Le jeu vidéo dans son ensemble se révèle assez propice à des séparations relativement marquées. Dans le cas de l'originalité par exemple, on trouve d'un côté les studios cherchant à innover, à apporter une nouvelle pierre à l'édifice vidéoludique, courant le danger d 'être décriés sauvagement, et de l'autre ceux qui ne prennent pas trop de risques et s'accrochent à des valeurs sûres. L'un et l'autre vivent la plupart du temps leur vie dans leur univers respectifs, et avancent tranquillement dans cet état de fait. Mais quelquefois un troisième larron s'invite à cette promenade. Celui-ci est en fait l'incarnation de projets n'hésitant pas à prendre des bonnes idées un peu partout pour les intégrer ni vu ni connu afin de s'attirer un public. Total Overdose est de ceux-là. Toutefois, cette caractéristique n'implique pas que le résultat final soit décevant...
Mais pourquoi toujours joindre mexicains, cocaïne et fusillades, pourrait-on se dire dès l'entrée en matière du jeu. En effet, Total Overdose fait partie de ce type de soft qui s'amuse ouvertement des clichés relayés par le cinéma et la conscience populaire, afin d'en faire la pierre angulaire de son ambiance. A l'image de GTA San Andreas, le titre d'Eidos surfe sur cette vague de dénonciation satyrique et acide, cherchant à se donner un fond humoristique très second degré, en jouant justement avec les clichés. Mais est-ce que la caricature ne se dessert-elle pas elle-même par ce trop plein d'a-priori acides et ironiques ? C'est une autre question. Toujours est-il que notre héros, loin d'être en proie à quelques doutes, affiche une sérénité bien étrange à la vue des évènements qui l'accablent. Ayant subi la mort de son père récemment, ce dernier, aidé par son frère handicapé, se met en tête de mener une enquête assez personnelle dans le but de résoudre les zones d'ombre de cette tragédie. Malheureusement pour lui, cette affaire remonte jusqu'à des strates difficilement accessibles de la société, et surtout liées au trafic de drogue dirigé par des latino-américains, ce qui semble relativement normal dans le contexte. Il va donc falloir vous intégrer dans les divers cartels afin de quérir diverses informations importantes, et bien sûr régler leur compte à certains notables un peu trop impliqués. Néanmoins, vous n'aurez pas besoin de faire appel à de quelconques notions de furtivité ou de stratégie. Ici, la seule loi est celle du fusil à canon-scié. Moins d'arguments peut-être mais bien plus convaincants. De ce fait, tout le gameplay tourne autour de cette mise en avant de l'action pure et dure, par le biais d'une volonté évidente de privilégier le côté spectaculaire. Et c'est enfin lorsque l'on se saisit du personnage principal que les souvenirs commencent à poindre.
En effet, et ce dès les premiers mouvements spéciaux, on ne peut s'empêcher de retenir un flot de noms et d'images ayant marqué les esprits. Allant de Max Payne à Enter The Matrix, en passant par The Suffering, les inspirations se succèdent et forment un tout étrangement plutôt cohérent. Mais ces dernières ne sont pas seules, vous le verrez par la suite. Effectivement, notre héros au bouc bien taillé se révèle un grand amateur de cascades et d'acrobaties variées. La preuve en est la focalisation du soft sur ces aspect bien précis, soutenant clairement le plaisir que l'on peut prendre à s'essayer à cette aventure pleine de "hombre", de "hermanos" et de "dineros". Le concept est malgré tout fort simple, reposant sur la bonne gestion d'une jauge d'adrénaline située dans le bas d'écran. Cette dernière, se remplissant dès que vous ne faites pas appel à elle, sert en fait de réserve nécessaire à l'exécution de mouvements spéciaux baptisés Tirs d'Esquives. Se déclinant sous différentes formes plus ou moins impressionnantes, ces derniers s'apparentent au mode "bullet time" de Max Payne, dans lequel vous pouviez ralentir le passage du temps pour ajuster au mieux votre visée, et neutraliser des groupes d'adversaires entiers sans vous soucier de la dangerosité de votre action. Justement, l'attrait vient de cette plongée vers un déluge de feu afin de prouver sa valeur de façon particulièrement évidente. Toutefois, Total Overdose ne s'arrête pas en si bon chemin, et mélange ces phases déjà enivrantes avec des actions surréalistes tirées en droite ligne d'Enter The Matrix. A vous donc les roues aériennes en s'appuyant sur les murs et les multiples rebonds effectués de manière analogue. Vous devenez pour le coup une sorte de tueur implacable et insaisissable, apportant un sentiment de puissance fort agréable, et favorisant l'immersion. D'autant que vous devrez gérer au mieux votre réticule dans le but avoué d'enchaîner les "headshots", même si un habile système de visée automatique vous secondera dans ce travail. Tout en sachant bien évidemment que chaque meurtre réalisé avec style vous rapportera un certain nombre de points, qui eux-mêmes vous autoriseront à engranger avec avidité des bonus à la fin de chaque mission. Et ce n'est pas tout, car il vous incombera de la même manière de tenir compte des combos que vous réaliserez, multipliant vos points en fonction du nombre d'ennemis abattus dans un laps de temps défini par le "chrono de combo" se déclenchant dès le premier meurtre avec un Tir Esquive. Un principe assez intéressant, obligeant à jouer le mieux possible et à rechercher la classe plutôt que la violence brute.
Pour continuer dans notre série des inspirations bienheureuses, il serait impensable de ne pas citer GTA San Andreas, tant l'ambiance, le fond, et l'aspect graphique semblent tout droit sortis d'une version pirate du titre de Rockstar. En effet, vous dirigez votre héros dans une immense cité, découpée en quartiers thématiques, dans lesquels il vous faudra trouver des malfrats locaux afin de récolter des missions, soit secondaires, soit destinées à faire avancer la trame. Pour ce faire, ne désirant pas user vos frêles semelles, vous vous jetterez logiquement dans la première voiture venue, vous engouffrant violemment à l'intérieur sans autre explication. Une grande liberté vous est d'ailleurs offerte, sachant que vous pouvez subtiliser n'importe quel véhicule à n'importe qui, n'importe où. En revanche, détail étrange, les conducteurs restent dans leur bolide, et ne cherchent même pas à vous en déloger. De même, il est surprenant de subir un temps de chargement entre chaque grande zone, donnant une impression d'enfermement et surtout de progression hachée. Une fois habitué à ces défauts légers, il sera temps de récupérer toutes sortes de bonus bien dissimulés dans les "niveaux", vous permettant soit d'améliorer vos barres de vie et d'adrénaline ce qui reste classique, soit de participer à des défis complètement barrés, contre des hommes-squelettes, des super-catcheurs ou encore des Mariachis sans aucune justification. Un délire rafraîchissant, qui ne fait pourtant pas oublier les graphismes relativement décevants du titre, reprenant de ce fait une nouvelle caractéristique à GTA. Offrant des décors avec une profondeur de champ correcte, affichant des détails assez nombreux et des textures convaincantes, le titre pèche surtout par son manque de finesse sur la modélisation générale. Les environnements s'avèrent un peu trop anguleux, même si les personnages tirent bien mieux leur épingle du jeu que sur consoles de salon. Fort heureusement, l'animation ne souffre pas de lacunes, et on prend un plaisir réel à observer les cabrioles de notre héros, bercé par une fluidité notable. On remarque également une gestion de la lumière réussie, rappelant une nouvelle fois le soft de Rockstar, par le grain appliqué à cette dernière.
Au final, fort jouable, mêlant phases de gun-fight sans problèmes majeurs au niveau de la gestion de la caméra, et phases de conduite s'appréhendant intelligemment, Total Overdose pourrait, avec son bagage d'inspirations diverses, se poser comme l'une des grandes réussites de cet automne. Malheureusement, il lui manque un vrai caractère et surtout une construction prenante. Effectivement, la majeure partie des missions nécessite de se rendre dans des endroits peu étendus, afin d'éliminer une trentaine d'hommes de main, puis de détruire ou de voler quelque chose, sans vraiment avoir le sentiment de parcourir la ville et de réellement avoir une influence sur le long terme. D'autre part, et bien que les "tirs d'esquive" mettent du piment dans les parties, on se prend à les utiliser à longueur de temps, si bien que le gameplay n'évolue plus vraiment jusqu'au bout. Reste que Total Overdose est un bon défouloir, complet, immersif et surtout enflammé. Si vous souhaitez retrouver une ambiance à la GTA SA un peu plus orientée action, vous savez ce qu'il vous reste à faire.
- Graphismes14/20
Loin d'égaler les récentes productions sur PC, Total Overdose reste tout de même dans la moyenne, proposant des décors variés, assez détaillés et relativement étendus. De même l'animation ne souffre d'aucun heurt, et conserve une grande fluidité tout au long de vos péripéties. Restent la modélisation globale, et le côté un petit peu anguleux du titre dans son ensemble. A noter par contre des effets spéciaux réussis, notamment dans le cas de la gestion des flammes.
- Jouabilité16/20
Proposant un savant mix entre Max Payne et Enter The Matrix (pour son bon côté, à savoir les acrobaties), Total Overdose procure un plaisir immédiat et permet de se sentir invincible dès les premières minutes de jeu. On prend ainsi des risques inconsidérés, plongé dans une certaine fascination. De plus, le pilotage des divers bolides du soft se révèle très agréable, offrant des sensations on ne peut plus captivantes. Il est simplement regrettable de ne pas avoir accès à une évolution du gameplay. D'autant que cette version PC profite avec bonheur du duo souris et clavier, bien plus agréable.
- Durée de vie14/20
Les diverses missions à accomplir augmentent en difficulté au fur et à mesure de votre progression, proposant même parfois un challenge assez relevé. Pour autant, il ne vous faudra pas des jours et des jours pour terminer Total Overdose. Amusant, prenant, mais également vite lassant, il demeure comme un excellent entracte entre deux gros titres. Ce qui est un compliment.
- Bande son14/20
Doté de doublages très moyens, du moins pour une grande moitié de ses personnages, Total Overdose se rattrape sur les morceaux musicaux, aux accents mexicains clairement mis en avant. Vous aurez donc le droit à des mélodies douces et typiques, tout comme des passages plus rock, soutenus par Molotov ou encore Delinquent Habits. Une bande-son qui met bien dans l'ambiance et qui colle parfaitement aux passages qu'elle souligne.
- Scénario/
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Petite surprise, Total Overdose se pose comme un titre assez convaincant, offrant son lot de sensations et parvenant à susciter un intérêt immédiat. Néanmoins son plus gros problème vient de son manque de caractère et de son aspect répétitif. Empruntant peut-être trop à de nombreux titres éminemment connus, le titre d'Eidos se perd dans ses inspirations et ne parvient pas à se montrer comme un chef de file. Néanmoins, si vous désirez poursuivre l'expérience GTA SA, Total Overdose sera à n'en pas douter un choix astucieux.