Dans le monde sans foi ni loi du jeu vidéo, certains studios bâtissent leur réputation sur des séries devenues cultes, légitimant à elles seules l'attrait que les fans porteront à toutes les prochaines productions de leur nouvelle référence dans le domaine. Certes un peu réductrice, cette manière de voir les choses s'applique pourtant avec une certaine mesure dans bien des cas. Prenez par exemple SNK, un assemblage mythique de trois lettres simples, à l'origine de véritables phénomènes ayant illuminé la vénérable et hors de prix Néo-Géo. Même si les talentueux développeurs ont mis au jour de nombreuses sagas, les deux principales revenant à l'esprit à l'évocation de ce trio de consonnes restent King Of Fighters et Metal Slug. Par une bienheureuse coïncidence c'est du quatrième épisode de cette dernière que nous allons parler aujourd'hui.
Après sa victoire sur les troupes du Général Morden, la célèbre PF Squad pensait sincèrement s'être débarrassée une fois pour toutes du despote moustachu, espérant une ère de paix emplie de chants d'oiseaux et de plages ensoleillées. Mais comme à son habitude, et malgré les deux résurrections précédentes de leur ennemi juré, la troupe de héros se laissa aller à cet espoir serein, poursuivant ses occupations sans se soucier de l'avenir. Cruelle erreur ! En effet, profitant une nouvelle fois du relâchement des commandos les plus décérébrés du monde, le haut gradé commença à mettre en place un plan machiavélique. Se réveillant clairement en retard, l'équipe des sauveurs potentiels du monde se mit alors en route pour empêcher cette vilenie. Mais était-ce réellement Morden qui tirait les ficelles ? C'est donc pour ces raisons obscures et tirées par les cheveux que vous replongerez dans des assauts à un contre cent, dans des duels avec des missiles ou encore dans des affrontements surnaturels. On le sait, la trame scénaristique d'un jeu d'action brute n'a jamais vraiment été considérée comme une épine dorsale indispensable, et c'est donc le sourire aux lèvres que vous déambulerez dans les six niveaux disponibles, vous focalisant plus sur les massacres à grande échelle que sur le suivi d'une histoire incohérente. Toutefois, un détail interpelle quelque peu dès l'entrée en matière du jeu. En effet, les désormais légendaires et attachants Tarma et Eri ont tout bonnement disparu de la sélection des personnages, remplacés par Trevor et Nadia, tout aussi sympathiques mais moins sujets à un clin d'oeil nostalgique. Fort heureusement les deux anciens agents viendront parfois vous prêter main-forte de manière surprenante et explosive, comme à leur habitude. C'est par conséquent au devant de quatre mercenaires téméraires et quasi inconscients que vous allez officier, menant tout ce petit monde vers une mort certaine, mais également vers un flot ininterrompu d'action rageuse et d'humour parodique.
En effet, chaque niveau est une ode à la construction des anciens jeux d'action 2D à la Ghoul's and Ghost, mais également un enchaînement délirant de clichés propres à la culture cinématographique. Entre les prisonniers barbus à la Rambo, les zombies cracheurs de bile dignes des films de Romero ou encore la fuite en side-car, vous n'aurez de cesse de rechercher l'inspiration des diverses situations rencontrées, amenant un décalage peut-être loin d'être subtil mais profondément amusant. De même, vous pourrez souvent apercevoir des détails habilement glissés dans les décors afin de compléter cet esprit malicieux définitivement et passionnément présent. Relativement fins et intelligemment variés, les environnements que vous traverserez disposent d'un rendu cartoon amenant un recul par rapport à l'action et surtout un support idéal pour la folie généralisée présente. Néanmoins, ces derniers s'avèrent étonnamment bien moins "denses" et léchés que dans l'épisode précédent. Un manque de "rondeur" qui ne parvient pas à les différencier de simples toiles de fond, alors qu'ils semblaient envahir l'espace dans Metal Slug 3. De plus, le design général est lui aussi quelque peu en retrait, se séparant de manière dommageable du fleurissement d'idées précédemment utilisées avec des armées de crabes géants, de méduses spatiales ou encore de machines torturées et incroyables. Mais ne vous y trompez pas, la touche graphique habituelle des Metal Slug est bel et bien présente, avec son lot de véhicules souples arborant un aspect SD et ses troupes militaires caricaturales à outrance. A ce propos, il est un peu décevant de ne pas bénéficier d'un nombre d'unités inédites plus important, se limitant à des pirates et des commandos ennemis tout de noir vêtus. Ceci n'est certes qu'un défaut mineur, mais cette absence de renouvellement est en quelque sorte la maladie qui gangrène cette quatrième version de la série de SNK.
En tout et pour tout, seules quatre petites modifications viendront égayer vos yeux scrutateurs de la moindre grenade négligemment jetée. Tout d'abord, vous pourrez désormais vous mettre aux commandes de deux véhicules autrefois propriété exclusive de vos opposants, ou bien d'une paire de machines guerrières nouvellement arrivées, à savoir une armure mecha radicale mais présente durant seulement 5 minutes et un robot-zombie très peu pratique et limité. Dans la même veine, vous aurez désormais l'occasion d'utiliser deux mitrailleuses lourdes simultanément, assurant le spectacle de façon on ne peut plus fournie. Enfin, après les transformations consciemment risibles et terriblement originales en zombie et en momie, vous allez connaître la joie d'occuper la peau d'un bébé singe très agile au mode de tir dont je vous laisse la surprise. Un ensemble pas vraiment convaincant donc qui laisse un arrière-goût de déception tant on a l'impression de rejouer à un Metal Slug 3 en un peu moins beau sans réelles modifications. D'autant plus qu'à l'image de la version PS2 de ce dernier, vous disposerez de continus infinis finissant de plomber la durée de vie, déjà courte, très courte du soft. Heureusement, le système ingénieux des routes secondaires est encore d'actualité, mais il ne suffira sans doute pas à redonner le sourire après une fin de partie au bout de 50 minutes de jeu. Surtout que dénué de bonus, mis à part un mode record anecdotique, ce quatrième épisode peine à totalement convaincre. Pourtant, détenteur d'un gameplay toujours aussi précis et jouissif, d'une ambiance délirante et explosive, le titre de SNK Playmore parvient à accrocher passionnément le temps d'une partie pour s'éteindre dans un flash lumineux sur le long terme. Metal Slug est un défouloir de luxe, un symbole de l'action brute, mais possède également la fragilité de l'éphémère. Espérons que le cinquième opus nous réserve un peu plus de surprises et surtout des crédits limités.
- Graphismes13/20
Bien que relativement joli et proposant toujours un déluge d'effets et de boss défiant toute imagination humaine, ce quatrième opus est tout de même bien en retrait par rapport au troisième épisode. Moins inspiré au niveau du design et surtout proposant une réalisation moins léchée, il expose une 2D de qualité mais bien moins probante que l'on aurait pu le penser. En revanche, l'animation ne souffre d'aucun défaut et les ralentissements sont aux abonnés absents.
- Jouabilité15/20
Jouissif et intuitif, Metal Slug 4 contient la puissance d'un gameplay 2D tout en y adjoignant des petites subtilités au niveau de l'utilisation des véhicules. En effet, chaque engin se voit tributaire d'une jouabilité particulière renouvelant à chaque fois l'expérience du pilotage. Néanmoins il est un peu dommage de ne pas bénéficier d'un nombre d'armes plus important et surtout d'un système de tir spécial. De plus, on note trop peu de changements dans la globalité.
- Durée de vie8/20
Grâce, ou plutôt à cause de continus illimités, il vous sera possible de terminer le jeu en moins d'une heure, et ce dans n'importe quel niveau de difficulté. Un écueil dommageable tant les Metal Slug reposent sur un véritable challenge, parvenant à tenir en haleine au gré de passages traumatisants. Malgré tout on reste sous le charme du début à la fin attendant la venue d'un mode bonus qui n'arrive jamais.
- Bande son13/20
Les compositions du titre de SNK, bien que passant relativement inaperçues, collent bien à l'ambiance du jeu et offrent le petit coup de pouce dynamique au rythme du jeu. Les effets sonores quant à eux participent pleinement à l'immersion en soulignant les explosions et les cris des soldats à l'image d'un cartoon. Vous assisterez parfois à un véritable festival de sons bruts et furieux.
- Scénario/
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Malgré sa réussite dans le fond, Metal Slug 4 se perd quelque peu sur sa forme, régressant au niveau du design et de la réalisation graphique par rapport à son vaillant grand frère. De plus, la présence de continus infinis gâche le plaisir pris lors de rixes jouissives où la vie ne tient qu'à un millimètre carré d'espace libre. Il est dommage de priver les joueurs de ces montées d'adrénaline, même si le titre en l'état reste très agréable à parcourir, réservant son lot de scènes d'anthologie. Un bon jeu, seulement handicapé par une volonté de le placer dans un créneau trop grand public.