Si la série de Namco n'a jamais brillé concernant l'évolution de son gameplay, elle a toujours eu pour point d'orgue d'en proposer davantage, que ce soit d'un strict point de vue visuel ou en terme de contenu. Tekken 5 ne fait nullement exception à la règle puisqu'il pousse la PS2 dans ses derniers retranchements pour nous proposer l'épisode le plus abouti de la saga.
En s'attardant sur l'ensemble de la série, on constate que la courbe de progression entre les trois premiers Tekken sur PSone est strictement la même que celle des trois opus suivants sur la PS2. Pour clore le bal, et en attendant le prochain épisode sur PS3, Namco nous gratifie d'un magnifique cinquième épisode qui malgré le manque flagrant d'innovations, se pose comme un incontournable de la baston sur le monolithe noir de Sony. Une des questions qu'on peut se poser tient à ce qu'on attend d'un nouvel épisode de Tekken. Personnellement, je dois dire que je ne recherche pas nécessairement un gameplay plus abouti mais plutôt un dynamisme qui n'a jamais fait faux bond à la série depuis ses débuts. Je ne nie pas que l'ajout de nouveaux personnages est aussi une donnée importante mais au final c'est bel et bien un état d'esprit que je sollicite. Nous touchons donc un point sensible qui fait que chaque Tekken se doit d'apporter sa pierre (toute petite soit-elle) à l'édifice de ce monument de la castagne. Le dernier acte dispose ainsi du minimum syndical afin de ne pas être taxé de simple extension. Au rayon des challenges, on retrouve les classiques Mode Histoire, Arcade, Contre-La Montre, Duel, mode Equipe, Survie et Entraînement. Rajoutons le beat'em all Devil Within, les trois premiers Tekken dans leur version Arcade ainsi qu'un éditeur pour personnaliser vos combattants et vous obtenez une richesse intrinsèque à même de booster la durée de vie. Pourtant, ce que je disais plus haut se vérifie également avec ce nouvel opus puisque Namco semble avoir eu beaucoup de mal à apporter des innovations dignes de ce nom.
Par exemple, le mode Devil Within peine réellement à convaincre. La faute en incombe à une gestion de la caméra un peu rebutante (avec l'obligation de la recentrer constamment), des environnements métalliques qui ne changent quasiment pas d'un iota sur toute la durée de l'aventure ou au faible panel de coups que peut utiliser Jin. Vous pourrez également bénéficier d'une transformation en démon pour varier les plaisirs mais au final ce challenge est uniquement intéressant pour choper quelques crédits supplémentaires qui vous serviront à customiser votre combattant. Cependant, bien que le relookage de son poulain soit une bonne chose, on se rend vite compte du manque d'envergure de cette personnalisation. Si le fait de ne pouvoir véritablement créer un personnage ne soit pas trop préjudiciable, il est en effet beaucoup plus dommage que les développeurs n'aient pas opté pour quelque chose de plus consistant en matière d'habillage. Par conséquent, une fois que vous aurez suffisamment obtenu de crédits (qui se gagnent dans quasiment tous les modes de jeu), vous devrez choisir un des combattants disponibles avant d'entrer dans la phase de personnalisation. Vous pourrez alors modifier son visage, lui ajouter un couvre-chef, quelques babioles (spécifiques à chaque héros), acheter de nouveaux costumes et en modifier les couleurs. Cette description semble prometteuse mais en définitive, ça s'avère peu intéressant, les objets à acheter étant anecdotiques et bien trop chers pour certains : une casquette pour 500,000 G, c'est un peu fort de café. Bref, l'idée ne demande qu'à être peaufinée et on attendra de voir ce que cela donne dans Soul Calibur III qui devrait également proposer une idée similaire.
En dehors de cet apport, il faut avouer que le mode Histoire est encore mieux fichu que dans Tekken 4. Faisant évoluer l'histoire des personnages au travers de superbes artworks, Namco a pensé à inclure quelques dialogues avant certains combats, ce qui apporte une petite touche scénaristique à l'ensemble. Certes, ça ne confine pas au génie mais quand on suit la série depuis ses débuts, c'est fort appréciable, tout comme les cinématiques de fin qui sont d'une beauté transcendante. On ne s'étonnera donc pas de retrouver la relation Paul/Law qui est toujours traitée sous l'angle de la comédie, les retrouvailles entre Jak et sa petite protégée, etc. Rien ne change mais c'est avec un sourire à peine gêné que le fan en demandera encore plus. Je trouve tout de même dommage que la difficulté de ce mode soit assez mal dosée en fonction des combattants choisis. Le rapport de force entre certains fighters est encore trop présent (Nina et Anna sont à ce titre de véritables pestes) et bien qu'on puisse modifier divers paramètres (difficulté, nombre de rounds...), on s'étonnera de voir que le challenge est assez élevé et ce même en Très Facile. Bien que ce défi s'étale sur 8 combats, vous devrez faire preuve de pas mal de sang froid arrivé au 4eme ou 5eme affrontement. Et que dire du boss de fin qui est à s'arracher les cheveux sachant qu'il arrive parfois que vous n'ayez même pas le temps d'appuyer sur un bouton qu'il vous a déjà envoyé au tapis après un combo de 4 coups et une attaque énergétique qui vous enlève à elle toute seule la moitié de votre barre de vie. Tekken 5 a beau être jouissif et maniable, il n'en reste pas moins plus coriace que ses prédécesseurs.
La jouabilité, elle, ne change pas vraiment. Toujours aussi accessible, le gameplay de Tekken est avant tout une ode à la simplicité qui permet à n'importe quel joueur de réaliser des enchaînements impressionnants dès le départ. Pourtant, n'allez pas croire qu'il s'agit ici de tapoter sur n'importe quelle touche pour réaliser des combos bien violents. En fait, le gros plus de la série vient du fait qu'il est parfaitement possible de mémoriser une dizaine de combos afin de les sortir pour varier les combats. Ensuite, rien ne vous empêche de vous entraîner sans relâche pour pouvoir sortir la centaine d'enchaînements dont disposent certains combattants, mais là il va vous falloir une sacrée bonne mémoire ainsi que des réflexes d'acier. En plus de trois nouvelles têtes, on retrouve tous les héros de la saga qui en ont fait ce qu'elle est. Il est un peu frustrant de s'apercevoir que plusieurs personnages se ressemblent énormément dans le design ou dans la façon de se battre mais tout ceci est plus ou moins légitimé par une relation parentale, maître/élève ou tout simplement par le scénario. Si 20 personnages sont disponibles dès le départ, vous pourrez en débloquer 11 autres en terminant plusieurs fois le mode Histoire.
Je reviens brièvement sur les trois nouveaux combattants pour féliciter Namco qui a su faire en sorte que les nouvelles têtes ne soient pas de pâles copies de leurs petits camarades. Raven, est un ninja très "Bladesque" qui sait enchaîner les coups rapides basés sur les sauts, les esquives et qui pour ne rien gâcher possède un jeu de jambes incroyable. Un combattant très agréable à jouer qui m'a vraiment tapé dans l'oeil. Feng Wei, lui, fait davantage parler sa force que sa rapidité. Néanmoins, ce combattant très sûr de lui propose une palette de coups assez imposante qui en fait quelqu'un à même de faire face à bien des situations. La petite dernière, Asuka, est une vraie pile électrique qui ne perd jamais une occasion de narguer ses adversaires. Si je dois avouer ne pas l'avoir aimé dès le départ, j'ai réussi à l'apprécier au fil des combats, ne serait-ce que pour ses enchaînements en plusieurs temps qui peuvent faire de gros ravages contre des adversaires imprudents. A ce sujet, ces combos en plusieurs temps, qui permettent de commencer un enchaînement, de marquer un temps de pause puis de frapper dans la foulée sont communs à plusieurs fighters et rendent les combats très techniques. En somme, on retrouve les sensations des premiers Tekken qui manquaient quelque peu à Tekken Tag Tournament et Tekken 4 et c'est un vrai bonheur de ressentir un plaisir continu à mesure que les heures de jeu avancent.
En comparaison de Tekken 4, certains décors de Tekken 5 pourront décevoir, surtout au niveau des arrière-plans moins vivants. Mais passé ce cap, quelle claque graphique ! Les personnages disposent toujours d'autant de costumes et il est vraiment étonnant de voir que certains d'entre eux donnent l'impression d'avoir affaire à des personnages totalement différents, à l'image de Yoshimitsu par exemple. Ce défilé de mode est aussi un bon moyen pour jouer encore et encore, histoire de profiter des talents de styliste des développeurs ou tout simplement pour se délecter de la qualité des animations. A ce sujet, si ces dernières sont fluides et nombreuses, on pourra être étonné de voir que certaines d'entre-elles n'ont pas évolué depuis le premier opus à l'image du mouvement qu'esquissent les personnages lorsqu'ils sont K.O. Ensuite, bien que les décors soient destructibles, il est frustrant de ne pouvoir combattre sur plusieurs niveaux alors que c'est désormais monnaie courante dans la plupart des jeux de baston. Mais comme vous pouvez le constater en jetant un oeil aux screenshots de ce test, ces légers détails ne vous empêcheront pas de profiter de superbes graphismes qui magnifient des affrontements percutants. "Percutant", c'est le mot pour définir ce Tekken 5 qui, sans bouleverser la donne, s'impose comme un des meilleurs jeux de combat de la PS2 malgré le peu de nouveautés et quelques défauts constatés ici et là. Son gameplay toujours aussi accessible achèvera de convaincre les fans les plus endurcis comme les nouveaux venus et si la série tire sa révérence sur le monolithe noir, cette dernière pièce du puzzle nous fait espérer de grandes choses sur les consoles Next Gen. Tekken vient à peine de naître mais ses cris résonnent déjà dans un lointain avenir, soyons à l'écoute.
- Graphismes17/20
Les décors sont d'une grande beauté bien que leur qualité soit variable. Quelques arrière-plans sont moins vivants que ceux de Tekken 4 mais on ne peut qu'être subjugués par la poésie de certains environnements. Cependant, ce sont bel et bien les nombreux costumes des personnages qui laissent pantois d'admiration. En plus d'assister à un vrai défilé de mode, ceci permet également à certains combattants d'être totalement différents dans leur apparence. Une vraie réussite artistique dont Tekken peut se prévaloir depuis ses débuts.
- Jouabilité17/20
Bien que le jeu n'ait toujours pas opté pour les affrontements sur plusieurs niveaux, maîtriser chacun des coups de la trentaine de combattants vous demandera des heures et des heures de jeu. Ceci dit, Tekken a toujours été un modèle d'accessibilité et ce cinquième opus ne déroge pas à la règle. Dommage que la différence de puissance soit toujours aussi notable entre plusieurs protagonistes mais comment blâmer Namco qui a su, malgré ce déséquilibre, concevoir des héros à même de satisfaire n'importe quel joueur en fonction de ses goûts.
- Durée de vie16/20
Les modes de jeu habituels sont au rendez-vous mais on regrette que le Devil Within soit si froid et monotone, à l'image de son rendu graphique. La personnalisation des combattants est peu intéressante mais rien que l'excellent mode Histoire vous prendra un temps fou, surtout en mode Normal, sachant que la difficulté est plus importante que dans les précédents opus.
- Bande son15/20
Les thèmes musicaux sont dans le même esprit que ceux des épisodes antérieurs (électroniques et éclectiques) et le fait que chaque combattant parle dans sa langue natale leur donne un charme bien réel.
- Scénario/
Le mode Histoire permet de faire évoluer des personnages qui auront droit à des scènes tragiques, comiques ou s'inscrivant directement dans la mythologie Tekken dont la famille Mishima reste le point névralgique.
Tekken 5 n'est pas l'épisode qui révolutionnera la série qui est plus que jamais dédiée à son gameplay accessible à tous. Mais comme la forme est aussi convaincante que le fond, pourquoi se plaindre ? Ainsi, malgré une création de personnages réduite et frustrante ou un mode Devil Within au rythme lancinant, le dernier épisode en date de Tekken réussit son examen haut la main en consolidant un peu plus les fondations d'une saga qui n'est pas prête de s'éteindre. De quoi lever le poing bien haut en hurlant un tonitruant "Victoire".