Bien que ce ne soit nullement de sa faute, Kao Le Kangourou deuxième du nom rappelle à nous des heures funestes et macabres. Non que le soft ait été développé dans le contexte d'un conflit particulier, mais il est la seule preuve de l'existence de traces désormais effacées, laissées dans le caveau du jeu vidéo. En effet, le premier épisode de la série avait été réalisé par le studio défunt Titus, et avait acquis l'exclusivité d'une console qu'on ne nomme plus, la Dreamcast. Le kangourou porterait-il malheur ? C'est, je pense, la réflexion que sont fait les développeurs, aboutissant à une campagne d'exorcisation de cet objet du démon dissimulé sous des couleurs pastels. Devant vous se tient donc la version libérée du soft et qui plus est renommée.
Malgré son appellation de Challengers, cet épisode de Kao ne trompe personne, livrant ses petits secrets dès les premières minutes de jeu. Effectivement, nous voici devant une version portable du second opus paru sur consoles de salon, arborant les couleurs un peu passées de l'adaptation brutale et sans imagination. Bref, pas très honnête et faisant ses coups en douce, notre ami le marsupial commence bien mal ses pérégrinations dans le monde de nomade nouvelle génération. Heureusement, il semblerait qu'une bonne fée veille sur lui et permette de se replonger dans l'aventure sans lassitude particulière, malgré le copier-coller indigent dont le jeu est la victime. Cette magie tient en effet de la relative affection que l'on entretient pour le titre au gré de ses parties, grâce à des composantes que je m'en vais vous décrire sur le champ. Très inspiré de la série Crash Bandicoot jusqu'à un point tenant pratiquement du plagiat, Kao Challengers vous conte l'histoire d'un jeune animal sauteur confronté aux plans d'un machiavélique chasseur désireux de capturer ses compagnons pour le coup d'infortune. Considéré comme la dernière et unique chance de salut des prisonniers, le héros aux poils courts va devoir traverser d'innombrables contrées dangereuses dans l'espoir de parvenir à ses fins. Jeu de plate-forme éminemment classique, le soft d'Atari vous fera donc parcourir des villages suspendus, des étendues vierges et glacées, des montagnes verdoyantes, ou encore des grottes volcaniques âcres. Il va sans dire que cette variété constante et bénéficiant d'un moteur 3D convaincant permet de ressentir un véritable dépaysement, et surtout de se rendre compte du côté "aventure" placé comme base du titre. Aboutissant à la construction d'une cohérence globale et d'un univers des plus prenants, cette utilisation intéressante des possibilités offertes par un environnement onirique amène un sentiment d'immersion total. Certes, l'atmosphère est grandement héritée une nouvelle fois de Crash Bandicoot, mais on passe cet état de fait pour suivre les bonds du petit kangourou.
Délimité en plusieurs parties correspondant le plus souvent à des phases de gameplay différentes, les 25 niveaux présents dans le jeu offre une multiplicité de situations salvatrices. En effet, la redondance habituelle des titres orientés plates-formes se fait un peu plus discrète face à l'arrivée d'épreuves de courses de bateaux, de descentes en snowboard, de poursuites à la Indiana Jones et de bien d'autres "mini-jeux" approfondissant l'expérience de jeu. Néanmoins, et malgré ce fond relativement dense, Kao se laisse emporter par une certaine simplicité de mauvais aloi. Avare de mouvements différents et surtout d'un détachement des bases inhérentes à Mario 64, le marsupial aux gants de boxe ne dispose que de peu d'actions diversifiées, se contentant d'effectuer des sauts classiques ou offensifs, de donner des coups de poing et de lancer des boomerangs. Une limitation pas forcément gênante dans l'absolu, mais qui tranche nettement avec la volonté de se renouveler, inhérente au soft d'Atari. De plus, comme si elle avait entendu cet appel, la caméra semble opérer en sous-marin, tentant de réduire à néant les espérances de Kao. Se plaçant soit avec un retard conséquent soit de manière totalement illogique, cette dernière vous posera de nombreux problèmes, surtout durant les phases nécessitant un replacement rapide. Fort heureusement, il vous est possible de la recadrer, mais au prix d'une manipulation lente et peu pratique avec les touches directionnelles, aboutissant à un véritable calvaire au cours d'une action. Pourtant, Kao Challengers se prend instinctivement en main, vous offrant une plongée immédiate dans le jeu et un plaisir ludique notable. Malgré son côté un peu trop classique dans le déroulement des stages uniquement plates-formes, la succession d'objectifs à atteindre et de passages aux pièges ingénieux suffisent à vous retenir durant de nombreuses heures.
Mais là où Kao montre un flanc propice à la blessure, c'est dans sa linéarité assez lénifiante. Si au sein des niveaux, comme dit ci-dessus, vous trouverez une myriade de choses à faire, il est dommage de ne pas avoir donné plusieurs voies à suivre, amenant le joueur à se sentir frustré par une scénarisation trop peu présente pour légitimer la ligne droite inflexible qu'il vous faudra suivre. Toutefois, rythmé et dynamique, le titre d'Atari parvient à surpasser quelque peu cet état de fait pour ressortir la tête de l'eau afin d'apercevoir au loin les nouveaux modes présents dans cette version PSP. Tous multijoueurs, ces derniers ne sont en fait principalement que des adaptations des épreuves spéciales disposées dans le jeu. Le premier, Deathmatch se définit par son propre nom et ne mérite donc pas un approfondissement majeur. Viennent ensuite la course, relativement fun et très jouable, le "maître d'arme" bourrin et peu intéressant sur le long terme, et enfin le mode "poulet" équivalent à une sorte de CTF (Capture The Flag) nécessitant de conserver sa prise, à savoir une tête de poulet, le plus longtemps possible. Un quatuor pour le moins déséquilibré au niveau de l'intérêt, mais qui réussit à justifier la présence de cette possibilité de jeu à plusieurs améliorant qui plus est la durée de vie globale. Kao est donc au final un titre honnête, limité dans ses fondements et dans ce qu'il apporte, mais suffisamment varié et "mignon" pour rallier quelques uns d'entre vous à sa cause.
- Graphismes14/20
Assez joli graphiquement, Kao Challengers est tout de même loin de ses homologues sur PSP laissant de côté la finesse détaillée présente dans de nombreux titres. Néanmoins, tant son univers que l'emploi de couleurs chatoyantes et choisies avec soin, parviennent à lui conférer un cachet particulier et attachant. De plus l'animation ne souffre d'aucun défaut et l'on prend plaisir à déambuler dans les jungles et les montagnes.
- Jouabilité13/20
Bénéficiant d'une prise en main très correcte et d'un gameplay intéressant bien qu'un tantinet trop classique, Kao reste en dessous de nombre de jeux de plate-forme 3D. Souffrant d'une caméra totalement laissée à elle-même le titre d'Atari parvient tout de même miraculeusement à diffuser un plaisir de jeu essentiellement dû à la variété des phases ludique.
- Durée de vie14/20
Disposant de modes multijoueurs assez dignes d'intérêt et donnant un coup de fouet à la durée de vie globale, Kao reste quand même relativement long pour un jeu du genre. S'égrainant au fil de 25 missions, le soft met de côté la lassitude pour proposer une expérience de jeu renouvelée. Néanmoins, ne comptez pas plus de huit heures pour en voir le bout.
- Bande son12/20
Les compositions musicales de Kao s'avèrent de bonne qualité, simplement entachées par les sonorités trop synthétiques et la redondance de certains morceaux. Festives et lumineuses, elles collent parfaitement à l'ambiance du jeu. Les doublages sont quant à eux crédibles, offrant aux animaux vedettes une personnalité bien tranchée.
- Scénario/
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Sortant du marasme des jeux de plate-forme morts-nés, Kao Challengers parvient à se faire une petite place dans la ludothèque encore peu fournie de la PSP grâce à sa variété et à son univers. Néanmoins, si le titre ne parvient pas à accéder à des plus hautes sphères c'est en grande partie à cause de ses écueils de caméra et surtout d'intérêt profond. Un jeu sympathique, assez original, même s'il vole des idées ça et là, et surtout attachant. Mais l'apparence ne fait pas tout.