On peut dire que cette fois-ci Kuju nous a bien surpris. En effet, se laissant emporter par la "mode" nauséeuse des pseudo armes de destruction massive peut être cachées dans un lieu incertain par on ne sait pas trop qui, il nous met aujourd'hui face à la cruelle réalité d'un titre empruntant cette mouvance à son compte. Mais, malin et avisé, le studio retourne habilement la situation aàson compte. Effectivement, jouant sur le doute, la conspiration, et les manipulations d'opinion coupables il ne peut que faire naître l'interrogation chez l'acheteur. Ce dernier se pose alors cette question :"Même si les images au dos de la jaquette sont piteuses, est-ce que ce ne serait pas justement pour me tromper, et justifier le fond du soft". Impressionnant n'est-ce pas ? De là naît la paranoïa, qui n'est pas très bonne conseillère.
Après une introduction vous contant le background scénaristique très original du titre, traitant de virus mortel, de russes et d'une poignée de trahisons gouvernementales, l'action commence enfin pour vous alias Cole Justice. Outre porter un patronyme pour le moins risible et rappelant les grandes heures navrantes de Chuck Norris, notre bon ami âgé tout de même de 49 ans, part donc régler des problèmes, dont il ne comprend rien, à sa manière. Vous vous en doutez, celle-ci repose essentiellement sur des fusillades aveugles, des bris de nuques et autres activités physiques spécifiques aux temps de guerre. Mais est-ce pour cela que l'on doit haïr monsieur Justice ? Bien entendu que non, car il est sauveur du monde américain attitré. Et quand on dispose de ce statut, rien ne vous est interdit, pas même de manger des chips avec du nutella. Les muscles saillants de Cole le portant au devant du danger, il est de ce fait normal que ce valeureux quinquagénaire puisse s'équiper d'un arsenal conséquent et surtout spectaculaire. C'est pour cette raison que vous pourrez dénicher une petite sélection comprenant lance-roquettes, fusils sniper et quelques mitraillettes de bon aloi sans être de bon goût. Tel un Rambo retraité, craignant plus l'arrêt de Derrick que la grande faucheuse, il vous incombera donc de parcourir cinq niveaux en adoptant le style que vous préférez. Les plus raffinés opteront pour une furtivité relative s'aidant de leur 9mm et visant particulièrement le crâne, tandis que les autres opteront pour une roquette propulsée vers, je cite :"un truc qui a bougé". Néanmoins, même en essayant d'être discret au possible, vous ne récolterez que les fruits amers de la déception. En effet, les gardes surgissent au moindre claquement de porte et s'avèrent tellement vifs que conserver un petit calibre se révèle fatal sur la durée. A ce propos, ces derniers doivent posséder une sorte de pouvoir mystique leur permettant de savoir où vous vous trouvez en moins de trois secondes sans même vous avoir entendu. Impossible de se dissimuler à la faveur d'une ombre, tel le Abe belliqueux. Un écueil dommageable d'autant que vos opposants s'avèrent curieusement surpuissants, pouvant aisément vous exterminer de trois ou quatre balles. Une donnée qui ne serait pas étonnante dans un soft à vocation réaliste, mais qui choque un tant soit peu dans Conspiracy, ouvertement arcade, voire plus.
Cette précision n'est pas anodine et reflète bien l'ambiance générale de l'aventure. C'est en effet, et sans méchanceté aucune, le grand n'importe quoi. Pour commencer les ennemis n'ont aucune logique et répondent toujours aux mêmes stimuli. Tirez dans une porte, personne ne viendra voir ce qui se passe, ouvrez-la et vous vous prendrez sûrement une balle dans la tête. Je plains sincèrement les personnes travaillant dans les locaux de l'organisation terroriste que Cole s'acharne à combattre. Imaginez le pauvre scientifique juste désireux d'aller chercher ses lunettes. Le personnel doit relativement bien tourner dans cette société à regrets limités. Dans le même registre, nos frères les gardes disposent de réflexes surhumains quand vous n'êtes pas en face d'eux. Si vous vous trouvez derrière une caisse, vous ne comprendrez rien à votre mort subite, mais si vous vous tenez devant eux ils hésiteront parfois plusieurs secondes avant de faire la différence entre une poutre et vous. Leur petit cerveau doit se dire :"Poutre pas tirer, type étrange tirer, copains tirer, heu...". C'est tout de même bien triste d'en arriver là. A côté de ça, du moins dans le premier niveau, vous allez pouvoir rencontrer des pièges censés vous ralentir, voire vous tuer. Malheureusement, pour eux, ils sont si grossiers que l'on se prend à croire que nous avons affaire au premier FPS pensé par les Monty Pythons. Un bon gros trait noir simulant un fil tendu entre deux buissons dignes de figurer dans une boîte de playmobils, une mine aussi massive et visible qu'une machine à laver dans une penderie, ou encore des pieux à peine enfoncés dans le sol et disposés sur un carré d'herbe quasiment fluorescent composent la stratégie de vos opposants. On en viendrait presque à faire exprès de se blesser afin de leur remonter un tantinet le moral. Ces cas pourtant très précis représentent tout de même la globalité du titre, ce qui n'est pas une mince conclusion. Pour résumer, le level-design s'avère minimaliste, proposant une avancée d'une linéarité sans nom et un manque d'imagination flagrant. D'autre part, la taille on ne peut plus réduite des stages amène à un syndrome de cloisonnement rapidement rebutant. Mais ce n'est pas tout, loin s'en faut.
En effet, que faut-il faire lorsque l'on a pas assez de missions (cinq précisément) pour dépasser les trois heures de durée de vie ? Et bien tout simplement afficher des objectifs à remplir tenant de la haute folie furieuse et une difficulté générale fortement élevée. Et si ça ne suffit pas, pourquoi ne pas inclure des schémas de jeu mal pensés et illogiques rendant la vie du joueur impossible. Le problème de cette idée révolutionnaire est que si elle est poussée dans des retranchements trop lointains elle peut facilement dégoûter l'acheteur. Ce qui est le cas ici. Peut-on alors se raccrocher à l'adaptation PC de ce jeu à l'origine sûrement destiné uniquement aux consoles de salon ? Et bien que nenni ! Pour commencer, il est impossible de choisir sa configuration de touche. Et n'espérez même pas définir l'affichage, aucun menu ne le permet. Si c'est pas une preuve qu'ils cherchent à nous éloigner d'une vérité profonde ça. Ils sont partout, ils nous observent. Cette crise passée, vous pourrez observer les décors aussi vides qu'une plage en automne et surtout remarquer les teintes employées, allant du très vif au criard en passant par l'éblouissant. De ce fait, les décors n'ont plus rien de crédible et paraissent vraiment sortir d'un jeu de construction. Même dans les environnements intérieurs, les couleurs apparaissent bien trop baveuses et fades, recouvrant des textures certes lissées, mais bien trop pauvres pour convaincre. D'autre part, on ressent une angoisse réelle à croiser des soldats identiques tout au long du jeu, semblant tous issus d'une grande machine à cloner. Il n'en faut pas plus pour délaisser ce titre, dont le seul point positif est de proposer un gameplay intuitif et une action sans temps morts. Maintenant, pourrez-vous vivre tranquillement en sachant que vous êtes observé ? Ne croyez en rien, ne faites confiance à personne, surtout si l'on vous conseille d'acheter ce jeu.
- Graphismes5/20
Sorte de vision horrifique de Turok Evolution, Conspiracy réutilise les couleurs criardes de ce dernier afin de les sublimer. Sorte de condensé de tous les bugs existant dans un FPS, le titre de Kuju aborde une terre trop exploitée en ce moment dans le jeu vidéo, l'absence de fond et de forme. Evoluer dans des environnements cubiques à peine masqués par un lissage grossier et sursauter à chaque vision d'un garde transgénique est clairement fatiguant à la longue. A préciser que ce titre est le seul où tirer sur un arbre aboutit à une gerbe de sang...
- Jouabilité5/20
Intuitive et claire, mais cruellement simpliste, la jouabilité de ce soft confine au ridicule lorsque l'on s'aperçoit de ses limites. De plus, l'impossibilité de configurer son clavier, voire d'utiliser un pad, et l'absence de gestion du "mode" azerty font preuve d'un portage bâclé à tous les niveaux. De plus, les déplacements se révèlent bien trop mous et cassent le rythme des combats.
- Durée de vie4/20
Affichant sans honte ses cinq vieux niveaux aussi étendus que l'intérieur d'une gazinière, et ne proposant aucun mode multi, Conspiracy ne fait pas même l'effet d'un entracte. Mal construit et particulièrement lacunaire dans son évolution il dégoûtera n'importe qui de poursuivre l'aventure.
- Bande son4/20
Mis à part la musique d'introduction et celle diffusée lors de votre mort, on ne peut pas dire que l'univers musical de Conspiracy soit détonnant. De plus, aucun bruit ne vient illustrer un coup de poing, ni la prise d'une arme. Et je ne vous parle même pas du doublage qui pique la langue.
- Scénario4/20
Les armes bactériologiques c'est pas bien, et les terroristes non plus. En plus tout le monde nous ment et le monde entier court à sa perte. On a déjà entendu cette mélopée des dizaines de fois, et on commence à visualiser que les héros sont vraiment un peu trop crédules. Surtout monsieur Justice. En même temps avec un nom pareil, il y a de quoi être parano.
Concrètement, Conspiracy est l'un des plus mauvais FPS existant, aux côtés de l'ami Turok Evolution. Pauvre graphiquement, ludiquement, et dans bien d'autres domaines encore, il ne peut en aucun cas prétendre posséder la plus petite trace d'un semblant de fond. La gamme Oxygen permet effectivement de respirer dans le flot de bons jeux disponibles. Une fenêtre ouverte sur un autre monde. Espérons que Kuju se reprenne, un jour.