The Movies n'est ni une superproduction, ni un petit produit indépendant sans envergure, loin de là. D'ailleurs, on n'est même pas sûr qu'il s'agisse vraiment d'un jeu et c'est sans doute cela qui le rend fascinant et prometteur.
Développeur vedette depuis des années, Peter Molyneux a toujours su susciter la curiosité autour de ses projets, que le résultat final s'avère probant ou pas. Sans s'étendre pendant des heures sur le style du bonhomme, un des points communs de nombreux titres qu'il a signés est de permettre au joueur de se retrouver sur un pied d'égalité avec Dieu, rien que ça, que la divinité en question soit bénéfique comme dans Populous, malfaisante comme dans Dungeon Keeper ou n'ait pas encore choisi son camp comme dans Black & White. On sent bien l'influence qu'a eu sur Molyneux cette fameuse anecdote qu'il raconte à qui veut l'écouter et selon laquelle, enfant, il se serait amusé à détruire une fourmilière pour, ensuite, observer les insectes reconstruire leur habitat. C'est encore sur ce principe qu'il a développé The Movies sur lequel nous avons pu jeter un rapide coup d'oeil.
Pourquoi y'a un bateau au milieu du jardin ?
L'idée de base est de vous mettre, en quelque sorte, à nouveau dans la peau d'une divinité créatrice de mondes puisque vous endossez l'identité d'un directeur de studio de cinéma. Plus précisément, le jeu commence en 1920, à l'époque du muet. Une fois que vous avez choisi une raison sociale pour votre société de production, vous vous retrouvez téléporté sur un terrain vague apparemment inondé de soleil, Hollywood oblige. Sur ce lopin, vous disposez vos premiers bâtiments : bureau de recrutement pour embaucher votre personnel logistique ou artistique, ainsi que l'indispensable atelier de production où vous pourrez établir une équipe technique ou mettre vos scénaristes au travail et, enfin, l'école d'art dramatique dont la lourde tâche sera de transformer le moindre quidam en acteur confirmé. En attendant que tout ce petit monde ait pondu un chef-d'oeuvre (du moins sur le papier...), vous continuez à améliorer vos infrastructures en ajoutant quelques éléments décoratifs (parterres de fleurs, dallages...) ou encore des commodités essentielles (toilettes, baraque à sandwich...). Le bien-être de vos employés est primordial et, comme dans tant d'autres jeux de gestion, ce sera un soucis perpétuel. C'est d'autant plus vrai que The Movies va vous emmener des années 20 à nos jours en reprenant les progrès qu'a fait la production cinématographique durant cette période énorme, progrès dont il vous faudra disposer pour produire des films ayant une chance de grimper au box-office. Donc, attendez-vous à faire constamment progresser vos bâtiments et à passer une bonne partie de The Movies le casque de chantier bien vissé sur la tête.
Flûte, mon légend-o-tron est en panne.
L'interface fait indubitablement penser à celle des "Sims", comprenez qu'elle est construite en cascade à partir de menus qui apparaissent les uns après les autres dès qu'on clique ou qu'on amène simplement le curseur sur un élément. Gros avantage : la plupart du temps, l'écran actif est libre de tout menu qui pourrait cacher ce qui se passe dans votre studio. Les développeurs ont également repris à leur compte le système des petites icônes temporaires qui vous indiquent durant quelques secondes combien vous coûte telle installation, quelle est l'humeur de tel ou tel personnage, etc. De plus , dès que cela est nécessaire, vos acteurs et vos techniciens sont reliés par des sortes de bandes dorées à l'endroit où ils devraient se trouver pour optimiser leur présence dans votre studio. Lisible et très pratique. Comme dans tout jeu développé sous l'égide de Peter Molyneux, vous n'avez plus qu'à vous emparer d'eux pour les jeter là où le devoir les appelle, même si cette méthode a, bien entendu, le chic pour engendrer de leur part moult protestations. Ils ont de la chance. S'ils avaient été dans Dungeon Keeper, vous auriez pu rabattre leur caquet d'une gifle bien méritée. Dès que vous aurez construit votre premier décor, vous ferez vos premiers pas dans le 7ème art en laissant votre équipe de "professionnels de la profession", chers à Godard, vous mettre en boîte un court-métrage forcément muet et en noir et blanc. A vous ensuite de l'exploiter en salle et, selon sa qualité, de récolter des critiques élogieuses ou assassines de la part de journalistes qui, c'est bien connu, ne sont que des artistes frustrés et qui ne comprennent jamais rien à l'art...
D'où qui sont les frères Warner ?
Sur cet aspect gestion qui représente la base de The Movies se greffera un atelier de création de films qui éloigne ce logiciel du concept de jeu à proprement parler. Molyneux et son équipe ont vraiment mis les moyens pour proposer un outil très complet, particulièrement intuitif et rendant toutes les approches amusantes et aisées, aussi bien pour le débutant que pour l'utilisateur chevronné. The Movies proposera une bibliothèque d'environ 10 000 scènes, chiffre qui sera augmenté par des mises à jour régulières sur Internet, nous a-t-on promis. Chacune de ces scènes sera entièrement paramétrable. Sur le principe des pantins de bois servant pour le dessin, on habillera les acteurs en leur appliquant des textures sélectionnées parmi une garde-robe pléthorique comprenant à la fois des vêtements et des apparences physiques. Il sera également possible de changer le décor à loisir, installer un nombre précis de figurants, véhicules et animaux que l'on voudra... Bref, les combinaisons seront vraiment innombrables. Mais le travail d'un réalisateur tient aussi à la direction d'acteurs qui leur permet d'adopter la bonne attitude par rapport au scénario. The Movies autorisera bien évidemment cela. Ainsi pourra-t-on faire varier avec précision l'humeur, la vitesse de déplacement et surtout le langage du corps grâce à un système de curseurs horizontaux qui feront varier la façon d'être de votre acteur selon l'idée de la règle graduée.
Alors toi le mannequin, tu crois vraiment que tu peux jouer mieux que moi ?
Une fois votre film dans la boîte, The Movie vous laissera tout loisir de fabriquer le doublage que vous souhaiterez puisqu'il gère parfaitement les fichiers MP3 ou les enregistrements directs. Autrement dit, et nonobstant les questions de droit d'auteur, vous pourrez tout à la fois vous constituer une bande originale à la Tarantino, bruiter à la bouche une fusillade dans votre remake de "Hardboiled", ou encore faire quelque chose de très professionnel mais facilement gérable au niveau de l'enregistrement. The Movies a également un gros avantage qui pourrait lui permettre sur la durée de séduire un public bien plus large que les quelques branchés qui vont se le procurer dès sa sortie : il n'enregistre pas les films produits dans un obscur format propriétaire mais en .wmv. C'est essentiel car que tous les possesseurs de Windows (et ils sont quelques-uns...) pourront se délecter des oeuvres existantes et, sans doute, se décider à apporter leur pierre à l'édifice. Poussant cette idée plus loin, Molyneux revendique aujourd'hui sa volonté d'organiser des festivals et des concours de courts-métrages. Comptez sur jeuxvideo.com pour vous tenir au courant sur ces initiatives dès que les précisions nous arriveront. The Movies sortira sur PC le 11 novembre 2005 et sur PS2, Xbox, GameCube en 2006.
