Plus de deux ans après le premier Big Mutha Trucker, Empire remet le couvert avec un délicat BMT 2 : Truck Me Harder. Se situant entre un Need For Speed et un Burnout à la sauce camionneurs, cette série vise avant tout un public friand de personnages bien potaches, d'humour bien salace et d'ironie bien grinçante. Une fois qu'on a compris que le jeu doit être pris au 25ème degré, on pourra alors se lancer dans cette version vidéoludique d'Easy Rider pour qui le bon goût n'est, au final, qu'un vague concept.
Je ne saurais dire pourquoi mais la série des Truck Me Harder possède un petit parfum "années 80". Cela est peut-être dû à son attitude désinvolte (voire iconoclaste) où à son design légèrement kitsh bien ancré dans une culture américaine, mais quoiqu'il en soit, ce titre doit autant à son atmosphère bien rétro qu'à son concept qui assume pleinement ses choix. Si vous avez joué au premier épisode de la série, vous devez donc savoir de quoi il en retourne. Pour tous les autres, sachez que vous allez être au volant d'un camion-remorque rempli à ras-bord de marchandises et que vous allez devoir effectuer plusieurs livraisons afin de ramasser un paquet de pognon. Tout ceci se fera dans l'optique de la libération prochaine de votre chère maman qui a passé le plus clair de son temps à l'ombre d'un mirador. Bien que le scénario ne vaille pas vraiment tripette, il a au moins le mérite de présenter le mode Principal qui va vous permettre de sillonner l'Ouest américain en engloutissant des kilomètres d'asphalte. En plus dudit mode, vous retrouverez également un mode Mission composé de 10 défis qui iront de la récupération d'aliens en passant par la promotion d'un artiste sur le retour. Ces petits défis ne payent pas de mine mais apportent un peu d'originalité à un jeu qui n'en manque pourtant pas.
Maintenant, l'originalité ne fait pas tout et c'est ce qu'on se dit après avoir passé quelques heures à sillonner les "vastes" étendues du titre. Le principal reproche que je ferai d'emblée à ce Truck Me Harder est la très grande linéarité de son cheminement qui implique inévitablement une lassitude quasi immédiate. On a beau pouvoir conduire des poids lourd (ce qui n'est pas si courant que ça dans un jeu vidéo), le titre de Eutechnyx s'enlise dans son concept de va-et-vient incessant. Voici donc comment se déroule le mode Histoire. Tout commence à un choix de destination sur une carte qui comprend une dizaine de lieux. Une fois choisie votre destination, vous devrez vous y rendre le plus rapidement possible pour essayer d'obtenir des gains supplémentaires. Une fois arrivé, deux choix s'offriront à vous : le magasin et le bar. En vous rendant dans le premier endroit, vous pourrez vendre les marchandises que vous transportez et en acheter de nouvelles pour essayer de les vendre à leur tour dans un autre bled. Par contre, vous ne pourrez pas toujours acquérir ce qui vous intéresse car certaines marchandises coûtent chères et sont très lourdes. La question du poids du chargement est une donnée importante car au début du jeu, la charge maximale de votre remorque est assez faible, ce qui fait que vous devrez choisir judicieusement votre cargaison. Il conviendra alors de prendre diverses marchandises afin de les amener dans des villes qui en ont besoin, le coût du rachat étant alors plus important. A mesure que vous progresserez, vous pourrez toutefois améliorer les compétences de votre véhicule et transportez davantage d'articles.
Le second endroit, le bar, vous permettra de papoter avec les indigènes du coin ou de jouer à des jeux d'argent. C'est ici que vous obtiendrez des missions Bonus qui vous rapporteront le plus souvent un maximum de deniers. Ces missions pourront vous conduire à éviter la police du coin, à ramasser des clochards, etc. D'autres vous demanderont d'aller voir une personne bien précise dans une autre ville afin de lui offrir un pot de vin. Ceci vous sera utile pour vous enrichir et pour ouvrir d'autres comptoirs de la carte qui recèlent de nouvelles marchandises. Dans le principe, c'est assez drôle mais vu que les missions ne sont pas si nombreuses que ça, le tout s'essouffle rapidement. C'est aussi le cas des jeux d'argent qui sont aussi nombreux qu'il y a de villes mais qui sont, malheureusement, de véritables gouffres financiers. Pourtant, la plupart des jeux de cartes sont principalement basés sur la chance mais rien n'y fait, la console est dotée d'une chance insolente ou triche comme ce n'est pas permis. On aura beau jouer à la Bataille, user de réflexes pour réussir à obtenir des paires, rien n'y fait, on perd dans la majeur partie des cas. Heureusement que d'autres solutions existent pour ramasser du pognon. C'est ainsi qu'en réalisant des excès de vitesse, en emboutissant des véhicules, ou en détruisant les décors, vous obtiendrez du flouze, du blé, des pépettes. Une autre astuce consistera à choisir une prime de livraison avant le départ, mais attention car plus la prime sera élevée, plus vous devrez rejoindre votre destination en un minimum de temps. Enfin, une des dernières options pour devenir riche sera de bien se garer une fois que vous aurez rejoint votre but. Mais tout comme les primes, ces défis de stationnement seront limités dans le temps.
Bien que cette course contre la montre fasse monter la pression, il est dommage de constater que le gameplay ne permet pas vraiment de prendre son pied. Si on ne s'attendait pas à quelque chose d'aussi rapide que Burnout, il est dommage que BMT 2 ne mette jamais en avant la puissance des camions pour accentuer le côté arcade du jeu. Au lieu de ça, les tracés sont plats, le trafic routier est limité et notre véhicule a tendance à ressembler à une Lada pour ce qui est d'encaisser les chocs. Ensuite, l'impression de vitesse est absente et chaque mission vous demandera de suivre une route bien précise, que vous pourrez visualiser grâce à une carte. Dans l'absolu, vous me direz que Burnout était lui aussi très linéaire avec son manque flagrant de chemins de traverse mais, la série de Criterion possède un fun et une rage qui font grandement défaut à Truck Me Harder. D'autant plus vrai que la maniabilité des camions exaspère en très peu de temps. Ok, ce sont des trucks américains, ok, ça ne se conduit pas aussi facilement qu'une voiture sans permis mais quel intérêt de réaliser un jeu qui prône d'un côté une attitude anarchique et très rock'n roll et qui de l'autre adopte un gameplay qui aurait davantage sa place dans une simulation d'auto-école ? En somme, si vous vous amusez à dévier de la route qui vous est proposée, il arrivera souvent que vous ne puissiez pas revenir sur vos pas, hormis par le biais d'un très long détour. La solution la plus simple sera alors de réaliser une marche arrière pour revenir sur vos pas mais vu que cette manoeuvre se fait au prix d'une grande maîtrise de soi, on s'énerve plus que l'on ne s'amuse.
Bien sûr, si c'est l'aspect trash ou la libido exacerbée des babes du jeu qui vous pousse à l'acheter, vous ne serez pas déçu mais pour le reste, vous pourrez repasser. L'aspect graphique est dépassé, malgré la variété des décors (une lointaine cousine de Las Vegas, une ville côtière, un hameau juché en haut d'une montagne...), les collisions ne sont pas mises en valeur et même si le style "Mad" apporte à l'ensemble une ambiance déjantée, le tout est bien moins convaincant une fois qu'on est dans le jeu à proprement parlé. Pourtant la volonté des développeurs qui est d'aller jusqu'au bout de leur délire est presque palpable quand on se penche sur la bande-son. On y trouve des rythmes bien Country sans oublier des bons gros morceaux de rock que ne renierait pas notre Dick Rivers national, et les voix des acteurs sont délibérément caricaturales. Mais malgré le fait que le jeu soit construit autour de son ambiance, on a bien du mal à échapper à l'ennui qui s'invite un peu trop prestement pour qu'on vous conseille l'achat de ce soft. A la limite, si vous êtes un adepte de la route 66, que vous idolâtrez Blake Shelton, et que Shérif fais-moi peur est votre série culte, pourquoi pas, mais pour les autres...
- Graphismes11/20
Les villes à visiter sont loin d'être en surnombre mais elles ont au moins le mérite de posséder une atmosphère qui leur est propre. Si on retrouve l'ambiance de véritables cités américaines, il faut aussi voir que la 3D est vieillotte, que les détails pointent au chômage et que les carambolages ne profitent d'aucune mise en scène, hormis quelques ralentis pour accentuer l'impact. Enfin, signalons que le design très Mad Magazine perd de son charme une fois qu'on est dans le jeu.
- Jouabilité12/20
La maniabilité est trop lourde pour qu'on puisse prendre du plaisir. Bien entendu, un camion se conduit plus difficilement qu'une voiture mais quitte à réaliser un jeu arcade, pourquoi ne pas avoir opté pour un gameplay moins contraignant, surtout au niveau des marches arrières ou de la façon de tourner des poids lourd ?
- Durée de vie11/20
Le mode Mission ne dispose qu'une dizaine défis qui ont au moins le mérite de varier les objectifs. Le mode Solo est également assez long vu qu'il y a une palanquée de missions mais après deux ou trois heures, vous devriez être blasés. Enfin, le fait de pouvoir choisir entre 4 camions n'apporte rien au déroulement de l'histoire et les sensations de conduite sont exactement les mêmes.
- Bande son14/20
Les doublages anglais sont caricaturaux mais c'est un choix assumé pour accentuer le côté décalé et bien trash du jeu. La bande-son passe de la country au rock plus musclé et donne un cachet bien kitsh à l'ensemble.
- Scénario/
Big Mutha Truckers 2 apporte quelques nouveautés à la série mais reste malgré tout sclérosé par sa "Beauf attitude". On s'y amuse le temps de quelques parties mais au final, le fun n'est jamais vraiment présent. Des courses bien trop mollassonnes et des missions qui se répètent à l'infini finissent d'achever ce titre qui ne fera pas vraiment date dans le milieu vidéoludique.