"Finir le jeu", c'est ce qui doit manquer dans le cahier des charges de Shiny depuis Enter The Matrix. Une fois de plus, le développeur, répondant à des impératifs qui n'ont rien de ludiques, nous livre un soft blindé de bugs et au gameplay inachevé. En dépit de qualités latentes indéniables, The Path Of Neo parvient tout juste à faire mieux que son prédécesseur.
On ne peut qu'être surpris par le manque de soin dont souffre à l'évidence cette nouvelle adaptation de la trilogie Matrix alors que, contrairement à Enter The Matrix, absolument rien n'obligeait Shiny et Atari à sortir leur soft dans une hâte néfaste. C'est tout aussi difficile à comprendre que pénalisant. Contrairement à Enter the Matrix, The Path Of Neo suit en droite ligne les événements des trois films et c'est bien dans la peau de Neo que vous irez fracasser de l'agent, parcourant une à une les scènes les plus marquantes de la saga, du gunfight dans le hall d'immeuble à la lutte finale contre Smith en passant par le combat chez le Mérovingien. Chaque niveau étant introduit par moult extraits vidéo qui, tout en étant d'une qualité remarquable, n'en sont pas moins bien souvent montés avec les pieds, évoquant de mauvaises bandes-annonces. A tel point que c'est à se demander si une personne n'ayant pas vu les films comprendrait quoi que se soit à l'histoire. Evidemment, de nombreuses séquences ont été ajoutées au strict déroulement du scénario, dont une conséquente initiation du jeune élu qui lui permettra d'apprendre les nombreuses techniques de combat à sa disposition.
C'est clairement dans le combat au corps-à-corps que l'on sent tout le potentiel du titre, que l'on se batte au poing ou armé. En ayant recours à deux simples touches d'attaques, à la concentration (soit le bullet time), il est possible de réaliser toutes sortes de combos parmi les plus spectaculaires que peuvent compter les films, des enchaînements dont se dégage une grande classe et une puissance vibrante. Et que je te sautille sur le torse pour te décalquer le menton, et que je te fais une clef de bras en te pulvérisant la cage thoracique, et toi, vlan je transperce au katana avant de frapper dans le dos. Et encore, je ne me risquerai pas à décrire certaines attaques aériennes qui feraient pâlir Spider-Man. Et tout ça avec deux boutons et surtout une mise en scène faisant appel à des ralentis "qui vont bien". Honnêtement, ça claque. Mais... Mais d'abord, quel foutoir. La plupart du temps, on s'y perd et on ne sait jamais vraiment quel combo va sortir, plus ou moins malgré nous. D'ailleurs, le jeu ne s'y trompe pas et du début à la fin, on continuera à voir défiler des conseils de mouvements. Cela dit, cette confusion est le moindre des défauts du jeu. Aussi classes qu'ils puissent être, les affrontements n'en deviennent pas moins rapidement dépourvus d'intérêt car souvent trop faciles. La rencontre finale, façon Dragon Ball Z, contre l'agent Smith en est la meilleure illustration. Souvent répétitifs, les combats perdent de leur éclat à force de se ressembler. Quant au combat contre les 100 agents Smith, une fois la surprise passée, il ne reste qu'à se demander combien de temps va encore durer ce festival de mandales et, surtout, de bugs. Mais ce sont principalement les gunfights qui peinent à convaincre. Il faut dire que si Neo est un vrai chat quand il se bat, quand il se déplace, il n'a aucune allure. Ses mouvements sont secs et sans aucune fluidité ce qui, en plus d'être laid, porte atteinte à la qualité des combats armés qui tiennent plus du "tape la taupe" qu'autre chose. Il faut ajouter un système de lock complètement idiot ou une caméra qui prend plaisir à nous cacher l'action et on peut laisser sombrer un pan du gameplay dans les abîmes.
Un gameplay incomplet, voilà qui est déjà une lourde charge, mais elle devient plus pesante encore quand s'y ajoute une réalisation branlante sur console, et carrément miteuse sur PC. Clipping, ralentissements, disparations soudaines d'objets ou de personnages, son qui flanche, The Path Of Neo devrait changer de nom et opter pour le PatCh de Neo. Shiny a visiblement encore une fois oublié de terminer de coder son jeu avant de le dupliquer. Si au moins ces bugs étaient liés à un titre élégant, on se montrerait plus magnanimes. Or, on ne voit ici que grosses textures et modèles 3D fort pauvres. Si les mouvements de combats sont véritablement réussis, l'ensemble des autres animations est risible, quant à la modélisation des visages elle est simplement pathétique. Le recours au moteur Havok venu assurer la physique du jeu a pour sa part des hauts et des bas, permettant un degré de destruction du décor assez sympathique mais n'offrant que des ragdolls plus que médiocres. Encore un point noir : le level design, inspiré en de rares occasions, pauvrissime le reste du temps, il contribue encore au manque de renouvellement dont souffre durement la progression du jeu. Dommage, on aurait presque pu penser que The Path Of Neo ferait oublier l'effronté Enter The Matrix. Mais avec son gameplay inabouti et sa réalisation qui prouve le respect qu'on a du client quand on travaille sur une grosse licence, on y réfléchira à 5 ou 6 fois, même si la nouvelle fin vaut franchement le détour.
- Graphismes8/20
L'aliasing peut se montrer très violent, en particulier sur PS2 mais il n'est pas la seule déconvenue esthétique. Pourri jusqu'à l'os, Path Of Neo nous livre un festival de bugs décorant des textures souvent immondes. Quant à l'animation, c'est à n'y rien comprendre puisqu'on va d'un extrême à l'autre entre les combats et les mouvements standards. Les visages sont à mourir de rire.
- Jouabilité10/20
Si on sent qu'il y a un potentiel, on le perd malheureusement vite de vue. Shiny a intégré une quantité impressionnante de combos qui pourraient faire le bonheur du joueur par leur grande classe mais la prise en main anarchique vous condamne à n'utiliser que 5 ou 6 d'entre eux et encore, par hasard. Les combats sont répétitifs, certaines phases carrément laborieuses et finalement, on soupire.
- Durée de vie9/20
8 heures suffisent à venir à bout du soft pour découvrir l'excellente nouvelle fin de la trilogie. C'est court, et surtout, on ne risque pas d'y revenir.
- Bande son13/20
Le travail des doubleurs - officiels pour la plupart - est de qualité quant aux musiques elles collent à l'esprit. En revanche, si on se penche sur les problèmes de mix ou les bugs, il y a de quoi être insatisfait entre des balances de voix mal faites ou des effets qui cessent de fonctionner sans raison.
- Scénario/
Il est là, on le sait. Qui ? Le potentiel ludique, quelque part sous ce fatras. Si Shiny avait voulu ou pu pousser au bout le développement du jeu, sans doute aurait-on eu droit à un titre vraiment sympathique, c'est en tout cas ce qu'on se dit lorsque qu'on constate à quel point l'ensemble du jeu manque de finitions. Le gameplay - avec ses combats aux corps-à corps bien sentis mais beaucoup trop limités -, aussi bien que la réalisation qui se situe aux frontières de la honte. Typiquement le genre de titre à essayer pour 10 sacs en occasion. A ce prix vous ne regretterez pas, à plus, vous aller pleurer.