de sa voix originale, à moins évidemment de jouer en V.O. Globalement assez proche de son grand frère, Bons Baisers de Russie se montre coquet mais manque un peu d'interaction avec l'environnement. Le design est en tout cas plaisant et compte pour beaucoup dans le petit capital sympathie du jeu. L'effet Sean Connery sans doute.
- Graphismes14/20
Joli mais pas à la pointe de la technologie. Bons Baisers De Russie est secoué d'explosions pas vilaines du tout et bénéficie de modélisations et d'animations de bonne facture. La qualité des séquences en véhicules a en revanche diminuée. La version Xbox souffre pour sa part d'un frame-rate assez chaotique.
- Jouabilité13/20
On ne peut que s'étonner de voir tant de bonnes choses être aussi peu employées. Gadgets, James Bond Moments, attaques furtives ou au corps-à-corps, tout ça ne tient qu'une place minime dans le gameplay qui mise tout sur la grosse action. Un choix déroutant et pas très en accord avec la licence.
- Durée de vie11/20
8 heures, voilà qui devient malheureusement une moyenne dans le genre. On pourra augmenter un peu la durée de vie en faisant la chasse aux bonus, dont quelques missions supplémentaires. Ne comptez pas en tout cas sur le multijoueur.
- Bande son14/20
Jouez en VO si vous souhaitez profiter du doublage de Sean Connery. Autrement, vous devrez faire avec un doublage VF de qualité mais assez moyen. Les musiques sont pour leur part parfaitement dans le ton.
- Scénario13/20
Le scénario de base est classique pour un James Bond, mais on s'interroge sur la pertinence des modifications et ajouts d'EA.
Au final, on a quelques pincements au coeur en découvrant tant de possibilités sacrifiées on ne sait trop pourquoi. Ceux qui rêvaient d'un gameplay à la Quitte Ou Double dans une atmosphère oldie en seront pour leurs frais, car si toutes les actions sont là, une seule est utilisée : celle du tir. Un usage curieux d'une licence qui a pourtant l'habitude de faire dans le simple sans pour autant oublier le subtil.