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Test Killer 7

Killer 7 : Trailer tamatama mix

Killer 7
4 052 vues
Profil de Logan,  Jeuxvideo.com
Logan - Journaliste jeuxvideo.com

Pour beaucoup Killer 7 est une idée (novatrice ou non) avant d'être un jeu. De ce fait, on peut légitimement penser que critiquer un tel produit est quasiment impossible, la subjectivité prenant rapidement le pas sur l'objectivité. Si Romendil a connu le problème avec Rez, je me vois aujourd'hui confronté à un dossier similaire. Néanmoins, Killer 7 opte pour des idées de gameplay totalement assumées par ses développeurs tout en y injectant un scénario diabolique aux accents kafkaïens : des raisons suffisantes pour ouvrir l'insconsicent d'Harman Smith afin de s'y plonger pour tenter de découvrir ce qui s'y cache réellement.

Killer 7

Si une analogie entre le 7ème art et Killer 7 devait être faite, on pourrait dire que le titre de Capcom est au jeu vidéo ce que les oeuvres de Miike Takashi sont au cinéma : surréalistes. Ainsi, bien qu'on puisse trouver pas mal de points communs entre Killer 7 et le Ishii The Killer ou la trilogie Dead Or Alive (rien à voir avec la série de Tecmo) de Miike, la dernière production de la firme nippone est à ce point déjantée, maladive et totalement barrée qu'on a l'impression de se retrouver devant un gouffre béant où rien de ce que l'on voit n'est acquis. J'avais déjà ressenti cette impression devant Silent Hill 2 qui reste pour moi le soft disposant du meilleur scénario jamais écrit pour un jeu vidéo et si on retrouve certains thèmes similaires entre les deux titres, disons que le synopsis de Killer 7 est moins poussé que celui de SH 2 tout en étant aussi psychologique. Cependant, il convient de préciser que l'orientation prise par les équipes de Grasshopper ne conviendra pas à tout le monde. En somme Killer 7 peut être comparé à de l'art abstrait dans lequel certaines personnes y verront quelque chose, y trouveront leur bonheur alors que d'autres se feront un malin plaisir de crier au scandale. Tout est une question de feeling tant l'atmosphère décrite en ces lieux est à nulle autre pareille.

Killer 7
MASK De Smith dispose d'une grosse puissance de feu qui réduira en cendres le plus imposant des Smiles.
Le fait que Killer soit aussi intrigant, mature et décomplexé, en cela qu'il ne cherche nullement à répondre aux attentes des joueurs, n'est pas innocent. Ainsi, il ne cherche pas son inspiration dans les productions actuelles et va plutôt piocher des idées du côté des comics américains et du cinéma. Son esthétique tout d'abord est d'une finesse inouïe, tant dans le choix des couleurs que dans le design des protagonistes. Il va sans dire que le graphisme du titre est la porte d'entrée d'un univers dédié à la folie, la violence et le sadisme viscéral. Ceci se caractérise par des couleurs criardes qui tranchent parfois avec l'ambiance terriblement glauque. En marge de ces plans saturés par des tons fluo, on a également droit à des décors proches des estampes japonaises où tout est basé sur les nuances de blanc ou de noir. Bien que l'ensemble puisse paraître dépouillé, que les environnements semblent spartiates, la charte graphique du soft est d'un très haut niveau et c'est bel et bien votre sensibilité qui fera battre ou non votre petit coeur devant cette bande dessinée interactive. Le terme n'est pas trop fort puisque en plus du cell shading qui accentue le côté comic book, les créateurs ont aussi opté pour un système de jeu qui zébrera l'écran en autant de cases (à l'image d'une bande dessinée) qu'il y a de chemins possibles arrivé à un croisement. Quelques passages animés viendront aussi s'immiscer et en plus d'être un régal pour les mirettes, ils vous en apprendront un peu plus sur le scénario.

Killer 7
Iwazaru vous prodiguera de précieux conseils tout au long de l'aventure.
L'histoire de Killer 7 n'est pas qu'un atout marketing sur lequel Capcom a basé sa communication et se veut bien plus complexe qu'on pourrait le penser. C'est sur fond d'un drame géopolitique, où la destruction du Japon pourrait être imminente, que la section Killer 7 entre en scène. Derrière ce nom de code se cache le dénommé Harman Smith qui a l'étrange possibilité de matérialiser sept personnalités distinctes. Si le pitch de départ est propice à des situations délirantes, on se rend vite compte que le monde de Killer 7 n'est qu'un vaste cauchemar dont un certain Kun Lan semble être le chef d'orchestre. Ce dernier, aidé de mystérieuses créatures du nom de Sourires Célestes, compte bien mettre le monde à feu et à sang en y répandant un nuage de folie. Pris comme tel, le titre pourrait très bien ressembler à un vaste thriller psychotique, mais on remarque rapidement qu'on a affaire à quelque chose de beaucoup plus évolué. Dès le départ, on ne sait pas à quoi se fier et on en vient même à se demander si Harman Smith est bien le réceptacle qu'il est censé être ou tout simplement une coque vide, une extension mentale de Garcian Smith, une des personnalités qui est seule capable de communiquer avec Harman. Je ne vous cache donc pas que le scénario de Killer 7 m'a littéralement scotché tout en me renvoyant à la figure les films de Tsukamoto Shinya (Tetsuo), Lars Von Trier (la série The Kingdom), David Lynch (Lost Highway et Mulholland Drive), les métrages de Miike ou le chef-d'oeuvre de James Mangold, Identity.

Killer 7
Une fois que vous aurez créé du serum, vous pourrez booster les capacités de vos personnalités.
Cette parenté avec le cinéma est également caractérisée par les 7 personnalités qui sont travaillées à l'extrême. Chacune dispose de caractéristiques et d'armes spécifiques et vous pourrez à tout moment switcher entre elles en fonction des situations ou des ennemis à abattre. Nous avons donc Garcian Smith qui est le seul à pouvoir ressusciter les autres personnalités et qu'il conviendra d'user avec parcimonie sachant que sa mort sera synonyme de Game Over. Dan Smith est armé d'un revolver et à la capacité de tirer des balles démoniaques. Kaede Smith utilise un pistolet automatique avec viseur intégré, peut se taillader les veines pour faire disparaître des murs de sang mais a tendance à recharger très lentement. Con Smith peut courir très vite, repérer les Smiles grâce à son ouie surdéveloppée et si ses tirs ne sont pas très puissants, ses doubles flingues et sa capacité à recharger rapidement sont de grands atouts. Coyote Smith est sans doute le personnage le plus équilibré. En plus de crocheter les serrures et de pouvoir sauter très haut, son flingue modifié est une excellente arme. Kevin Smith a pour lui de pouvoir de se rendre invisible et c'est le plus rapide du groupe sachant qu'il peut lancer des couteaux sans discontinuité. Reste MASK De Smith (un clone de El Santo qui fut le héros d'une tripotée de films durant les années 60-70), dont la propension à utiliser deux lance-grenades n'a d'égal que sa maîtrise du catch.

Killer 7
Les enigmes restent très simples à résoudre et sont le plus souvent basées sur l'équation : Objet=résolution.
Une fois que vous aurez fait connaissance avec ces personnalités, il faudra que vous vous fassiez au gameplay assez particulier. Premièrement, le tout est un mix entre le jeu de tir et celui d'aventure, ce qui se caractérisera par quelques énigmes à résoudre afin d'avancer. Ceci dit, cela reste très simple d'autant qu'une map vous indique quel personnage utiliser à tel endroit, quel objet doit être trouvé pour résoudre telle énigme, etc. C'est en tuant ces ennemis que vous pourrez récolter du sang, source de vie et d'évolution de vos personnages. En effet, le précieux liquide vous servira à remonter la vie de vos tueurs mais sera surtout indispensable pour créer du sérum qui vous servira ensuite à augmenter les capacités de vos personnalités ou à débloquer de nouvelles aptitudes. Malheureusement, il est un peu idiot de voir que le joueur pourra booster à fond toutes les capacités de ses 7 personnages dès la deuxième mission. Le truc sera ici de rester dans un endroit rempli de Spiral Smiles, qui en plus d'être lents se matérialiseront indéfiniment. Ainsi avec un peu de patience, vous pourrez tranquillement remplir vos éprouvettes et créer autant de sérum qu'il vous faut.

Killer 7
Vous devrez utiliser les capacités spécifiques de chaque tueur pour atteindre des zones inaccessibles.
Bien que vous ayez accès à plusieurs personnalités dès le début d'une mission, il faut savoir que vous devrez généralement tuer un certain nombre de Smiles avant que d'autres personnalités se réveillent. Ensuite, si vous pourrez switcher de l'une à l'autre en passant par un menu d'options, vous devrez impérativement utiliser des téléviseurs, qui se trouvent dans les chambres d'Harman, pour faire évoluer vos personnages. De plus si une de vos personnalités venait à mourir, vous recommenceriez l'aventure dans la dernière chambre visitée afin de choisir un autre personnage. Le système a quelques lourdeurs car si plusieurs chambres sont dispersées dans chaque niveau, vous ne pourrez sauvegarder votre partie que dans certaines d'entre-elles. De plus, il arrive parfois que vous ayez à refaire un bon bout de chemin pour revenir à l'endroit où on vient de vous éliminer. Enfin, si vous désirez ressusciter une des personnalités défuntes, vous devrez choisir Garcian Smith qui devra dans un premier temps se rendre sur le lieu de l'accident pour ensuite être téléporté d'office dans la chambre d'où vous venez. Néanmoins, on s'y fait assez vite, ce qui est aussi le cas pour le système de déplacement. Ici, aucune liberté de mouvements, vous évoluez sur des rails (votre personnage avançant lorsque vous appuyez sur un bouton) et avez seulement la possibilité de vous retourner à votre guise pour revenir en arrière. A chaque croisement, vous devrez choisir le chemin que vous désirez prendre en poussant le joystick dans la direction souhaitée et c'est à peu près tout.

Killer 7
Les tons fluos accentuent encore plus le malaise intrisèque en celà qu'ils paraissent complètement décalés.
Un autre aspect très important a trait à la bande-son. En plus du doublage américain en tout point parfait, des musiques hallucinées ou au contraire très spirituelles, vous devrez tendre l'oreille pour entendre les rires de vos ennemis. Vous devrez ensuite appuyer sur la touche R1 pour passer en vue subjective, presser L1 pour scanner les environs histoire de voir vos ennemis et enfin balader votre viseur sur leur corps afin de chercher leur point faible représenté par un point jaune. Il n'est pas utile de dénicher leur faiblesse pour les tuer (à l'exception de Poison Smile) mais si vous réussissez à toucher leur talon d'Achille, vous pourrez leur exploser des membres ou les tuer en un coup pour obtenir davantage de sang. Sachant que les Smiles sont parfois très véloces et qu'ils ont la fâcheuse tendance de se faire sauter quand ils vous touchent, prenez donc votre temps pour affûter vos réflexes. Bien qu'on puisse trouver pas mal de défauts à la jouabilité, elle reste à l'image du jeu tout entier qui assume ses choix tant artistiques que techniques. Conseiller Killer 7 serait donc aussi abstrait que de scander haut et fort que Wassily Kandinsky était un génie. Ce qui fera la différence est tapi au fond de chacun d'entre-vous mais si l'Etrange et l'Absurde sont vos compagnes, vous ne pourrez que succomber au charme déviant de la nouvelle expérimentation de Capcom...

Les notes
  • Graphismes16/20

    Autant on peut trouver le design d'ensemble sans expression, autant on peut totalement adhérer à cet univers très Comic Book, où chaque plan semble puiser ses inspirations dans le cinéma ou l'art abstrait. Pour ma part, je trouve le tout très expressif, raffiné et à même de donner du crédit à un univers baroque que ne renierait pas David Lynch ou Tarantino. Que dire également des 7 personnalités si ce n'est qu'elles ont toutes bénéficié d'un grand soin. Leur charisme est proportionnel à leur sadisme et à leur folie et ici aussi on trouvera de grosses références à la BD et au 7ème art.

  • Jouabilité15/20

    La jouabilité est bonne (quoique simpliste) et ne vous posera aucun problème surtout si vous n'avez rien contre le fait que vous avanciez sur des rails. Chacune des personnalités a ses propres caractéristiques qui seront tôt ou tard mises à profit et bien que le système de résurrection et de sauvegarde rattaché aux chambres d'Harman soit un peu contraignant, l'aspect évolutif de vos tueurs est bien pensé.

  • Durée de vie14/20

    Le jeu est composé de sept missions qui demanderont chacune deux heures pour être bouclée. Privilégiez d'entrée le mode Difficile pour obtenir moins d'indices. La difficulté reste bien dosée, surtout si vous utilisez correctement les capacités de vos personnalités.

  • Bande son17/20

    Le doublage américain est en tout point excellent et les musiques ne sont pas en reste. D'un éclectisme certain, elles arrivent parfois à devancer la mise en scène en nous faisant ressentir des émotions qui s'accordent avec celles véhiculées par des atmosphères graphiques où la noirceur peut côtoyer des tons beaucoup plus vifs. Plusieurs thèmes sont assez dérangeants et peuvent faire penser à une cacophonie assourdissante mais on ne pourra pas leur enlever leur originalité qui se marie à point nommé avec ce qui se déroule sous nos yeux.

  • Scénario16/20

    Le scénario possède plusieurs niveaux de lecture et à l'instar des films de David Lynch, il est très excitant de ne pas avoir de vraies réponses sur le pourquoi du comment, le joueur pouvant dès lors se faire son propre film/jeu. Signalons aussi que l'ambiance renvoie au cinéma complètement déjanté de Miike Takashi, si bien qu'il sera difficile pour tout le monde d'adhérer aux concepts excentriques et psychologiques dont se nourrit l'histoire de Killer 7.

Killer 7 pourra être adulé comme il pourra être décrié. Si on se base uniquement sur l'aspect technique, quelques lourdeurs et autres approximations pourront gêner la progression mais ce n'est pas vraiment si préjudiciable que ça, surtout sur GameCube. Au delà du gameplay très simpliste, Killer 7 ressemble davantage à un trip psychotique qu'à un jeu d'action conventionnel. Entretenant des liens de parenté avec le cinéma de Lynch, Tarantino, Tsukamoto, Miike, etc., il est clair que le grand public aura beaucoup de mal à rentrer dans le vif du sujet sans quelques appréhensions. Mais si vous parvenez à franchir cette barrière culturelle, le voyage sera d'autant plus plaisant qu'il vous fera réfléchir tout en installant une atmosphère baroque sortie du cerveau malade de développeurs aux multiples...talents.

Note de la rédaction

15
17.7

L'avis des lecteurs (58)

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