Réputé pour agir sans bruit, au nez et à la barbe de tous, Sam Fisher revient pourtant faire parler de lui dans un troisième épisode de Splinter Cell reprenant tous les ingrédients des deux premiers volets, en mieux. La série profite aussi pour introduire quelques nouveautés en multi qui vont changer votre vision de l'infiltration.
Bon, tout le monde connaît Sam Fisher maintenant. Ses trois loupiotes vertes sur le front, ses grands écarts entre deux parois, et ses semelles anti-bruit sont désormais entrés dans le patrimoine vidéoludique. On sait tous ce dont est capable ce maître de l'infiltration. On connaît ses techniques par coeur, ses mouvements lents et précis lorsqu'il s'agit de surprendre un garde par derrière, ses acrobaties sur les canalisations pour passer inaperçu, ou encore sa panoplie de gadgets aussi high-tech qu'utiles, tout cela fait maintenant partie de l'acquis. On pourrait alors croire que se lancer dans un troisième Splinter Cell pourrait se faire en douceur, confiant que l'on est de maîtriser Sam dans n'importe quelle situation. Pourtant, ce n'est pas tout à fait comme ça que ça se passe. Non seulement Fisher à désormais quelques nouveaux mouvements à vous présenter, mais en face, du côté des ennemis, on note aussi une nette évolution, ce qui change complètement la donne, n'hésitant pas à rendre le jeu plus délicat à aborder.
Certes Splinter Cell est déjà connu pour offrir une expérience hautement trippante dans le domaine de l'infiltration. Tous ceux qui ont aidé Sam dans ses missions passées le savent pertinemment, rares sont les jeux à nous faire prendre un tel pied alors qu'on joue à cache-cache dans la pénombre avec de nombreux gardes armés. Cela dit, quand on regarde maintenant dans le rétroviseur pour se remémorer Splinter 1 et 2, on s'aperçoit qu'il y avait encore bien des choses à améliorer, notamment dans l'IA du camp adverse. Aujourd'hui, les ennemis sont donc bien plus malins et se comportent enfin comme des personnes dont la vie est réellement en jeu. C'est vrai quoi, dans le passé, lorsqu'ils entendaient un bruit, ils se contentaient de faire une ronde avant de conclure bêtement qu'ils avaient dû rêver. Vous pensez vraiment qu'un garde agirait de la sorte en vrai ? Maintenant, ils cherchent vraiment d'où vient le problème. Eteignez une lumière, ils viendront la rallumer et si jamais vous avez préalablement saboté leur générateur d'électricité, ils sortiront des torches pour mieux vous traquer. De vraies petites fouines qui font enfin leur boulot correctement !
Pour leur rendre la tâche plus aisée, et pour nous la compliquer par la même occasion, on notera la présence d'une jauge de bruit agissant de la même façon que la jauge de luminosité. Elle vous donnera quelques indications sur votre discrétion et vous permettra de corriger ce qu'il y a à corriger pour vous faire oublier (par exemple, marcher moins vite pour se faire silencieux). L'apparition de cette jauge n'est pas anodine, puisque les gardes ont grandement amélioré leur ouïe et peuvent vous repérer même si vous êtes assez loin d'eux. Le jeu gagne un peu en réalisme, pas mal en difficulté, mais surtout beaucoup en fun. Il faut aussi dire que les missions ne sont plus aussi linéaires que par le passé. Evidemment, vous êtes toujours soumis aux objectifs donnés en début de niveau, mais ces directives sont souvent amenées à être remaniées en cours de route. L'illusion de liberté s'en trouve renforcée. Ce sentiment se retrouve aussi dans le level design qui fait tout pour ne pas proposer une unique solution pour avancer. Il y a toujours plusieurs façons de faire, on se retrouve rarement bloqué dans une situation, ne sachant pas trop comment passer les trois gardes qui nous tournent le dos. Généralement, il suffit de se poser dans un coin, d'activer la vue qui convient bien (infrarouges, thermique et IEM), d'observer le décor, avant de se lancer et de le faire au feeling. Puisqu'on est moins guidé, l'improvisation a tout à fait sa place, payant parfois bien plus qu'un plan réglé au millimètre.
Les nouveaux mouvements sont d'ailleurs bien une preuve que le jeu se veut moins dirigiste. Et oui, plus il y a de mouvements, plus il y a de façons de faire pour réussir une mission. Bon, faut pas non plus s'emballer la liste des nouveautés est plutôt réduite, mais si on l'ajoute à celle des mouvements déjà présents dans les deux volets précédents, on se retrouve avec un Sam qui peut faire vraiment pas mal de choses. Du geste le plus anodin (souffler les bougies) au plus spectaculaire (attraper puis balancer un corps par dessus une rambarde), les gestes sont toujours impeccablement détaillés, franchise Splinter Cell oblige. Parmi les nouveaux accessoires, difficile de passer à côté du couteau. Idéale pour couper des voiles de tissus ou de plastique, la lame est aussi un moyen efficace de se débarrasser rapidement d'un ennemi un peu trop entreprenant. Puisque Sam peut désormais lancer des attaques rapides au corps à corps, il lui suffit de sortir son long canif pour mettre hors jeu un garde en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire. Aussi discrète que cette solution puisse paraître, il faut tout de même savoir que cette technique n'est pas la plus silencieuse et il faudra espérer que personne alentour n'entendra le râle de douleur que lâchera votre victime dans un dernier souffle.
Voilà donc à quoi ressemble le Splinter Cell nouveau, un jeu qui reprend les bases de la série mais qui les bonifie en y ajoutant de nouvelles possibilités pour un résultat solide et efficace. Mais attendez, car vous n'êtes pas au bout de vos surprises. Vous vous souvenez probablement que Splinter Cell : Pandora Tomorrow avait réussi un coup d'éclat en introduisant un mode multijoueur (absent de la version GC il est vrai), une première dans un jeu d'infiltration. Et bien ce troisième volet va encore plus loin. S'il n'y a toujours pas de versus pour cette édition GameCube, le titre introduit un tout nouveau mode, coopératif cette fois ! Oui, vous avez bien lu, vous pouvez jouer à deux dans des niveaux spécialement étudiés pour cela, qui n'auront malheureusement pas forcément à voir avec la trame principale. Qu'à cela ne tienne, le trip est total lorsqu'on se retrouve avec un pote en train d'infiltrer un bunker ou une ambassade sous haute protection. Si les trois versions consoles proposent le jeu en écran partagé, le mode prend toute son ampleur en LAN ou sur internet (uniquement sur Xbox), lorsqu'on communique via headset en chuchotant pour ne pas se faire repérer. S'il n'y a que quatre missions à découvrir en coopératif, on se régale vraiment dans ce mode. Le gameplay intègre complètement la notion de binôme et inclut pour l'occasion des mouvements spéciaux à effectuer à deux. L'un pourra faire la courte échelle à l'autre afin de l'aider à atteindre une corniche trop haute. Le second se laissera ensuite suspendre à cette corniche pour permettre au premier de l'escalader et de le rejoindre en haut. On peut également projeter son équipier pour le faire passer au-dessus de lasers ou encore utiliser un filin pour tracter son partenaire le long d'une paroi. Cette dernière technique peut également être mise en pratique pour imiter Tom Cruise dans Mission Impossible et pirater un ordinateur entouré de lasers. Bref, le coop regorge de bonnes idées. Encore une fois, dommage qu'il n'y ait que quatre niveaux pour en profiter...
Niveau réalisation, il faut malheureusement admettre que cette édition GameCube n'arrive pas au niveau de ses consoeurs, graphiquement j'entends. Ce n'est pas vilain, loin de là, mais si on compare le résultat obtenu par rapport aux performances de la machine, on a ici la moins bonne version. Les textures sont moins percutantes et moins tapes à l'oeil que sur Xbox, tandis que les modélisations sont dignes de la PS2. Pour le son par contre, rien à dire, c'est juste excellent. Le doublage français reprend les voix que l'on connaît pour chaque personnage, les comédiens semblent même très à l'aise avec leurs rôles. Pas de souci non plus pour les musiques. Ubisoft a fait appel à Amon Tobin pour composer une ribambelle de thèmes et de sons d'ambiance qui collent on ne peut mieux à l'univers de Tom Clancy en général et à Splinter Cell en particulier. Que dire de plus sur ce Splinter Cell Chaos Theory ? La série ne cesse de progresser au fil du temps en apportant à chaque volet de nouvelles idées tout en améliorant ce qu'il y a à améliorer. Il ne reste donc qu'à apprécier pleinement ce troisième épisode, en attendant sagement les quatrième aventures de Sam Fisher, déjà annoncées pour l'année prochaine.
- Graphismes16/20
Moins tape à l'oeil que la version Xbox, Splinter Cell sur GameCube se hisse tout juste au niveau de la version PS2. Compte tenu de la machine, on peut donc éprouver une pointe de déception. Cela n'enlève rien à la qualité des animations de Sam Fisher. Souple et agile, le maître de l'infiltration maîtrise chacun de ses mouvements pour se rendre le plus discret possible. Le jeu de lumière, élément clé de toute la série, se montre une nouvelle fois bien rendu. Le seul inconvénient est qu'il faut absolument jouer dans une pièce sombre pour profiter pleinement du contraste de chaque environnement.
- Jouabilité17/20
A chaque épisode, l'éventail des possibilités de Sam s'élargit, laissant plus de choix pour aborder chaque situation comme on l'entend. On se sent moins pris par la main, et donc plus libre d'évoluer au feeling et d'improviser quand il le faut. A noter tout de même qu'en raison du pad GameCube limité en boutons, il faut fréquemment passer par des combinaisons de touches malvenues. Comme sur les anciens volets en fait.
- Durée de vie15/20
S'il ne faudra qu'une dizaine d'heures pour venir à bout de la mission solo, les options multijoueur permettent de garder la console allumée un peu plus longtemps. On aurait cependant aimé avoir plus de missions en coopératif. Dommage aussi que le mode versus ne soit pas présent (même si l'on comprend facilement pourquoi).
- Bande son18/20
Difficile de dire si Amon Tobin apporte vraiment quelque chose de plus à Splinter Cell tant son univers semblait déjà correspondre au jeu. Pour ceux qui connaissaient déjà le musicien, la collaboration coulait de source depuis un moment. Cela n'enlève rien à la qualité des compositions, parfaites pour installer des climats de tensions ou d'inquiétudes. Rien à dire pour le doublage ni pour les bruitages, tout colle à merveille.
- Scénario14/20
Si Splinter Cell fait partie de la franchise Tom Clancy, ce n'est pas pour rien. Ce troisième volet relate un énième conflit international que vous êtes le seul à pouvoir calmer. Si on prend tout ça au premier degré, ça peut devenir flippant, mais tout ça n'est qu'un jeu. Hein que ce n'est qu'un jeu ?
Avec des modes multi innovants et une réalisation à la hauteur, Splinter Cell Chaos Theory confirme tout le bien qu'on pensait déjà de Sam Fisher. En reprenant les bases des deux premiers volets, mais en poussant plus loin le challenge de l'infiltration, il s'agit très certainement du meilleur épisode de la série ! A choisir, on préférera tout de même les versions Xbox ou PS2, plus convaincantes chacune dans leur domaine.